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Droit 34 : Quand une agression sexuelle passe pour un manquement déontologique

Alors que la répression de la parole n’a pour la majorité des Français qu’un caractère répressif, attentatoire aux libertés fondamentales d’opinion et d’expression, elle a également, dans le cas de certains privilégiés, une autre fonction, moins connue, qui consiste à condamner des actes comme de simples paroles. C’est une forme de privilège puisque, malgré le caractère inique de telles lois, la parole reste encore – et c’est heureux – moins sévèrement punie que les actes. Un « propos haineux », par exemple, reste moins condamné qu’un « crime haineux ». (Ces terminologies n’ont d’ailleurs guère de sens, puisque non seulement l’opposition n’est pas entre un propos et une infraction, dès lors qu’un propos peut être une infraction, mais, en outre, quand on traduit hate crime par « crime haineux », on commet une erreur puisque crime en anglais désigne aussi bien un crime qu’un délit, et nous avons donc, avec l’expression « crime haineux » ou « crime de haine », introduit en français un nouveau sens pour le mot « crime », à savoir le sens qu’a le mot crime en anglais.) Dès lors que les actes de certains privilégiés ne sont pas condamnés comme des actes mais comme de simples propos, ou même comme de simples manquements déontologiques, on garantit à ces personnes une forme d’immunité ; c’est ce qu’il est permis d’appeler, en toute rigueur, un privilège.

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1/ Les faits
2/ La sanction : une simple amende administrative prononcée par une quasi-juridiction
3/ La caractérisation pénale des faits
4/ Immunité audiovisuelle ?

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1/ Les faits

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Quels sont les faits ? Le 9 février 2023, selon un article publié en ligne ce jour-là par l’édition française du Huffington Post, la Cour européenne des droits de l’homme a confirmé les sanctions prises en France à l’encontre d’une chaîne de télévision à la suite des agissements de l’un de ses animateurs (dont nous ne souhaitons pas citer le nom sur ce blog, et que nous appellerons donc M. – pour monsieur – X). Les sanctions avaient été prononcées, non par un tribunal de l’ordre judiciaire à l’encontre de la vedette, mais par l’autorité administrative indépendante (AAI) connue alors, au moment des faits, en décembre 2016, sous le nom de Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et devenue entre-temps l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), à l’encontre de la chaîne de télévision dont la vedette est un employé.

En décembre 2016, M. X avait, sur le plateau de l’émission qu’il anime, « au prétexte d’un jeu, amené une des chroniqueuses, qui avait les yeux fermés, à poser la main sur son pantalon, au niveau de son sexe, ‘sans que cette séquence ne fasse apparaître qu’elle aurait été prévenue ni que son consentement aurait été recueilli’, note la CEDH ». La citation est tirée de l’article du Huffington Post, qui poursuit : « La séquence avait suscité plus de 3 500 plaintes auprès du CSA qui, en 2017, a imposé comme sanction à la chaîne une suspension des coupures publicitaires, 15 minutes avant et après l’émission, et au cours de celle-ci, pour une durée de deux semaines. Le CSA avait sanctionné cette séquence en imposant une amende de 3 millions d’euros à [la chaîne]. » La Cour a constaté les manquements de la chaîne à ses « obligations déontologiques ».

Il semblerait en fait (article du Monde en ligne du 26 juillet 2017) que la suspension de publicité soit la sanction pour ces faits-là tandis que les 3 millions sont la sanction d’un canular téléphonique jugé homophobe, diffusé en mai 2017 et pour lequel le CSA aurait cette fois reçu 47 000 plaintes. La Cour européenne a examiné les deux affaires ensemble. Nous ne parlerons pas ici spécifiquement du canular homophobe, mais ces faits eux aussi seraient passibles selon nous de poursuites pénales, au titre des délits dits de presse.

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2/ La sanction : une simple amende administrative prononcée par une quasi-juridiction

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La sanction était, au terme d’une procédure nationale devant le juge administratif, contestée par la chaîne devant la Cour européenne des droits de l’homme au nom de la liberté d’expression, garantie par l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. Le 9 février 2023, la Cour européenne a donc débouté la chaîne de sa demande (laquelle incluait une réparation par le CSA à hauteur de 13 millions d’euros), précisant, comme le souligne l’article, « qu’elle ‘considère que la mise en scène du jeu obscène entre l’animateur vedette et une de ses chroniqueuses ainsi que les commentaires graveleux qui celui-ci a suscité véhiculent une image stéréotypée, négative, et stigmatisante des femmes’. » La Cour EDH a donc jugé que le CSA avait à juste titre condamné la chaîne pour une forme d’expression « négative, stigmatisante des femmes », ce que l’on appelle en droit français un propos haineux envers des personnes « à raison de » leur sexe.

La Cour EDH avait déjà jugé que les lois françaises de répression de ce genre de propos stigmatisants envers des personnes, à raison de leur ethnie, race, nationalité, religion, sexe, orientation sexuelle, handicap, etc., étaient justifiées et de ce fait permises par l’article 10 CEDH. Cependant, elle jugeait alors des condamnations pénales, tandis que nous sommes en présence ici d’une simple sanction administrative ou quasi-juridictionnelle. Le code pénal pour ce genre de propos stigmatisants, que ces propos soient qualifiés d’injure, de diffamation, d’incitation à la haine ou autre, prévoit, en plus d’amendes, une peine d’emprisonnement. L’amende prononcée par le CSA contre la chaîne était certes, en laissant de côté les punitions relatives à la publicité commerciale, incomparablement plus élevée (3 millions d’euros) que les amendes pénales prévues (45.000 euros pour une diffamation, par exemple) mais ne comporte en revanche aucune mesure privative de liberté. Les AAI investies d’un pouvoir « quasi-judiciaire » n’ont d’ailleurs pas le pouvoir de prononcer des peines privatives de liberté, qui restent une prérogative de l’ordre judiciaire.

La Cour EDH a donc considéré qu’était justifiée une sanction administrative à l’encontre de contenus qui pourraient faire l’objet d’une condamnation pénale en France. Il est étonnant, une fois relevé le caractère justifié de la mesure, que la Cour n’ait pas aussi relevé le caractère étrangement bénin, absente toute réponse pénale, d’une amende administrative prononcée pour des faits délictueux condamnables pénalement.

Mais ce n’est pas tout, car les faits en question, loin d’être un simple « contenu » sexiste, un hate speech stigmatisant, sont une véritable agression sexuelle. Et si une simple amende du CSA pour toute réponse des autorités françaises est déjà étonnante en soi pour un propos haineux, elle devient totalement incompréhensible, et choquante, dans le cas d’une agression sexuelle.

Avant d’en venir à la caractérisation pénale des faits, un mot sur la procédure quasi-juridictionnelle. Ce que le CSA sanctionne, précisément, ce sont des manquements à la convention qui le lie à la société audiovisuelle en question, de telles conventions étant passées avec les chaînes de télévision sur le territoire national. Il s’agit en l’occurrence de manquements à l’obligation pour cette société de « lutter contre les discriminations », discriminations sexistes dans l’affaire qui nous occupe, discriminations homophobes dans l’autre affaire examinée conjointement par la Cour EDH. Ce n’est donc pas directement de la législation pénale contre les contenus haineux qu’il s’agit, mais des obligations conventionnelles d’une société privée vis-à-vis de l’État. Puisqu’aucunes poursuites pénales n’ont été engagées, ni à titre d’injure, diffamation ou autres à raison du sexe, ni à titre d’injure, diffamation ou autres à raison de l’orientation sexuelle (dans un canular qui, selon le CSA, a « eu recours à de nombreux clichés et attitudes stéréotypées sur les personnes homosexuelles »), cette « obligation de lutter contre les discriminations » s’est donc substituée, dans les faits, à la législation pénale sur les délits dits de presse. En d’autres termes, le fait d’avoir une obligation contractuelle de lutter contre les discriminations crée une immunité vis-à-vis de la législation pénale sur le sujet. Il serait difficilement intelligible que des propos véhiculant de nombreux clichés et stéréotypes vis-à-vis de certaines catégories de personnes protégées par la législation contre les contenus haineux puissent ne pas être, justement, haineux, et ne pas tomber sous le coup de cette législation – car il ne s’agit pas de dire qu’on n’est pas haineux tant qu’on reste poli ; non, puisque ces lois sur les contenus haineux existent, elles visent nécessairement les clichés et stéréotypes négatifs stigmatisant les catégories de personnes protégées par elles.

Or le raisonnement de la Cour EDH elle-même n’est nullement dénué d’ambiguïté. Elle examine en effet le cas – c’est l’évidence même – à la lumière de sa jurisprudence sur les lois pénales des États en matière de propos haineux, mais la véritable question de droit était en réalité de savoir si l’État peut imposer de telles clauses conventionnelles à une chaîne de télévision. En effet, cette dernière se plaignait certes d’une violation à la liberté d’expression à l’occasion d’une sanction financière, mais après avoir signé une convention l’obligeant à lutter contre les discriminations, c’est-à-dire à conformer ses contenus à la pensée non-discriminatoire promue par l’État. Si sa liberté d’expression a jamais été méconnue, c’est donc tout d’abord par la convention elle-même. Et si la pensée non-discriminatoire est la seule dont l’expression soit licite en droit, une obligation de lutte contre les discriminations ne peut être méconnue qu’à titre d’omission, tandis qu’une faute par commission est, quant à elle, sanctionnable pénalement. Pourtant, le CSA, la justice administrative française et la Cour EDH ont sanctionné au titre de la convention non pas une faute par omission mais une faute par commission, un propos stigmatisant, c’est-à-dire qu’ils auraient dû, en outre et sans préjudice de leur propre action au regard de la convention, saisir les autorités judiciaires.

Or les faits en question, dans l’affaire sexiste, vont même au-delà, selon nous, des délits dits de presse ; ce ne sont pas de simples propos sexistes.

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3/ La caractérisation pénale des faits

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Le code pénal (CP) définit une agression sexuelle à son article 222-2 : « Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ou, dans les cas prévus par la loi, commise sur un mineur par un majeur. »  Une agression sexuelle est passible de cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende (art. 222-27 CP).

La « surprise » mentionnée par l’article 222-2 s’applique au cas d’espèce, où la malheureuse chroniqueuse a été conduite par surprise à poser sa main sur le sexe de l’animateur vedette, devant le public du plateau et des milliers de téléspectateurs. Il nous reste donc, pour savoir si les faits en question sont bien une agression sexuelle, à définir l’atteinte sexuelle, puisqu’aux termes de cet article une agression sexuelle est une forme d’atteinte sexuelle.

Certains juristes semblent considérer qu’une atteinte sexuelle ne porte que sur les mineurs de moins de quinze ans, car elle est mentionnée à l’art. 227-25 CP : « Hors les cas de viol ou d’agression sexuelle prévus à la section 3 du chapitre II du présent titre, le fait, pour un majeur, d’exercer une atteinte sexuelle sur un mineur de quinze ans est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. » Le site public service-public.fr considère ainsi, à la page « Infractions sexuelles sur mineur », qu’une atteinte sexuelle « désigne tout comportement en lien avec l’activité sexuelle (avec ou sans pénétration) adopté par un majeur à l’encontre d’un mineur de moins de 15 ans, sans qu’il y ait violence, contrainte, menace ou surprise », tandis que l’agression sexuelle « est un acte sexuel sans pénétration, commis par violence, contrainte (contre sa volonté), menace ou surprise (attouchement) ». Cette présentation est peu conforme à la lettre de l’article 222-2, qui décrit une agression sexuelle comme une forme d’atteinte sexuelle : dans un cas, l’atteinte est commise avec violence, menace, surprise, et c’est alors une agression, dans l’autre, l’atteinte est commise sur un mineur sans violence, menace, surprise, et c’est alors, pour la clarté des débats, un abus sexuel. L’atteinte n’est en effet pas une catégorie sur le même plan que l’agression car c’est bien plutôt la catégorie qui chapeaute tant l’agression que l’abus. Ainsi, alors que, selon la typologie que nous suggérons, l’atteinte se subdivise en agression et abus, dans celle présentée par le site des autorités françaises, l’atteinte se divise en agression et atteinte : une typologie médiocre, source de confusion.

Avant de nous demander ce qu’est une atteinte sexuelle, posons-nous la question de savoir si les faits pourraient être du harcèlement sexuel. Ce dernier est défini à l’art. 222-33 CP : « Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. » La précision que les faits doivent s’être produits « de façon répétée », termes soulignés par nous dans la citation, exclut a priori l’acte reproché à M. X. Cependant, le même article ajoute : « Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété (nous soulignons), d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. » La répétition n’est pas un caractère décisif du harcèlement, dans les cas énoncés à cet alinéa. Le harcèlement est passible de deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende, portés à trois ans et 45.000 euros lorsque les faits sont commis « par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions » (même art.), ce qui est bien le cas de M. X, dont la victime est une collègue placée en-dessous de lui dans la hiérarchie de la chaîne. Toutefois, même avec cette circonstance aggravante, le harcèlement reste moins sévèrement puni qu’une agression.

L’agression sexuelle étant, donc, une forme d’atteinte sexuelle, qu’est-ce qu’une atteinte sexuelle ? Un attouchement sexuel est une forme d’atteinte sexuelle. Si l’on admet ce point, et ce n’est guère difficile, comme nous allons le voir, il est clair, d’après ce qui précède, qu’un attouchement commis par surprise est une agression sexuelle (art. 222-2). Le site servicepublic.fr précise, on l’a vu, que l’agression sexuelle « est un acte sexuel sans pénétration, commis par violence, contrainte (contre sa volonté), menace ou surprise (attouchement) ». L’attouchement est expressément cité au titre des agressions sexuelles. Qu’il soit le seul cas où l’élément de surprise soit amené à jouer un rôle, comme cette présentation le laisse entendre puisque le mot « attouchement » est placé entre parenthèses après le mot « surprise », comme s’il ne pouvait y avoir de violences ou de contraintes par surprise, mais seulement des attouchements par surprise, est plus douteux, mais peu importe ici.

Un attouchement sexuel est une atteinte sexuelle et il existe des brigades spéciales de la police en civil affectées à la traque aux « frôleurs », ces délinquants sexuels qui satisfont leurs pulsions en attouchant les parties sexuelles de femmes, poitrine, fesses, parties génitales, dans les transports en commun, où ces actes peuvent être commis impunément quand les victimes hésitent à protester contre de tels agissements, par exemple lorsque, dans des compartiments particulièrement bondés, où les passagers sont pressés les uns contre les autres, elles n’ont peut-être pas une idée bien précise de la personne qui commet ces actes ; elles protesteraient alors sans pouvoir dénoncer quelqu’un en particulier. Les brigades de police en question visent à réprimer et prévenir ce genre d’atteintes sexuelles.

La jurisprudence de l’art. 222-2 comprend les attouchements sans consentement comme une forme d’atteinte sexuelle (cabinetaci.com : « Attouchement »). À ce titre, les attouchements sont donc condamnés de cinq ans d’emprisonnement. (La même page rappelle l’élément, parmi d’autres possibles, de la surprise, avec une jurisprudence Crim 25 avril 2001, Bull. crim. n° 99 précisant la notion.)

Rappelons donc, encore une fois, ce que sont les faits condamnés par le CSA. L’animateur vedette a manigancé, à l’insu de sa chroniqueuse (la Cour EDH insiste sur l’élément de surprise : « sans que cette séquence ne fasse apparaître qu’elle [la chroniqueuse] aurait été prévenue ni que son consentement aurait été recueilli »), une situation où la main de celle-ci s’est retrouvée en contact avec le sexe de celui-là. Nous avons donc : 1/ un attouchement sexuel, 2/ commis par surprise ; c’est-à-dire une agression sexuelle.

1/ Le présent attouchement est en effet analogue aux situations décrites plus faut. A) Dans les transports en commun, un frôleur ne touche pas les parties à même la peau mais à travers les vêtements ; le fait que la main de la chroniqueuse ait touché le sexe à travers le pantalon de l’animateur n’est donc pas, de ce point de vue, différent des attouchements poursuivis par les brigades de police anti-frôleurs. B) En outre, le fait de toucher de la main une partie sexuelle d’autrui est analogue au fait de faire toucher par la main d’autrui son propre sexe. Ne pas établir un strict parallélisme serait une faute. On ne voit pas comment, en effet, une de ces formes d’attouchement pourrait être un crime tandis que l’autre ne le serait pas. Puisque le consentement mutuel est requis pour que la main d’autrui touche intentionnellement une partie sexuelle, il est pareillement requis pour qu’une partie sexuelle d’autrui touche intentionnellement la main, ainsi que pour le contact de parties sexuelles de l’un et l’autre. En somme, dès qu’un contact intentionnel est impliqué, le consentement mutuel est requis pour que ce contact soit licite. Même dans le cas de contacts moins sensibles, on peut considérer qu’un simple attouchement non sollicité puisse être une voie de fait, au cas où le refus d’être touché serait suffisamment clair et manifeste, et, dans le cas de personnes de sexe différent, le fait de seulement toucher les cheveux, par exemple, pourrait même être un attouchement sexuel au sens de la loi, si ce contact était maintenu contre le consentement de la personne touchée, car les perversions sexuelles sont innombrables. Ce pourrait l’être encore entre personnes du même sexe, si c’est une gratification homosexuelle qui était ainsi recherchée.

2/ Quant à la surprise, elle est admise dans le cas d’espèce par la Cour EDH elle-même et ne devrait donc pas être mise en doute. Il ne s’agit pas d’un contact accidentel ; ce que d’ailleurs la chaîne ne prétend pas, puisqu’elle a au contraire défendu l’idée que cela relevait de la liberté d’expression de l’animateur, et ce n’est pas un accident qui peut relever de la liberté d’expression, mais bien une intention. Il est peut-être à propos ici de souligner que nous n’avons pas vu la séquence, la description par le journal paraissant suffisamment éclairante (en dépit de son euphémisme, volontaire ou non : la main n’est pas dite toucher le sexe mais « le pantalon, au niveau du sexe »). Si la chaîne avait invoqué l’accident, nous aurions sans doute tenté de vérifier ce point en regardant la séquence, mais, encore une fois, la thèse de l’accident n’est évoquée par personne.

S’il existe, par conséquent, le moindre doute quant au fait que ces actes pourraient être qualifiés par un tribunal d’attouchement sexuel non consenti, donc d’agression sexuelle, nous avouons ne pas du tout voir sur quoi pourraient bien se fonder ce genre de doutes. Il s’agit selon nous d’une manigance ayant visé à produire par surprise un attouchement sexuel, et c’est ce que la chaîne a prétendu défendre comme l’exercice de la liberté d’expression.

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4/ Immunité audiovisuelle ?

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Nous ne comprenons même pas, à vrai dire, comment de tels faits peuvent passer pour appartenant au registre de l’expression, si ce n’est qu’à ce compte tout agissement, quel qu’il soit, serait une forme d’expression. Un assassinat politique est certes une forme d’expression, mais cela n’écarte pas pour autant la cour d’assises : en l’occurrence, c’est plutôt même un facteur aggravant, soit que la victime soit dépositaire d’une forme ou d’une autre de l’autorité publique (art. 221-4 CP), soit que les faits soient classés comme actes terroristes (dont le mobile possède indéniablement un caractère politique). Dans cette voie, il faudrait en réalité considérer qu’un attouchement sexuel est aggravé par le fait qu’il s’agisse en même temps d’une forme d’expression, car cette forme d’expression est alors un « contenu haineux », « stigmatisant des femmes », c’est-à-dire que cet attouchement serait une infraction haineuse et non une simple infraction. (Mais le droit français – voyez notre essai « Le féminicide non intime en droit français » ici – ne prévoit pas les crimes de haine contre les femmes, bien qu’il reconnaisse et sanctionne les propos haineux contre les femmes, « à raison du sexe », et bien qu’en outre il reconnaisse et sanctionne plus gravement que les meurtres « ordinaires » les meurtres haineux à raison de la race, de l’ethnie ou de l’orientation sexuelle – mais pas du sexe.)

En outre, c’est comme si l’on pensait que la retransmission de l’acte à la télévision le ferait ipso facto basculer dans le pur domaine de la représentation, dans le domaine exclusif de la loi sur les contenus de presse et autres médias. Un crime filmé serait ainsi un pur et simple contenu audiovisuel hors de la réalité : la victime d’un snuff movie serait une victime irréelle, l’agresseur un criminel virtuel, tout est de la comédie, et la seule infraction reconnue est le manquement déontologique d’une mise en scène stigmatisante envers les femmes. Comme si une vedette cathodique ne pouvait plus commettre d’actes répréhensibles autres que des manquements à la déontologie des médias. Et comme si droit de la presse voulait dire qu’une carte de presse protège de toute incrimination autre que pour délit de presse. – Nous avons abordé une problématique semblable aux États-Unis (Law 22: Pacta turpia are not speech), pays où, dans tous les États sauf un, la prostitution est illégale (pactum turpe) mais où la pornographie filmée, produite en recourant à ce genre de contrats illicite, est prétendument protégée par le Premier Amendement.

On peut s’étonner que le procureur de la République n’ait pas jugé pertinent de poursuivre ces faits. Cela ne dépend nullement d’une plainte, même avec constitution de partie civile, de la malheureuse chroniqueuse : les faits sont notoires et n’ont donc pas besoin d’être portés à l’attention des autorités, qui les connaissent. Nous sommes en présence de faits dont tout porte à croire qu’ils relèvent de poursuites pénales et au sujet desquels l’action de l’État s’éteint avec une simple amende administrative.

Même si des expertises montraient que la main de la chroniqueuse n’a pas exactement touché le pantalon au niveau du sexe, mais par exemple au niveau du pubis ou de l’aine, l’acte n’en serait pas moins – au mieux, c’est-à-dire si cela pouvait avoir la moindre importance – une tentative d’attouchement sexuel, et les tentatives criminelles sont elles aussi condamnées. Les « 3 500 plaintes auprès du CSA » (qui n’ont débouché sur aucunes poursuites) attestent la nature du « message » communiqué par ces faits : de nombreuses personnes se sont senties atteintes par l’agression. Une agression traitée par les autorités françaises en simple manquement déontologique plutôt qu’en infraction pénale.

C’est pour la même raison, pour ces mêmes consciences heurtées, qu’il n’est pas non plus indispensable d’interroger la chroniqueuse, devant des faits notoires en raison de leur diffusion. Non seulement cette personne était dans une situation typique de sujétion professionnelle de nature à créer un obstacle à des déclarations aux autorités, mais en outre on n’admet pas en droit pénal les déclarations telles que « Et s’il me plaît, à moi, d’être battue ? », dans Le Malade imaginaire de Molière ; à savoir, une infraction pénale est caractérisée quoi qu’en pense ou n’en pense pas la victime, car l’atteinte est portée, à travers celle-ci, à l’ordre public, dont les autorités doivent assurer la défense.

Par ailleurs, la publicité de cette dégradation subie est de nature à rendre son caractère plus odieux encore, de sorte que, même au cas où des faits isolés de cette nature pourraient, sans publicité, ne pas représenter une offense particulièrement grave, en revanche une dégradation morale infligée en public est une humiliation bien plus sensible.

Précisons deux points, avant de conclure. 1/ Nous ne prétendons pas que les faits soient à compter parmi les agressions sexuelles les plus graves. 2/ L’amende de 3 millions d’euros est cependant un trompe-l’œil : est-ce même tant soit peu dissuasif, pour une société dont le chiffre d’affaires était de 95,8 millions d’euros en 2021 (135 millions en 2015) ? Pour ce qui en est de l’animateur lui-même, c’est de toute façon l’impunité ; même si l’on nous disait que c’est un pion qui n’a fait qu’appliquer le script, il n’en serait pas moins un exécutant.

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Conclusion

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En conclusion, on voit le double emploi de la répression de la liberté d’opinion et d’expression. D’un côté, le quidam dont le seul tort est d’ouvrir la bouche est traité en délinquant pour de simples prises de parole. D’un autre côté, des privilégiés peuvent être sanctionnés pour des actes comme si c’étaient de simples moyens d’expression. Certains croiront que, grâce à l’action du CSA, confirmée par le juge administratif français puis la Cour européenne des droits de l’homme, l’égalité devant la loi n’est pas un vain mot, que les riches comme les pauvres sont frappés par le glaive de la justice dans ce « contentieux de masse » (selon l’expression du magistrat et député Didier Paris sous la précédente législature) que produit le droit dit de la presse, droit répressif de la parole ; mais ce n’est qu’un trompe-l’œil, et le contraire est vrai. Pour les uns, c’est un « contentieux de masse » ; pour les autres, la voie de l’immunité.

Que ces faits aient été traités par les autorités comme le non-respect d’une obligation de lutte contre les discriminations, c’est-à-dire comme la simple négligence d’une obligation conventionnelle de communication au sujet de valeurs, alors qu’ils sont le déni en acte de ces valeurs, est une faute d’appréciation juridique. La séquence sanctionnée n’était nullement la négligence d’une mission de service public, c’était une véritable attaque contre l’objet de ladite mission – non, par conséquent, une faute par omission mais une faute par commission. Et cette faute par commission ne relève pas des clauses d’une convention de service, mais du droit pénal.

TW22 A First-Amendment Revolution

Twitter Anthology Aug-Sep 2019

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What France needs is a First-Amendment revolution.

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We need answers. Lots of them. (Alexandria Ocasio-Cortez, commenting headline ‘Jeffrey Epstein Dead in Suicide at Jail, Spurring Inquiries’)

Congress getting answers supposes that a significant part of its male members be not in Epstein’s files. Nor the spouses of female Congress members.

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If Epstein was murdered, the culprit is his successor.

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Le #DeepState (État profond) pour les nuls. Aux États-Unis, les élections entraînent un renouvellement des postes de la haute administration aux couleurs de la nouvelle majorité politique : c’est ce qu’on appelle le spoils system ou système des dépouilles. La bureaucratie qui échappe à ce mouvement est le Deep State.

La France est un Deep State total [exception faite de la poignée d’« emplois supérieurs à la discrétion du gouvernement »].

Par conséquent, n’essayez pas d’importer le concept de Deep State pour parler de la France. Vous vous ridiculiseriez comme ceux qui parlent de « politiquement correct » alors que le #politicallycorrect #PC est une régulation de la parole sans juge. En France, on régule la parole par amende et prison. Rien à voir.

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Quand la France choisissait un écrivain pour ses billets de banque (le 50 francs de 1993 à 2001), c’était… le Pilote de guerre Saint-Exupéry. Ça plus le défilé militaire du 14 juillet : c’est moi ou il y a un fil rouge ?

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#JeNeSuisPasLePrésidentDesRiches

La preuve, c’est que, quand je suis allé manger dans une pizzeria (menu à 27€), mes amis des médias ont trouvé ça tellement original et amusant !

La preuve, c’est que le kwassa-kwassa pêche peu, il amène du Comorien, c’est différent.

Seulement ça devient les dix petits nègres.

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En droit français, une injure par un média est une satire, une satire par un twittos est une injure.

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La différence entre les États-Unis et l’ex-URSS, c’est que les États-Unis ont connu le communisme sur leur sol : les communautés New Harmony (Owen), Icarie (Cabet), Brook Farm (phalanstère), etc.

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Hong Kong #antiELAB protesters adopt the name #UmbrellaMovement (same as 2014). It reminds me of ‘la révolte des ombrelles,’ the Umbrella Revolt of July 1942 in Cambodia, which started the independence movement from French rule in the country.

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Toute personne (éditeur…) qui réédite un classique comportant des propos condamnables aux termes de la loi actuelle devrait être poursuivie (avec prescription courant à partir de la réédition). Ce qui démontre l’insanité de notre droit.

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Quoi de plus stupide que ce nom de « droit de la presse » pour des textes qui vont jusqu’à condamner des propos tenus en privé ?

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Quand Diogène le Cynique dit à l’empereur Alexandre : « Ôte-toi de mon soleil », le plus étonnant est que nul procureur ne se soit saisi pour outrage au chef de l’État. Autres temps, autres mœurs.

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La Belgique a un parti politique ISLAM (Intégrité Solidarité Liberté Authenticité Moralité) qui défend les intérêts des Musulmans belges. Or la Belgique compte 6 % de Musulmans contre 7,5 % pour la France (ce qui est le plus haut pourcentage en Europe de l’Ouest [après Chypre, 22,7 %]). Mais en France aucun parti de ce type n’existe. Pourquoi ?

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Comme aux États-Unis, il existe au Danemark, pays membre de l’Union européenne, un parti nazi légal et ce parti se réclame du NSDAP allemand. En quoi cette démocratie se porte-t-elle moins bien que la démocratie française où je ne suis même pas sûr de ne pas être poursuivi pour apologie du nazisme à cause de ce tweet ?

Comparons le Danemark et la France à l’aide des indices internationaux pertinents (2018) :

Democracy Index DK 5e FR 29e
Human Freedom Index DK 6 FR 32
Press Freedom Index DK 5 FR 32

Le pays où le parti nazi (Danmarks Nationalsocialistiske Bevægelse) est légal est de loin le plus démocratique et libre.

[Un mot sur ces indices qui tendent à revenir régulièrement sur ce blog et dont certains lecteurs pourraient contester la validité. Ils ont le mérite d’exister. Et comme les chiffres ici indiqués pour les deux pays le montrent, leurs classements tendent à converger, alors que ces indices sont calculés par des organisations différentes : le Democracy Index émane d’intérêts privés par le biais de la société The Economist Intelligence Unit, les deux autres de la société civile, à savoir le Human Freedom Index conjointement du Cato Institute, du Fraser Institute et du Liberales Institut à la Friedrich-Naumann-Stiftung für die Freiheit, et le Press Freedom Index de l’ONG Reporters sans frontières.]

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#HomardGate Un rempart de homards contre l’extrême-droite.

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Le CSA (Conseil supérieur de l’audiovisuel) met en garde LCI pour les propos islamophobes de Zemmour. (France-Soir)

Le procureur s’est-il saisi ou bien n’attaque-t-il que les pauvres et les sans-nom ?

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Le CSA rappelle LCI à l’ordre, suite aux propos de Zemmour en février dernier. Très bien. Et après ? Les journalistes continueront-ils de se taire lorsque des propos islamophobes sont proférés sur leur plateau ? (CCIF [Collectif contre l’islamophobie en France])

Si le procureur ne se saisit pas, vous pouvez, en tant qu’association, porter plainte, pour –selon la nature des propos– injure envers un groupe de personnes en raison de leur religion ou incitation à la haine envers un groupe de personnes en raison de leur religion. Vous aurez pour vous le témoignage du CSA.

La prescription pour ce type de délit étant d’un an, vous avez jusqu’à février 2020 pour déposer une plainte. N’hésitez pas car d’autres n’hésitent pas.

J’ai commencé par dire « Si le procureur ne se saisit pas » mais l’un n’empêche pas l’autre. N’attendez pas de savoir si le procureur se saisit d’office, comme il peut le faire sur ce genre de délit, mais attaquez en justice.

Au cas où vos statuts en tant qu’association ne vous permettraient pas de porter plainte dans une telle affaire, il faut alors faire un signalement au procureur et lui demander de se saisir d’office.

Quand une plainte sera déposée ou le procureur se sera saisi, l’intéressé sera convoqué pour une audition à la police, puis recevra une citation à comparaître devant le tribunal correctionnel ; il peut encourir une peine d’un an d’emprisonnement et 45.000€ d’amende.

Passer par le CSA n’était pas nécessaire mais son avis ne peut que rendre une plainte recevable (si vos statuts le permettent) ou contraindre le procureur à se saisir d’office à partir du signalement qui lui sera fait.

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Les révolutionnaires du Tchad, documentaire de Raymond Depardon en trois parties, 1970-75-76, sur le Frolinat (Front de libération nationale du Tchad) d’Hissène Habré.

Un contingent français a été envoyé combattre le Frolinat de 1968 à 1971 à l’insu de l’opinion française. L’opération est un échec. Depardon dit que 200 soldats français y laissèrent la vie, « dans l’anonymat ».

L’otage française du Frolinat Françoise Claustre est interviewée par Depardon. Extraits : « Le gouvernement français ment. » « Jamais je n’aurais pensé que le gouvernement français soit si lâche. » Un tel reportage est-il pensable aujourd’hui ? Médias ou merdias ?

Stéphane Hessel d’#IndignezVous, qui était alors diplomate, est cité par Françoise Claustre dans l’interview : « M. Stéphane Hessel est venu mais ça n’a rien donné. Une fois que le Tchad a fermé la porte aux Français, les Français s’écrasent. Lâchement. » Il y avait de quoi s’indigner, là, non ?

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Ceux qui disent que le Coran est violent n’ont pas lu la Bible.

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Le président de la France a dit (en off mais c’est sorti) que, face à Poutine, « on est des pitres ». Nous sommes prévenus : il ne veut pas être un pitre mais un Poutine.

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It isn’t enough that First Amendment law be protected in the United States. America’s alliance and support must be made conditional on First Amendment constitutional reforms, for instance in E.U. countries, where there’s hardly any constitutional review worth the name in many cases.

In one of these countries, constitutional control is the task of a council (Conseil constitutionnel) where former legislators sit, so these people may be asked to control the constitutionality of bills they passed and that actually bear their names! (To hell with ‘Nemo judex in causa sua’ [could be their motto].)

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La corrida de la mort

Deux ministres à une corrida et c’est un scandale. Ça suffit ! Qu’on le veuille ou non, la corrida fait partie de notre patrimoine… et à ce que je sache, ce n’est pas illégal. (Éric Brunet, journaliste)

Si c’était illégal, il n’y aurait pas seulement un scandale mais aussi un procès.

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La nouvelle de Jack London La Folie de John Harned est le plus brillant et le plus beau plaidoyer contre la tauromachie. Ceux qui la lisent et continuent de ne pas avoir honte sont très… « forts ».

Extraits :

Ce doit être, alors, un goût cultivé artificiellement, répondit John Harned. À Chicago [aux abattoirs], nous tuons tous les jours des taureaux par milliers, mais personne ne voudrait payer pour assister à ce spectacle [à une corrida].

Ne savons-nous pas tous que, vingt-quatre heures durant, on prive d’eau la pauvre bête et qu’immédiatement avant la course on lui en donne à satiété ?
— De sorte qu’il entre dans l’arène alourdi par l’eau ? fit brusquement John Harned ; et je vis qu’il avait l’œil très gris, très froid et perçant.
— C’est une précaution indispensable pour le sport, répondit Luis Cervallos.

Vous aimez les taureaux, à ce que je vois ? dit Maria Valenzuela avec un sourire forcé.
— Je les préfère en tout cas à ces hommes-là, riposta John Harned. Un toréador n’est pas brave. Voyez ! Le taureau tire déjà la langue, il est fatigué avant d’avoir commencé !

C’est très simple, déclara Luis Cervallos. Le taureau ferme les yeux en chargeant. Donc…
— Donc, interrompit John Harned, l’homme n’a qu’un pas à faire pour s’écarter de son chemin, et le taureau passe à côté… (…) Mais les vaches, elles, ne ferment pas les yeux. Je possède chez moi une vache de Jersey, une bonne laitière, qui aurait vite raison de toute cette bande-là.
— Mais les toréadors ne se battent pas avec des vaches.
— Non, fit John Harned, ils en ont peur.

Pauvre bête ! (…) D’abord, on le gonfle d’eau ; puis les toréadors l’épuisent en se relayant. Pendant que les uns le fatiguent, les autres se reposent. Mais on n’accorde aucun répit au taureau. Quand il est à bout de forces, le matador vient lui plonger son épée dans le corps.

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Le 10 janvier est la fête nationale du vaudou (ou vodoun) au Bénin 🇧🇯

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Hate speech laws are insane because they repress disparagement only as directed to some as if the others were less sensitive to it. #GodBlessAmerica

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De Gaulle président faisait condamner à tour de bras des opposants pour offense au chef de l’État (une incrimination supprimée après condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme en 2013) mais sinon, hein, quel grand homme.

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Il y en a, on dirait qu’ils ne connaissent que la Corée du Nord ou le Venezuela, pour comparer la France, et qu’ils n’ont jamais entendu parler de la Norvège, de la Suède, des Pays-Bas, de l’Irlande, de tous les autres voisins de la France loin devant elle au Democracy Index.

En France, le pouvoir dit au peuple : « Souriez, vous pourriez être en Corée du Nord ou au Venezuela. » En Norvège, en Suède, au Danemark, aux Pays-Bas, en Irlande etc. etc. (chez nos voisins), le pouvoir dit : « Souriez, vous pourriez être en France. »

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L’Antifa

Quand il dit qu’il combat le fascisme, tout le monde lui sourit et lui fait des clins d’oeil. Quand il dit qu’il combat le capitalisme, on hausse les épaules ou on le regarde de travers. Il faut le comprendre…

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« Les exhortations à combattre le fascisme au nom de la démocratie sont un leurre destiné à faire oublier au prolétariat que son véritable ennemi est et reste le système capitaliste. » Wkpd Amadeo Bordiga (1889-1970)

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Icy Green

Greenland Shirt 2019 by the National Republican Congressional Committee (NRCC) Source (“Give a gift of $25 or more and we’ll send you our new limited-edition shirt!”)

Sa proposition sur le Groenland rejetée, Trump repousse une rencontre avec la première ministre du Danemark. (LeHuffPost)

Les États-Unis ont déjà une base militaire de plus de 3.000 km2 au Groenland : « Le territoire de 3000 km2 qui assurait depuis des millénaires la subsistance de ce peuple de chasseurs était réquisitionné pour agrandir la base militaire américaine installée en 1951. » (Article de LibérationDroit au retour : les Inuits de Thulé en appellent à Strasbourg, du 26 mai 2004) Ce que les autorités danoises se gardent bien de rappeler.

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I can’t find the surface of Thule Air Base in Greenland although I’ve read Danish authorities forcibly took 3,000 square kilometers from Inuits for the U.S. base.

Please someone give us the figure for the surface of Thule Air Base in Greenland (“autonomous country of the kingdom of Denmark”). I want to be sure it isn’t the whole surface of Greenland already.

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A couple of Danish politicians have made fun of Trump’s #GreenlandPurchase idea, drawing huge attention on them in this way, but the truth is that the story of Denmark in Greenland is one of colonial abuse: Greenland Reconciliation Commission finds colonization did ‘a lot of damage.’ (CBC News, Jan 4, 2018)

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Pia Klemp ❤️

Pia Klemp, capitaine du bateau Sea Watch, refuse la médaille de la Ville de Paris. (Le Parisien)

[Extraits de la lettre de Pia Klemp motivant son refus.] « Votre police vole les couvertures de gens contraints de vivre dans la rue, pendant que vous réprimez des manifestations. » « Nous n’avons pas besoin de pouvoirs décidant qui est un ‘héros’ et qui est ‘illégal’ »

Et vlan !

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Petite erreur de traduction de l’anglais au français dans la lettre de Pia Klemp. [La lettre est accessible en ligne en anglais et en français ; je pense qu’elle a été écrite par Pia en anglais, puis traduite par elle ou ses amis en français, par égard pour la mairie de Paris, capitale de la France.]

« It is time we cast all medals into spearheads of revolution! » est traduit par «  Il est temps que toutes les médailles soient lancées comme des fers de lance de la révolution ! »  Il faut lire : que les médailles soient fondues en fers de lance. L’idée exprimée par Pia est de fondre les médailles dans un fourneau ou creuset pour en forger des fers de lance (de la révolution). C’est poétique et beau.

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I am disgusted to see that the hashtag #PiaKlemp, in homage to the captain of the Sea Watch 3, isn’t trending in spite of her refusing the medal vermeil offered by political wrecks.

Looks like people only aim at one thing in life: A medal.

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La #bravitude de Pia Klemp est bien mal récompensée quand, après avoir refusé la médaille en vermeil (en vermeil !) de Mme la mairesse, elle n’a pas droit à une haie d’honneur sur Twitter.

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#SOS Mairie coule à pic après passage #SeaWatch3 #PiaKlemp

(Merci de ramasser vos déchets en plastique avant de quitter la plage à la fin.)

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Politicianism

A lawmaker in New Zealand brought his baby to parliament after coming back from paternity leave. The House speaker babysat for him during a debate. (AJ+)

Can I do the same at my job and say there’s a Zealand politico did it? Indecent politicianism. They are insulting their constituents, who have no right under the bills they pass to do the same as them here. Their constituents must struggle with the finding of and paying huge sums for kindergartens.

HOT TIP Register your child New Zealand has lots of ECE services, but demand is high. Places can be hard to get, especially in the bigger cities and towns. So check early that the pre-school you are interested in has room for your child.” (newzealandnow.govt.nz “Page last updated: 16/05/2019”)

Good luck.

“Especially in the bigger cities and towns.” Cities are bigger than towns so the lingo means: Places are hard to get in cities and even in towns. Remains the countryside but there people are used to driving long distances so no one bothers to tell them they will for babysitting too.

It’s cute how you think you know more about NZ than actual NZers because of a line on a website. What an ego. (Cate O.)

For one thing I translated contemporary Maori poetry from NZ and I invite NZers to read those poets and poems like Forked Tongues, Our tupuna remain, Comparatively speaking there is no struggle, Zigzag Roads, and others with similar social content. (Here and here in French translation) Then what’s cuter in my eyes is that a NZer deems a website from NZ government such a distorsion of truth that a foreigner should consider it garbage.

[And in further reply to a couple of indignant comments based on the dignified ones’ own experience:]

I have no doubt a petty bourgeois experience is a thing. I don’t mean to be harsh but what amazes me is that when your government says demand is high and places can be hard to get, you and others say “No, it’s very easy and proof is… me (and my neighbors too).”

[Then this exchange on my translation skills:]

Your poetry translation fails to give the tribal affiliation of the poets. Even a NZ rock can see you read the words but you don’t really get it. Also, you translated from one colonial language to another. You don’t even know te reo! Haere atu! (papango)

Tribal affiliation would be of little relevance for unspecialized francophone readership. The poetry was written in English and I made no attempt at making believe I know te reo [Maori language].

When I write “contemporary Maori poetry” you read “poetry in Maori,” ignoring that: “As far as Māori literature can be said to exist, it is principally literature in English dealing with Māori themes” (Wkpd NZ lit.) Had I translated te reo I’d had said so. You’re a fraud.

You’re using Wikipedia to tell me about whether or not my own literature exists? You don’t even know enough about this country to know our lit, your supposed area of expertise, and you’re convinced you know the country better than the people who live here. You egg. (papango)

I quoted a source you can check. In the context “As far as Māori lit can be said to exist, it is principally in English,” “contemporary Maori poetry” means “in English”: I didn’t have to be specific as it’s the unusual that must be specified, not the previsible. You had no clue.

Besides, you admitted failing your French class [“Happily, although you should know that I base my entire view of your nation on a section of poems I translated in high school French (which I failed) and will be very very upset with anyone who lives there trying to tell me it’s in any way different to what was in those.“] and, as the original English poems aren’t on my blog, where did you read them? You simply can be no judge of my translations and antagonize me gratuitously.

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Un Français ne peut pas comprendre les États-Unis sans les étudier de manière approfondie. Quand il entend dire que telle loi a été votée là-bas, il imagine que c’est plié, comme en France, mais aux États-Unis toute personne peut faire casser la loi devant une cour de justice pour inconstitutionnalité. Une loi fédérale, par exemple, est soumise au contrôle de n’importe quelle cour fédérale (cours de district, cours d’appel fédérales), dont le système est chapeauté par la Cour suprême.

Les questions prioritaires de constitutionnalité #QPC introduites en France par révision constitutionnelle en 2008, censées aller dans le même sens, reposent sur un Conseil constitutionnel où siègent d’anciens législateurs au mépris du principe « nul ne peut être juge et partie » (Nemo judex in causa sua).

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Notre actuel Président n’invente rien. « Le Président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire. » (article 64 de la Constitution) Vous le voyez, le problème, ou pas ?

Cela fait soixante ans que cet article existe. Toujours fiers d’être Français ?

Vous ne voyez toujours par le problème ? Un indice : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. » (Article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789) Et maintenant ?

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Amazonas Grand Hotel

Amazon forest fires extend plantation and mining areas as aimed by Brazilian government. Forestal destruction is also required by Solid State Entity i.e. autonomous AI located in hardware, to which humidity needed by biological organisms, including humans, is adverse. SSE needs a dry desert.

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As deforestation of Amazonia has always been on Bolsonaro’s platform, #AmazonFires are, if he didn’t start them, providential for him and the people he serves. After the fires are over, I guess he won’t “re-forest” but plant soybean and open mines as he said he would on deforested areas.

Yet I think Bolsonaro may have started the fires, precisely because deforestation has been on his political platform. For everybody knows political platforms are the most invisible thing in the world.

“Would I have started fires criminally after saying I’d deforest within the law, signing the needed decrees? It can’t be me, it’s NGOs in order to ruin my government’s reputation.” Yet fires started criminally have no culprit unless found by investigators. That’s the difference with legal deforestation.

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Il paraît que les États-Unis sont le pays où les gens se font des procès pour un oui ou pour un non. En France, c’est l’État qui fait ça.

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Race et religion en « droit de la presse » : kif-kif bourricot

Il n’est pas raciste de s’en prendre à une religion. (Henri Pena-Ruiz, philosophe)

Ce n’est pas ce qui dit la loi, qui peut faire condamner quelqu’un à un an de prison pour injure ou provocation à la haine envers « un groupe de personnes (pas seulement « une personne ») à raison de leur religion ». Autrement dit, ce n’est pas raciste de s’en prendre à une religion car une religion n’est pas une race ; c’est quand même, aux termes de la loi, haineux.

Il est malhonnête [de la part de tels ou tels (journalistes ?) auxquels Pena-Ruiz s’en prend dans ce tweet] de ne citer que le bout de phrase « on a le droit d’être islamophobe ». Je vous invite à regarder la vidéo de la conférence.  (Henri Pena-Ruiz)

Je ne vois pas comment on aurait le droit d’être islamophobe alors qu’il existe un délit d’injure envers un groupe de personnes à raison de leur religion et un autre d’incitation à la haine envers un groupe de personnes à raison de leur religion.

Le délai de prescription pour ces délits n’est pas l’immuable délai de trois mois du droit de la presse, mais un an. Et le procureur peut décider de poursuites de son propre chef (ou celui du pouvoir exécutif dont il dépend) sans qu’il y ait de plainte, et ce alors même que des associations agréées ont de droit la qualité à agir pour porter plainte.

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Élisabeth Badinter : « Il ne faut pas avoir peur de se faire traiter d’islamophobe. » (France Inter, tweet du 6 janvier 2016)

Ça revient à dire qu’il ne faut pas craindre d’enfreindre la loi :

« injure envers un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap » (article 33 de la loi de 1881). + le même article pour incitation à la haine (article 24).

Après Badinter, Pena-Ruiz et d’autres continuent avec « on a le droit d’être islamophobe » alors que les articles 24 et 33 de la loi de 1881 incluent la religion. Comme ils ne veulent pas l’abrogation de ces articles (rien ne laisse supposer qu’ils la souhaitent, comme de mon côté je le demande), ils cherchent à en exclure les Musulmans. Les autres y ont droit mais pas les Musulmans !

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Citez-moi un propos qui serait islamophobe et licite, sans être de l’injure ou de l’incitation « envers un groupe de personnes à raison de leur religion ». Merci d’avance.

« Hijab et niqab sont misogynes » « la lecture littéraliste du coran conduit au fanatisme et à une vision rétrograde des rapports homme-femme » « une partie des faits décrits dans le coran ne sont qu’affabulations » « le coran incite à la haine envers les athées et les agnostiques » (philip KA)

Si j’étais une association agréée, je porterais plainte contre de tels propos. Un juge peut tout à fait penser qu’ils sont illicites. Misogyne et rétrograde sont des insultes. Dire que l’islam incite à la haine est une incitation à la haine.

La religion étant, par ces articles de loi, protégée au même titre que la race, l’ethnie, etc, si j’ai le droit de critiquer une religion sans que ce soit une injure ou une incitation, alors j’ai le droit de critiquer une race, une ethnie, etc, sans que cela le soit. Là aussi, des exemples ?

Ces articles posent le principe que des communautés déterminées par les catégories énumérées sont protégées par la loi. On parle d’ailleurs de minorités protégées (protégées par des peines aggravées par rapport à l’injure ou à l’incitation à la haine simples). On pourrait donc même dire que la critique envers une telle minorité est une incitation à la haine par définition de la loi. C’est pourquoi je demande des exemples de critiques envers ces minorités qui ne soient pas de l’insulte ou de l’incitation. Ceux qui, comme Pena-Ruiz, parlent de cette distinction comme d’une réalité, ont une représentation fausse de la liberté de parole dans notre droit et, partant, dans notre société.

Libre à vous de penser que le salafisme et le wahhabisme n’ont pas une vision rétrograde des rapports entre les deux sexes. Au vu des conditions de vie des femmes dans les pays où cette lecture littéraliste impose son ordre social, il n’y a pas vraiment discussion… (philip KA)

Le sujet, c’est la loi française. Même si ce que vous dites était vrai, en injure ou incitation à la haine, “truth is no defense” (formule du droit anglo-saxon qui s’applique ici). (En diffamation, c’est différent.) Vous pouvez poursuivre un ou des Musulmans qui s’expriment pour injure envers les femmes (article 33 « injure envers un groupe de personnes à raison de leur sexe ») mais dire que l’islam est misogyne, c’est (en vertu du même article 33) une « injure envers un groupe de personnes à raison de leur religion ».

[En réalité, mon interlocuteur a en partie changé son fusil d’épaule : au lieu de parler d’islam, il évoque certains courants de l’islam, le salafisme et le wahhabisme, pour que son propos porte non pas sur une religion, c’est-à-dire sur un « groupe de personnes à raison de leur religion », mais sur une ou des idéologies, le juge répressif ne connaissant pas de « groupes de personnes à raison de leur idéologie ». Le lien de ces idéologies à l’islam aurait pu être laissé dans le vague, mon interlocuteur aurait pu ne pas dire s’il considère ces idéologies comme consubstantielles à l’islam, comme devant en naître nécessairement, et ç’aurait été de bonne guerre. Il qualifie cependant ces idéologies de « lecture littéraliste » au sein de l’islam, ce qui revient à disculper l’islam lui-même des propos tenus sous l’empire de ces idéologies.]

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La phrase « L’islam est une religion, pas une ethnie » montre votre ignorance de la loi, puisque la loi protège la religion au même titre que l’ethnie, la race, etc.

Insulte et critique de la religion n’ont rien à voir, c’est bien pour cela que les gens comme vous sont dangereux avec leurs amalgames. (Marie-France B.)

Donc on peut critiquer une race si ce n’est pas une injure ou une incitation à la haine ? [C’est le même argument que j’ai avancé précédemment : « La religion étant, par ces articles de loi, protégée au même titre que la race, l’ethnie, etc, si j’ai le droit de critiquer une religion sans que ce soit une injure ou une incitation, alors j’ai le droit de critiquer une race, une ethnie, etc, sans que cela le soit. Là aussi, des exemples ? »]

Droit au blasphème qui est reconnu en France et que vous voulez faire passer pour de « l’islamophobie ». (Marie-France B.)

Il existe en France un contentieux des films « blasphématoires » : TGI Paris 22.9.1988, 1e civ. 29.10.1990 cf. J-M Denquin, Sur les conflits de liberté, 1981. Une jurisprudence dite « équilibrée ». Ma source (B. Beignier) dit également que le décret du 27 mars 1992 interdit « l’utilisation de moyens susceptibles de choquer les sentiments religieux » dans la publicité. Compte tenu de ces éléments, je ne vois pas d’où sort ce « droit au blasphème » que vous invoquez.

Le concept d’islamophobie n’existe pas en droit, certes. Seulement si vous croyez que cela vous permet de vous exprimer librement sur une religion, vous vous trompez.

[Mon interlocutrice alors de publier deux extraits, dont le premier est tiré d’un article de Libération, extrait sans mention de date :]

Conscients de cette distorsion entre le droit international et leur droit interne, plusieurs États, sous l’impulsion de l’Organisation de la coopération islamique (OCI), ont tenté d’obtenir au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, en 2011, une résolution qui reconnaîtrait l’interdiction de la diffamation religieuse. Cette tentative a échoué. (Libération)

La France n’a nul besoin d’un délit de « diffamation religieuse » puisqu’elle a l’article 33 précité. Cet article est même plus répressif que ce que serait un tel délit, car en diffamation on peut invoquer une « exception de vérité » (exceptio veritatis) tandis que pour une incitation ce n’est pas prévu. Pour l’injure et l’incitation, il ne sert juridiquement à rien de se défendre en disant « Ce que j’ai dit est vrai ». Le juge ne se prononce pas : la loi française protège l’islam, c’est tout ce qu’il sait. Dire que l’islam, par exemple, incite à la haine, même si c’était vrai, n’exclurait pas que cette parole est une incitation. Si un Musulman incite à la haine par ses propos ou ses écrits, il peut être poursuivi et condamné, mais l’islam, à titre de religion, est protégé : dire que l’islam incite à la haine est donc une incitation à la haine envers les Musulmans.

S’il existait un délit de « diffamation religieuse », le prévenu pourrait invoquer la fameuse exception de vérité, et le juge pèserait l’argument. L’article de Libération, du moins l’extrait, fait croire que la France, en refusant ce délit, reste libérale, alors que c’est tout le contraire. La demande de l’OCI concernait des pays où la religion n’est pas une catégorie dans les hate speech laws nationales, et ne visait donc pas la France qui lui donne déjà pleinement satisfaction, et même au-delà. Même en droit de common law, le libel (diffamation) fonctionne de la manière que j’ai indiquée : “truth is defense“. Si la démarche de l’OCI avait abouti, les pays de common law auraient été invités à adopter des lois de diffamation religieuse qui resteraient toujours plus libérales que ce que nous avons chez nous actuellement.

[Les difficultés sous-jacentes à ce qui vient d’être exposé sont sans doute la raison pour laquelle la notion de group libel (diffamation d’un groupe de personnes) n’a, aux États-Unis, après une première jurisprudence de la Cour suprême qui semblait l’admettre (Beauharnais v Illinois, 1952), finalement jamais connu d’autre application. Dans le cas du religious libel proposé par l’OCI, comment un juge pourrait-il prendre sur lui de déterminer avec l’autorité de la chose jugée la vérité de ce qu’est le contenu d’une religion, en particulier d’une religion qu’il ne pratique pas ? Si le juge entrait dans une telle démarche, il faudrait alors parler non de gouvernement mais de tyrannie des juges.]

[Le second article provient de l’Institut Montaigne, think tank de hauts fonctionnaires (extrait non daté) :]

En France, il est possible d’insulter une religion, ses figures et ses symboles, il est en revanche interdit d’insulter les adeptes d’une religion. L’introduction de ces nouveaux délits a entraîné des difficultés d’interprétation qui se sont matérialisées par des décisions de justice parfois douteuses. (Institut Montaigne)

Amusante, cette expression de « difficultés d’interprétation ». Pendant que d’autres pensent, nous nous demandons ce que la loi nous autorise à penser. Qu’est-ce qu’un pays ayant de telles lois peut offrir au monde ? Rien de bon.

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As public officials we can’t really sue, and just have to live with all the vile untrue things people say about us. (Ilhan Omar)

It is wise of U.S. law to make libel lawsuits hardly winnable for public officials, as an official’s career exposes him or her to public scrutiny as a matter of democratic values. People around the world envy the Americans for their wise jurisprudence.

Please note that in European countries public officials don’t have the scruples you here express about suing for libel, and they sue for libel, as national laws not only make the case winnable but also skew the judicial process to the officials’ advantage.

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Je soumets au #RIC (référendum d’initiative citoyenne) la loi suivante : interdire les tribunes officielles des stades aux élus et politiciens.

Ils gagnent un énorme capital de sympathie en fonction des scores des matchs de sport. Un gain indu qui détourne l’attention de l’exécution de leur mission. #GiletsJaunes

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Le droit français du racisme anti-Blanc

Je veux bien que le #RacismeAntiBlanc n’existe pas, seulement il y a déjà eu des condamnations au pénal. La loi parle de groupes de personnes à raison de leur origine, race, ethnie, nationalité, religion, handicap, sexe, orientation sexuelle… Elle ne dit pas « à raison de leur race à l’exception de la race blanche ».

Dire, comme l’humoriste australien (d’origine bangladaise) Aamer Rahman, que les Blancs ont une dette envers les races de couleur en raison de l’esclavage et de la colonisation, c’est, en droit français, même si c’est vrai, une incitation à la haine envers un groupe de personnes en raison de leur race. En injure et incitation, “truth is no defense“: le tribunal n’examine pas le reproche sous-jacent à l’injure/incitation, il se borne à constater qu’il y a injure/incitation, et la condamne. Accuser un groupe racial (les Blancs) de crimes (coloniaux) est une incitation à la haine. 🤷‍♂️

J’ai cité l’adage anglo-saxon parce qu’il est court mais en français ça donne ça : l’exceptio veritatis (exception de vérité) peut être invoquée en diffamation mais pas en injure, où la défense peut invoquer une excuse de provocation. Sauf qu’un « groupe de personnes » (abstrait) ne peut provoquer…

En droit français est une minorité protégée tout groupe de personnes « à raison de leur race », ce qui inclut la race blanche (articles 24 et 33 de la loi sur la presse) ; de même tout groupe de personnes « à raison de leur sexe » (mêmes articles), ce qui permettra demain d’exterminer judiciairement le féminisme.

L’expression « à raison de leur sexe » permet de comprendre que parler de minorité protégée n’a rien à voir avec la définition ordinaire de minorité. C’est une définition sui generis. La race blanche majoritaire est une minorité protégée. [Les sexes oscillent autour d’un ratio 50:50, donc des propos ou écrits sur un groupe de personnes à raison de leur sexe visent soit une moitié de la population, soit l’autre moitié ; il ne s’agit pas de minorités numériques.]

Si le droit français était féministe, il dirait que la loi protège de l’injure/incitation à la haine « les femmes », plutôt que « toute personne ou groupe de personnes à raison de leur sexe », ce qui inclut les hommes et les protège d’éventuelles incitations féministes à la haine.

De même, si, pour le droit français, il n’existait pas de racisme anti-Blanc, la loi ne parlerait pas de « personne ou groupe de personnes à raison de leur race », ce qui protège les Blancs au même titre que d’autres de l’injure et de l’incitation à la haine, par des peines aggravées.

Le droit français des « contenus haineux » peut (peut-être en réalité doit) servir à réprimer l’expression des minorités, et il se pourrait que ce soit déjà le cas. Les statistiques raciales officielles n’existant pas en France, on ne sait pas quels groupes raciaux ces lois punissent. Si, par exemple, 30 % des personnes condamnées à ce titre étaient maghrébines ou d’origine maghrébine (8-9 % de la population française), la loi française visant à protéger les minorités réprimerait proportionnellement plus une minorité que la majorité. L’État n’a pas de statistiques.

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Commet une faute l’employeur qui ne réagit pas lorsque son salarié se fait traiter de « Nain de Fort Boyard » par un client. Cour d’appel d’Aix-en-Provence, 11 octobre 2018. (Curiosités juridiques)

Puisque l’on ne peut pas se faire justice soi-même, pourquoi prétendre que l’employeur devrait faire justice à son salarié ?

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