Tagged: droits de l’homme

Philo 40 : L’échec cumulatif de la science

ÉPISTÉMOLOGIE

L’échec cumulatif de la science

Dans le cadre d’une réflexion sur l’épistémologie (cf. Apologie de l’épistémologie kantienne, essai qui présente mon interprétation de l’histoire des sciences), je me suis intéressé aux théories alternatives en physique, tout particulièrement dans le monde germanique : Hans Hörbiger (Welteislehre), Viktor Schauberger, la critique des théories de la relativité… Ma réflexion philosophique me porte cependant à considérer les théories fondées sur des dimensions « surnuméraires », à l’instar de la théorie de « l’effet Vialle » (de Richard Vialle), comme fourvoyées. J’ai un fort apriori contre une théorie qui parle d’un espace à quatre dimensions plutôt que de trois dimensions de l’espace plus une dimension de temps, ainsi que d’autres singularités tout aussi paradoxales que celles contenues dans les théories les mieux acceptées.

Hörbiger est connu pour une théorie cosmologique fondée sur un espace plein plutôt que vide. La théorie newtonienne étant fondée sur des interactions dans le vide, on explique que la matière est tellement diffuse que c’est comme si, pratiquement, l’espace était, dans l’ensemble, vide. Pour Hörbiger, les orbites sont en fait en spirale, du fait des frictions de la matière (même diffuse), et les corps célestes sont voués à entrer en collision les uns avec les autres dans le temps astronomique long. Mais la principale singularité du modèle de Newton est l’action à distance : la gravitation est bel et bien, dans le modèle, une action à distance, c’est-à-dire une impossibilité en physique 101. Que la relativité einsteinienne ait raffiné sur le modèle en introduisant de nouvelles singularités, comme des régions physiques de densité infinie dans les trous noirs relativistes et autres, ne doit étonner personne, mais ce sont précisément ces singularités qui doivent écarter tout dogmatisme en la matière et toujours laisser la porte ouverte aux modèles alternatifs, ce qui n’est malheureusement pas le cas parce que les savants sont en général des esprits obtus : ce qu’ils ont appris leur sert de dogme, au-delà duquel ils ne veulent ou ne peuvent rien connaître.

Une « vitesse infinie », dans la théorie de Vialle, est une autre singularité. Comment une qualité physique quelconque pourrait-elle avoir une valeur infinie ? On touche ici à la limite de l’instrument mathématique dans les sciences empiriques et donc à la limite de celles-ci. Une valeur infinie est quelque chose en mathématiques pures mais n’a aucun sens physique. Certains esprits un peu simples s’émerveillent des réalisations permises ou espérées par quelques résultats paradoxaux de mécanique quantique, en termes d’ordinateurs quantiques. J’ai l’habitude de répondre à ces enthousiastes puérils que, quand j’allume la lumière chez moi, je produis un phénomène encore plus incroyable et merveilleux que n’importe quel ordinateur quantique du futur, car le phénomène en question est à la fois ondulatoire et corpusculaire, ce qui est un paradoxe insoluble. Certaines expériences montrent que la lumière est corpusculaire à l’exclusion d’un caractère ondulatoire et d’autres expériences tout aussi valides, comme celle des fentes de Young, montrent qu’elle est ondulatoire à l’exclusion d’un caractère corpusculaire. Pourquoi, dès lors, s’émerveiller de la bilocation de telle ou telle particule quantique, quand nous avons déjà dans notre corpus de connaissances, depuis longtemps, le phénomène paradoxal que je viens de décrire ?

S’agissant, par ailleurs, de la conclusion de la relativité einsteinienne selon laquelle il n’existe pas de simultanéité absolue, j’ai démontré dans l’Apologie de l’épistémologie kantienne que l’expérience des fentes de Young dément cette affirmation. La simultanéité absolue ne peut être vérifiée par une mesure traditionnelle (« les horloges ») mais les résultats des fentes de Young conduisent nécessairement à conclure à une simultanéité absolue. C’est d’ailleurs une remarque au fond superflue, car la négation absolue de la simultanéité absolue n’est qu’un résultat de métrologie, c’est-à-dire une conclusion restreinte dans le cadre restreint d’une science de la mesure. Une simultanéité absolue est entièrement conforme, en dehors de ces considérations restreintes, à notre conception a priori du temps.

L’outil mathématique ne permet à lui seul aucune traduction en termes empiriques des phénomènes empiriques. Les équations rendent les modèles prédictifs mais non descriptifs. En termes de description, nous ne pouvons dire que la lumière est quelque chose de connu, car notre description selon laquelle elle est un phénomène à la fois corpusculaire et ondulatoire est une contradictio in adjecto sans validité discursive possible. Dans ce cadre, un tesseract n’est ni plus ni moins descriptif que la lumière corpuscule-onde, c’est-à-dire nullement descriptif car nullement conforme aux lois de notre entendement. Or ce que l’on attendrait de modèles alternatifs, c’est justement qu’ils évitent ces écueils des modèles prédictifs non descriptifs, et qu’ils fournissent des capacités prédictives s’insérant dans les cadres de notre entendement.

L’hypothèse de plusieurs univers (dont l’un serait celui des « âmes », selon un certain courant disant s’appuyer sur la théorie de Vialle) n’a, en dehors d’un postulat matérialiste, guère de sens. La nature est une et unifiée par les lois de la nature. Si plusieurs univers coexistent, ou bien ils sont dans la même nature et obéissent aux mêmes lois physiques ou bien ils sont dans des natures différentes et obéissent à des lois physiques différentes. S’ils sont dans la même nature, ce ne sont pas en réalité plusieurs univers mais un seul et même univers, unifié par les mêmes lois. S’ils obéissent à des lois différentes, l’hypothèse est sans intérêt car il ne peut y avoir aucuns « passages ou couloirs communicants » entre ces univers ou natures, car nous ne pouvons rien connaître empiriquement en dehors des lois de la physique qui unifient notre univers. Pour comprendre l’âme, il faut écarter le postulat matérialiste, afin de considérer qu’il existe, non pas plusieurs univers, mais quelque chose d’autre que la nature. L’âme est cette part de l’homme en dehors de la nature. Une explication de l’âme en termes physiques (relatifs aux lois de la nature) est vouée à l’échec. La nature est le monde réel tel que notre entendement l’intuitionne, c’est-à-dire elle est le monde selon notre connaissance par les sens et l’entendement. Si notre connaissance ne venait pas de l’âme et ne précédait pas, ainsi, la nature, elle serait un produit de la nature plutôt que la nature un produit de notre faculté de connaître. Dans l’hypothèse matérialiste, nous sommes liés par des conditions naturelles particulières, ce qui pourrait laisser supposer d’autres conditions naturelles particulières, d’autres ensembles de lois, d’autres univers, mais, encore une fois, nous n’aurions aucun accès possible à ces autres univers, notre connaissance et l’ensemble de notre être ayant été formés par cet univers-ci. Tout ce à quoi notre technique peut nous donner accès est de notre univers, c’est-à-dire de la nature : par exemple, les ultrasons qu’entendent les chiens et que n’entend pas notre oreille, et le spectre des ultrasons n’est pas un autre univers. Si, au contraire, l’univers est le monde tel que notre entendement le représente par ses facultés, il y a bien autre chose que l’univers, mais cette autre chose n’est pas un univers physique, car notre représentation des objets dans l’espace et le temps est précisément la nature physique. Cette autre chose est la chose en soi, tandis que la nature est la chose pour nous.

Dans cet univers, dans la nature, les valeurs négatives n’ont pas de réalité physique. « Moins trois oranges », cela n’existe pas. Une température de « moins trois degrés » est encore positive par rapport au zéro absolu, ce n’est une valeur négative que sur une échelle arbitraire. Dès lors, comment une masse négative, un temps négatif (théorie de Vialle) auraient-ils une réalité physique et non pas seulement mathématique ? Une telle description doit se heurter aux mêmes oppositions de fond que les modèles physiques plus courants, qui, tirés d’équations permettant de mettre en forme des résultats expérimentaux, rendent possibles sur cette base restreinte des prédictions locales mais ne servent à aucune description valable. Tant que l’on défendra le caractère allant de soi d’un phénomène à la fois ondulatoire et corpusculaire, on se heurtera à l’objection légitime qu’une onde n’est pas un transport de matière et qu’un corpuscule en mouvement est un transport de matière, parce que de cette manière on parle, selon l’expression allemande, de « silbernes Gold », d’or en argent, une contradictio in adjecto qui répugne à l’esprit. Que ces contradictions dans la description n’empêchent pas ceux qui les professent de me permettre de lire à la lumière électrique, ne rend pas ces contradictions moins contradictoires. Nous ne reprochons pas à ces savants de ne pas être de bons techniciens, mais nous leur disons, sans nous laisser impressionner par le fait qu’ils tiennent le destin de l’humanité entre leurs mains par la production d’armes ultrasophistiquées, qu’ils ne savent pas produire une description valable des phénomènes naturels avec lesquels ils produisent tant de choses.

Si l’âme et l’éther sont une même chose, ainsi que certains souhaitent le croire sur le fondement de la théorie de Vialle, pourquoi, d’ailleurs, parler de plusieurs univers ? L’éther n’est-il pas de notre univers ? Moyennant une simple reformulation dialectique, il serait possible de ne plus parler de plusieurs univers mais de plusieurs régions de l’univers ; cependant, la modélisation en plusieurs univers a toujours cet avantage qu’elle permet de s’affranchir des lois physiques connues dans et pour ces autres univers hypothétiques, où il serait permis de supposer des choses extraordinaires, tandis que ce ne serait pas cohérent dans un seul et même univers.

De même que les dimensions surnuméraires, l’antimatière est posée par certains physiciens comme une conséquence nécessaire de telle ou telle prémisse ou résultat ; on ne peut pas identifier l’antimatière, seulement l’inférer, c’est-à-dire inférer quelque chose que nous avons décidé de décrire comme de l’antimatière, mais c’est comme parler de la « couleur » des particules : ces couleurs comme cette antimatière ne sont ni des couleurs ni de l’antimatière, pas plus que le spin ne répond aux caractéristiques physiques de ce mouvement dans le monde visible à l’œil nu. Il s’agit simplement de « dé-mathématiser » des résultats d’équations pour faire des objets empiriques considérés (bien qu’échappant à l’œil nu, mais j’insiste sur le fait que tout ce qui est empirique, c’est-à-dire tout ce qui se laisse intuitionner par nos sens, aussi sophistiquée que soit la technologie qui permet cette appréhension en palliant les carences des sens limités, est physique, tandis qu’une dimension 4 ne se laissera jamais appréhender, quelle que soit la sophistication de notre technologie, et restera donc une abstraction non physique) de faire de ces objets empiriques, dis-je, des objets discursifs, dialectiques, ce qui est à la fois largement arbitraire (on aurait aussi bien pu parler d’odeurs de particules, pour ce que vaut l’appellation de couleur à ce niveau) et peine perdue dans les modélisations actuelles. La tâche est d’ailleurs vaine dans l’ensemble, en raison de la synthèse inductive continue qu’est par essence la science positive. Autrement dit, il n’y a rien à demander à la science en dehors de résultats pratiques, et, ces résultats pratiques étant toujours incomplets par définition de la synthèse continue, le progrès est le mouvement qui conduit les civilisations à leur perte (parce que, en un mot, la science accroît l’effet de l’action humaine au-delà de l’effet local et limité conforme aux « prédictions locales », comme nous les avons appelées plus haut, que la synthèse permet). L’inévitable effondrement de nos sociétés sous la pression d’un progrès déchaîné est une idée admise aujourd’hui par beaucoup, et les efforts pour tenter d’empêcher cet effondrement passent, chez un nombre croissant d’esprits pourtant convaincus de la réalité de ce qui nous attend, pour absolument vains.

*

PHILOSOPHIE DU DROIT

FR-EN

Août-Septembre 2023

Conflicts of Interest and Politicians’ Naiveté

“NATO Nation PM Faces Fury After Husband’s ‘Secret Russia Deal’ Exposed. Estonian PM Kaja Kallas’ husband has landed her in hot soup over the Russia link amid the Ukraine war. A firm co-owned by Kaja Kallas’ husband ‘kept working with Russia’ despite EU sanctions.” (Hindustan Times, Aug 2023)

“It’s true that I am married to Arvo Hallik.” As if the question were: Are you married to Arvo Hallik?

“It’s true that I am married to Arvo Hallik, but I have no idea about his business.” Estonia is a member state of the European Union; therefore, its political system complies with a package of membership conditions, among which are rules about conflicts of interest (COI) that make her statement “I have no idea about my husband’s business” out of place. She must have declared her and her husband’s business to comply in her position with COI rules, so, if it is true that she has no idea about her husband’s business, it means she made frivolous statements regarding COI.

“My husband told me that his activities in Russia were terminated in March 2022.”  They were not, and it is most unfortunate that she did not try to assess the true situation of the business herself, since her credibility as PM and, more importantly, Estonia’s reputation were at stake.

Her defense is self-contradictory. After saying she has “no idea about her husband’s business,” she tells what she knew about his business, namely that he told her the company had terminated business with Russia in March 2022. Of course, she had to have an idea about her husband’s business, because of the COI rules that apply to people in government positions in EU countries. The “no idea about his business” out-of-place defense casts some doubt on her sincerity about what she knew about his business.

The company’s CEO admits there remained some residual activity with Russia after March 2022, so her husband obviously knew the situation, as a stakeholder in a company where the CEO does not try to conceal the situation. (Unless the CEO first concealed and only later admitted the truth.) Her husband told her, she says, that the company abided by the sanctions against Russia as soon as March 2022, and she took his words as a satisfactory answer. Admitting this scenario is true, she would still be liable for gross neglect. As a PM under strict duties regarding conflicts of interest, she took these duties quite lightly. She has a duty to avoid COIs, and she is telling Estonians she did her duty by asking her husband and taking him to his word, even though he only had, she says in her defense, a “minority stake” in the company, that is, he may not be overly informed of what happens. What she gives away as a point in her defense (he is only a minority stakeholder, as if this implied a minor responsibility), turns out to be damning: Precisely because he is a minority stakeholder, she had a COI duty to double check his words in order to make sure the minority and perhaps remote owner knew the situation as accurately as wished or expected.

ii

“Qin Gang Sacked As China Foreign Minister Over Extramarital Affair in US?” (Crux, Sep 2023)

In France the so-called free media never report on politicians’ “affairs.” For them it is a privacy issue, and if a minister or whatever public official has become a puppet in foreign hands because of blackmail after private misconduct, they consider this is none of French citizens’ business. How free and democratic.

Consider, also, the idiocy of a political class passing laws against conflicts of interest (COI) which demand strict scrutiny of the spouses and family of public officials but preventing anyone from inquiring about the same people’s extramarital affairs, as if COIs could only arise in marital and legitimate family relationships and never in relationships with extramarital lovers and natural children. These people are preposterous.

*

Niger : Un ambassadeur français otage de la France

Les faits. Le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) au pouvoir au Niger donne 48 heures à l’ambassadeur français pour partir. Le gouvernement français refuse que son ambassadeur quitte le pays, au motif que la France ne reconnaît d’autre autorité légitime que le Président destitué. Passé l’ultimatum, l’ambassadeur vit reclus dans son ambassade, le Président français affirmant alors qu’il est otage au Niger. (Entre le moment où les lignes qui suivent ont été écrites et la publication sur ce blog, le Président français a finalement annoncé, le 24 septembre, que la France rappelait son ambassadeur, c’est-à-dire le Président annonçait sa volte-face.)

Analyse. La France n’a pas le droit de chercher à se servir d’un de ses fonctionnaires comme appât pour saisir le prétexte de sa détention, voire de sa mort, en vue de déclencher une intervention armée au Niger. C’est contraire aux droits de l’homme de ce fonctionnaire.

Quel intérêt de faire arrêter son ambassadeur par un pays qui demande son départ ? Le gouvernement français n’a d’ailleurs pas le droit, selon le droit national et ses propres lois nationales, de demander un tel sacrifice à l’un de ses fonctionnaires. L’ambassadeur est délié de son devoir d’obéissance quand l’ordre qu’il reçoit, en l’occurrence rester sur place après un ordre d’expulsion par les autorités effectives, fait courir un risque exorbitant sur sa personne. Ce n’est pas un militaire mais un fonctionnaire civil.

« Le Quai d’Orsay a aussitôt indiqué que les putschistes n’avaient pas autorité pour faire cette demande. » Le ministère français n’a pas autorité pour demander à son fonctionnaire de rester sur place, au risque de sa liberté, voire de sa vie, dès lors que les autorités effectives au Niger demandent son départ. Si le gouvernement français entend forcer son fonctionnaire civil à rester là où sa présence est indésirable pour les autorités effectives, il met la liberté, voire la vie de ce fonctionnaire en danger ; celui-ci est délié, en raison de ses droits humains imprescriptibles, de tout devoir envers une administration qui lui impose un tel risque exorbitant. Ce qui arrivera à ce fonctionnaire au Niger après l’ultimatum, l’État français en est responsable devant les juridictions de son pays et la Cour européenne des droits de l’homme.

Les autorités que le gouvernement français appelle légitimes ne sont pas en mesure d’assurer la sécurité de ce fonctionnaire civil indésirable dans le pays. C’est comme si ce gouvernement entendait sacrifier cet homme. La France a pourtant rapatrié ses ressortissants, pour leur sécurité. Elle sait donc parfaitement ce que risque l’ambassadeur, mais elle ne semble en avoir cure : le gouvernement français déclarant que les autorités effectives au Niger n’ont pas autorité pour faire cette demande, l’ambassadeur, sa famille et ses proches ont du souci à se faire, car on lui demande de rester alors que la France n’a pas les moyens, sur place, d’empêcher sa détention. En d’autres termes, le gouvernement français ne peut demander à son fonctionnaire de rester au Niger contre la volonté des autorités de fait, qu’il ne reconnaît pas, car il met en danger la vie de son fonctionnaire civil, à tout le moins sa liberté. Bazoum est certes la seule autorité légitime selon le gouvernement français, mais il se trouve que Bazoum est aux mains de ceux qui l’ont destitué. Une autorité aux mains d’une autre autorité est peut-être légitime mais ce n’est pas une autorité de fait. L’ambassadeur français au Niger dépend, pour sa sécurité, de l’autorité de fait et non de Bazoum aux mains de celle-ci. Si le gouvernement français lui demande de rester contre la volonté de l’autorité de fait, cet ordre est illégal. Merci pour l’ambassadeur et son personnel, qui seront assignés à résidence dans l’ambassade, comme un Julian Assange à l’ambassade d’Équateur, parce que la France ne prétend reconnaître que l’autorité d’un homme sans pouvoir. Nous savons à présent que, pour ce gouvernement français, les fonctionnaires civils peuvent être sacrifiés par les autorités comme bon leur semble.

Il y a encore une chose irrégulière dans la démarche française. La procédure normale en cas de contestation de ce qui se passe sur place est le rappel d’ambassadeur. Par exemple, quand la France était mécontente que l’Australie annule un contrat de sous-marins, elle a rappelé son ambassadeur depuis l’Australie. Autre exemple, la France ne reconnaît pas le régime des Talibans et par conséquent n’a plus d’ambassadeur en Afghanistan. Ici, la France fait tout le contraire : elle ne veut pas reconnaître le nouveau pouvoir mais, au lieu de rappeler son ambassadeur, ce qui serait la procédure attendue, elle refuse qu’il quitte le territoire. Comment cela peut-il s’interpréter autrement que comme la volonté de la France de faire servir son ambassade à des actions hostiles au pouvoir en place ? C’est de la folie.

Addendum. La présentation de l’affaire au contentieux administratif ne verrait pas forcément le juge français aller dans le même sens que nous dans ces pages, parce que, traditionnellement, le juge administratif français est réticent à juger de questions ayant trait aux relations internationales de la France. Il paraît cependant hors de doute que la Cour européenne des droits de l’homme développerait des arguments comparables aux nôtres, et par ailleurs le juge français est censé tenir compte de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme dans sa propre jurisprudence.

ii

“The envoy backed by president Macron” (a turn of phrase used by media Hindustan Times)? The envoy made no decision for his government to back, he was ordered by his government to stay. This is how things work in the administrative state: civil servants are at the order of politicians. Anything happening to the envoy in Niger will be the French president’s fault because the order is illegal. Even if the decision was the envoy’s, the executive would be responsible for backing an illegal decision of one of his agents.

Anything happening to the ambassador will be Macron’s fault. The procedure in case of contestation is ambassador recall, not ambassador sacrifice.

A military intervention by France after duress suffered by the French ambassador in Niger would be, in these circumstances, sheer aggression according to international law, and Niger’s self-defense rightful. France has the right to not recognize the new government in Niger, but this right has only one legal translation, which is to cancel diplomatic relationships, the opposite of imposing one’s envoy to the country. On the side of French law, a government’s imposing this to a civil servant is contrary to the international conventions on human rights ratified by France.

France’s president said “a diplomat is a sometimes risky commitment, which requires a spirit of responsibility” (translation by Hindustan Times). Such spirit of responsibility is due to the laws, not to illegal orders by an unhinged executive. The French president’s examples, in the same speech (Afghanistan…), are classic cases of civil war; they are not instances of the use of a country’s envoy to challenge and provoke a new government. This justification before a civil servant who is coldly asked to risk his life, that his job is “sometimes risky,” is cynical beyond belief. (In parentheses, for typically risky service, as of police and military, agents are provided with weapons to defend their lives. A diplomat’s commitment is not risky by nature, it is risky by accident, but Macron justifies his order as if diplomacy were risky by nature, which is simply not true, and the situation of the French envoy in Niger is currently risky only because of an illegal order of his government.)

Take Afghanistan: France does not recognize the Talibans as legitimate authorities; therefore, there is no French envoy in Afghanistan. Likewise, as France does not recognize Niger’s new authorities, France has no legal choice but to recall its envoy back to France. Macron’s justification for the illegal order is cynical chicanery. He says Bazoum did not resign and thus remains the only legitimate authority in Niger. Let us apply this reasoning to Afghanistan. The Talibans took power, chasing the Western-backed governmental clique. Did this clique formally resign, or did they just pack their cases and run away? Where is the official resignation letter? If there is no resignation letter, why is Macron asking for a resignation letter from Bazoum in Niger, where the new Nigerien authorities are as effective authorities as the Talibans in Afghanistan?

*

De la perpétuité incompressible

« Attentats de Bruxelles : Salah Abdeslam échappe à la prison à vie. » (TV5 Monde, septembre 2023)

« Échappe à la prison à vie » est erroné puisque cette peine, en l’occurrence, n’a pas été prononcée en Belgique parce que Salah Abdeslam, condamné pour terrorisme, est déjà sous le coup d’une peine de « prison à perpétuité incompressible » en France. La demande ou le souhait qu’il soit condamné à deux ou plusieurs peines de prison à perpétuité est étrange, car dans la matérialité des faits cette accumulation de peines ne changerait rien, Salah Abdeslam n’ayant qu’une seule vie. Échapper à une seconde perpétuité purement symbolique n’est pas échapper à la première perpétuité bien réelle, une peine qui ne se laisse pas dépasser dans notre droit.

S’agissant, à présent, de l’incompressibilité de cette peine, elle est manifestement contraire aux droits de l’homme. En effet, la possibilité des réductions de peine est une nécessité de l’administration pénitentiaire : la suppression de la peine capitale et son remplacement par la perpétuité incompressible, c’est une pure hypocrisie qui fait du détenu un animal de laboratoire. On ne veut pas le tuer, prétendument au nom des droits de l’homme, mais il doit lasciare ogni speranza en passant ce seuil, comme c’est bénin ! D’ailleurs, on a compris, je pense, que cette incompressibilité a un sens technique échappant au commun des mortels, et que Salah Abdeslam ne mourra en prison que s’il n’a pas de chance, et qu’il n’est pas possible de procéder autrement sans droguer des personnes désespérées en l’absence de leur consentement ou d’intervenir sur elles neurochirurgicalement (lobotomie) en l’absence de leur consentement. Une peine incompressible en droit français est donc tout sauf incompressible. Ou bien elle est contraire aux droits de l’homme.

Les réductions de peine sont un instrument nécessaire de l’administration pénale. Une perpétuité incompressible supprime a priori cet instrument. Par conséquent, de deux choses l’une, pour que Salah Abdeslam ne se conduise pas comme un fou dangereux en prison : ou bien on lui fera savoir que sa peine incompressible n’est en fait pas intouchable, et cela passera par ce qu’on appelle un « aménagement de peine », c’est-à-dire que, sa peine restant inchangée sur le papier, on l’aménagera, il pourra sortir de prison avec un bracelet, par exemple, ou sous simple contrôle (il ne finira donc ses jours en prison que s’il n’a pas la chance de bénéficier d’un tel aménagement), ou bien il faudra lui administrer des drogues ou lui faire subir une opération qui le transforment en légume. Les drogues neuroleptiques sont déjà le quotidien de maints détenus, sur une base volontaire. Dans le cas d’un désespéré dangereux, il pourrait être tentant pour l’administration d’utiliser ces drogues de force. Mais le plus probable est que la peine incompressible fera l’objet d’un aménagement qui conciliera les nécessités pénitentiaires pratiques avec la condamnation telle que prononcée, purement rhétorique, illusoire.

*

Israeli Envoy Detained At UNGA [United Nations General Assembly] For Protesting [President of Iran] Raisi’s Speech. (Crux, Sep 2023)

Israel sends a hooligan as ambassador. The UN should cancel this person’s accreditation.

Raisi is invited at the UN, and as a UN guest it is UN’s duty to accommodate him like all other guests and to prevent hooligans from heckling him. The Israeli hooligan was duly detained by UN security for his misconduct. I urge UN authorities not to stop at this and to make full use of the organization’s regulations to punish this misconduct in the clearest way. The man was detained, he must now be punished for his blatant disregard of the organization.

*

Est-ce que dire que l’homosexualité est un péché est passible d’un an d’emprisonnement en France ?

Law 37 On Swedish Discrimination

Languages: EN-FR

EN

The International Criminal Court is not a “court,” it is something no constitutional regime could have in place, namely both a prosecutor and a court in one and the same organ, a mixture of powers abhorrent to constitutional principles. Therefore, no fair trial can ever be had from such a body, and international justice as embodied by the ICC is no justice at all. The treaty instituting the ICC is not binding for countries abiding by constitutional principles. Take France; the preamble of its constitution says: “A society without separation of powers has no constitution” (“Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution“). How could such a country be bound by decisions from a body whose constitution (the treaty) so blatantly overlooks the principle of separation of powers? The ICC’s answer amounts to saying, and I am telling you no joke, that the prosecutor and the judges do not share the same office within the court’s precincts…

*

TikTok CEO Shou Zi Chew faces off with US legislators in hearing. Shou Zi Chew was grilled about teenage safety and data security. (Al Jazeera English, March 2023)

“Deadly challenges” among teenagers on social platforms are not specific to one company: How do these legislators care about deadly challenges when it’s done on a US platform? And how would forcing the sale of TikTok to a US company, as suggested, solve the problem? They are mixing things up –(a) national security issues re a Chinese company and (b) the usual problems of such platforms, most of them American– to create an emotional climate against the activity of a Chinese-owned company and pinpoint in this Chinese company the problems these legislators fail to address in US companies. This is discrimination and China would be justified to see a casus belli in this, as per the Opium Wars, Open Door Policy, and other precedents of international law. The American public will be made to endorse, by way of deception, a legislative response to bogus claims on national security by approving measures against problems occurring with all such platforms, which the American legislator fails to address in the case of other, mostly American companies. The remiss legislator is claiming to address a general problem by pinpointing a foreign, Chinese company, and this is discriminatory.

*

Ukrainians and their supporters online are protesting the International Olympic Committee’s recommendation to let Russian and Belarusian athletes compete at international competitions under a ‘neutral’ white flag. (Al Jazeera English, March 2023)

They should reread Pierre de Coubertin. The games are for all countries, and those countries which object to this may boycott and remain out of it. The games’ organizers are not a political tribunal hearing complaints from this or that country.

Make no mistake, Russian athletes already competed under a neutral flag in the previous games, this has nothing to do with the conflict in Ukraine but with sports ethics, related to allegations of doping, as the organizers considered the Russians did not evidence a serious will to cope with the problem.

The International Olympic Committee (IOC) has no power, under its statutes, to exclude a country on political grounds. What the people who make this demand fail to see is that such an exclusion would be outrageous because it would send the message that there is no conflict in the world expect the conflict in Ukraine, a mind-bogglingly insensitive message. The IOC is simply not that kind of tribunal.

­ Oh yeah? Care to tell us why Germany and Japan were not allowed to participate in 1948 Olympics then? There is always a line.

Coubertin was dead and the IOC made a mistake it did not dare to make twice. Not inviting Russia while inviting other countries engaged in offensive wars would be a reckless disregard for the sufferings of victims; the IOC would be a puppet of state interests for which some wars and sufferings matter while others don’t.

*

On Rahul Gandhi’s trial for defamation after saying “Modi is a surname of thieves” – and international implications. “Modi is a surname of thieves” is not defamatory, as it is not an allegation of facts. It is a jibe. If someone dislikes my name, it may anger me but that doesn’t build up to a factual claim, that is, a defamation. Although the message intended is that the person, by implication, is a thief, this is not an allegation of facts. Insult and defamation are different concepts. Insult is a damage to feelings; defamation is a damage to reputation. When A says B has the surname of a thief, A may hurt B’s feelings (if B is thin-skinned, which is not an overly good quality for a statesman) but B’s reputation remains intact. Had A said B had stolen goods on this or that occasion, then, yes, there may be some damage to B’s reputation (through alleged facts). Not here. Rahul is innocent of defamation.

Everybody has a say on Indian jurisprudence because Indian judges may be posted at international courts and therefore make international law; if it turns out Indian judges are not professional at home, we should oppose their tenure at international courts. The way Indian justice is carried out is not an “internal matter”; if Indian judges are not competent and ethical at home, international courts should discard their applications. If they try to claim that law means subservience to Indian politics, their applications should be discarded without further review.

*

Donald Trump’s Hush Money Indictment

What are the charges? “Hush money,” what crime is that? Is a man punishable for being a victim of blackmail?

It looks like a conspiracy using a hooker to make a man fall through blackmail. “Blackmail is the crime of threatening to release certain private information, unless the victim meets specific demands. In many states, blackmail falls under the laws of extortion or theft by coercion. This offense is generally a felony that can carry over a year in prison for a conviction.”

I mean “conspiracy” in the legal, not the thought-police sense: “A conspiracy exists when 2 or more persons join together and form an agreement to violate the law, and then act on that agreement. The crime of conspiracy was created to address the inherent dangers posed to society when people come together and join forces to commit criminal acts.”

*

Italy’s most powerful mafia busted as more than 1,000 police officers carry out raids across Europe. (Crux, April 2023)

According to this news, the ‘Ndrangheta is responsible for drug dealing and money laundering (it goes without saying that crime money must be laundered, so it is a mere detail). In the past, Crux says, they used to kidnap people for ransoms; let us assume this is the past and their only crime today is drug dealing. I, then, claim these people today are morally less repugnant than the governments that arrest them and at the same time, through taxation, make money from pornography and prostitution, which are legal in these countries. These governments are complicit in human trafficking. Ironically, this and other mafia groups probably launder their illegal money precisely through these legal activities. In fact, we know that nothing can be done against organized crime in the current institutional framework of these countries, as organized crime is the main corrupting agency in a system where many admit, since Tocqueville, that some degree of corruption is inescapable. Corruption is now exerted by organized crime, which did not exist in American democracy in Tocqueville’s time. (On this point, see my essay Pacta turpia are not speech here, with the Comments section.)

*

The developing country that is the first economy in the world

US aims to hinder China’s development by depriving it of developing status: Spokesman. (CCTV Video News Agency, June 2023)

We are reading that BRICS’s share in global GDP has just or is about to surpass G7’s share. Does China agree with these figures and, if yes, does China agree that GDP is a benchmark of development?

–GDP “per capita.”

OK. Two questions. 1) Is there a consensus on what the GDP per capita threshold should be between developed and developing countries? 2) If there is no consensus, what GDP per capita should China reach to become a developed country, according to the Chinese themselves? A developing country is due to become a developed country sometime: When do the Chinese see that time coming? If a developing country has no target, the reach of which would prompt her to say “mission accomplished, we are now developed,” she is not “developing,” and the developed-developing categories lack meaning. Such a country would not be developing; she would, due to preferential treatment clauses in vigor, be a permanently privileged country. This is not to say that the US is legitimate to ascribe this or that statute to China unilaterally.

This page shows the distinction is wanting. To sum up one of the points, a developed economy is service-based while a developing economy is industry-based. How can such a benchmark be of any worth? International division of labor is not going to stop at any GDP and/or GDP per capita figure, because it is ingrained in the mechanisms of international trade. Therefore, by this benchmark, some developing countries will remain “developing” forever, if they specialize in industry in the international division of labor, no matter how high their GDPs per capita. By this rule, developing countries are not developing.

The abstract distinction between developed and developing countries goes against the conditions upon which life itself is premised. There is no such thing as a developed vs. developing organism or economy (the set of material conditions for living organisms): they are all developing. China is developing as much as G7 countries. The current theoretical construct for a regulation of international trade aiming at fairness among parties is, therefore, nonsense. It is premised on an ideal of equally developed, that is, non-developing, stationary economies, which is only conceivable, empirically, as death. No threshold can define a terminally developed economy because there is no such thing as an economy of this kind. Therefore, the labels are entirely arbitrary, so much so that denouncing this or that label is itself arbitrary. In the final analysis, this denouncing is, when all parties claim to abide by the same arbitrary framework, a sovereign decision.

*

On Swedish Discrimination

NATO Chief Jens Stoltenberg spoke out on the burning of the Quran in Sweden. Stoltenberg said that the burning of the Quran was offensive and objectionable, but not illegal. (Hindustan Times, July 2023)

If it is offensive, then it is, by the letter of the Swedish law, illegal, because incitement is by definition offensive speech and incitement against groups based on their religious faith (“trosbekännelse”) is illegal hate speech according to the Swedish legislation (see Law 32). This is, again, the letter of the law, and the claim that Swedish hate speech laws do not protect Muslims from incitement in the form of offensive book burning is a despicable attempt at discriminating against Muslims.

This blatantly discriminatory interpretation of the law makes me want to burn heaps of Swedish constitutions and flags. What do I care if some find it offensive? The NATO bureaucrat says offense is not a problem. What are the Swedish hate speech laws for, if they are not supposed to prevent and punish offenses?

This bureaucrat and others only defend freedom of speech when the target of speech are Muslims. Not only does Sweden have hate speech laws protecting whole groups, including religions or faiths, from incitement (“hets”), which this bureaucrat does not oppose, but it also has many other repressive laws, such as lese-majesty laws, which, again, go unnoticed by said bureaucrat. When such discriminating people say “freedom of expression,” it means: Deprive Muslims of their speech through legal speech repression and then make them the target of hate speech through alleged freedom of speech. This is arbitrariness and consequently tyranny. “Offence toward the monarch and the royal family (lèse-majesté) remains a criminal offence in Sweden under the Swedish Criminal Code. Defamation or insult committed against the King or other member of the Royal Family is a criminal offence under Ch. 18, Sec. 2 of the Criminal Code. The punishment is imprisonment for up to four years, or up to six years in the case of gross defamation” (International Press Institute: Sweden).

The US has no say in the matter, considering that Quran burning is free speech in US legislation, where the First Amendment has barred legislatures from passing hate speech laws. The Biden administration is expressing concern over some speech abroad that its own Constitution protects at home… However, this administration is correct to say that Quran burning is hate speech according to a no-nonsensical hate speech legislation (where omission to prosecute make the authorities, therefore, remiss and show they are full of hate against Muslims).

In this country, Sweden, a man can spend six years behind bars for “defaming” the king or any member of the royal family. This is a free speech country, you hear me! To be sure, international analysts say that convictions for defaming the king or the royal family are rare. I believe they are, because six years imprisonment is dissuasive enough to keep people silent about the monarchy. But the analysts seem to believe, when they say convictions are rare, that in fact the law is not really applied, because Sweden is a free speech country; it is more a joke than a law, therefore. Certainly, the notion of legislation as a joke is not foreign to European countries; yet here is something different: here, a law that suppresses speech efficiently by dissuading people from opening their mouths is described as innocuous considering the scarcity of trials! The dialectic should be clear, and when the same people allow Quran burning in the name of free speech, this is nothing but institutionalized anti-Muslim hate.

On the first day of Eid al-Adha, a person set fire to the Muslim holy book outside a mosque in Stockholm. Swedish government later charged him with agitation against an ethnic or national group. Bur Iran’s Foreign Minister, Hossein Amirabdollahian, has held the Swedish government responsible for allowing such protests and announced that Tehran would not be sending an ambassador, despite having appointed one. The Swedish courts had granted permission for these demonstrations, citing freedom of expression. (Hindustan Times)

You must be wrong, Hindustan Times, because if the courts “had allowed such demonstrations,” by which you mean, presumably, that courts had allowed Quran burning, the government would not have filed charges against a man burning a Quran, as you say the Swedish government did. As the authorities, facing an act of Quran burning, filed charges for agitation against a group (“hets mot folkgrupp”), that is, for hate speech, there is obviously no judicial precedent (stare decisis) stating that Quran burning is not a hate speech crime under the statutory law regarding agitation against a group. Prosecution authorities are not supposed to disregard a judicial precedent when it exists. Therefore, you must be wrong, and the courts had said nothing of the sort. And how could the courts have said something of the sort when the act in question is undeniably the kind of act repressed by the letter of the Swedish hate speech law, which protects from offensive speech such groups as those based on religious faith?

.

FR

Contre la subvention sociale de l’avortement

États-Unis : un juge de la Cour suprême bloque un arrêt qui limite l’accès à la pilule abortive. (CGTN Français, avril 2024)

Une personne qui ne désire pas d’enfants doit faire en sorte de ne pas en avoir par la façon dont elle se comporte. La loi n’oblige pas les gens à avoir des enfants mais la loi n’est pas non plus obligée de réparer les erreurs des individus. Pourquoi le contribuable doit-il payer, via la sécurité sociale, pour que l’État corrige les erreurs de personnes qui ne veulent pas d’enfants et sont pourtant sur le point d’en avoir, c’est-à-dire ont agi (à moins de viol) contrairement à leurs propres objectifs, donc de manière irréfléchie ? Que l’on montre d’abord que ces dépenses d’avortement, pilules abortives et autres, sont à la seule charge des personnes concernées et non du contribuable avant de parler de liberté, parce que si, comme en France, ces dépenses sont socialisées, la responsabilité subventionne l’irresponsabilité et ce n’est pas acceptable. Vous êtes libres d’avoir des enfants ou pas, du moment que le contribuable ne paye pas pour vos avortements, car il n’a aucune responsabilité dans vos erreurs personnelles.

Dans les pays comme la France où l’avortement est une dépense socialisée, une femme ne devrait avoir droit, au mieux, qu’à un nombre limité d’avortements dans sa vie, défini par la loi, par exemple un ou deux. À la grossesse non voulue suivante, elle devrait subir une stérilisation forcée. « Mon corps, ma liberté », soit, mais ce n’est pas à moi de te payer ta liberté. L’avortement doit être une dépense entièrement privée ou bien être assortie de règles du genre énoncé.

*

Du concept de philosophies plurielles des droits de l’homme et de sa naïveté

Il faut « respecter les philosophies des droits de l’homme des autres pays » (Ambassadeur chinois). (CGTN Français, juin 2023)

On ne peut parler de différentes philosophies des droits de l’homme. S’il y avait différentes philosophies, l’une protégerait moins les droits que l’autre et serait donc déficiente par rapport à l’autre, serait moins parfaite et moins « respectable ». Ce qu’il faut chercher à savoir, c’est si la pratique des États est conforme à leur discours. Quand un État européen est condamné de manière répétée par la Cour européenne des droits de l’homme pour les mêmes violations, c’est qu’il ne respecte pas les droits de l’homme et ne s’amende pas, ne cherche même pas à s’améliorer ; c’est juste un présomptueux donneur de leçons.

Quand il est question de « valeurs asiatiques » pour définir une philosophie asiatique des droits de l’homme, il s’agit de faire une place au collectif dans le traitement des droits individuels. Or les États occidentaux ont exactement le même raisonnement chez eux : dans la pratique gouvernementale des États européens vis-à-vis de leurs citoyens, le discours est toujours que les libertés individuelles ne sont pas absolues et que leur exercice est limité par la considération de l’intérêt général. C’est seulement à l’égard d’autres États souverains, par exemple asiatiques, que les pays occidentaux passent sous silence cette dimension de leur propre pratique gouvernementale et tiennent un discours absolutiste fallacieux. Cette instrumentalisation des droits de l’homme est régulièrement dénoncée par la Chine et d’autres pays, et c’est là une approche plus pertinente que d’invoquer des philosophies différentes, car en réalité la philosophie occidentale des droits de l’homme est la même que celle des valeurs asiatiques, dans la pratique interne des États occidentaux.

Quand il s’agit de libertés, c’est toujours, dans la philosophie occidentale comme dans les valeurs asiatiques, un compromis entre l’individuel et le collectif. Il n’y a donc pas de différence de philosophie. Quand, à présent, on prétend que la philosophie des droits de l’homme exclut par principe telle ou telle législation, par exemple l’application de la peine capitale, il est certain, si l’on admet que les droits de l’homme exigent nécessairement l’abolition de cette peine, qu’il ne s’agit plus d’une question de compromis ; et si un État veut maintenir la peine de mort tout en se disant respectueux des droits de l’homme, il lui faut invoquer une « autre » philosophie des droits de l’homme, avec laquelle cette peine est compatible. Or que les États européens (au contraire des États-Unis) et les ONG occidentales aient fait de l’abolition de la peine de mort un critère du respect des droits de l’homme ne signifie pas que ce soit autre chose qu’une manœuvre, que ce soit une philosophie légitime des droits de l’homme plutôt qu’une interprétation dévoyée. Les philosophes européens des Lumières (Montesquieu, Voltaire, Kant…) qui ont contribué à poser les bases d’une philosophie des droits humains considéraient la peine capitale comme légitime. (La source d’inspiration des promoteurs de l’abolition est un assez obscur juriste, Beccaria, surtout connu pour cet argument abolitionniste ; les philosophes du même courant, comme Voltaire, ont retenu de ce juriste ses appels à mettre fin à la « barbarie » judiciaire, mais Voltaire, par exemple, a défendu la légitimité de la peine capitale, qui n’est donc pas, pour ces auteurs, une peine barbare en soi.) L’absolutisme abolitionniste est injustifié du point de vue des droits de l’homme et sert en réalité à créer une ligne simpliste de démarcation entre États en ignorant les questions plus sensibles des pratiques gouvernementales qui, indépendamment des proclamations, traduisent un parti pris répressif entre l’individuel et le collectif dans les sociétés occidentales.

*

Émeutes et responsabilité du fait d’autrui

Le garde des sceaux veut « rappeler aux parents un certain nombre de choses ». Il peut rappeler autant de choses qu’il le souhaite : aucune loi n’interdit aux gens de sortir, si ce n’est un couvre-feu. Ce n’est donc pas la peine de proférer des menaces, car appliquer des sanctions pour des conduites permises par la loi (sortir ou laisser sortir ses enfants) serait illégal.

Le garde des sceaux, comme le président de la République avant lui, qui sont censés parler dans le cadre de leurs fonctions au nom de la loi, ont parlé au nom d’un certain sens de la responsabilité morale, mais avec ce genre de propos ils sont en dehors de leurs attributions, et ils ne font que discriminer les parents de certaines zones urbaines, car si les parents d’un émeutier venu de Neuilly-sur-Seine se faisaient visiter par la police, ils diraient qu’ils ne pouvaient pas savoir que leur fils sortait pour participer à une émeute alors qu’ils pensaient qu’il allait seulement faire sa rooftop party hebdomadaire à plein volume avec ses petits camarades de la Haute Ecole de marketing commercial, et l’on dirait alors « c’est vrai, ils ne pouvaient pas savoir », tandis que Fatma de Sarcelles devait savoir, quant à elle, et avait donc le devoir au nom de la loi d’enfermer son enfant à double tour : présomption de culpabilité.

Le premier soir d’émeute était imprévisible car spontané. Le deuxième soir était imprévisible car on pensait que les forces de l’ordre avaient rétabli l’ordre dont elles portent le nom. Le troisième soir, idem, etc. Il est vrai qu’à un moment le gouvernement a appelé les parents au secours. Au secours des forces de l’ordre. Mais, et c’est mon argument, il n’avait pas ce pouvoir. Il ne peut pas donner d’ordre aux parents, seulement aux policiers, gendarmes, RAID, brigades anti-terroristes, véhicules blindés…

Un président de la République a certes le droit de parler pour ne rien dire. Il a même le droit de parler, pour la première fois que je sache, des jeux vidéo, comme si c’était le moment. S’il sait qu’il existe un problème avec les jeux vidéo, que n’en a-t-il fait un sujet de campagne électorale, que n’a-t-il demandé le vote d’une loi au Parlement, que n’a-t-il cherché à prévenir ou endiguer leurs méfaits ? C’est bien le moment de parler des jeux vidéo, quand il lui est demandé, non pas de prévenir leurs méfaits, mais de rétablir l’ordre. S’il avait fait voter une loi pour interdire, confisquer, réglementer – que sais-je ? – les jeux vidéo, il aurait aujourd’hui un pouvoir contre ce danger, mais il nous dit : « Je n’ai rien fait contre les jeux vidéo, je ne vous en ai même jamais parlé, c’est comme si je ne m’étais jamais rendu compte de rien, et voilà le résultat. » C’est surréaliste. Il peut dire ce qu’il veut aux parents, il n’a pas été élu pour donner des leçons de pédagogie. Qu’est-ce qui lui fait croire que les parents ont encore de l’autorité sur leurs enfants, d’abord ? Le problème de l’autorité touche les familles au premier chef, et ce n’est pas comme si l’État français ne s’était pas acharné contre l’autorité dans les familles ces dernières décennies. Quant à la prévisibilité de la durée des émeutes, les médias parlent d’un précédent de 2005 et je trouve très fort que tout le monde, apparemment, ait tout de suite compris que c’est 2005 qui était en train de se refaire. La perspicacité des commentateurs de ce pays est quelque chose de merveilleux.

Les médias faisant les titres sur 2005, s’ils parlent d’une longue série, plutôt qu’un précédent unique, cela n’apparaît pas dans les titres. Ils n’ont qu’à écrire dans les titres que c’est le dernier numéro d’une longue série pour que le discours de la durée prévisible des émeutes devienne crédible, car, je le reconnais, je n’ai pas souvenir d’autres dates. Je me souviens, en revanche, des Gilets jaunes, il n’y a pas si longtemps, et des manifestations contre la réforme des retraites, encore plus près de nous. Et de certaines images qui se ressemblent. Cependant, les gens capables de faire des pronostics à partir d’un précédent vieux de dix-huit ans ne sont pas des pronostiqueurs mais des agitateurs. Je voudrais que le garde des sceaux leur rappelle un certain nombre de choses à eux aussi. 99 % des Français ne lisent que les titres des journaux (plutôt que le journal tout entier) et seraient donc forcément convaincus que le précédent date de 2005 si des agitateurs professionnels et qui devraient se faire rappeler un certain nombre de choses ne soufflaient sur les braises.

Les propos sur la responsabilité des familles sont, comme pour les jeux vidéo, de la diversion : c’est évoquer des voies d’évolution législative dans un futur hypothétique alors qu’il est question de savoir quels pouvoirs exécutifs (ce qui n’inclut pas l’action contentieuse civile : voir supra) on emploie et comment pour rétablir l’ordre. Ils sont déjà dans « l’après », pour éloigner l’attention du présent. Et cet après ne répond évidemment même pas à la question des violences policières, puisque les agitateurs professionnels et le gouvernement sont d’accord pour dire que cela n’existe pas.

Contre les agitateurs professionnels, il faut des poursuites pénales pour incitation à la haine, à la suite de propos sur de grands médias, tels que « Ces gens se permettent des choses que les Français ne se permettraient jamais » (comme si les émeutiers n’étaient pas français) et « Pour eux, c’est une guerre de conquête ». À défaut de poursuites pénales, il s’agit de comprendre que ce gouvernement applique la législation de répression des propos haineux de manière discriminatoire en vue d’assurer l’impunité de certains. Que pourrait dire un procureur de la République prononçant le réquisitoire attendu ? Voici. (1) La République française applique le principe de la nationalité par droit du sol, il est par conséquent certain que la grande majorité des émeutiers, dont de nombreux mineurs, sont français. L’auteur des propos se fonde quant à lui, de manière illégitime, sur le droit du sang pour dénier la qualité de Français aux personnes en question. À partir d’une définition fictive, il oppose les comportements de deux catégories de personnes, les étrangers et les Français : ces derniers n’auraient pas de tendances émeutières en vertu de la qualité de leur sang ou d’un attachement millénaire au sol (car ils sont « de souche »). Ceci est de l’incitation à la haine envers les personnes d’origine étrangère, c’est-à-dire « à raison de » leur race, ethnie ou religion, personnes dont la présence serait, à raison de leur race etc., la raison des émeutes, et même la seule raison (la police est hors de cause). La conclusion en est nécessairement que ces personnes doivent être écartées d’une manière ou d’une autre, à raison de leur race etc., dans un souci d’ordre public, car sans ces « étrangers » pas d’émeutes. (2) La « guerre de conquête » est, pour l’auteur de ces propos, une nouvelle conquête de la France par les Sarrasins. Ces émeutes n’ont, pour lui, rien à voir avec des violences policières inexistantes : il s’agit d’un affrontement civilisationnel qui nécessite de la part de la France des mesures défensives contre ces personnes à raison de leur ethnie ou religion, c’est-à-dire des mesures discriminatoires assumées en tant que telles. Sans de telles mesures, la France sera conquise et perdue. Ceci est de l’incitation à la discrimination et à la haine.

(ii)

Sur la responsabilité des parents, il existe un principe de responsabilité civile du fait d’autrui, à l’article 1242 (ancien article 1384) du Code civil : « On est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre … Le père et la mère, en tant qu’ils exercent l’autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux. … La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère ne prouvent qu’ils n’ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité. » Cependant, la doctrine souligne, pour dire qu’elle n’apprécie pas ce principe, que notre droit ne reconnaît pas un principe de responsabilité générale du fait d’autrui (il n’existe pas du tout en matière pénale : art. 121-1 CP). Après avoir tellement entendu parler de justice des mineurs sans avoir entendu parler en même temps de ces dispositions de responsabilité civile des parents du fait de leurs enfants, je suis porté à croire que les autorités les ont purement et simplement oubliées, et il n’est donc nullement légitime de leur part de les évoquer aujourd’hui, dans le contexte d’une pratique de la justice des mineurs qui l’ignore, ainsi que de l’acharnement de l’État français contre l’autorité dans les familles (qui fait obstacle à une imputation de responsabilité des parents). Mais surtout, puisqu’il s’agit de responsabilité civile, il faut, pour qu’elle soit engagée, des constitutions de partie civile. La justice des mineurs dissuaderait-elle les victimes de se constituer partie civile aux procès ? Ou bien les avocats des victimes oublient-ils de leur dire qu’elles peuvent demander d’engager la responsabilité des parents ? Ou bien la preuve que les parents n’ont pu empêcher les infractions commises par leurs enfants est-elle plus ou moins automatiquement acquise ?

L’État pourrait, j’imagine, se constituer partie civile pour les dégâts sur les équipements publics relevant de lui, mais c’est la portion congrue, la plupart des équipements touchés relevant des collectivités, qui ne sont pas à la botte du garde des sceaux. L’État peut engager des poursuites pénales (l’action publique) sans plaignant mais, pour le paiement de dommages-intérêts aux victimes, il faut un volet civil au procès, c’est-à-dire une constitution de partie civile. Les menaces du garde des sceaux ne pourraient donc, dans le cadre de la responsabilité du fait d’autrui de l’article 1242 CC, se réaliser que si l’État lui-même peut se porter partie civile, ce qui semble impossible pour des dégâts non seulement sur des biens privés mais encore sur des équipements qui relèvent des collectivités locales.

Le dépôt de plainte avec constitution de partie civile implique le versement d’une consignation, plus les frais du procès ensuite (frais d’avocat). C’est pourquoi il existe des dispositifs pour procéder à une réparation en dehors de tout procès, en raison de quoi les victimes s’abstiennent plus facilement de se constituer partie civile : Fonds de garantie des infractions (pour les actes de terrorisme, les infractions ayant entraîné la mort ou une invalidité grave, les viols et agressions sexuelles), mesures indemnisant les commerces vandalisés lors de manifestations publiques, et autres.

Or, « en l’absence de texte spécial (ce qui devient rare), la Cour de cassation, chambre criminelle, déclare souvent l’action de l’association irrecevable devant la juridiction répressive (surtout lorsqu’il s’agit d’association à but désintéressé), au motif que le préjudice causé par l’infraction n’est pas personnel à l’association (le même argument conduit à repousser, sauf texte contraire, l’action civile exercée par l’État, le département ou la commune, dont l’intérêt se confond avec l’intérêt social protégé par l’action publique). Permettre aux associations d’exercer largement l’action civile devant la juridiction répressive (c’est-à-dire de déclencher l’action publique) serait empiéter sur les prérogatives du ministère public, défenseur attitré de l’intérêt général. L’action civile, dans l’aventure, perdrait son caractère fondamental d’action en réparation pour devenir un simple moyen de déclencher l’action publique » (J. Larguier, La procédure pénale, 1994). Sauf texte spécial, pas plus que les collectivités, l’Etat ne pourrait donc nullement se constituer partie civile dans ces émeutes et demander aux parents de payer via l’article 1242 CC. Du reste, l’argument cité par l’auteur, qui écrivait avant l’existence en France d’un contrôle de constitutionnalité, montre assez ce qu’il faut penser de ces textes spéciaux : ils dérogent à des principes fondamentaux, notamment (1) le monopole de l’accusation publique détenu par le ministère public (le parquet) et (2) le principe selon lequel l’intérêt de l’État se confond avec l’intérêt social protégé par l’action publique. Ces textes spéciaux semblent donc parfaitement inconstitutionnels.

Dans Le Parisien du 13 juillet 2023 (pages Grand Parisien), on trouve une interview du procureur général, qui affirme : « À Créteil, le parquet a aussi notifié leurs obligations par écrit aux parents des mineurs déférés devant le juge, pour leur signifier très clairement que leur responsabilité pouvait être engagée. » Très clairement, le parquet parle pour les autres. En tant que responsable de l’action publique, le parquet applique le principe pénal contenu à l’art. 121-1 CP, « Nul n’est responsable pénalement que de son propre fait », c’est-à-dire que les parents sont hors de cause selon ce principe. Le principe civil, qui est que « la responsabilité civile est plus étendue que la responsabilité pénale » et dont une application est l’art. 1242 CC concernant entre autres les parents d’enfants mineurs habitant chez eux, échappe donc à tout pouvoir du parquet : pour être mis en œuvre, ce principe nécessite une action civile (à la différence de l’action publique). C’est un peu comme quand, dans le même numéro du Parisien, le ministre de l’intérieur, au sujet d’un fait divers mortel, annonce, et c’est la conclusion de l’article : « Ce drame ne restera pas impuni. » C’est Mme Irma avec sa boule de cristal qui le lui a dit ? Car, pour ce qui concerne les attributions du ministre, elles ne s’étendent pas jusqu’à punir les crimes et délits, ce qui relève de la justice, alors qu’il est, lui, au gouvernement. Si la personne déférée à la justice est déclarée irresponsable, par exemple, le ministre sera démenti. L’action publique dépend certes du gouvernement, le parquet étant soumis à son pouvoir hiérarchique, mais quand le ministre dit « ce sera puni », il ne peut parler que de ce qui relève de son pouvoir ; or la punition au sens courant, la peine judiciaire, relève de la justice, mais peut-être que l’on peut aussi considérer des poursuites comme une punition en soi, si les autorités savent s’y prendre (« nous l’avons bien puni, nous pouvons à présent le déférer à la justice ») ; il faudrait demander à la Cour européenne des droits de l’homme ce qu’elle en pense. – Et toujours dans le même numéro, un article sur L’IGPN saisie après l’interpellation de Youssouf Traoré, lequel manifestait comme les années précédentes contre la mort de son frère Adama à la suite d’une interpellation policière en 2016.

*

La chanteuse Izïa [Higelin] évoque le lynchage de Macron en plein concert, le parquet de Nice ouvre une enquête. (Le Parisien, juillet 2023)

Ce gouvernement ne connaît pas le droit à l’hyperbole et est donc ignorant en matière de liberté d’expression. Le grief, provocation à commettre un crime ou délit, n’est nullement crédible, c’est du flicage gouvernemental de la parole. Des Gilets jaunes ont été relaxés après une décapitation symbolique (voyez mon essai L’art de la décapitation symbolique ici) mais ça n’a pas empêché le parquet du même exécutif bis de traquer une nouvelle violence à pantin plus récente, comme si la justice n’avait rien dit sur le sujet. C’est lamentable.

La provocation à commettre un crime ou délit, c’est l’article 24 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Cet article 24 précise qu’il faut avoir « directement provoqué » et concerne les propos qui n’ont pas été suivis d’effet. Ici, les propos n’ont certes pas été suivis d’effet (à part le déplacement des gendarmes, mais c’est un autre problème), et pour cause ils ne pouvaient être suivis d’aucun effet, Macron n’étant pas présent au concert, et hors de ce contexte les propos ne peuvent s’entendre comme une provocation, au vu de la forme. Comment cela pourrait-il donc passer pour une provocation « directe » ? Le mot n’est pas là pour faire joli. Une provocation directe est une provocation plus une autre condition, qui fait ici défaut. Une provocation est directe quand elle est susceptible d’avoir un effet immédiat ou imminent. Par exemple, si Izïa Higelin avait dit : « Allez, on casse tout ici », même si ce n’avait pas été suivi d’effet, c’aurait été une provocation directe à du vandalisme car la foule des spectateurs aurait pu en effet tout casser. Mais l’audience n’aurait pas pu agir aux termes de ladite provocation en cause, donc celle-ci, même si c’était une provocation, ne serait pas directe.

*

La polygamie existe en droit français

La polygamie est un régime juridique ; ce n’est pas ce régime qui fait qu’un homme a ou peut avoir plusieurs femmes en même temps (polygynie), mais seul ce régime juridique permet à un homme d’avoir des enfants légitimes de plusieurs femmes en même temps. Or la reconnaissance des enfants naturels dans notre droit a exactement cette conséquence, ce qui fait que notre droit reconnaît la polygamie.