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Documents. L’Ariosophie de Jörg Lanz von Liebenfels : Un aperçu
Le présent billet appartient à la série Documents de ce blog à la fois parce qu’il comporte des textes que nous nous sommes borné à traduire et que, pour le reste, il s’agit du pur et simple compte rendu de la pensée d’un auteur, même quand nous apportons, à partir d’autres lectures, des éléments pouvant corroborer tel ou tel propos. Si nous n’avons pas écrit « selon Lanz von Liebenfels » à chacune de nos phrases, c’est pour d’évidentes raisons de lisibilité.
En l’occurrence, notre propre philosophie est celle exposée dans le livre Apologie de l’épistémologie kantienne (x) et, plus particulièrement, concernant les questions anthropologiques ici traitées, dans notre essai Vraie Science et Pseudo-pensée (x). Notre point de vue est que la pensée raciale ne peut nullement se voir opposer une fin de non-recevoir en tant que « pseudo-science » et que c’est bien plutôt la science elle-même qui est en question : à la manière dont Hegel, dans sa Phénoménologie, s’oppose longuement à la physiognomonie de Gall et Lavater (dont Lanz von Liebenfels fait d’ailleurs usage) non comme pseudo-science mais comme science, et à la manière dont Heidegger développe une phénoménologie du Dasein, de l’existence humaine selon laquelle cette dernière ne se laisse appréhender par la moindre anthropologie ou science de l’homme.
À l’occasion de la mise en ligne sur notre page Academia (ici) de notre traduction française de 2008 de la Théozoologie (1905) de Jörg Lanz von Liebenfels, nous publions un aperçu de la pensée de cet auteur tiré d’écrits de 2011 qui devaient servir à un vague projet de livre pour accompagner la traduction, projet qui ne vit jamais le jour.
L’Autrichien Jörg Lanz von Liebenfels (1874-1954) est l’un des auteurs völkisch les plus originaux et prolifiques de son temps. Moine cistercien de 1893 à 1899, il fonda en 1900 un Ordre du Nouveau Temple, Ordo Novi Templi (ONT), qui végéta, semble-t-il, jusqu’en 1907 et l’acquisition du château de Werfenstein en Haute-Autriche, dont Lanz fit le premier prieuré de son Ordre. À la fin de l’empire austro-hongrois, en 1918, Lanz s’établit en Hongrie où il fonda un deuxième prieuré à Szent Balázs, qu’il nomma Marienkamp, et où il collabora à partir de 1920 à des organes de presse soutenant le régime de l’amiral Miklós Horthy. Ses écrits furent interdits sous le Troisième Reich comme tous ceux de la mouvance völkisch occultiste, sans qu’il y ait lieu de discuter ici si c’est pour exactement les mêmes raisons.
Nos sources pour l’essai qui suit ne sont autres que les textes de Lanz, à savoir, principalement, en dehors de la Théozoologie (1905) que nous avons traduite, la revue Ostara. Briefbücherei der Blonden und Männerrechtler (Ostara : Journal pour les blonds et défenseurs des droits virils) publiée de 1905 à 1917, et la série Bibliomystikon oder die Geheimbibel der Eingeweihten (La Bible ésotérique des initiés), de 1930 à 1935, développant livre par livre l’interprétation ariosophique de la Bible présentée dès les premiers écrits de Lanz. (Dans le sous-titre du journal Ostara, le terme Briefbücherei, littéralement bibliothèque de lettres ou collection de lettres, n’est guère courant et semble même être le seul cas d’un tel emploi. Lanz donne à ces brochures ou fascicules le nom de lettres sans doute en référence aux épîtres apostoliques du Nouveau Testament ; du reste, il s’agissait bien de lettres envoyées à ses amis et soutiens.)
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I/ Théozoologie (Bibliomystikon)
(i) Les six thèses de l’ariosophie
(ii) La Bible en tant que document anthropologique : « Idoles » et « Démons »
II/ Anthropologie raciale (Ostara, Bücherei der Blonden)
(i) L’Aryen dolichocéphale blond
(ii) Dépigmentation ; Indice céphalique
III/ Anthropologie sexuelle (Ostara, Bücherei der Männerrechtler)
(i) Ariosophie et Lebensreform (réforme de la vie) : Callipédie
(ii) La femme et l’Occident
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I/ Théozoologie
(Bibliomystikon)
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(i)
Les six thèses de l’ariosophie
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Tirées de Geisteswissenschaftlichen Schriften Nr. 35, Manserie Szt. Balázs, Hongrie, 1930 (il s’agit d’un écrit relativement tardif, postérieur de plus de dix ans au journal Ostara), et traduites de l’allemand.
Première thèse. Tout ce qui vit vient de Dieu, d’en haut, du spirituel et de l’âme, et ne procède pas du corporel et du matériel mais inversement : Dieu, ainsi que des âmes et des esprits intelligents, ont créé la matière et les organismes. Les organismes sont dans la même relation à Dieu et ces esprits qu’un appareil de radio-réception avec un émetteur central et une pluralité de relais.
Deuxième thèse. L’antique religion aryenne, la religion la plus ancienne, ainsi que les mythes et légendes qui en découlent ne sont pas des spéculations littéraires ou mythologiques mais les documents d’une philosophie théozoologique et paléoanthropologique. En un mot, c’est la préhistoire de l’humanité.
Troisième thèse. Les types préhumains les plus anciens (ondins, simiens, nains, géants et griffons ailés) se sont conservés en petit nombre jusque dans les temps historiques.
Quatrième thèse. Ces êtres archaïques firent dans les temps historiques, principalement dans des lieux de culte, l’objet d’un élevage soit à des fins d’orgie soit comme oracles magiques, et furent croisés par accouplement avec des humains et des bêtes. Que de tels croisements puissent être fertiles, c’est ce que montrent les récentes expériences de croisement entre loups, renards et chiens, et même entre chiens-loups, chats angoras et ovins. Ma théorie du croisement, pour expliquer l’apparition d’espèces nouvelles, se trouve ainsi confirmée par les plus récentes expériences d’élevage.
Cinquième thèse. Parmi ces êtres préhumains archaïques, en particulier parmi ceux des espèces ailées, certains étaient de véritables stations d’émission et réception électriques, et étaient ainsi quasiment tout-puissants, doués d’ubiquité, omniscients et immortels, pouvaient se matérialiser et dématérialiser à volonté. Ils étaient vénérés comme des « dieux » ou demi-dieux et sont de fait les créateurs de toutes les formes de minéraux, plantes et animaux.
Sixième thèse. Ces créatures que j’appelle des Elektrozoa et qui sont les « Anges », « Muses », « Nornes », « Valkyries », « Grâces », « Griffons » etc. des écrits anciens, sont ceux qui ont enseigné le savoir, la religion, la culture primordiaux. Naturellement, ce sont aussi les créateurs de la langue originelle unique, et la méthode que j’emploie dans le présent dictionnaire pratique, comparatif et étymologique (Schlüsselwörterbuch zur Esoterik des Altertums und Mittelalters) est fondée scientifiquement. Les langues gotique et lithuanienne, ainsi que les dialectes sémites originels, de même que l’ancien égyptien et les langues iro-celtiques sont, d’après mes recherches, les plus proches de cette première langue.
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(ii)
La Bible en tant que document anthropologique :
« Idoles » et « Démons »
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Nous donnons ici quelques passages de la Bible cités dans la Théozoologie de 1905, dans trois traductions : (a) la Vulgate latine (Nova Vulgata), (b) la traduction française de la Bible de Jérusalem, catholique, et (c) la traduction française de la Bible suisse protestante de Louis Segond. Un commentaire succinct de ces passages et de leurs traductions quant au sens réel, ésotérique, de la Bible suit.
Lev. XVII, 7
Nequaquam ultra immolabunt hostias suas daemonibus, cum quibus fornicati sunt.
Ils n’offriront plus leurs sacrifices à ces satyres à la suite desquels ils se prostituaient.
Ils n’offriront plus leurs sacrifices aux boucs, avec lesquels ils se prostituent.
Is. II, 18-19
Et idola penitus conterentur. Et introibunt in speculas petrarum et in voragines terrae
Les faux dieux, en masse, disparaîtront. Pour eux, ils iront dans les cavernes des rochers
Toutes les idoles disparaîtront. On entrera dans les cavernes des rochers
Is. XXXIV, 14
Et occurrent hyaenae thoibus, et pilosus clamat ad amicum suum
Les chats sauvages rencontreront les hyènes, le satyre appellera le satyre.
Les animaux du désert y rencontreront les chiens sauvages, et les boucs s’y appelleront les uns les autres.
Ezec. XXIII, 37
Cum idolis suis fornicatae sunt
Elles ont commis l’adultère avec leurs ordures
Elles ont commis adultère avec leurs idoles
Ezec. XXIII, 49
Et peccata idolorum vestrorum portabitis
Vous porterez le poids des péchés commis avec vos ordures
Vous porterez les péchés de vos idoles
De plus amples citations se trouvent dans nos commentaires à la traduction de la Théozoologie. À la lecture de ces seuls passages, on voit que le lecteur ordinaire de la Bible est très dépendant de la traduction pour sa compréhension des Écritures, et qu’en réalité il n’en a qu’une appréhension vague s’il ne cherche pas à savoir ce que peuvent être ces « satyres » qui sont pour les autres des « boucs », et ces « ordures » là où un autre a sous le yeux le mot « idoles ». Les obscurités du texte ou de la traduction sont imputées à un style poétique qu’il ne servirait à rien de tenter de pénétrer, et c’est ainsi que les croyants des diverses confessions chrétiennes croient débrouiller le sens des Écritures et s’y appuyer pour conduire leur existence ici-bas.
Le fait que des « idoles » se cachent dans les cavernes des rochers (Is. II, 18-19) passe ainsi pour du style poétique. Cependant, cela a paru tellement extraordinaire aux deux traducteurs français cités ici qu’ils ont préféré envelopper leur texte d’un voile opaque. Ainsi, alors que le texte latin ne laisse aucune ambiguïté quant au fait que ce sont les idoles elles-mêmes qui s’enfuiront dans les cavernes, L. Segond écrit « On entrera », sans que l’on puisse savoir de qui il s’agit, et pour sa part la Bible de Jérusalem ajoute un « Pour eux » purement explétif qui, en alambiquant la phrase, ôte toute clarté au passage : on peut croire que ce « Pour eux » signifie que le sujet n’est plus les « idoles ».
C’est pour la même raison, choqué par cette anthropomorphisation trop absolue des « idoles », que le traducteur de la Bible de Jérusalem parle d’« ordures ». Le texte latin dit pourtant bien que les Hébreux forniquent avec leurs idoles et que les idoles commettent des péchés.
Enfin, il est également question dans le texte latin de prostitution aux démons (Lev. XVII, 7), ce qui est traduit tantôt par « satyres » et tantôt par « boucs ». La Bible de Jérusalem ne veut d’ailleurs pas garder le sens littéral (cum quibus, c’est-à-dire « avec lesquels » ils se prostituent), mais elle écrit l’expression vague « à la suite desquels ils se prostituent ». On sait que ce passage et d’autres ont pourtant servi aux Inquisiteurs du moyen âge à dresser des actes d’accusation contre les sorcières, coupables selon ces accusateurs de commerce charnel réel avec le démon. Les démons lubriques et violeurs, les incubes, tirent leur nom du latin incubones, qui désigne les « satyres » de l’Antiquité gréco-latine. Aujourd’hui, l’Inquisition n’existe plus, et ces expressions de fornication ou de prostitution avec les idoles et les démons seraient à prendre au seul sens poétique et métaphorique, comme des figures de style. Dans ce cas, que ne prennent les croyants les anges aussi au sens métaphorique ? En réalité, ces idoles, ces démons renvoient, de même que les anges, à la quatrième thèse de l’ariosophie (supra), c’est-à-dire à des créatures existantes, dont maints passages de la Bible, un document anthropologique selon Lanz von Liebenfels, décrivent les actions et les mœurs. Et c’est justement l’objet de la « théozoologie » que d’établir un tableau scientifique de ces créatures.
À cet égard, livrons-nous à un examen succinct du terme latin pilosus (Is. XXXIV, 14). Le mot signifie « couvert de poils ». Il est traduit, dans ce passage de la Bible, tantôt par « bouc », tantôt par « satyre ». Voici ce que dit le glossaire latin de Du Cange à cet égard : « Isidorus : Pilosi, qui Graece Panitae, Latine incubi appellantur (…) Eucherius Lugdunensis : Pilosi, in Esaia, daemonum genera. Nonnulli etiam hos doctissimorum incubones, vel satyros, aut quosdam silvestres homines intelligendos putaverunt. Mammotrectus : Pilosi, monstra sunt ad similitudinem hominum, quorum forma ab humana effigie incipit, sed bestiali in extremitate terminatur, vel sunt daemones incubones, vel satyri, vel homines silvestres. » Le pilosus est un satyre, un incube, mi-homme mi-bête, un « homme sylvestre », homme des forêts, ainsi nommé parce que son corps est couvert de poils ; c’est un homme-singe, Äffling, c’est l’udumu des Assyro-Babyloniens (cf. infra). C’est, dans la Bible, un démon et une idole, un démon car il fait partie de ces races que Dieu a demandé aux Hébreux de passer au fil de l’épée, une idole car il était vénéré dans des cultes orgiaques, contribuant par la fornication à la dégradation du type aryen ou ario-héroïque (homo ario-heroicus).
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II/ Anthropologie raciale
(Ostara, Briefbücherei der Blonden)
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(i)
L’Aryen dolicocéphale blond
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L’homme des origines est l’Aryen. C’est une création des dieux. Le type aryen pur est le plus ancien, les autres races du genre homo sont issues de croisements avec des espèces anthropoïdes : udumi, ou anthropoïdes simiens adamiques, baziati, ou nains, paguti, ondins ou tritons (amphibies), issuri, anthropoïdes ailés, selon l’onomastique des documents assyro-babyloniens examinés dans la Théozoologie. La multiplication des croisements entre espèces ont donné naissance aux hominidés aujourd’hui disparus en tant que tels (homo neanderthalensis etc.) ainsi qu’aux singes de la faune historique.
Le type aryen est nettement défini et toute variation est la conséquence d’un croisement. Ce type se définit notamment par la dépigmentation des cheveux (blonds) et des yeux (bleus ou gris), la dolichocéphalie (angle facial et indice crânien compris entre telle et telle valeur numérique : vide infra), des indices numériques spécifiques de la taille, des mains, des pieds, des bras, des jambes, du tronc, etc., et de leurs rapports entre eux : rapport du tronc aux bras, du tronc aux jambes, etc.
Ces caractéristiques ne sont pas arbitraires et traduisent au contraire une efficience du rendement métabolique. Ainsi, la pigmentation de la peau a pour corollaire un travail d’élimination des toxines par la surface du corps au détriment du fonctionnement des organes internes, moins sollicités et donc moins robustes. Ce travail d’évacuation par la peau est d’autant plus poussé que la peau est plus pigmentée, d’où l’odeur caractéristique des peaux pigmentées1. Le corollaire psychologique de ces variations de pigmentation se trouve dans la plus ou moins grande intériorité psychique : les types les plus pigmentés subissent un appauvrissement de la vie intérieure, laquelle fait fond sur le métabolisme des organes internes.
De même, l’importance de la dolichocéphalie est liée aux résultats de la physiognomonie (Gall, Lavater et al.). La forme du cerveau est différente dans un crâne dolichocéphale et dans un crâne brachycéphale. Or, les différentes facultés intellectuelles étant localisées dans les différentes parties de la masse cérébrale, il en résulte que leur répartition selon les individus dépend de la valeur de l’indice crânien. La personnalité la plus riche et la plus équilibrée est associée à la dolichocéphalie : les facultés cognitives et psychiques supérieures, telles que la faculté de pensée abstraite, sont en effet localisées dans ces parties de l’encéphale qui sont à leur plus haut développement dans la boîte crânienne dolichocéphale.
Enfin, parmi les autres traits de l’efficience du type aryen, on peut citer la courbure de la colonne vertébrale. La station debout caractéristique de l’homme nécessite une certaine courbure de la colonne pour amortir les chocs de la marche, ainsi qu’un ressort mécanique. Une colonne vertébrale rectiligne donne une démarche de marionnette, caractéristique de certains types. Le caractère rectiligne de la colonne vertébrale est le résultat d’un croisement qui, dans les cas extrêmes, empêche la station debout : ce sont les actuels singes de la faune historique.
Lanz von Liebenfels conçut une échelle anthropologique permettant de définir la variation d’un individu par rapport au type racial pur. De son vivant, l’examen anthropologique devait donner un résultat d’au moins 70 % (100 % étant le type aryen originel pur) pour qu’une personne puisse être reçue membre de l’ONT.
De même, Lanz préconisait un ordre social dans lequel les fonctions de direction et d’encadrement seraient confiées, non plus comme dans des pays tels que l’Allemagne et la France à la suite d’une procédure de concours toute scolaire, dont la nature même, en insistant sur les capacités de mémorisation et d’imitation, est au détriment des Aryens, mais par des concours où l’examen anthropologique jouerait un rôle de premier plan. De même, l’assistance sociale devrait selon lui se fonder sur un tel examen.
Le type aryen est selon Lanz en voie d’extinction. Le dogme égalitariste moderne est en réalité une arme contre lui. Mis en contact, à l’école égalitariste, avec les multiples produits de croisement des sociétés européennes, l’enfant aryen peine à développer pleinement ses talents, quand il ne dégénère pas purement et simplement par l’exemple.
1 Cette odeur caractéristique a un nom dans le castillan parlé en Amérique, catinga, dont le Diccionario de Americanismos de F. J. Santamaría donne la définition suivante (1942) : « catinga (f) : (voz guaraní) 1. en Bol. y Arg., olor sofocante y desagradable que despiden naturalmente algunos animales 2. olor intenso de la traspiración de los negros. » On trouve également le mot grajo : « grajo (m) : 1. sobaquina, catinga, mal olor de los negros 2. (Eugenia tuberculata) planta cubana de olor semejante al de los negros. » Ce dernier terme a donné l’adjectif grajiento : « en Antillas, que huele mal. Dícese de persona, del negro principalmente. Lo mismo en el Perú. » (Catinga : « En Bolivie et en Argentine, odeur suffocante, désagréable que dégagent naturellement certains animaux. 2 Forte odeur de la transpiration des Noirs. » Grajo : « Odeur d’aisselles ou mauvaise odeur des Noirs. 2 En Colombie, scarabée noir dégageant une odeur nauséabonde et qui vit dans les maisons. 3 Plante de Cuba dont l’odeur est semblable à celle des Noirs. » Grajiento : « Aux Antilles, cet adjectif signifie puant et s’applique à des personnes, en particulier de race noire. Même sens au Pérou. »)
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(ii)
Dépigmentation ; Indice céphalique
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Dépigmentation
D’aucuns affirment que nous n’avons pas une idée exacte de l’apparence physique des Aryens originels. C’est une erreur, selon Lanz. Nous savons au contraire que les Aryens étaient blonds aux yeux bleus, pour la simple raison qu’ils doivent être par définition parfaitement dépigmentés. S’ils ne l’étaient pas, les anciens ou les actuels Nordiques blonds aux yeux bleus seraient racialement plus purs. Or il n’y a pas à cet égard évolution mais involution. L’Aryen actuel ne peut être plus aryen que l’Aryen des origines ; dans la plupart des cas, il a au contraire dans son patrimoine génétique du sang non aryen. L’Aryen est le dépigmenté parfait (à ceci près que l’albinisme que l’on rencontre parfois, et qui est une pathologie, n’est pas viable).
La pigmentation, c’est-à-dire la production par le métabolisme de mélanine, associée à quelques autres molécules pour les yeux et les cheveux2, a cette conséquence sur le psychisme que la régulation, thermique et autres, de l’organisme a lieu directement à l’interface avec le monde extérieur3. En sorte que la vie de l’individu elle-même se situe à cette interface, à cette surface : la vie de l’esprit est superficielle. L’individu dépigmenté présente quant à lui une activité des organes internes beaucoup plus importante, qui compense cette faible activité des surfaces : il est l’homme intériorisé par excellence. Il peut développer des capacités mentales spécifiques, incluant les phénomènes paranormaux considérés de nos jours avec le plus grand scepticisme, et pour cause.
2 La couleur de la peau, des yeux et des cheveux fournit un indice certain de la quantité de production de mélanine par l’organisme, une quantité qui peut être exprimée sous forme numérique, par exemple sur une échelle de 0 à 100.
3 D’où la forte production de sueur (et d’odeur corporelle) – régulation thermique – par les peaux pigmentées.
Indice crânien (IC) et angle facial
Nous savons également que l’Aryen des origines est dolichocéphale (IC<75 ; IC = 100.l/L [l largeur, L longueur]). Les travaux archéologiques qui ont amené à considérer l’histoire de l’Aryen établissent la prépondérance, voire la présence exclusive de crânes dolichocéphales dans les sépultures des classes sociales supérieures des civilisations de l’Antiquité.
Il existe une corrélation directe entre l’indice crânien, ou indice céphalique, et les facultés intellectuelles, dans la mesure où le crâne dolichocéphale représente une forme différenciée et fonctionnelle par rapport à la forme intégrale du crâne simien, par exemple.
Il est également possible de recourir à la notion d’angle facial, formé par l’écartement des deux lignes partant de l’épine nasale supérieure et se dirigeant l’une horizontalement en arrière, l’autre en haut, de manière à toucher la partie la plus avancée du front. « L’angle facial est d’autant plus aigu que le front est plus fuyant, et que le type observé appartient à une race moins intelligente ; il devient plus ouvert à mesure qu’on s’élève du quadrupède au singe, du singe à l’homme, de l’homme noir à l’homme blanc. » (Larousse du XIXe siècle, article sur Petrus Camper, anatomiste hollandais à l’origine de la notion)
Réfutations
Il n’est pas permis de considérer, comme le généticien Othmar von Verschuer, que le patrimoine génétique se distingue en « traits physiques » et « traits psychologiques » distincts de telle façon qu’une personne d’un type racial physique donné puisse montrer les dispositions mentales d’une autre race. En réalité, les dispositions mentales sont conditionnées par les valeurs numériques de l’anatomie individuelle. L’examen des indices céphalique et facial complété par des examens physiognomoniques de la surface du crâne correspondant aux différentes parties du cerveau où sont localisées les aptitudes, est de nature à révéler l’intégralité de la personnalité innée d’un individu et par là-même les modalités selon lesquelles cet individu interagira avec les différents environnements dans lesquels il sera conduit à évoluer.
Ce point fondamental se heurte à l’idéologie contemporaine qui, en tant que pensée métaphysique et dogmatique, s’oppose à la connaissance de l’homme. Cette impossibilité psychologique, pour le type qui pullule dans nos universités, de considérer ces données scientifiques est d’autant plus remarquable que les préhistoriens ne peuvent s’en passer dans leurs travaux. Il en va ainsi pour déterminer l’espèce de tel squelette de préhominien. Exemple : « Cette empreinte montre que la structure de l’avant du cerveau, siège des pensées abstraites, est plus évoluée et plus complexe que chez les australopithèques. » (Article du Figaro « Un petit ancêtre de l’homme doué de la tête et des mains », septembre 2011) La recherche paléoanthropologique s’appuie sur les indices anatomiques et, spécifiquement, céphaliques pour tirer des conclusions : c’est la preuve de la validité scientifique de ces indices et il y a d’autant moins de raison de vouloir limiter leur validité aux préhominiens et de refuser de l’étendre aux races humaines que, dans la conception darwinienne en vigueur, les uns sont les ancêtres des autres.
[Ajout 2025. Parler, sur la foi d’examens crâniens, de pensée abstraite plus évoluée d’un hominidé à l’autre, en admettant la théorie de l’évolution issue de Darwin selon laquelle il n’existe pas de différence ontologique entre l’homme et le singe, ne permet pas en cohérence de nier la portée de l’examen crânien des races humaines actuelles au plan de la faculté de pensée abstraite. C’est tout simplement une erreur de raisonnement. Par conséquent, ou bien l’ontologie du scientisme est vraie et cet examen crânien doit être passé à Lanz, ou bien cette ontologie est fausse et l’homme ne descend pas du singe, puisque s’il en descend il n’y a pas de différence ontologique de l’homme au singe, seulement une différence dans une histoire naturelle de l’évolution qui ne permet pas d’appliquer diverses formes d’examen s’agissant d’un organe comme le cerveau, commun aux deux.]
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III/ Anthropologie sexuelle
(Ostara, Briefbücherei der Männerrechtler)
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(i)
Ariosophie et Lebensreform (réforme de la vie) : Callipédie
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Le numéro 66 de la revue Ostara traite de la culture aryenne de la nudité, opposée à l’exploitation de l’obscénité. Il défend l’idée que c’est la répression de la première qui permet en définitive la seconde.
Ces considérations, à l’opposé des conceptions bourgeoises et conservatrices de l’époque, s’inscrivent dans le mouvement culturel de la Lebensreform. Ce mouvement repoussait les normes de la société industrialisée. D’un point de vue ariosophique, les conditions de l’industrialisation et du développement technologique et économique, en ce qu’elles sont pour une large part, tout en reposant sur l’exploitation du génie d’invention aryen, conduites par des caractères raciaux non aryens, est nuisible à l’épanouissement de l’homme blond. Le milieu de la métropole « tchandalisée »4 est aussi malsain pour ce dernier, physiquement, qu’un marais paludique, avec la corruption morale qu’elle induit de surcroît.
Ce mouvement de Lebensreform, dont l’une des figures proéminentes fut le peintre allemand Karl-Wilhelm Diefenbach, membre de l’ONT, a été le premier de divers mouvements de retour à une vie plus respectueuse de la nature, y compris des hippies américains, avant que ces derniers ne sombrent dans les stupéfiants, voie sans issue.
Le retour à des valeurs naturelles implique pour l’Aryen un retour à sa culture – foncièrement eugéniciste – de la nudité et de la beauté, et donc au « combat contre la pudibonderie tchandalique ».
Culture raciale et culture de la nudité dans le combat contre la pudibonderie (Muckertum) tchandalique
La pudibonderie est fondamentalement une entreprise commerciale qui entend exploiter la sexualité de façon monopolistique. En un mot, elle est le trust sexuel des tartuffes et des abâtardis ! Ces bourreaux pudibonds poussent chaque année des milliers d’hommes à se tirer une balle dans la tête, des milliers de jeunes filles à se jeter dans les rivières, chaque année ils acculent au poison des milliers d’individus, brisent de douleur et de chagrin des milliers de cœurs et remplissent les asiles d’aliénés, tout cela à cause d’une chimère qu’ils appellent « immoralité » et qui n’est en réalité de leur part qu’un vil ressentiment, d’essence commerciale ou érotique. Ils chassent du râtelier les esprits débonnaires dépourvus de malice, c’est-à-dire le plus souvent les individus de race supérieure, pour s’y faire une plus grande place. Ces hypocrites n’ont cure de ce que, pour posséder davantage, il leur faille passer sur des tas de cadavres. Ils se sentent bien dans leur peau de Tchandalas cannibales, et la police veille à ce qu’ils ne soient pas dérangés dans leurs plaisirs. Nous ne sortons donc pas de là : l’immoralité et la pudibonderie, comme tous les maux, sont le résultat du tchandalisme. Le Tchandala est un hypocrite et un pandore né, le pandore des mœurs.
Éthique et esthétique de la nudité
Rien n’excite davantage la haine de la pudibonderie tchandalique que la nudité et la beauté. Sa cruauté satanique et simiesque est déchaînée contre elles ; la nudité, la beauté, jusqu’au sens de la propreté passent pour « immoraux » ! Même parmi les personnes éclairées et tolérantes, il n’est pas rare de rencontrer les opinions les plus fausses sur la nudité et sa signification morale.
Une des qualités les plus remarquables de la nudité est sa vertu éducative. De même que la culture hypocrite des Tchandalas est une culture de l’immoralité et de la laideur, la culture aryenne de la nudité est celle de la moralité et de la beauté. Pour la jeunesse, il n’existe pas d’instrument éducatif plus indiqué et plus sûr que la culture de la nudité. L’éducation des antiques Aryens, visant à une formation harmonieuse du corps et de l’esprit, faisait largement appel à la nudité, comme en témoigne le nom même des instituts grecs d’éducation de la jeunesse, les gymnases. « Gymnase » signifie littéralement : institut de nudité. Tout le contraire de nos écoles contemporaines, qui sont les fondations de la pudibonderie et dans lesquelles les enseignants et les élèves de race noble sont pareillement foulés aux pieds !
Lorsque Tacite évoque le vêtement des anciens Germains, qui doivent être considérés comme représentatifs de toutes les autres nations de la race des héros, il affirme que ce peuple vit nu ou à moitié nu. Ils avaient pour tout vêtement de belles et précieuses fourrures ou chemises de lin. Même les femmes portaient des robes sans manches qui ne couvraient que partiellement la poitrine. Et pourtant (en réalité, de ce fait), ce peuple était d’une chasteté irréprochable. « Les bonnes mœurs ont chez eux une plus grande force que les bonnes lois partout ailleurs. » Quelle parole profonde et juste ! Aucun règlement de police, aucune loi de moralité, aussi sévères et brutaux soient-ils, ne peuvent rendre un peuple ou un État foncièrement moral et chaste quand les hommes ne sont pas, par leur nature même, c’est-à-dire par leur race, des hommes vertueux, dont la décence et la mesure sont inscrites dans le corps et l’âme.
La culture de l’habit et des tailleurs est une culture de trafiquants, et elle est fondamentalement antisociale car elle aggrave les différences de classe entre riches et pauvres. Le vêtement classe. C’est pourquoi les femmes gaspillent des fortunes en vêtements et alimentent une industrie du luxe si socialement nuisible. Une femme en singe une autre, et ces singeries s’appellent la mode. La mode féminine actuelle n’est rien d’autre que le fait délibéré de recouvrir les caractères sexuels secondaires de la femme – en même temps que les caractères primaires –, de draper dans des tissus l’immoralité, la frivolité et l’hypocrisie afin que les passions masculines soient enflammées mais jamais – sans bakchich – satisfaites. Cette torture d’hommes, qui produit chaque année des hécatombes par la neurasthénie, les maladies mentales et la perversité, va de soi selon la police des mœurs. Cette dernière laisse se montrer nus « athlètes » et autres culturistes, elle laisse ouverts les rings abrutissants parce que les imprésarios sont des étrangers et que cela plaît aux « dames de la haute société ». Voilà comment, point par point, se répète la chute de l’empire romain sur son déclin.
Plus une époque est entichée de mode, plus elle est pudibonde, tchandalisée, malade, dépravée. La nudité innocente et pure est le plus sûr critère de la moralité et de la santé d’une époque. Celui qui cherche à dissimuler son corps cherche également à dissimuler ses pensées. L’habit est le symbole du mensonge, de l’imposture et de la pruderie. Aussi nu et découvert qu’était leur corps, le tempérament des antiques Aryens était nu, innocent, naïf, sans dissimulation. À son époque déjà, Tacite le reconnut. La vanité vestimentaire s’accroît toujours en même temps que la dépravation.
La culture de la nudité mène contre la pudibonderie et pour la vraie beauté, pour les plus hauts idéaux esthétiques, un combat sans merci. Que s’étonne-t-on qu’en ces temps tchandalesques, qui ne possèdent pour toute morale que des critères vestimentaires, naissent autant d’individus hideux ! Étonnons-nous plutôt que les femmes n’accouchent pas d’enfants binoclards, en blouse et caleçons de bain conformes aux arrêtés de police.
(…)
Enfin, la nudité de l’individu laid et racialement inférieur est également un repoussoir excellent pour ses vertus pédagogiques, dont l’hygiène raciale des antiques Aryens usait avec prédilection.
Ostara-Heft n° 66 (Extrait)
4 Les termes Tchandala, tchandalisés, etc. sont empruntés à la philosophie de Nietzsche, qui est le premier à avoir recouru à ce concept de la culture indienne des castes et l’a popularisé dans la langue allemande. Le Tchandala est, dans sa culture d’origine, le plus banni des hors-castes en ce qu’il est le produit d’une femme de la caste des Brahmanes la plus haute avec un Sudra, un homme de la caste la plus basse. C’est pour Lanz l’expression du chaos racial.
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(ii)
La femme et l’Occident
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Le titre complet de la revue Ostara est Ostara. Briefbücherei der Blonden und Männerrechtler. Le terme Männerrechtler est un néologisme forgé par Lanz en opposition et réaction au mot lui-même récent à l’époque de Frauenrechtler, c’est-à-dire celui ou celle qui défend les droits des femmes. Le Männerrechtler est celui qui défend les droits des hommes, du sexe masculin.
Le fait que le terme apparaisse dans le titre même de l’organe de communication le plus connu de l’ONT indique l’importance de cette question dans la pensée de Lanz. L’ariosophie ne se conçoit pas sans cette dimension, aussi fondamentale que le racialisme, et sans la nécessité de rétablir la prééminence juridique et sociale de l’homme. Une société qui perd de vue les « droits des hommes » pour ne se consacrer qu’aux « droits des femmes » est vouée à sa perte.
a/ Voile intégral
Dans l’histoire de l’Occident, l’émancipation des femmes est un épisode qui, bien que le dernier en date et l’état actuel de notre culture, ne peut se targuer que d’une fort brève existence de quelques dizaines d’années, ce qui fait bien peu – n’était l’effet d’optique dû à la proximité – après plusieurs millénaires de minorité légale. On trouverait même difficilement un exemple plus pur de minorité légale (la femme a le statut d’un mineur, c’est-à-dire qu’elle mène une existence sociale sous la tutelle de son père puis de son époux) que dans l’antiquité grecque et romaine. Une conception reprise par les Pères de l’Église : outre les Écritures, tous les auteurs grecs et latins sont mobilisés par eux pour légitimer la minorité légale des femmes en civilisation chrétienne. Enfin, le code civil de Napoléon est un autre exemple classique de ce statut de minorité pour le sexe féminin. Autrement dit, il s’agit d’une donnée de l’Occident, dont la disparition archi-récente n’est, à preuve du contraire, qu’un événement fortuit, certes singulier mais nullement caractéristique. Il est à préciser que cette conception va en Occident de pair avec une grande sévérité pour les actes de brutalité envers les femmes et qu’elle est liée à l’esprit chevaleresque.
Si l’on veut parler du voile islamique, de ce voile cachant le visage de la femme et qui serait si étranger à nos traditions, nous nous bornerons à citer le très classique Dictionnaire des antiquités romaines et grecques d’A. Rich, traduction française de M. Chéruel de l’Académie impériale de Paris (1864), à l’article Caliptra (qui n’est autre que le mot grec pour « voile ») : « Caliptra ou Calyptra. Voile porté en public par les jeunes femmes de la Grèce et de l’Italie, et destiné à dérober leurs traits aux regards des étrangers (cit. Festus, Homère, Sophocle). Il était tout à fait semblable à celui dont se servent les femmes turques. On le plaçait sur le haut de la tête et on s’en entourait la figure de manière à la cacher entièrement, excepté la partie supérieure du nez et des yeux (cit. Euripide). On laissait tomber ce voile sur les épaules jusqu’au milieu du corps (…) Un voile de cette sorte était aussi porté par les jeunes mariées en Grèce (cit. Eschyle), et c’est avec ce même costume que paraissent encore à Rome, à la fête de l’Annonciation, les jeunes femmes qui reçoivent une dot de l’État. »
Au moyen âge, ensuite, les coiffures féminines, hennins et autres, étaient confectionnées de façon à comporter ou à pouvoir recevoir un voile, lequel était abaissé ou relevé selon les circonstances, à savoir qu’il était porté en public, hors de la maison de l’époux. La littérature médiévale en comporte maints témoignages. Par exemple : « Une demoiselle descendit devant le palais, accompagnée d’un chevalier tout vieux et tout chenu. En entrant dans la salle, elle laissa tomber son voile, et l’on vit une pucelle d’une grande beauté » (Galehaut, sire des îles lointaines, Les Romans de la Table Ronde par Jacques Boulenger, 1923). Boulenger n’écrit pas « le voile qu’elle portait » mais « son voile », car c’était un élément imprescriptible de la toilette des femmes de condition. Ces voiles permettaient à celles qui les portaient de voir au travers sans que leurs traits fussent distincts.
Au cours des siècles, cet accessoire, si tant est que l’on puisse désigner ainsi un élément que les mœurs ne permettaient pas d’omettre, a évolué. En plusieurs endroits, il fut remplacé par le loup, ce masque qui couvre la partie supérieure du visage et qui permet de voir à travers deux ouvertures ménagées au niveau des yeux. Le loup n’est plus aujourd’hui qu’un accessoire de carnaval. Les dames le portaient sur le visage ou en face-à-main.
Il est fort possible que cette époque un tant soit peu corrompue que fut le dix-huitième siècle et qui s’est achevée en France par la Révolution, ait vu un recul de l’usage du voile ou du loup. En matière de condition de la femme, il y eut, avec le code civil, ce que l’on pourrait appeler une réaction napoléonienne.
Le dix-neuvième siècle a consacré l’usage de la voilette, étymologiquement « petit voile », qui se fixait au chapeau. Jusqu’à la Première Guerre mondiale et encore au-delà, une femme de condition ne sortait pas sans voilette. Si le dictionnaire Robert définit celle-ci comme un « petit voile transparent », il ajoute une citation de Maupassant qui montre qu’elle n’était nullement transparente dans les deux sens : « Elle avait relevé sa voilette et Morin, ravi, murmura : Bigre, la belle personne ! » Morin ne pouvait distinguer clairement les traits de cette femme tant qu’elle n’avait pas relevé sa voilette.
b/ Gynécée
Au long article « femme » du Larousse du dix-neuvième siècle, on peut lire la chose suivante sur les femmes de l’antiquité grecque et romaine :
« Dans les petites cités grecques, où toutes les affaires publiques et privées se débattaient devant le peuple assemblé, le citoyen passait sa vie sur la place publique. Si l’homme vivait toujours au dehors de sa maison, la femme, au contraire, ne pouvait en sortir. Tristement reléguée dans son gynécée, où les plus proches parents avaient seuls le droit de pénétrer, elles ne pouvaient se laisser voir au dehors que dans des cas rares et déterminés par la loi. »
« Les matrones [romaines] sortaient toujours accompagnées ; au dehors, leur figure était soigneusement voilée. Une longue stole leur descendait jusque sur les talons, et un large manteau, les enveloppant, ne laissait pas voir leur taille. Une troupe de gardiens, nous apprend Valère Maxime, les entourait et empêchait la foule d’approcher d’elles. Presque toutes, au temps d’Auguste, portaient encore des voiles et se conformaient ainsi à la vieille loi qui défendait aux Romaines de sortir le visage découvert. »
On voit que la réclusion au gynécée et le voile au dehors dont elle est le corollaire ne concernent que les femmes mariées (c’est le sens du mot « matrone »), c’est-à-dire, en réalité, les femmes qui doivent assurer une descendance à l’homme. Il faut relever, puisque nous avons parlé du code civil napoléonien, que celui-ci reconnaît en droit une égalité civile entre hommes et femmes (art. 8), mais que cette égalité cesse dans le mariage, la femme mariée acquérant un statut d’incapacité, qui cesse si elle devient veuve. Il est inutile de souligner ce qu’une telle conception a de dangereux pour l’institution du mariage.
L’obligation de la réclusion et de son corollaire, le voile, n’a pas à s’étendre au-delà des femmes qui sont épouses et mères, et même au-delà des épouses des « citoyens », c’est-à-dire des hommes qui comptent dans la vie de la cité. Si l’islam impose le voile à toutes les femmes en âge d’être mariées, c’est en raison à la fois de son égalitarisme religieux et du fait qu’il ne conçoit pas d’autre état pour la femme que celui du mariage (la seule alternative possible, le célibat, est un accident).
Tel n’était pas le cas des sociétés grecques et romaines (ni même des sociétés occidentales ultérieures), comme en témoigne ce propos de Démosthène : « Nous avons des hétaïres pour la volupté de l’âme, des pallaques pour la satisfaction des sens, des femmes légitimes pour nous donner des enfants de notre sang et garder nos maisons. » C’est quelque chose qui se retrouve dans la doctrine ariosophique telle que la conçoit Lanz von Liebenfels5. Les hétaïres et les pallaques correspondent aux courtisanes et aux prostituées modernes, les premières cultivant des talents artistiques de musiciennes, danseuses, comédiennes, les secondes se bornant au commerce charnel. Pour Lanz, il serait dangereux de vouloir supprimer la courtisanerie car les femmes perverses, dès lors qu’il ne leur est laissé d’autre choix que le mariage, ne peuvent que ruiner cette institution et ruiner les familles en altérant par leur adultère, en adultérant le sang des meilleures lignées.
Ces institutions historiques témoignent de l’effort de l’Aryen pour préserver son capital génétique au contact des populations assujetties par la conquête. Il n’y a pas trace de tels efforts chez les populations aryennes vivant en vase clos, comme ce fut relativement le cas pour les anciens Germains, où de telles garanties n’ont pas lieu d’exister et où les relations entre les sexes sont différentes et caractérisées par un véritable culte chevaleresque de la femme (qui ne cesse pourtant pas de voir en elle un être naturellement moins doué à de nombreux égards et qu’il convient de protéger comme un enfant).
5 Le rhéteur Démosthène est en fait, selon Lanz, un représentant de la décadence grecque, dont le type physico-racial correspond à l’universitaire contemporain, parangon d’une intellectualité pervertie. Le propos cité ne fait cependant que décrire une situation déjà ancienne à son époque et qui a sa logique dans une perspective ariosophique.
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Ces propos sur le voile peuvent sembler contradictoires avec ce qui précède au sujet de la culture de la nudité. À cela il convient de répondre de la manière suivante.
Le nudisme concerne principalement la jeunesse : « Pour la jeunesse, il n’existe pas d’instrument éducatif plus indiqué et plus sûr que la culture de la nudité » (Ostara n° 66 supra). Associée à une éducation à la beauté aryenne (callipédie), la culture de la nudité doit être pratiquée de manière quotidienne parmi les adolescents et les jeunes adultes, en particulier au cours de leurs exercices physiques. Il ne convient sans doute pas que garçons et filles pratiquent ensemble les mêmes sports, car les différences physiques ne le permettent guère de manière satisfaisante, mais, outre le fait que certaines activités peuvent être pratiquées en commun, telles que certains échauffements, la gymnastique, la randonnée, etc., les activités séparées peuvent avoir lieu dans des gymnases communs, qui permettent aux uns et aux autres de considérer leur nudité réciproquement. Il ne s’agit là rien d’autre que de la mise en pratique de l’éducation à la beauté qui doit être dispensée à la jeunesse.
D’autre part, en parlant du voile dans notre histoire, l’idée n’est pas tant de proposer de le rétablir que de signaler à l’attention des uns et des autres les moyens par lesquels l’Aryen a cherché à préserver son capital génétique dans les sociétés multiraciales qu’il dominait. Dès lors que l’objectif de l’ariosophie contemporaine est de permettre aux Aryens de vivre entre eux, selon leurs besoins spécifiques en vue de leur plein épanouissement, et de faire en sorte que les tâches jusqu’alors réservées (tant qu’était respecté un ordre traditionnel aryen) aux populations soumises ont vocation à être assurées à l’avenir par des machines, y compris des machines organiques (cf. Théozoologie) dans un État social-eugéniste, la stratégie du voile n’apparaît plus aussi fondamentale.
Il ne faut pas attendre de la femme qu’elle développe les mêmes qualités rationnelles et intellectuelles que l’homme, pour la simple raison que son anatomie et la structure de son cerveau, avec prédominance relative du cervelet, siège des émotions et des sentiments, ne le permettent pas. L’homme profond, intellectuellement puissant, est absolument seul du point de vue de sa relation à la femme : elle ne peut tout simplement pas le comprendre. La seule chose qu’elle puisse faire et qui doit lui être demandée, c’est de témoigner du respect pour ce mystère en présence duquel elle se trouve. La « femme libre », la femme émancipée, a toujours été et sera toujours l’ennemie de la culture, par sa prédilection pour les hommes inférieurs. Lanz va jusqu’à dire que la femme a orienté la sélection génétique de ces deux mille dernières années ad grandiora genitalia, sur la foi de la statuaire grecque antique, qui présente les formes les plus excellentes du corps masculin.
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ANNEXE
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Il n’est pas sans intérêt d’examiner les erreurs commises au sujet de l’ariosophie par un auteur qui en a traité, le Français Jean Mabire, dans son livre Thulé, le soleil retrouvé des Hyperboréens.
Cet auteur nuit par ses jugements péremptoires et erronés, qui sont autant de balourdises, à la connaissance de la pensée dont il s’agit. Or Mabire est le premier à reconnaître son ignorance : « L’introuvable collection de cette revue [Ostara] fera rêver quelques générations d’occultistes et de pamphlétaires. » Il avoue ainsi, cela semble indéniable, ne pas avoir lu une seule ligne des cahiers Ostara ; et il faut également se rendre à l’évidence qu’il n’a pas lu une seule ligne d’un quelconque ouvrage de Lanz. À preuve ce qu’il dit de la Théozoologie : « un volumineux ouvrage de 3.500 pages », alors qu’elle n’en compte qu’une centaine. Il confond avec le Bibliomystikon en quinze volumes, puisqu’il affirme que la Théozoologie « comprendra une quinzaine de livraisons ». En bref, Mabire ne connaît pas le moins du monde le corpus du sujet qu’il traite.
Aussi n’est-il pas étonnant que son texte soit un tissu d’inexactitudes et d’âneries. Par exemple, « Dans cet étrange bestiaire métaphysique, deux races se disputent le monde : les ‘sombres’, qui descendent des singes, et les ‘clairs’, qui remontent à l’Hyperborée. » Un tel schématisme n’appartient pas à la pensée de Lanz, qu’il ne fait que caricaturer. Prétendre ou croire que Lanz ignorerait l’existence de la pluralité des races humaines est une sottise. En revanche, il est clair que Lanz en distingue une de toutes les autres, mais il ne la qualifie pas de l’appellation primaire « les clairs ». Qu’on dise tant qu’on veut que cela n’est ni plus ni moins ce que nous avons exposé plus haut sur les conséquences de la pigmentation, on ne peut prétendre que cette présentation de Mabire soit sérieuse.
Il poursuit : « Il importait assez peu que Lanz se donnât tant de mal pour nous prouver que le premier homme était un authentique Germain », en ajoutant immédiatement : « Adam n’est pas plus allemand que Dieu n’est français ! » Ou comment se faire passer pour une intelligence en donnant autrui pour sot. Lanz n’a pas évidemment cherché à prouver qu’Adam était allemand ; en présentant les choses en termes aussi absurdes, l’auteur fait preuve d’une grande légèreté.
Il est en revanche plus étonnant de lire sous sa plume : « Malgré ses outrances polémiques et ses prophéties hasardeuses, la revue Ostara reste une étape capitale dans la redécouverte de l’esprit de Thulé », un esprit de Thulé que Mabire prétend servir, à sa manière. Une fois compris que Mabire ne connaît rien à l’ariosophie, on peut en effet s’étonner qu’il lui impute une quelconque importance dans la redécouverte de cet esprit. C’est d’autant plus étonnant que dans ces quelques pages les injures pleuvent : « ce défroqué au persistant délire hallucinatoire », « hantise maniaque », « un charlatan, qui n’avait quitté le christianisme que pour inventer une nouvelle révélation fantasmagorique ». Injures faciles qui ne s’appuient, encore une fois, sur aucune connaissance précise. Toujours est-il que cette « étape capitale » est bien mise à mal, quelques lignes plus loin : « En tout cas, les fidèles de ce pseudo Ordre du Nouveau Temple tomberont à jamais dans les oubliettes d’où ne les tireront que quelques publicistes en mal de sensationnel. »
Dans son livre, Mabire s’attache à grandir la personne de Rudolf von Sebottendorf, comme il s’attache à grandir celle d’Ernst Röhm dans un autre ouvrage consacré à ce dernier, Röhm, l’homme qui inventa Hitler (sic). Cette tendance à vouloir grandir des figures historiques somme toute mineures au détriment d’acteurs de bien de plus de poids objectif en dit long sur la psychologie de l’auteur. Il est indéniable, d’une part, que l’œuvre intellectuelle de Lanz est sans commune mesure avec celle de Sebottendorf, ne serait-ce qu’au seul plan des connaissances mobilisées, qui sont dans le rapport de l’encyclopédie au traité de vulgarisation, et, d’autre part, qu’Ernst Röhm est un personnage historique de second plan.
Quelques lignes à peine après avoir écrit que les fidèles de l’ONT sont dans les oubliettes de l’histoire, ne voilà-t-il pas que notre Mabire affirme que « parmi les fidèles de l’ONT on comptait d’indéniables chercheurs de vérité et des hommes de valeur, comme lord Kitchener, si l’on doit en croire les spécialistes des sociétés secrètes de ces époques ». Suivent les noms de plusieurs autres personnalités connues. Il ne se rend même pas compte qu’il se contredit d’un paragraphe à l’autre.
Quant à Lord Kitchener, le maréchal britannique, ministre des armées pendant la Première Guerre mondiale, ce ne sont pas d’abord les « spécialistes des sociétés secrètes » qui le placent parmi les « fidèles de l’ONT », mais Lanz lui-même, à plusieurs reprises dans Ostara. Aucun élément documentaire n’est venu corroborer jusqu’à présent cette affirmation. Il est avéré que Kitchener parlait l’allemand, du fait de ses années d’éducation en Suisse, et qu’il aurait donc pu lire la revue ; c’est tout ce qu’on peut dire à ce sujet.
Les inexactitudes de Mabire ne s’arrêtent d’ailleurs pas à l’ariosophie. Dans un autre chapitre de son livre, il affirme par exemple que le prêtre catholique Bernhard Stempfle, éditeur du journal antisémite Miesbacher Anzeiger, relecteur de Mein Kampf avant sa publication et plus tard homme de liaison d’Adolf Hitler avec le Vatican, était un « moine barnabite », alors qu’il appartenait à l’ordre de saint Jérôme.
Droit 26 : Un arrêt de la Cour suprême de Suède sur la liberté d’expression
Cet arrêt importe à des Français dans la mesure où il s’agit d’une application de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (CEDH), dont la France est signataire. La loi d’un pays, ce ne sont pas seulement les textes votés par le législateur de ce pays mais également leur interprétation aux cas particuliers par les tribunaux. Par conséquent, la loi de la France est non seulement la Convention européenne des droits de l’homme, qui a force de loi chez nous depuis sa ratification, mais également son interprétation par les tribunaux, à savoir la Cour européenne des droits de l’homme, en dernier ressort après l’épuisement des voies de recours nationales, ainsi que les tribunaux nationaux. Et les tribunaux nationaux, cela ne signifie pas les tribunaux propres à chaque pays respectivement : un arrêt de la Cour suprême de Suède doit avoir autant de force en France, comme acte d’interprétation de la Convention, qu’un arrêt de la Cour de cassation ou une décision du Conseil constitutionnel ou de n’importe quel tribunal français. En effet, la Convention n’aurait aucune valeur juridique intrinsèque si telle jurisprudence nationale lui donnait un sens et telle autre un autre sens. C’est ce que le statut de la Cour européenne comme juge de dernier recours implique en soi, et cela implique en outre que les législateurs et les tribunaux nationaux doivent tendre vers une interprétation uniforme de la Convention. En somme, l’arrêt de la Cour suprême de Suède Riksåklagaren mot Åke Green (Procureur du Royaume contre Åke Green) du 29 novembre 2005 fait jurisprudence en France et dans les autres pays signataires de la Convention, jusqu’à preuve du contraire. Si cet arrêt était inconnu de la plupart des juges français et des autres juges nationaux d’Europe en dehors de Suède, comme je le suppose, ce serait la preuve d’un état très primitif du droit sur le continent, d’une intégration par le droit défaillante, et d’une protection des libertés fondamentales se constituant de la manière la plus anarchique et paresseuse.
Il s’agit par le présent billet de montrer ce que la Cour suprême de Suède a déclaré ne pas être du hate speech (j’emploierai sans réserve cette expression anglophone car la Cour de Suède y recourt elle-même dans son arrêt), en particulier pour que les prévenus français en ces affaires puissent invoquer la jurisprudence suédoise devant les tribunaux français.
J’ai déjà parlé de l’affaire sur ce blog (Law 18 : ici), en anglais, et commencerai donc par citer ce que j’ai dit.
As Finnish politician Päivi Räsänen is currently prosecuted for hate speech in Finland after having expressed her Christian views about homosexuality, let us remember a case in Finland’s neighboring Sweden, where Pentecostal Pastor Åke Green was acquitted by the Swedish Supreme Court applying Articles 9 (freedom of conscience and religion) and 10 (freedom of speech) of the European Convention on Human Rights (ECHR) against the Swedish criminal code.
For having in a sermon « described ‘sexual perversions’ (referencing homosexuality) as ‘abnormal, a horrible cancerous tumor in the body of society’ [and] said that a person cannot be a Christian and a homosexual at the same time » (Wikipedia), Pastor Green was prosecuted for group libel (hets mot folksgrupp, « incitement against a group ») and sentenced to one month in prison. The court of appeals overturned the sentence, leading the attorney general, unsatisfied that Pastor Green could get off scot-free for expressing his views, to bring the case before the Supreme Court.
In 2005 the Supreme Court, invoking the ECHR that applies to all party states (among them Finland too), upheld Pastor Green’s right to express his views.
Then, « [r]esponding to the sentence, Sören Andersson, the president of the Swedish Federation for Lesbian, Gay, Bisexual and Transgender Rights (RFSL), said that religious freedom could never be used as a reason to persecute people. » (Wikipedia) This is a testimony of this person’s blatantly muddled notions since, even though there were no separation of Church and State in Sweden (there is a national Lutheran church), expressing one’s negative views about homosexuality from outside the national church and state in no way can be construed (contrived) as persecution of homosexuals, and on the contrary it was Pastor Green’s conviction for his speech that was persecution – state persecution (endorsed by RFSL), until the Supreme Court overturned the conviction.
I ask the Finnish courts regarding Päivi Räsänen to uphold Sweden’s interpretation of the ECHR and not to make an empty nutshell of the Convention.
Après avoir été condamné à un mois de prison pour des propos sur l’homosexualité prononcés lors d’un prêche, le pasteur Åke Green fut relaxé en appel et la Cour suprême, saisie par le procureur insatisfait de cette relaxe, confirma le jugement d’appel : Åke Green avait été condamné injustement compte tenu du respect des articles 9 et 10 de la CEDH s’imposant aux autorités suédoises à l’encontre des dispositions du code pénal suédois.
Dans ce passage en anglais, je rappelle également que le président de la fédération suédoise des organisations LGBT protesta publiquement contre l’arrêt de la Cour suprême en contestant que la liberté religieuse puisse être utilisée à des fins de persécution. À quoi je réponds que des propos tenus en dehors de l’État et/ou de l’Église nationale (il existe en Suède une église luthérienne nationale dont le statut est encore plus ou moins, mais moins qu’au Danemark, celui d’une Église d’État, cependant le pasteur Green appartient à une autre dénomination, sans lien avec l’État) ne pouvaient être considérés comme de la persécution mais que c’est au contraire la condamnation du pasteur Green qui était de la persécution d’État (une persécution approuvée par la fédération suédoise LGBT). – Je considère du reste que même de simples propos tenus dans des positions gouvernementales ou ecclésiastiques dans une Église d’État ne seraient pas non plus de la persécution, car des paroles ne sont pas encore des actes, une politique.
Voici les propos tenus par le pasteur Green tels que cités et incriminés par le procureur suédois, quatre passages en tout. (Je les donne à lire dans ma traduction ; le texte original est renvoyé à la fin du billet.)
(1)
« La légalisation des relations sexuelles entre un homme et un homme ou entre une femme et une femme ne peut produire que des catastrophes sans pareilles. Nous en voyons déjà les conséquences. Nous le voyons avec l’épidémie du sida. Certes, les personnes malades du sida ne sont pas toutes homosexuelles mais cette épidémie est d’abord apparue, à un moment, parmi ces dernières, et depuis lors d’autres personnes peuvent naturellement être infectées à leur tour par cette horrible maladie sans pour cela avoir quoi que ce soit de commun avec ce qui se cache derrière, en termes d’homosexualité. »
« La Bible nous offre des enseignements au sujet de ces déviances (abnormiteter : anormalités). Les déviances sexuelles sont une profonde tumeur cancéreuse dans le corps social. Le Seigneur sait que les personnes déviantes sexuellement en viennent y compris à violer des bêtes. Même les bêtes ne sont pas à l’abri des désirs sexuels de l’homme et du feu qui brûle en lui. »
« Corrupteurs d’enfants. Déjà à l’époque où la Bible fut écrite, le Seigneur savait ce qui se passerait. Nous l’avons vu et nous le voyons et nous en sommes horrifiés. Paul parle dans la première épître aux Corinthiens, un et dix, des pervers. Le mot pervers est une traduction du texte original, qui parle de ‘ceux qui couchent avec des garçons’. Ceux qui couchent avec des garçons sont les pervers dont parle la Bible. Je tiens à souligner que les homosexuels ne sont pas tous pédophiles. Les homosexuels ne sont pas tous des pervers. Mais en ouvrant la porte des domaines interdits, on permet au vice de prendre racine dans l’esprit. Et celui qui est aujourd’hui un pédophile ne l’a pas toujours été mais a commencé par changer ses manières. C’est de cette façon que cela commence. Et être fidèle dans une relation homosexuelle n’est guère mieux, en aucune façon, que de changer de partenaire chaque jour. Ce n’est guère mieux, c’est tout aussi abject aux yeux de Dieu. »
« C’est librement que l’on renonce à la pureté pour adopter l’impureté. Ils changent en conscience, dit Paul. L’homosexualité est quelque chose de malade. C’est une pensée saine et pure changée en pensée contaminée. C’est un cœur sain changé en cœur malade. C’est ainsi que ça se passe : un corps sain qui a été dévasté en raison d’un retournement, dit Paul… L’homosexualité est quelque chose que l’on choisit, réponds-je. On la choisit. On ne naît pas dans cet état, on le choisit, tout simplement. »
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Le procureur suédois a considéré que ces paroles étaient de l’incitation à la haine envers les homosexuels. La Cour suprême ne l’a pas suivi et c’est ce qui fait jurisprudence.
Il est toujours difficile de tirer des conclusions certaines de ce genre d’affaires car les juges rappellent sans cesse que c’est une appréciation en contexte, de sorte que, si nous disions qu’il est depuis cet arrêt licite en droit suédois de dire par exemple que « l’homosexualité est quelque chose de malade », ce serait peut-être encore trompeur car c’est toujours une affaire de contexte. Or la libre appréciation du contexte tend aussi toujours fortement à l’arbitraire. Comme je l’ai déjà fait remarquer ailleurs, les professionnels du droit ne sont pas d’accord et ne peuvent être d’accord sur ce qu’il est permis de dire avec des lois comme celle qui considérée (ici le procureur a eu un juge avec lui et deux contre lui), car on ne peut tout de même pas faire comme certains politiciens français et laisser croire que ce sont des opinions en tant que telles qui sont condamnables pénalement, à savoir, ici, ce que les mêmes politiciens appellent « l’homophobie » et qui n’est autre qu’une certaine opinion sur l’homosexualité, en l’occurrence une opinion négative. Ou bien on est libre d’avoir une opinion sur l’homosexualité et alors cette opinion peut être négative, ou bien on n’est pas libre et dans ce cas c’est une opinion sur l’homosexualité qui est condamnée en tant que telle et non simplement les propos injurieux ou autrement haineux qui pourraient en découler.
Or, en raison de ces contextualisations permanentes ne pouvant faire l’objet d’aucune définition, toutes ces lois de hate speech condamnent en réalité, partout où elles existent, certaines opinions, ce qu’elles ne sont pas supposées faire dans des sociétés qui défendent une liberté chèrement acquise. C’est pourquoi des gens comme les politiciens français ne s’embarrassent guère de dialectique subtile : pour eux, ce sont des opinions qui sont condamnées quoi qu’en dise notre Constitution. Mais un juge doit être dialecticien et c’est pourquoi il cherche à draper son arbitraire, le plus souvent, dans des argumentations balancées censées montrer qu’il a bien tenu compte de la liberté d’expression en condamnant l’expression d’une pensée. Tout cela relève d’une division du travail dans l’enfumage : les politiciens vendent ces lois comme autant de moyens de bâillonner des opinions, la justice administre des sentences comme si ces lois ne visaient pas les opinions elles-mêmes. Pour toutes ces raisons, de telles lois ne peuvent être dites avoir la clarté suffisante demandée à la loi pénale pour garantir droits et libertés. La lettre de ces lois est peut-être claire mais leur application ne l’est pas : les dissensions entre professionnels du droit ne portent pratiquement jamais, dans ce genre d’affaires, sur les faits, la personne reconnaît avoir tenu les propos incriminés, sa défense porte sur l’application de la loi aux faits, c’est-à-dire de son application aux propos tenus. Tant de dissensions avec tant de certitude quant aux faits, c’est la preuve que ces lois sont pourries.
Les paroles du pasteur Green auront, je pense, fait bondir plus d’un lecteur français, pour qui c’est de la haine à l’état pur qui se trouve exprimée là. La Cour suprême suédoise n’a aucune raison non plus de croire qu’il se trouvera des homosexuels que de telles paroles laisseront indifférents. Cependant, elle a jugé que ce n’était pas du hate speech et elle a même, nous allons le voir, catégoriquement exclu que cela puisse en être.
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Avant d’en venir au jugement lui-même, voyons les arguments de la loi sur l’incitation à la haine tels que la Cour les résume et tels que le gouvernement suédois les a présentés au moment du débat législatif en 2003. (Je cite ces arguments dans ma traduction ; l’original se trouve en fin de billet.) Le lecteur comprendra qu’on est loin de la France. L’accumulation des réserves exprimées devant cette atteinte à la liberté d’opinion montre que l’on prend cette dernière très au sérieux. En France, cette préoccupation est comparativement inexistante.
(2)
« Au sujet de la modification de la loi, le chef d’accusation décrit par les termes ‘qui exprime de la haine (uttrycker missaktning)’ a été discuté. Ce chef d’accusation a été introduit en 1970 et a été largement employé dans la pratique. Cependant, toute parole péjorative ou humiliante n’est pas concernée. Les propos ne pouvant être considérés comme outrepassant les limites d’une critique factuelle de certains groupes sont en dehors du domaine prohibé. Pour qu’une condamnation puisse être prononcée, il faut que soit parfaitement clair que le propos outrepasse les limites d’une discussion factuelle et objective au sujet du groupe en question. Le respect de la liberté d’opinion et du droit de critique ne peut certes servir de défense à des propos exprimant de la haine envers un groupe, en raison par exemple de l’appartenance à une nationalité, et qui pour cette raison seraient de peu de valeur. Le domaine illicite ne saurait cependant recevoir une extension telle qu’il puisse être appliqué à une discussion factuelle ou à une critique de l’homosexualité. On ne saurait admettre que la criminalisation des propos représente un obstacle à la liberté d’opinion ou une mise en cause de la libre formation des opinions. En outre, la liberté de la recherche scientifique doit être garantie. »
On est très loin de la France. Chez nous, un Premier ministre en exercice peut tweeter que « le racisme est un délit » et un Président de la République en exercice que « l’antisémitisme est un crime » sans que cela fasse bondir qui que ce soit parmi les commentateurs. En réalité, dans un régime constitutionnel, le racisme, l’antisémitisme ne sont ni des crimes ni des délits puisque ce sont des opinions et que les opinions sont libres. Seuls certains propos pouvant éventuellement découler de ces opinions sont condamnés (au titre, entre parenthèses, de délits et non de crimes). – L’excuse selon laquelle il ne s’agit pas, dans ces tweets, de langage juridique mais d’hyperboles vaut ce qu’elle vaut. Il est certain qu’on ne peut demander à des gens ignorants du droit de comprendre la portée juridique de leurs paroles.
Pour ce qui est de notre sujet, un document du ministère de l’intérieur indiquait que « l’homophobie n’est pas une opinion, c’est un délit ». L’administration étant hiérarchiquement soumise aux élus, il n’est pas étonnant qu’elle ressorte les mêmes mensonges ou absurdités que ceux-ci mais c’est encore plus consternant car on attend de l’administration qu’elle adopte en toutes circonstances le langage du droit plutôt que de recourir à des hyperboles fallacieuses. Or une opinion ne se définit pas par un contenu puisque tout contenu peut être une opinion. Si le gouvernement souhaite interdire une ou des opinions, il est contraint de procéder de la manière suivante : d’abord supprimer la liberté d’opinion, ensuite interdire par la loi telle ou telle opinion. Le gouvernement à la tête de l’administration qui a produit le document cité n’ayant, pas plus qu’aucun autre avant lui, supprimé la liberté d’opinion, l’homophobie reste libre. L’idée que certains contenus seraient des opinions et d’autres non est une infamie, car comment l’État pourrait-il garantir la liberté d’opinion s’il lui suffisait, pour supprimer des opinions, de décréter que ce n’en sont pas et que par conséquent la liberté ne s’y applique pas ? En réalité, même les « propos homophobes » ne sont pas en tant que tels un délit : il faut que les propos soit « injurieux », ou « diffamatoires », ou « incitent à la haine », etc. Je ne sais trop si l’on peut logiquement penser qu’un propos puisse être homophobe, c’est-à-dire contre l’homosexualité, sans être injurieux ou diffamatoire ou autre ; je sais seulement que, si c’est impossible, la loi condamne bel et bien une opinion, malgré la constitutionnelle liberté d’opinion.
Or, pour la Cour suprême suédoise, c’est possible, on peut critiquer ouvertement l’homosexualité sans tenir des propos illicites : « Le domaine illicite ne saurait cependant recevoir une extension telle qu’il puisse être appliqué à une discussion factuelle ou à une critique de l’homosexualité (en saklig diskussion om eller kritik av homosexualitet). » Qu’une « critique factuelle » et licite de l’homosexualité soit de nature à être reçue sans peine émotionnelle de la part de personnes homosexuelles est en soi douteux, et les propos du pasteur Green déclarés licites par la Cour avaient d’ailleurs suscité une émotion certaine dans les milieux homosexuels, qui réclamaient et applaudirent la sanction pénale. C’est, selon leurs représentants associatifs, ce que demandait leur balance émotionnelle. La Cour suprême suédoise indique que les états émotionnels des groupes faisant l’objet d’une critique licite ne sont pas à prendre en considération dans l’application de la loi. Je peux par conséquent, en droit, développer une critique licite sans me préoccuper des larmes des membres appartenant au groupe que je critique.
Une fois tirée cette conclusion indubitable, se pose alors la question : quel est donc l’objet de la loi ? Pourquoi certaines critiques sont-elles licites et d’autres non si elles doivent toutes faire subir une sorte de préjudice moral aux membres des groupes critiqués ? La jurisprudence de la Cour montre en creux qu’il n’existe aucune justification à l’adoption d’une telle loi, car si la loi vise à prévenir un préjudice moral elle devrait prendre en considération toutes les situations créant ce préjudice. Les restrictions apportées à une liberté fondamentale doivent, aux termes de la Convention européenne des droits de l’homme, répondre à une nécessité sociale. Celle-ci, nous dit en substance la Cour suédoise, est inexistante. D’un autre côté, si je ne laisse aucune latitude à la critique de tel ou tel groupe, je supprime en réalité une opinion purement et simplement, ce qui n’est pas non plus permis en raison de la liberté d’opinion chèrement acquise. Il ne reste donc que le moyen dérisoire et pathétique de définir certaines opinions comme n’étant pas des opinions.
Poursuivons l’analyse des limites de la loi. « [T]oute parole péjorative (nedsättande) ou humiliante (förnedrande) n’est pas concernée », c’est-à-dire n’est pas illicite. Cela renforce l’idée précédemment développée que toute parole susceptible de troubler l’équilibre émotionnel des personnes du groupe critiqué ne saurait être condamnable sans d’autres qualifications qui la fassent tomber sous le coup de la loi. J’ai le droit de tenir des propos péjoratifs et/ou humiliants à l’encontre d’un groupe : ce n’est pas cela, en tant que tel, qui est condamné.
« Pour qu’une condamnation puisse être prononcée, il faut que soit parfaitement clair (fullt klart) que le propos outrepasse les limites d’une discussion factuelle et objective au sujet du groupe en question. » Il est certain, au vu de ce qui précède, que pour la Cour une discussion peut être factuelle et objective tout en comportant des termes ou des paroles péjoratives ou humiliantes, c’est-à-dire que cette critique factuelle peut être passionnée et même emportée, ou bien encore blessante de façon réfléchie. En outre, si l’on peut encore penser, dans ces conditions, que des limites puissent être jamais outrepassées, il faut que ce soit, non pas simplement sensible, ni même simplement manifeste, mais « parfaitement clair », ce qui signifie que le moindre doute à ce sujet doit empêcher une condamnation. On sait qu’en matière pénale « le doute profite à l’accusé » ; ce principe n’a aucune réalité en droit français, où c’est l’intime conviction du juge qui est déterminante (et elle ne saurait justement s’appliquer que dans les cas douteux), mais je crois que la formule employée par la Cour suédoise a du sens dans ce pays, et quand quelque chose doit être « parfaitement clair » dans le contexte d’une interprétation sémantique, je ne vois d’autres possibilités de poursuites que dans l’aveu d’un prévenu qui demanderait lui-même sa condamnation.
Je passe rapidement sur la « liberté de la recherche scientifique (vetenskapens frihet) » qui doit être garantie, si bien que la critique factuelle des homosexuels ou d’autres groupes pourrait être, selon la Cour, confirmée par une libre recherche.
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Saisi par le Conseil des Églises libres de Suède (Sveriges Frikyrkosamråd) sur la menace que la loi faisait peser sur des prédicateurs chrétiens, le gouvernement ajouta encore les garanties suivantes, que rappelle la Cour dans son arrêt. (Ici dans ma traduction ; original en fin de billet.)
(3)
« L’objectif n’est pas de faire obstacle au raisonnement ni aux discussions concernant l’homosexualité, la bisexualité ou l’hétérosexualité, que ce soit à l’église ou en d’autres lieux de la société. Il doit aussi être possible aux homosexuels et aux autres de répondre, dans un débat libre et ouvert, à des conceptions erronées et de les corriger, afin de s’opposer de cette manière à des préjugés qui risquent autrement de se maintenir dans l’esprit des personnes condamnées.
L’actuelle législation sur l’incitation à la haine envers un groupe comporte aussi des limites, de façon que tout propos comportant des jugements envers un certain groupe ou toute marque de mépris n’est pas illicite. Les travaux préparatoires, entre autres, montrent que, pour qu’une condamnation puisse être prononcée, il faut que soit parfaitement clair que le propos outrepasse les limites d’une discussion factuelle et objective au sujet du groupe en question. … Un certain champ de licéité doit être évidemment laissé à la critique ou à d’autres propos du même genre. »
Le gouvernement suédois a lui aussi pleinement conscience des nécessaires limites de la loi. Il ajoute l’argument selon lequel la libre discussion de l’homosexualité est un moyen de permettre de corriger des préjugés. Examinons cette affirmation. Les personnes critiques de l’homosexualité ont le droit d’exprimer leur point de vue dans les limites posées par la loi. Ces limites sont présentées, on l’a vu, comme laissant une très large latitude aux locuteurs, sont réellement présentées comme étant à peine des limites : je peux être péjoratif et humiliant, c’est-à-dire blesser des sentiments, il faut pour que je sois condamné qu’il soit « parfaitement clair » que j’outrepasse les limites d’une discussion factuelle, où j’ai le droit d’être blessant, et je peux invoquer la liberté de la recherche. Présentée ainsi, la loi ne peut guère être dissuasive. Or ne l’est-elle pas au contraire bien plus que le juge ne paraît le souhaiter ? La critique de l’homosexualité fait-elle partie du paysage médiatique, littéraire, intellectuel, scientifique, artistique ? fait-elle partie du débat public ? Poser la question, c’est y répondre. Les Suédois n’auraient donc aucune critique à formuler vis-à-vis de l’homosexualité, étant convaincus d’avoir le droit de le faire dans les limites d’une discussion factuelle ? Je m’interroge : la loi avait-elle la moindre utilité si personne ne songeait à critiquer l’homosexualité ? En France, on parle, pour ces lois, de « contentieux de masse » : tout le monde ou presque, semble-t-il, veut critiquer les catégories que ces lois protègent, dont les homosexuels, seulement ils ne savent pas se contenir dans les limites d’une critique factuelle. Plaisanterie à part, la loi suédoise est massivement dissuasive et c’est ce qu’il est impossible de comprendre en lisant les éléments d’information présentés par le gouvernement et par la Cour.
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Mais le plus étonnant est que la Cour suprême de Suède, après avoir peint ce tableau idyllique de la loi suédoise éminemment respectueuse de la liberté d’opinion et d’expression, considère néanmoins qu’elle ne va pas assez loin dans le respect des libertés fondamentales et l’écarte au profit d’une application directe de la Convention européenne des droits de l’homme.
(4)
« Dans une appréciation générale des circonstances de l’espèce – avec à l’esprit la pratique de la Cour européenne –, il est clair d’emblée (till en början klart) dans le cas d’ÅG [Åke Green] qu’il ne s’agit pas de ce type de propos haineux que l’on appelle couramment hate speech. Cela vaut même pour celles de ses paroles qui peuvent être considérées comme allant le plus loin dans la description des déviances sexuelles comme un cancer, car le propos, éclairé par ce qu’il dit dans son prêche en relation à ceci, n’est pas de nature à pouvoir être perçu comme une incitation à la haine ou une justification de la haine envers les homosexuels. »
« Le terme de ‘haine’ (missaktning) dans la disposition relative à l’incitation à l’encontre d’un groupe ne saurait être considéré comme ayant une signification si dépourvue d’ambiguïté qu’un conflit de normes surgisse ici entre la Convention européenne et le code pénal [suédois]. Il résulte de ce qui précède que, d’après les travaux préparatoires, il est entendu que des propos tels que ceux que le procureur a relevés dans son acte d’accusation doivent être considérés comme exprimant de la haine au sens de la disposition. Cependant, l’une des raisons de l’incorporation de la Convention européenne en droit suédois a été le souhait de créer une base explicite pour permettre aux tribunaux nationaux d’appliquer directement la Convention. La Cour suprême a également indiqué dans plusieurs arrêts que les interprétations sur le sens d’une règle de droit élaborées au cours de procédures législatives ou d’origine jurisprudentielle doivent pouvoir être écartées lorsque l’exige l’interprétation exprimée dans les arrêts de la Cour européenne. Cela conduit à ce que la disposition sur la responsabilité relative à l’incitation à la haine envers un groupe doive être ici interprétée de manière plus restrictive que ce que suggèrent les travaux préparatoires de la loi, afin de parvenir à une application conforme à la Convention. »
Après tout ce que nous venons de dire, il est difficile de comprendre comment la Cour suprême a encore pu trouver la loi suédoise trop répressive car, si l’on s’en tient aux travaux préparatoires dont elle parle, c’est-à-dire à ce que nous avons discuté, la loi apparaît au contraire extrêmement soucieuse de préserver la liberté d’opinion et d’expression. On notera par ailleurs un fort élément de contexte dans son arrêt, à savoir la prédication religieuse, peut-être de nature à vider cette jurisprudence de toute portée en dehors de ce contexte particulier.
La Cour suédoise a une lecture de la CEDH à ses articles 9 (liberté religieuse) et 10 (liberté d’expression) et des arrêts de la Cour européenne extrêmement protectrice puisqu’elle permet au pasteur Green de traiter licitement l’homosexualité de « quelque chose de malade », de « pensée contaminée » et, avec les autres déviances sexuelles, de « tumeur cancéreuse dans le corps social », propos ayant conduit des manifestants outrés à brandir des pancartes « Je ne suis pas une tumeur cancéreuse » (Jag är ingen cancersvulst).
La Cour rappelle que, dans les travaux préparatoires à la loi, le Comité constitutionnel (Konstitutionsutskottet) a en gros écarté l’idée de règles spécifiques au contexte de prédication religieuse. Il faut croire que c’est ce qui a décidé la Cour suprême à trouver la loi nationale trop répressive. Cependant, le même comité déclarait, selon la Cour elle-même, que la citation de sources religieuses dans le contexte d’une prédication, accompagnée de la simple admonestation à suivre la direction morale de ces sources, est licite : cf. (5) en fin de billet. La Cour trouve donc, conformément aux arguments du procureur, que ce n’est pas ce qu’a fait le pasteur Green ; autrement, elle aurait pu défendre ce dernier à partir des déclarations du comité.
Par ailleurs, les restrictions apportées à la généralité de son propos par le pasteur (« les personnes malades du sida ne sont pas toutes homosexuelles », « les homosexuels ne sont pas tous pédophiles », « pas tous des pervers ») sont écartées comme moyen de défense tant par le procureur que par la Cour. Le pasteur aurait donc pu se passer de celles-ci, est-on conduit à penser, sans que cela le rendît coupable aux yeux de la Cour. Celle-ci considère que le terme de « haine » (missaktning) de la loi nationale doit recevoir une acception plus restreinte en raison de la jurisprudence européenne, et que c’est cette jurisprudence qu’auraient dû suivre le procureur et le tribunal, dont les arguments sont dépourvus de toute portée pour l’avoir ignoré.
Selon la Cour suprême, la liberté religieuse de l’article 9 CEDH ne peut aux termes de la Convention être limitée : « Denna frihet får inte begränsas. » Elle rappelle que des limites aux libertés fondamentales sont permises en cas de conflits entre libertés ; dans ce cas, toutefois, à la liberté religieuse doit être accordée une considération toute particulière. La Cour considère ainsi que la liberté d’expression de l’article 10 CEDH n’est pas protégée avec la même rigueur : « När det gäller yttrandefriheten … så får den i viss utsträckning begränsas genom lag. » Elle souligne par ailleurs que la Constitution suédoise garantit les deux libertés de la même manière tandis que la Convention permettrait des limitations plus strictes de la liberté d’expression. De sorte que, puisque la Cour suprême a cru bon de recourir à la Convention, c’est qu’elle considère que c’est la liberté religieuse de l’article 9 qui a été violée par le tribunal plutôt que la liberté d’expression de l’article 10.
(On se retrouve donc devant un état du droit comparable à celui en vigueur aux États-Unis. L’affirmation est paradoxale car il n’existe pas de lois condamnant le hate speech aux États-Unis : elles ont toutes été déclarées inconstitutionnelles. Cependant, les lois dites Civil Rights Acts interdisent les pratiques discriminatoires dans l’administration publique ainsi que dans plusieurs domaines du secteur privé lucratif, à savoir l’emploi et le logement, mais aussi, dans une moindre mesure, le commerce ; tous autres intérêts privés, par exemple un club ou une église, ne sont pas soumis à ces règles. Une église peut ainsi avoir des activités commerciales, loger et employer des gens sans être soumise à la législation antidiscriminatoire. Il ne faut donc pas s’étonner de voir fleurir ici et là d’étranges dénominations comme la United Church of Adolf Hitler, par ailleurs parfaitement légale, tout comme le ou les partis nazis américains, puisque les États-Unis prennent la liberté d’opinion au sérieux.)
Selon la Cour suédoise, l’article 9 CEDH isole le cas spécial de la prédication religieuse. Elle invoque à l’appui de cette affirmation l’arrêt Kokkinakis c. Grèce de 1993. Elle discute ensuite divers arrêts de la Cour EDH relatifs à l’article 10 dont j’ai bien du mal à voir comment ils peuvent la conduire à sa conclusion, que nous connaissons. L’arrêt Gündüz c. Turquie, par exemple, est cité pour dire que l’État dispose d’une certaine « marge d’appréciation » et peut interdire certains propos au nom de valeurs morales ou religieuses. Elle rappelle également que la Cour européenne trouve permis d’interdire le hate speech. Dans l’arrêt Feridun Yasar et autres c. Turquie, la Cour EDH a, nous dit cependant le juge suprême suédois, refusé de voir du hate speech ou de l’appel à la violence dans un discours politique condamné par l’État turc. C’est alors que la Cour suédoise revient au pasteur Green pour dire, à la citation (4), que, s’agissant des paroles poursuivies par le procureur, il était « clair d’emblée » que ce n’était pas du hate speech – une conclusion à laquelle je dois dire que rien ne nous prépare. La seule explication véritablement dialectique qui soit apportée porte sur le contexte de prédication (« éclairé par ce qu’il dit dans son prêche en relation à ceci »).
Elle complète par deux autres points qui apportent plus de confusion que de clarté. Le premier est que les paroles du pasteur ne sont pas aussi dépréciatives que le passage de la Bible en question (« inte sägas vara så mycket nedsättande än ordalagen i aktuella bibelställan »). S’agit-il de dire que, dans le contexte de la foi chrétienne, des propos ne peuvent pas être considérés comme du hate speech à moins qu’ils n’aillent au-delà des dépréciations contenues dans la Bible ? Le second point est que la Cour EDH trouverait certainement disproportionnée la sanction prononcée, ce qui est fort possible mais étranger à la question de savoir si les paroles du pasteur Green sont du hate speech ou non. Est-ce à dire que le juge suédois aurait accepté l’argumentation du procureur et du tribunal ayant trouvé Green coupable si ce dernier n’avait été condamné qu’à une amende et non à de la prison ?
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En conclusion, si l’on ne veut pas voir dans l’arrêt Åke Green la création d’un privilège ecclésiastique, une immunité des prédicateurs religieux face aux lois d’incitation à la haine, ce qui serait une interprétation étrange de l’article 9 CEDH, il faut, comme par ailleurs nous ne pouvons considérer que la prégnance du contexte dans les affaires de « droit de la presse » (pardon d’employer une expression française absurde) empêche irrémédiablement toute jurisprudence, toute élaboration du droit par stare decisis, il faut, dis-je, nécessairement conclure que ce genre de paroles ou des paroles de ce genre – le genre de celles prononcées par le pasteur Green – ne sont pas du hate speech et sont au contraire protégées par la CEDH.
Comme j’ai commencé par citer l’ex-ministre finlandaise Päivi Räsänen, inquiétée pour ses critiques de l’homosexualité et dont le procès m’a conduit à discuter l’affaire du pasteur Green en Suède et son acquittement quinze ans plus tôt, j’ai le plaisir d’informer mon lecteur que Mme Räsänen a elle-même été acquittée en mars 2022 de tous les chefs d’accusation portant contre elle. Le procureur finlandais a cependant fait appel.
Nous aurons sans doute l’occasion de discuter de cette nouvelle jurisprudence, dont on peut déjà dire qu’elle tourne elle aussi principalement, plus encore que l’arrêt Åke Green, autour de la question religieuse puisque la cour n’a pas suivi le procureur au motif que les tribunaux ne sont pas compétents pour « interpréter les concepts bibliques ». Ceci se transpose nécessairement aux sources scripturaires de toute autre religion. – Même en limitant strictement ces deux arrêts au contexte religieux, ils manifestent clairement, à eux seuls et s’il en était besoin, que le traitement administratif des « prêches radicaux » par les autorités françaises est, sous couvert de lutte contre le terrorisme, une abomination. Nous aurons sûrement l’occasion d’y revenir.
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TEXTE ORIGINAL SUÉDOIS
(1)
« Genom att legalisera då partnerskap mellan män och män och mellan kvinna och kvinna, så kommer det att skapa katastrofer helt enkelt. Utan dess like. Vi ser följderna redan av det här. Vi ser det genom AIDS somme sprider sig. Nu är inte alla AIDS-smittade homosexuella, men det har uppstått på grund av detta en gång i tiden och sedan kan naturligtvis oskyldiga människor bli smittade av denna hemska sjukdom utan att för den skull ha någonting med det som ligger bakom i detta vad gäller homosexualitet. »
« Bibeln tar upp här och undervisar om dessa abnormiteter. Och sexuella abormiteter är en djup cancersvulst på hela samhällskroppen. Herren vet att sexuellt förvridna människor kommer till och med att våldta djuren. Inte heller djuren går fria från människans sexuella behov och branden som är tänd i en människa. Utan till och med det kan ägna sig åt. »
« Gosseskändare. Redan då bibeln skrevs visste Herren vad som skulle ske. Vi har upplevt det här och upplever det och vi förfasar oss över det. Och Paulus talar i första korintierbrevet ett och tio om perversa människor. Och perversa människor är översatt från grundtexten som säger ‘en som ligger med pojkar’. En som ligger med pojkar är perversa människor som då bibeln talar om. Nu vill jag understryka att alla homosexuella är inte pedofiler. Och alla homosexuella är inte perversa. Men man öppnar ändå porten till förbjudna områden och låter synden få fäste i tankelivet. Och den som är pedofil i dag börjar inte som sådan. Utan började helt enkelt med att byta sitt umgänge. Det var så det började. Och att vara trogen i ett homosexförhållande är inte på något sätt ett bättre förhållande än där man byter partner varenda dag. Det är inget bättre förhållande. Utan det är lika föraktligt i Guds ögon. »
« Frivilligt lämnar jag renheten och tar emot orenheten. Medvetet bytte de säger Paulus. Homosexualitet det är någonting sjukt. Det är alltså en frisk och ren tanke som blivit utbytt mot en besmittad tanke. Där ett friskt hjärta som blivit utbytt mot ett sjukt hjärta. Det är så man har gjort. Där en frisk kropp som har blivit ödelagd på grund av ett byte säger Paulus… Är homosexualitet något man väljer, svar ja. Man väljer det. Man är inte född till det. Man väljer det här helt enkelt. »
(2)
I samband med lagändringen diskuterades ansvarsbestämmelsens rekvisit ‘uttrycker missaktning’. Detta rekvisit infördes år 1970 och har i praxis fått en vidsträckt tillämpning. Alla uttalanden av nedsättande eller förnedrande natur omfattas dock inte. Uttalanden som inte kan anses överskrida gränserna för en saklig kritik av vissa grupper faller utanför det straffbara området. För straffbarhet krävs att det är fullt klart att uttalandet överskrider gränsen för en saklig och vederhäftig diskussion rörande gruppen i fråga. Hänsyn till opinionsfriheten och kritikrätten får visserligen inte åberopas som skydd för uttalanden som uttrycker missaktning mot en hel folkgrupp på grund av den t.ex. tillhör en viss nationalitet och av denna anledning skulle vara mindre värt. Det straffbara området skall dock inte sträckas så långt att det kommer att omfatta även en saklig diskussion om eller kritik av homosexualitet. Kriminaliseringen skall inte utgöra hinder mot opinionsfriheten eller ett hot mot den fria åsiktsbildningen. Vidare skall vetenskapens frihet bevaras.
(3)
Meningen är alltså inte att hindra resonemang och diskussioner om homosexualitet, bisexualitet eller heterosexualitet vare sig inom kyrkor eller på andra håll i samhället. Det måste också vara möjligt för homosexuella och andra att i en fri och öppen debatt bemöta och tillrättalägga felaktiga uppfattningar och på så sätt motverka fördomar som annars riskerar att konserveras och leva kvar i det fördolda.
Den nuvarande lagstiftningen om hets mot folkgrupp innehåller också begränsningar så att varje yttrande som innehåller omdömen om en viss grupp eller varje uttryck för missaktning är straffbelagt. Således sägs i förarbetena bl.a. att det för straffbarhet bör krävas att det är fullt klart att uttalandet överskrider gränsen för en saklig och vederhäftig diskussion rörande gruppen i fråga. … Ett visst utrymme för straffria kritiska eller liknande uttalanden måste självfallet finnas.
(4)
Vid en samlad bedömning av omständigheterna – mot bakgrund av Europasdomstolens praxis – i ÅGs fall är det till en början klart att det inte är fråga om sådana hatfulla uttalanden som brukar kallas hate speech. Detta gäller även det av hans uttalanden som får betraktas som mest långtgående där sexuella abnormiteter beskrivs som en cancersvulst eftersom uttalandet, sett i belysning av vad han sagt i samband med detta i sin predikan, inte är sådant att det kan anses uppmuntra till eller rättfärdiga hat mot homosexuella. (…)
Uttrycket missaktning i bestämmelse om hets mot folkgrupp kan inte anses ha en så entydig innebörd att en verklig lagkonflikt här uppkommer mellan Europakonventionen och brottsbalken. Av det förut anförda följer visserligen att det enligt förarbetena är avsett att yttranden av sådant slag om dem som riksåklagaren har åberopat i den justerade gärningsbeskrivningen skall anses ge uttryck för missaktning i bestämmelsens mening. Ett av skälen för att inkorporera Europakonventionen i svensk rätt har emellertid varit att skapa ett uttryckligt underlag att direkt tillämpa konventionen vid svenks domstol. Högsta domstolen har också i flera avgöranden slagit fast att sådana uttalanden om en lagregels innebörd som har gjorts i lagförarbeten eller rättspraxis måste kunna frångås när detta krävs enligt den konventionstolkning som kommer till uttryck i Europadomstolens avgöranden. Det anförda leder till att ansvarsbestämmelsen om hets mot folkgrupp i detta fall bör tolkas mera restriktivt än vad dess förarbeten ger vid handen för att en konventionsenlig tillämpning skall uppnås.
(5)
När det gäller predikosituationer skulle det enligt utskottets mening normalt komma att ligga utanför det straffbara området att citera religiösa urkunder och endast uppmana åhörarna att följa urkundernas inriktning.
