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Par-delà le rien et le banal
La femme de ménage polonaise de C. retourne finalement en Pologne où, avec son compagnon resté là-bas, elle a fait construire une maison. La maison vient des euros de son salaire de femme de ménage en France plus que des zlotys de son compagnon. Voilà le genre de projet de vie qu’un Gilet jaune pitoyablement franco-français ne pourra jamais avoir. Même les Népalais au Qatar font de tels projets de carrière courte et, quand ils ne tombent pas d’un échafaudage de gratte-ciel entre-temps, les réalisent. Qui est le plus à plaindre ?
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Les pays du Golfe emploient, on le sait, beaucoup de main-d’œuvre étrangère, principalement en provenance du sous-continent indien. Dans bien des cas, ces travailleurs migrants optent pour une stratégie de carrières courtes, avant de retourner s’établir définitivement dans leur pays d’origine au bout de quelques années (10-15 ans), car les revenus en riyals ou autres monnaies du Golfe leur permettent, en raison des différences internationales de pouvoir d’achat, d’acheter un petit commerce chez eux et d’en vivre.
Les capitalistes des économies d’accueil sont bénéficiaires, les travailleurs migrants également, profitant des différences internationales de pouvoir d’achat, mais pas les travailleurs des pays d’accueil. Car ces migrants servent aux capitalistes de main-d’œuvre à bas coût.
Les syndicats (là où ils existent, ce qui n’est pas le cas dans les monarchies du Golfe) essayent de faire en sorte que les travailleurs migrants ne soient pas autant exploités, non seulement pour ces travailleurs eux-mêmes (bien que ce soit en réalité le prix à payer pour une carrière courte avec forte rémunération dans les termes de l’économie d’origine qui est à la fois le point de départ et le point d’arrivée) mais aussi pour l’ensemble des travailleurs du pays d’accueil, car tout travailleur qui accepte des conditions de travail indignes fait ainsi pression sur ses camarades pour qu’ils acceptent à leur tour de telles conditions s’ils ne veulent pas être évincés du marché du travail.
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Dans l’affaire Steve, noyé dans la Loire à Nantes, la police cherche à se disculper. Quatorze personnes du même rassemblement festif sont tombées dans le fleuve à cause de la charge de police, et les porte-paroles de la police sont en train de nous expliquer que le seul qui ne peut plus dire ce qui lui est arrivé serait tombé, lui, pour une autre cause. Et les médias considèrent hypocritement qu’il n’y a pas lieu de présumer que Steve est tombé dans le fleuve par la même cause que les autres.
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La France est un des pays du Conseil de l’Europe les plus mal classés en matière de liberté d’expression, l’un des plus condamnés dans ce domaine par la Cour européenne des droits de l’homme, avec la Russie et la Turquie. Et ce depuis des années. Notre droit en la matière, c’est la loi de 1881 sur la presse, mais aménagée par les « lois scélérates » quelques années plus tard, à la suite des attentats anarchistes. Depuis lors, on n’a fait que suivre la pente des lois scélérates chaque fois que nos élus ont cru bon par là de satisfaire tel ou tel lobby ou parce que cela les met eux-mêmes à l’abri des critiques. La prochaine étape, actuellement discutée par un comité Théodule à la demande de la garde des sceaux, est de sortir des pans entiers du droit de la presse pour les verser au droit pénal commun, ce qui veut dire mandats d’arrêt, gardes à vue, perquisitions, comparutions immédiates, etc, pour des propos ou des écrits (cela a déjà été fait pour l’« apologie de terrorisme »). Ainsi, un auteur sera jugé par le juge habitué à envoyer au mitard délinquants et criminels de droit commun.
Une autre étape sera –c’est demandé par certains– de criminaliser le « complotisme », si bien que la ligne officielle du gouvernement ou de l’administration sur n’importe quel sujet ne pourra plus être contestée. D’ailleurs, un préfet de police vient, illégalement à mon sens, de refuser la prolongation du permis de séjour d’un Marocain en raison de messages « complotistes » publiés sur Facebook. Une loi suivra, c’est certain.
Les États-Unis ont raison de se dire le pays le plus libre du monde. Le droit américain de la liberté d’expression (First Amendment) est un monument de la raison humaine. Il reste quelques reliques du passé, comme l’Espionage Act de 1917 qui permet aujourd’hui de harceler judiciairement Julian Assange, mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. D’ailleurs, une cour fédérale américaine vient de rejeter une plainte contre Wikileaks en indiquant que la publication des documents par Wikileaks était protégée par le Premier Amendement. J’avais bon espoir que ce fût le cas et j’ai eu l’occasion de publier des tweets avec de la jurisprudence de la Cour suprême américaine qui pouvait s’appliquer au cas d’Assange dans le sens d’un abandon des poursuites ou d’une relaxe. Ce n’est pas encore le fin mot de l’histoire (malheureusement pour Assange) mais c’est une belle bataille de gagnée.
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La France figure dans le peloton de tête des pays du Conseil de l’Europe en ce qui concerne les condamnations pour violation de la liberté d’expression par la Cour EDH, c’est-à-dire que la 17e chambre correctionnelle spécialisée en « droit de la presse » (sic) est connue pour être particulièrement répressive si on la compare, non à la Corée du Nord ou à l’antiquité, mais à nos voisins (sans même parler des États-Unis : cf supra).
Il y a pourtant des avocats qui vous soutiennent mordicus que la 17e chambre n’est pas répressive ! Comme dans les autres milieux, la majorité des juristes français ne connaissent rien au-delà des Pyrénées.
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On me demande : « Pourquoi avoir tweeté ci ? pourquoi avoir tweeté ça ? pourquoi ? pourquoi ? » Quand j’étais aux États-Unis, mon amie Kate me dit un jour un adage de là-bas : « If you’ve got them, flaunt them », « Si vous les avez, montrez que vous les avez » (en sachant que flaunt est un mot fort qui indique l’ostentation : montrer ostentatoirement, faire parade de…) Elle parlait des seins d’une femme (elle n’ayant pas de poitrine). Je trouve amusant que ce soit une femme élevée dans un milieu mennonite (les Mennonites sont des anabaptistes, dont une des branches les plus radicalisées sont les célèbres Amish) qui m’ait sorti cela. Elle voulait dire que les Américaines plantureuses mettent volontiers leur poitrine en valeur par leur façon de se vêtir. J’étais prêt à adopter telle quelle cette maxime comme devise pour moi, bien que ce fût, comme je le découvris entre-temps, une version un peu aménagée de l’adage réel, qui va au-delà des fortes poitrines : « If you’ve got it, flaunt it » (Si vous l’avez, montrez que vous l’avez). Un talent, une qualité quelconque ne doivent pas rester cachés. C’est ma réponse désormais : quand on a de l’esprit, on le montre, c’est pourquoi je tweete des traits d’esprit. C’est certes une entorse à la modestie que de se dire plein d’esprit, mais il est des cas, par exemple s’il s’agit d’un moyen de défense judiciaire, où l’immodestie est excusée.
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J’ai enfin trouvé un Boucharel célèbre. Et même deux : Jean et Henri, père et fils, anarchistes. Ici
Jean Boucharel et son fils Henri furent des militants anarchistes et syndicalistes ; le père, qui fut secrétaire du syndicat de l’Habillement, collabora au journal La Voix libertaire, organe de l’Association des fédéralistes anarchistes, dont le premier numéro parut en mai 1928 et le n° 394, le dernier, en juillet 1939. Il figurait comme « militant dangereux pour l’ordre public » sur la liste des anarchistes de Haute-Vienne établie le 1er juin 1935.
Son fils Henri, qui mourut à Limoges en novembre 1966, était libre-penseur, pacifiste, coopérateur ; il fut secrétaire du syndicat de l’Habillement affilié à la CGT-SR, membre en 1935 de la Commission administrative de l’UL-CGTSR ; il fit partie du Comité de grève du bâtiment de Limoges en 1936 et de la délégation ouvrière chargée de négocier avec le patronat et fonda la société coopérative de production « Le Meuble ».
Hommage à Jean Maitron (1910-1987).
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« Le pape François prend position contre l’utilisation des procédures judiciaires dans les processus politiques et sociaux. Il dénonce les opérations multimédiatiques qui accompagnent ces persécutions. Il déclare que ces pratiques mettent en danger les démocraties. » (Tweet de Jean-Luc Mélenchon)
Et le pape cite le néologisme lawfare, le warfare par l’appareil judiciaire.
La pseudo-indépendance du pouvoir judiciaire tellement évidente en France (« spécificité française » du ministère public) place celle-ci aux premiers rangs des démocraties en danger – et en réalité des pseudo-démocraties. « Dans les pays anglo-saxons, le troisième pouvoir est confié à des organes absolument indépendants aussi bien des gouvernants que des gouvernés, de façon à réaliser une justice aussi exacte que possible. En France, malgré toutes les doctrines officielles, les tribunaux sont considérés en fait depuis Napoléon comme une branche particulière de l’Administration, et le pouvoir juridictionnel est, au point de vue politique, une partie spéciale du pouvoir exécutif. » (Maurice Duverger, Les régimes politiques, 1965) Une réforme de la justice a-t-elle démenti ces paroles entre-temps ? Non.
Or l’utilisation des procédures judiciaires dans les processus politiques et sociaux est possible surtout grâce à la pénalisation de la parole : de fait, une telle pénalisation est prima facie une interférence illégitime dans les processus politiques et sociaux (voir la jurisprudence de la Cour suprême américaine).
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Ne pas attaquer la jurisprudence nationale dans un recours contre l’administration française est impossible pour quelqu’un qui doit dès le début annoncer qu’il a l’intention de saisir la Cour européenne des droits de l’homme le cas échéant. Car il devra la saisir en invoquant des défaillances du droit national et de son exercice en matière de droits de l’homme et de libertés fondamentales. Autrement dit, il doit arriver devant le juge national en le regardant droit dans les yeux et en lui disant : « Je vous conteste. » Si c’est de nature (pour des raisons psychologiques plutôt que juridiques) à faire échec à la requête au plan national, c’est un argument sérieux contre le juge national, mais cela conduit aussi à contester la procédure CEDH elle-même, à savoir le nécessaire épuisement des voies de recours internes et l’introduction d’un moyen CEDH devant le juge national dès le début de la procédure. Une telle organisation est la moins favorable possible au plein développement des dispositions de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. En réalité, le droit des libertés fondamentales en Europe passe nécessairement par une Cour européenne des droits de l’homme qui exerce son contrôle de conventionnalité du droit national en pouvant être saisie à tout moment par les parties à un procès.
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Les journaux satiriques bénéficient en France d’une « immunité prétorienne » (Bernard Beignier), tout comme les paparazzi. Quand on a des capitaux derrière soi, la justice ne se mêle de rien.
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Les partis politiques sont, comme le disait Duverger, les grands oubliés du droit constitutionnel. C’est pourtant là que tout se passe, comme le même le disait encore. C’est là que les bons postes sont distribués, les immunités légales et celles de fait des positions électives – immunités « de fait » car on peut toujours faire porter le chapeau à un fonctionnaire.
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En Nouvelle-Zélande, le nombre de locuteurs du maori est nettement inférieur à la population maorie du pays (3,7 % contre 15 %), ce qui traduit une forte déculturation de la population maorie. Les populations indigènes d’Amérique latine n’ont pas subi quant à elles, en ce qui concerne la langue, une telle déculturation : chaque groupe continue de parler sa langue, en plus de l’espagnol (et même il est rare que tous les individus d’un groupe connaissent l’espagnol).
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La démocratie étant une idée qui ne peut se contredire elle-même, on ne peut pas dire que les hate speech laws sont démocratiques et ne le sont pas. Pour la Cour suprême américaine, elles ne sont pas démocratiques, elles sont donc inconstitutionnelles. De ce point de vue, la France n’est pas une démocratie.
Si la Cour suprême des États-Unis casse systématiquement (déclare inconstitutionnelles) les hate speech laws, c’est pour de bonnes raisons démocratiquement correctes. Et c’est parce que, chez nous, le pouvoir judiciaire est faible (on peut même dire, dès lors qu’il n’est pas indépendant, qu’il est inexistant en tant que pouvoir constitutionnel) que la parole est corsetée.
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La philosophie (et la jurisprudence) de la Cour européenne des droits de l’homme est à l’exact opposé de celle de la loi française en matière d’outrages, injures et diffamations, qui a donc vocation à exploser. En France, et c’est complètement stupide, les élus, en tant que dépositaires de l’autorité publique, sont plus protégés que les particuliers, tandis que pour la Cour EDH ils doivent de toute nécessité se montrer plus tolérants vis-à-vis de propos les concernant, eu égard aux impératifs du débat démocratique, et c’est la sagesse même.
Ce qui signifie concrètement que toute personne condamnée pour injure ou diffamation en France peut (et selon moi doit) porter son affaire devant la Cour EDH et la faire juger à l’aune d’une saine jurisprudence plutôt qu’à celle d’une loi scélérate.
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Les deux auteurs d’un Que sais-je ? se lamentent sur le fait que la Cour pénale internationale soit venue porter un coup au « dogme » (ils se vantent de défendre un dogme !) de l’immunité parlementaire. Comme si cette dernière existait encore, alors qu’un député qui écrit des choses outrageuses ou autres dans un rapport parlementaire en bénéficie tandis que, s’il veut faire un compte rendu loyal de son rapport diffamatoire dans les médias, il sera poursuivi en justice. Il est absurde de prétendre que l’immunité existe encore dans ces conditions. Le « cadre précis » –c’est encore une expression des auteurs– de l’activité d’un député n’est pas cet espace topologique qui s’appelle le Palais-Bourbon ! C’est là du pur fétichisme, comme pour les églises, refuges des criminels au moyen-âge.
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Quand j’en parle, tout le monde semble ignorer qu’un pétomane est un artiste qui fait de la musique en pétant, alors que le plus grand pétomane au monde est le Marseillais Joseph Pujol, qui se produisait au Moulin-Rouge, et qu’il s’agit donc d’un art français par excellence.
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Si, lecteur, tu veux t’intéresser à l’anthropologie raciale, sache que la recherche n’a pas pris fin avec la Seconde Guerre mondiale. Sans même parler de l’anthropologie raciale explicitement revendiquée en tant que telle (Carleton Coon etc.), la sociobiologie puis, aujourd’hui, la psychologie évolutionniste (Evolutionary Psychology, EP), qui en est l’héritière, comportent des recherches sur le sujet. C’est une littérature académique, essentiellement anglo-saxonne, pas forcément facile d’accès et qui comporte rarement, voire jamais, le mot race dans le titre, mais c’est aussi de cela qu’il s’agit.
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Le laissez-faire en matière raciale n’implique pas forcément l’horizon plus ou moins lointain de la totale fusion des races. Les travaux de psychologie anglo-saxons contemporains montrent les racines biologiques du racisme, dont un réflexe de défense immunitaire, issus de l’environnement évolutionniste d’adaptation (environment of evolutionary adaptedness EEA). Les femmes enceintes présentent ainsi un (surcroît de) rejet xénophobe inconscient, attesté expérimentalement, par rapport à leur personnalité en temps ordinaire, et ce pour des raisons biologiques et immunitaires liées à la protection du fétus (même si le milieu de vie contemporain a probablement effacé une partie de la variabilité immunologique des habitants de différentes races d’une même ville, non par fusion raciale mais par cohabitation prolongée).
Reste que la fusion des races implique une question en quelque sorte morale, s’agissant des caractères récessifs, voués à la disparition en cas de fusion. Cela dit, le sujet semble encore assez mal connu, la définition même de caractère dominant/récessif ayant subi des révisions.
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À l’exposition Géométries Sud de la Fondation Cartier sur l’art abstrait contemporain d’Amérique latine (novembre 2018), j’ai eu l’honneur de voir le monochrome blanc le plus monochrome et blanc que j’ai jamais vu. Tlon, une œuvre de l’Argentin Cesar Paternosto de 1969.
Rien à dire : c’est suprêmement monochrome et blanc.
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Mais quel ignorant je suis ! Je viens de faire une recherche sur internet et il paraît, c’est du moins ce que je crois comprendre, que l’artiste a peint sur une ou plusieurs tranches du tableau… Là où personne ne regarde.
Quant au titre, Tlon, le peintre étant Argentin, c’est sans nul doute une référence à la nouvelle de Borges, Tlön, Uqbar, Orbis Tertius, avec omission du tréma, par erreur (?), sur l’étiquette à la Fondation Cartier (Tlon au lieu de Tlön). J’ai trouvé cette présentation de la nouvelle [que je ne retrouve plus] : « L’histoire est celle de la découverte par l’auteur du mystérieux et apparemment fictif monde de Tlön, dont les habitants croient en une forme d’idéalisme subjectif, niant la réalité du monde, et parlent une langue dépourvue de noms. » La réalité n’est donc pas la toile du tableau représentant le monde objectif mais la pensée subjective représentée par la tranche ?
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Je suis favorable à la légalisation des autres formes de drogue que l’alcool, ne serait-ce que pour que l’État français se mette en conformité avec le principe de laïcité qui implique la liberté de culte et donc l’usage rituel de substances psychoactives par les religions qui voient les choses de cette manière (shamanisme amérindien, rastafarisme…). Mais la France pays des droits de l’homme est connue par ses voisins (à défaut de se connaître elle-même) comme un État particulièrement discriminatoire et répressif, comme cela vient d’être rappelé par un comité des Nations Unies qui dénonce notre fameuse loi sur le voile islamique. (Ce comité rend des avis que l’État français n’est pas obligé de suivre mais dont je ne sais plus quelle sommité magistraturale française a fait savoir il y a quelques années qu’elle tiendrait compte, ce qui promet des contentieux bien embrouillés.)
[Il existe en réalité deux débats au sein de la question de la légalisation, selon les substances considérées. Le point de vue ici exprimé concerne les substances psychotropes, également dites enthéogènes (une étymologie qui souligne leur intérêt spirituel et religieux), qu’elles soient naturelles –cannabis, champignons…–, ou d’ailleurs synthétiques, comme la psilocybine et le LSD. D’autres substances classées parmi les stupéfiants illicites, telles que cocaïne, héroïne, crack…, ont des effets bien plus physiologiques que psychotropiques, produisent rapidement une forte dépendance physique (c’est le cas également de l’opium par ailleurs psychotrope) et peuvent donc passer, sans doute à juste titre, pour particulièrement dangereuses en termes de santé publique. De toute évidence, l’argument que j’avance ici pour libéraliser certaines catégories de stupéfiants ne s’applique pas à ces dernières, sur la légalisation desquelles je réserve mon opinion (ainsi que sur l’opium).]
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Rêve-contact ?
Dans les jeux de rôle de mon enfance et adolescence, un coup porté faisait perdre des points de vie et c’est tout, c’est-à-dire que la blessure rapprochait le personnage de la mort (zéro point de vie) d’un certain degré selon sa gravité.
En réalité, une blessure ouverte continue de faire perdre d’elle-même des « points de vie » jusqu’à ce qu’elle soit traitée (fermeture de la plaie). Sans même parler des blessures qui occasionnent la perte d’un membre, une blessure fait aussi perdre de la force, de l’adresse, de l’attention…, bref diminue les capacités du personnage, jusqu’au rétablissement de celui-ci.
Dès lors, entrer dans un donjon pour affronter monstre sur monstre, en recevant quelques blessures à chaque combat, est en fait une idée complètement irréaliste.
C’est ce dont j’ai rêvé cette nuit. Avec l’idée qu’un nouveau jeu de rôle devrait définir un tableau de corrélation entre perte de points de vie et diminution effective des capacités du personnage.
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Dans la réalité, blessure = hors service. Les livres-jeux et JDR (jeux de rôle), bon nombre de films et romans aussi, reposent sur le fait de passer outre ce principe.
Il y a aussi la façon de traiter l’armure. Deux approches existent. Dans Donjons et Dragons (D&D), on tire les dés pour savoir si l’armure joue son rôle : plus elle est protectrice et plus la probabilité est grande que le coup ne porte pas, c’est-à-dire que l’armure amortisse complètement le coup. Dans L’Œil noir, on soustrait à une quantité de coup une quantité d’armure pour déterminer la perte de points de vie occasionnée par le coup.
Dans D&D, on applique donc le système du coup à la jointure : si le coup porte, l’armure n’a pas joué son rôle, le coup porte donc sur un point non protégé. Dans L’Œil noir, c’est le système du blindage : si le coup porte, l’armure joue son rôle d’amortissement et les dégâts dépendent du rapport des quantités. Un système réaliste devrait pouvoir combiner les deux.
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Porter une armure lourde n’est pas sans effet sur la vitesse de mouvement, donc sur la dextérité. L’idée d’entrer dans un donjon avec une armure de chevalier est complètement délirante, en réalité, car cette armure sert au combat à cheval. Le cheval est, contrairement au chevalier, suffisamment puissant pour ne pas être gêné par le poids de l’armure du chevalier. L’armure protège l’ensemble du corps du chevalier, sur lequel les armes traditionnelles ne peuvent rien, en tout cas ne peuvent provoquer de blessure directe ; elles peuvent toutefois provoquer une secousse qui désarçonne le chevalier. Il faut, comme dans le film Excalibur, passer sa lame dans une jointure de l’armure du chevalier à terre (une réalité qui m’avait choqué en tant que rôliste ayant un culte pour la fameuse armure de plates de D&D). Et le chevalier se retrouvant comme une tortue sur le dos, incapable de se relever et encore moins de se défendre (dextérité zéro), était le plus choquant de tout.
(Voyez dans mon lexique de vieux français la dague de miséricorde, ou miséricorde tout court, qui confirme ce déroulement des combats de chevaliers en armure.)
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Once, as a child, I was introduced to a girl of my age named Klytaimnestra (in fact, Clytemnestre, the French version of it). When I heard her name my mouth gaped and I remained dumb. Seeing it, the girl gave me the evil eye. I knew Clytemnestre was some Greek character and all that, but I couldn’t make up my mind as to what kind of madness it was that led parents to give a child such an impossible name, which begins like clit (clitoris).
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In villages people know each other and gossip about each other. In cities people drop bad comments on passers-by. Same pestilence everywhere.
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I find hijabs a pleasanter look than Western fashion. And the best look of all, according to me, is when all women wear black abayas, like in the Gulf States, which I have come to see as the summum of beauty in a crowd. Otherwise I find crowds ugly. Please note this is solely a judgment on how crowds look like.
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Je ne connaissais pas ce « fossile vivant », l’argonaute. Voir la femelle nager m’a fait penser à une tête de Marianne avec son bonnet phrygien. Il faudrait donc en faire un symbole de notre république, elle aussi un fossile vivant, avec des fossiles vivants, les politiciens, qui nous prennent pour des moules.
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La littérature prolétarienne est unanime pour dire que jamais la vie ne fut aussi horrible pour l’humanité travailleuse que pendant les cent premières années de la révolution industrielle. Jack London compare le travailleur anglais des premières années du vingtième siècle aux Eskimos d’Alaska : ces derniers souffrent de disettes périodiques, les premiers de malnutrition permanente. Le peuple de l’abîme.