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LII Trois articles sur l’indonésien et l’Indonésie
Les trois articles suivants, deux recensions de livre et une recension de documentaire filmé, ont été publiés dans la défunte revue de l’association franco-indonésienne Pasar Malam, Le Banian, dans le n° 21 de juin 2016 pour le premier et dans le n° 22 de décembre 2016 pour les deux autres.
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L’indonésien de Philippe Grangé
Philippe Grangé, directeur de l’Institut universitaire de l’Asie-Pacifique à l’Université de La Rochelle, membre du comité de rédaction et collaborateur régulier de la revue Le Banian, vient de publier un livre sur la langue indonésienne, aux éditions Peeters.
L’avant-propos, repris en quatrième de couverture, indique que l’ouvrage « a pour objectif de permettre au lecteur, même sans formation en linguistique, d’appréhender les caractéristiques essentielles de l’indonésien ». Le livre fait partie de la série Les Langues du monde, une collection de la Société de linguistique de Paris. Je confirme qu’une formation en linguistique n’est pas nécessaire pour lire et apprécier ce livre, qui n’en est pas moins un livre de linguistique, s’intéressant à la langue en tant qu’objet plutôt que comme un médium à acquérir comme le ferait une grammaire. Le vocabulaire technique inhérent au domaine de la linguistique ne manque pas, ce qui pourra dérouter le profane, mais, dans l’ensemble, ce n’est pas un obstacle dirimant à la compréhension du propos, ne serait-ce que parce qu’un bon nombre de ces termes sont explicités par l’auteur lui-même. Le fait que les citations anglaises ne soient pas traduites en français indique par ailleurs que le public visé a plutôt fait des études supérieures.
Il n’est pas non plus nécessaire d’avoir un bon niveau en indonésien pour apprécier le livre, qui pourra au demeurant consolider les bases acquises. Sa lecture permettra en tout état de cause de percevoir la logique de la langue et facilitera donc son apprentissage et son utilisation orale comme écrite.
Sans entrer dans une analyse approfondie des choix faits par l’auteur, qui serait bien au-dessus de mes capacités, je remarque tout de même que, par rapport aux grammaires que j’ai eu l’occasion d’utiliser pour apprendre l’indonésien, le traitement du sandhi, de ses exceptions et de leur raison d’être, est plus détaillé et plus précis, de même que le traitement des règles relatives à l’infixation (p. 71) ou encore de la différence entre sudah et telah (pp. 190 et s.), entre autres points sur lesquels je peux dire que la lecture du livre m’a permis d’améliorer ma connaissance pratique de l’indonésien.
L’ouvrage présente également des notes intéressantes sur les évolutions les plus récentes de la langue parlée (voire écrite, avec le mélange de langue écrite et de langue parlée qui se pratique sur internet) – par exemple, la tendance à remplacer l’affixe men- par nge, les suffixes -kan et -i par -in, etc. –, ainsi que sur la langue littéraire (pp. 193 et s.).
J’ai également appris que l’itération systématique utilisée pour certains noms d’animaux servait en particulier à désigner « les animaux sociaux ou apparaissant souvent en groupe » (p. 55). C’est une explication ingénieuse de ce recours un peu étonnant au marqueur du pluriel, mais je suis surpris de voir figurer, dans la liste de quelques « animaux sociaux » proposée par Ph. Grangé, l’araignée (laba-laba), qui me semble être l’exemple même de l’insecte solitaire, alors que, par ailleurs, le nom indonésien des fourmis (semut) et des termites (rayap) ne recourt pas à l’itération.
La section sur les néologismes est également très instructive. « Les néologismes sont presque toujours construits sur les bases sanscrites (langue morte prestigieuse) et/ou nousantariennes (de l’archipel, de préférence le malais). » (p. 50). Ce qui n’empêche pas l’emploi occasionnel de l’arabe, avec parfois des constructions arabo-sanscrites (nirakal, « insensé », nir sanscrit, akal arabe ; nirbau « inodore », nir sanscrit, bau arabe) témoignant, au même titre que de multiples autres phénomènes, du syncrétisme de la culture indonésienne. Cela dit, je ne sais pas si des considérations géopolitiques sont à l’œuvre dans le fait que l’arabe ne soit pas plus utilisé dans la construction de néologismes en indonésien. La description du sanscrit en tant que langue morte est par ailleurs certainement exacte dans le contexte indonésien mais ce serait une affirmation controversée en Inde, à tout le moins dans les milieux hindouistes, où certains s’évertuent à faire revivre le sanscrit en tant que lingua franca du sous-continent. Le dictionnaire sanscrit que j’ai l’habitude de consulter en ligne s’appelle spokensanskrit, « le sanscrit parlé ».
Enfin, ce livre intitulé L’indonésien ne manque pas de rappeler la similitude de cette langue (bahasa Indonesia) avec celle parlée dans la Malaisie voisine (bahasa Malaysia). Il relève cependant un accroissement des différences au fil du temps : « Les points essentiels de notre description de l’indonésien sont applicables au malaisien, car leur morphosyntaxe est largement commune. Cependant, leurs lexiques respectifs divergent de plus en plus. » (p. 3). Cela ne laisse pas d’étonner, compte tenu des efforts de rapprochement déployés dans le cadre du Majlis Bahasa Brunei Darussalam Indonesia Malaysia (MABBIM), rappelés par Ph. Grangé à la p. 23. Dans l’introduction à son dictionnaire indonésien-français (1984), Pierre Labrousse indique quant à lui : « les écarts linguistiques sont destinés à se réduire progressivement du fait de la volonté politique de faire évoluer l’indonésien et le malaysien vers une réunification. » Il semblerait donc que trente ans après ces efforts aient fait long feu.
Les différences, voire les différends, politiques pourraient l’expliquer, mais, d’un point de vue strictement pragmatique, ce n’est pas sans être un peu dommage, dans la mesure où parler de « l’indonésien-malais » (l’expression est de Grangé) contribuerait à élargir le public potentiellement intéressé, en visant un ensemble d’au moins quatre entités nationales plutôt qu’un pays unique. Un pays comme Singapour présente à cet égard, bien que de taille très réduite et malgré le fait que le malais n’y soit pas la principale langue officielle, un intérêt particulier en raison de son succès économique ; la liste du PIB par habitant (en parité de pouvoir d’achat) dressée par le FMI en 2015 place Singapour à la troisième place mondiale, juste devant… le Brunei (qui dispose de ressources pétrolières importantes). Singapour détient également le record du monde du quotient intellectuel.
Ph. Grangé ne passe pas non plus sous silence les ressources linguistiques disponibles sur internet, en particulier la version en ligne du Kamus Besar Bahasa Indonesia (p. 23), dont il précise qu’il existe une version gratuite pour smartphone. Cette application, que j’utilise, recourt malheureusement à la publicité de manière abondante et passablement intempestive.
Enfin, en tant que membre du comité de rédaction de la revue Le Banian, je remercie Philippe Grangé de mentionner l’activité éditoriale de l’Association franco-indonésienne Pasar Malam (p. 26).
L’indonésien
Philippe Grangé
Éditions Peeters – Les Langues du monde, mars 2016
248 pages
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Ailleurs des mots,
choix de poèmes d’Acep Zamzam Noor,
traduits de l’indonésien et présentés par Étienne Naveau
Les Presses Sorbonne Nouvelle éditent une série de « Cahiers de poésie bilingue » dont le cinquième numéro est Ailleurs des mots, un choix de poèmes d’Acep Zamzam Noor, poète indonésien contemporain (né en 1960), traduit et présenté par Étienne Naveau.
Chaque poème apparaît dans sa langue originale et vis-à-vis de sa traduction française. Des notes de bas de page explicitent les choix du traducteur. Cette lecture peut donc intéresser les amateurs de poésie ainsi que ceux qui étudient la langue indonésienne.
À condition qu’ils ne se laissent pas décourager par le quatrième de couverture : « Le langage consacre la perte de l’être. L’œuvre d’Acep Zamzam Noor … s’emploie à dire ce manque, en épurant la langue pour lui permettre de suggérer une réalité qui l’excède. » Cette pensée (anonyme) pourrait s’appliquer à tout ou partie de la poésie occidentale contemporaine, qui dérive indéfiniment dans l’hémisphère gauche du cerveau (intellectuel), mais non, je trouve, la poésie d’Acep, qui, comme tout ou partie de la poésie contemporaine des pays dits émergents, reste lisible et intéressante, n’ayant pas encore complètement renié son siège naturel dans l’hémisphère droit (émotionnel).
Le choix même du titre de ce cahier est insolite. Ailleurs des mots, pour un esprit un peu rigidement grammatical, signifie « il y a des mots ailleurs », mais c’est la traduction de Di Luar Kata, qui signifie, grammaticalement, « en dehors des mots » ou « en dehors de la parole », et l’explication du traducteur précisant, même si ce n’est pas franchement grammatical non plus, qu’il s’agit d’« un ailleurs des mots » est requise pour que le sens nous apparaisse. Les tendances idiosyncratiques et agrammaticales dans l’emploi de la langue, qui ne se justifient pas en tant que « licence poétique » dans une forme de versification entièrement libre, sont un trait saillant de la poésie « sénestrohémisphérique ».
Les pays émergents, dont l’Indonésie, ne présentent pas encore un tel tableau, et la poésie n’y a pas l’apparence d’une simple (mais obscure) réflexion sur la parole (« le langage consacre la perte de l’être »). On y est encore en prise avec la vie vécue. Et s’il est question, chez Acep, de mystique, et si « tout grand spirituel se nourrit du paradoxe » (citation d’É. Geoffroy par Étienne Naveau), le paradoxe chez le mystique ne fait pas, comme dans notre poésie contemporaine, l’effet d’une juxtaposition de termes s’annulant les uns les autres – l’effet produit par celui qui, dans un sens très concret, parle pour ne rien dire.
Dans son introduction, Étienne Naveau situe l’œuvre d’Acep Zamzam Noor dans la continuité des « grands mystiques musulmans comme Rûmî et Ibn ‘Arabî », ainsi que du poète indonésien Amir Hamzah, mais souligne aussi la parenté de son écriture avec celle de l’« artiste bohème » Chairil Anwar. Il évoque son éducation dans un pesantren de l’ouest de Java (Acep est le fils d’un maître de pesantren, ou kyai), son attachement à ses racines rurales et à son pays soundanais, son activité de poète et de peintre. Il qualifie son mode de vie de « rousseauiste ».
Le rattachement au courant de la mystique islamique, qui a produit de grands poètes, est abordé par Acep lui-même, qui revendique cette filiation en même temps qu’il se déclare indigne de porter le flambeau : « Je ne suis pas poète à la manière d’Attar ou de Rûmî / Ma bouche est flétrie des odeurs d’hôpital / Tandis que mon ouïe s’est durcie à charrier des déchets d’usine » (Bukan penyair seperti Attar atau Rumi Mulutku busuk meniupkan bau rumah sakit Sedang telingaku deras mengalinkan kotoran pabrik).
Le rousseauisme d’Acep est également apparent dans ses descriptions des villes et de leurs foules, telles que celle-ci, dans son poème Jakarta, où il s’adresse à la ville elle-même : « Comment pourrai-je aller tout droit / Vers ton cœur ? Je n’ai pas de plan, je n’ai pas appris les itinéraires / Les rues parfois m’égarent / Les panneaux de signalisation parfois me désorientent / Comme des affiches publicitaires » (Bagaimanakah aku bisa langsung Ke hatimu? Aku tak punya peta, tak hapal rute Jalan-jalan kadang menyesatkan Rambu-rambu kadang membingunakan Seperti papan-papan iklan). Une dénonciation poignante de la « pollution visuelle » des villes contemporaines, dont les pouvoirs publics commencent seulement à prendre conscience ou à prétendre y apporter des solutions.
Car les effets d’une telle pollution sont loin d’être négligeables : « Et je suis ivre / En buvant la boue du siècle, en mangeant les déchets de la civilisation » (Dan aku mabuk Minum lumpur zaman, makan sampah peradaban). Cet état d’ivresse ou de vertige (mabuk) conduit à des sentiments au mieux mitigés pour nos frères humains : « Pourquoi restai-je immobile, mon amour, / À contempler leurs triomphes qui m’écœurent / Mais aussi leurs échecs qui ne m’émeuvent plus » (Mengapa aku hanya diam saja, kekasihku, Menyaksikan kemenangan-kemenangan yang menggelikan Juga kekalahan-kekalahan yang tak lagi mengharukan).
Étienne Naveau rappelle également que l’allégorie mystique peut être chez Acep à double sens, à savoir que, si elle se sert , comme chez ses prédécesseurs, de l’eros humain pour décrire l’expérience de l’amour divin, elle peut aussi – et alors « la hiérarchie est subvertie » (Naveau) – se servir de l’expérience mystique pour décrire l’amour humain, comme dans le poème Zikir, où le dhikr, ou récitation incantatoire du nom de Dieu par les soufis, est adressé à une « Anne » selon toute apparence très humaine. De même, les vers « J’ai essaimé dans les bordels, les venelles humides [et même bourbeuses : becek] / Les wagons sans maîtres, les mosquées, les églises et les temples » (Kutabur di rumah-rumah bordil, gang-gang becek Gerbong-gerbong tak bertuan, masjid, gereja dan candi), du poème Dans des corps que je ne connais pas (Di tubuh-tubuh tak kukenal), ont un sens littéral que d’aucuns jugeront peu respectueux des sensibilités religieuses. Des poèmes mystiques plus classiques concluent l’ouvrage, dans la partie « Vers la clarté divine ».
Ailleurs des mots
Acep Zamzam Noor
Traduction de l’indonésien par Étienne Naveau
Presses Sorbonne Nouvelle, novembre 2016
96 pages
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Plantungan de Fadillah Vamp Saleh et Putu Oka Sukanta
Plantungan. Potret Derita dan Kekuatan Perempuan (Plantungan, un tableau de la souffrance et de la force des femmes) est un film documentaire indonésien d’une durée de quarante-cinq minutes réalisé par Fadillah Vamp Saleh et l’écrivain Putu Oka Sukanta en 2011. Il évoque le camp de Plantungan, où furent internées des centaines de femmes à la suite des purges politiques de 1965 qui visèrent en particulier le parti communiste indonésien (PKI ou Partai Komunis Indonesia), en donnant la parole à d’anciennes détenues. Le film est sous-titré en anglais.
Plusieurs femmes témoignant dans le film évoquent leur appartenance à des organisations proches du parti communiste, comme le Mouvement des femmes indonésiennes (Gerwani ou Gerakan Wanita Indonesia) ou les Jeunesses populaires (Pemuda Rakyat). D’autres ne paraissent pas savoir la cause de leur enfermement ; l’une d’elles dit par exemple qu’elle était totalement ignorante en politique.
Ces femmes furent d’abord internées, sans procès, à la prison de Bukit Duri, à Jakarta. Ce n’est qu’en 1971, donc quelque six ans plus tard, qu’elles furent transférées au camp de Plantungan, sur l’île de Buru. Le site était une ancienne léproserie à l’écart du monde, dans la forêt. Ce fait parlera aux connaisseurs de Michel Foucault, dont font apparemment partie les réalisateurs du film, qui évoquent l’ostracisme subi par ces femmes en raison de leur « lèpre politique » (lepra politik)*.
À l’époque, le site était à l’état d’abandon, impropre à habiter, a fortiori pour des centaines de personnes, et les femmes durent elles-mêmes en faire un lieu de vie, sans avoir les outils nécessaires : l’une d’elles rappelle qu’elles arrachaient les broussailles à la main. Les serpents s’y trouvaient en grand nombre, et les détenues s’en nourrissaient, ainsi que d’escargots, de crabes et de larves. C’est ce désert que les autorités indonésiennes appelaient un centre de réhabilitation pour détenus politiques. Le camp était clôturé.
Telles étaient les conditions à l’arrivée des femmes à Plantungan. Pour leur subsistance elles pratiquaient l’agriculture. Les autorités du camp leur imposaient par ailleurs divers travaux quotidiens, dont la nature n’est pas précisée dans les témoignages. Mais surtout, ces femmes, qui semblent avoir été pour la plupart des personnes éduquées de la ville, créèrent une clinique, d’abord pour leur propre usage et celui des autorités du camp mais dont les services furent bientôt demandés par les villageois des alentours. C’est ainsi que la règle selon laquelle les détenues ne devaient pas avoir de relation avec l’extérieur fut finalement ignorée et que la clinique de Plantungan devint un centre de soins important dans la région, et ce en dépit également des préventions initiales des populations à l’égard de personnes stigmatisées par le régime. Le succès de cette clinique paraît avoir été dû au fait que les détenues acceptaient les paiements en nature.
Les réalisateurs du film donnent également la parole à une jeune représentante de la Commission nationale indonésienne sur les violences faites aux femmes (Komnas Perempuan), un organisme qui conduit des campagnes de sensibilisation sur cette question et a publié des brochures et des livres sur le passé et la situation du pays en la matière. Elle évoque des violences sexuelles à Plantungan, qu’elle qualifie de viols.
Ce témoignage officiel alterne avec celui de l’une des détenues, qui sonne un peu différemment. Cette détenue, qui semble avoir été le médecin de la clinique, est plus ambiguë quant au rôle de certaines détenues, et je vais la citer. Elle affirme que certaines détenues étaient « coquettes » (flirtatious, dans les sous-titres anglais), « tentées par une vie facile ». Elle évoque en particulier le cas de l’une d’entre elles qui devint la compagne d’un commandant du camp et dont « l’attitude au jour le jour était devenue celle d’une épouse ». Elle ajoute : « Nous ne disions rien, nous avions peur, il n’était pas simple de savoir qui était ami et qui ennemi. C’était la situation dans le camp. » Une autre indique que deux enfants sont nés de la liaison d’une détenue avec un commandant.
Selon une source internet présentant le film, l’organisation Komnas Perempuan affirme, dans sa documentation, que deux enfants sont nés dans le camp de Plantungan « à la suite de viols ». Au regard du témoignage que je viens de citer, il faudrait souligner, si ces deux naissances ont bien eu lieu dans les circonstances décrites par l’ancienne détenue, qu’il s’agirait de viols sans violence – en dehors de la violence en quelque sorte globale résultant de l’enfermement des personnes et de leur soumission à des gardiens.
Or je perçois dans le témoignage cité une forme de reproche à l’endroit des détenues « coquettes », qui devaient chercher à améliorer leur situation de cette manière. Il me paraît également évident que la mère des enfants du commandant devait recevoir un traitement de faveur. Le discours officiel est que cette femme, étant donné le contexte, n’a pas eu le choix. Le témoignage de l’autre détenue n’est pas si catégorique, et il n’est pas du tout impossible que la « promotion sociale » de cette femme ait eu indirectement des conséquences négatives pour les autres détenues, dans le contexte de pénurie qui est celui d’un camp.
La question se pose dans les mêmes termes dans toute relation de dépendance sociale entre hommes et femmes, et en particulier sur le marché du travail. Les entreprises de certains pays, notamment anglo-saxons, interdisent les relations sexuelles entre leurs salariés. Si certains font valoir que le travail est pourtant le principal lieu de rencontres pour de nombreuses personnes, cette interdiction est toutefois conforme à l’idée que le choix de la personne est forcément contraint dès lors qu’il intervient dans une relation de hiérarchie. La littérature prolétarienne abonde en exemples d’ouvrières forcées d’avoir des relations sexuelles avec le patron ou le contremaître, et l’effet recherché par de telles histoires n’est pas douteux (voir, par exemple, La Jungle d’Upton Sinclair).
Le rapport entre l’ouvrière et le contremaître est homologique de celui entre la détenue et le commandant du camp. Et l’on peut également concevoir que les ouvrières qui ont indirectement à souffrir de la promotion gagnée par l’une des leurs en échange des faveurs, même involontaires, que celle-ci accorde au contremaître en veuillent, au jour le jour, davantage à leur camarade qu’elles ne la plaignent d’avoir été forcée de se donner au contremaître à cause des inégalités sociales. Il n’est pas impossible que l’ouvrière ainsi « distinguée », si l’on peut dire, soit même perçue comme passant à l’ennemi, tout comme la détenue de Plantungan aux yeux des autres détenues, qui ne savent plus, du fait de ces conditions nouvelles, qui est ami et qui est ennemi dans le camp.
Le film ne dit pas combien de temps ces femmes ont été détenues à Plantungan. Deux d’entre elles indiquent qu’elles ont été en tout et pour tout, c’est-à-dire en comptant les années à la prison de Bukit Duri, privées de liberté pendant quatorze ans, et ce, encore une fois, sans le moindre procès. Le retour dans la société n’a pas été facile non plus. Dans de nombreux cas, peut-être dans tous, il s’agissait seulement de liberté surveillée : les ex-détenues devaient par exemple demander une autorisation pour tout déplacement. L’une d’elle témoigne que son fils, qui avait été à l’école pendant son absence et avait donc absorbé le discours politique du régime, lui en voulait d’avoir été communiste. Enfin, malgré les démarches de plusieurs anciennes détenues auprès d’une Commission des droits de l’homme, la reconnaissance de leurs souffrances par l’État indonésien, sous forme de réparations, ne semble pas à l’ordre du jour.
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*C’est, je crois, dans Surveiller et Punir (à moins que ce ne soit dans son Histoire de la folie à l’âge classique) que Michel Foucault évoque l’ambiguïté des prescriptions relatives aux lépreux dans le moyen âge chrétien. J’avoue d’ailleurs ne pas comprendre ce qu’il reproche à ce qui passe autrement pour avoir été des mesures salutaires de prophylaxie empirique, destinées à éviter la contagion. Foucault aurait été plus clair s’il avait expressément évoqué les cagots, ces parias du sud de la France et d’Espagne, dont le véritable statut d’intouchables, en vigueur jusqu’à la Révolution française de ce côté des Pyrénées et jusqu’au dix-neuvième siècle en Espagne, était justifié par les coutumes locales sur le fondement de la lèpre qui leur était imputée, une lèpre pourtant totalement imaginaire aux yeux mêmes des médecins de l’époque.
Glossaire de l’occulte malais II / Logat Ghaib Melayu
Le présent travail complète le premier Glossaire de l’occulte malais publié sur ce site (voir ici). Alors que celui-ci s’intéresse aux seules apparitions et créatures surnaturelles enregistrées dans la langue malaise, le présent travail aborde un plus large éventail de phénomènes. Il n’est nullement exhaustif et a vocation à être complété.
Chaque entrée comporte en premier lieu une définition en malais, tirée du Kamus Besar Bahasa Indonesia (KBBI), dictionnaire indonésien, ou du Kamus Bahasa Melayu (KBM), dictionnaire malaisien, ou bien des deux. Quand les deux définitions ont été retenues, parce qu’elles se complètent plutôt qu’elles ne se répètent, elles sont séparées par le signe /. Lorsque j’ai pu trouver l’équivalent en écriture jawi, dans le Daftar Rumi-Jawi, je l’ai ajouté entre parenthèses à côté de chaque entrée. Les définitions sont suivies de leurs traductions en français, auxquelles j’ajoute, entre crochets [], des commentaires personnels ou des précisions. Certaines entrées sont placées ensemble, sans considération de l’ordre alphabétique, quand elles renvoient à un même phénomène ou à des réalités identiques ou semblables.
Les abréviations utilisées sont les suivantes : Ar arabe, Cn chinois, Jk Jakarta, Jw Java, Mk Minangkabau.
…………….LOGAT GHAIB MELAYU
Alawar. Ar anak setan yang tugasnya menyebabkan zina dan perbuatan mesum sehingga manusia tidak malu melakukannya.
Alawar. Genre de diable dont la fonction est de provoquer l’adultère et les actes ignobles jusqu’à ce que l’homme n’éprouve plus aucune honte de sa conduite.
Asmaragama. ilmu atau seni bersanggama. Ajigineng. Jw pengetahuan mengenai teknik bersanggama.
Asmaragama. La science ou l’art de l’accouplement sexuel. Ajigineng. Le savoir relatif à la technique de l’accouplement. [Le terme asmaragama est un composé de deux mots issus du sanskrit, asmara (jawi اسمارا, sanskrit स्मर smara), l’amour et en particulier, en sanskrit, l’amour sexuel, et agama (اݢام, आगम), qui veut dire religion en malais, mais désigne en sanskrit une doctrine ou un précepte traditionnel, ou encore un recueil de ces doctrines, et peut servir à désigner les Védas. Le terme asmaragama est donc un précepte traditionnel, ou un recueil de préceptes, concernant l’amour sexuel, sur le modèle du Kamasutra indien. Le terme ajigineng peut également s’écrire aji gineng, ou ajian gineng, car il s’agit également d’un composé, avec le mot aji, qui désigne un charme ou une incantation magique, en d’autres termes un savoir occulte.]
Badi (بادي). pengaruh buruk (dari orang mati, binatang yang terbunuh, pohon keramat, dsb) 2 kelakuan yang luar biasa (mirip hewan dsb) yang diperoleh pada saat dilahirkan 3 zat yang menularkan penyakit.
Badi. Influence mauvaise (d’une personne décédée, d’un animal qui a été abattu, d’un arbre surnaturel, etc.). 2 Comportement anormal (par exemple, semblable à celui d’un animal) adopté par un individu depuis sa naissance. 3 substance pathogène.
Baureksa, Bahureksa. Jw roh penjaga dan pelindung.
Baureksa. Esprit gardien protecteur, génie tutélaire. [Provient du sanskrit : bahu (बहु) et raksa (राक्ष), grand démon ou démon puissant.]
Bidadari (بيداداري). putri atau dewi dari kayangan. 2 perempuan yang elok. Haur (هور), Hauri (هوري). Ar bidadari = hauri bidadari. Haur uljanati. bidadari surga.
Bidadari. 1 Femme ou déesse du paradis. 2 Belle femme. [Le terme bidadari vient du sanskrit vidhyadhari (विद्याधरी), qui désigne certaines déités féminines du paradis d’Indra. Le terme haur, ou hauri, est le nom des vierges du paradis du Coran, les houris. L’expression haur uljanati n’est autre que l’arabe pour « houri du paradis » (حور الجنة). Dans les dictionnaires indonésiens et malaisiens, l’un de ces noms, sanskrit ou arabe, sert à définir l’autre.]
Bisa Kawi. kekuatan gaib (tulah dsb) yang menimpa orang karena melanggar adat dsb.
Bisa Kawi. Malédiction frappant une personne à la suite d’une transgression de la coutume.
Bomoh (بوموه). tabib yang mengubati orang sakit dengan menggunakan ubat tradisional atau cara kampung dan jampi-jampi. = Balian (بليان)
Bomoh. Guérisseur qui traite les malades avec des remèdes traditionnels ou des formules magiques.
Brata. tindakan pengendalian diri: ada tiga brata yang mesti dilakukan berkaitan dengan Syiwaratri, yaitu tidak tidur selama 36 jam, berpuasa selama 24 jam, dan tafakur memusatkan pikiran pada Syiwa. Tapa Brata. bertarak; menahan hawa nafsu, berpantang, dsb.
Brata. Pratique du contrôle de soi : trois formes de brata doivent être pratiquées en liaison avec le festival de Syiwaratri, à savoir veiller pendant trente-six heures, jeûner pendant vingt-quatre heures, et méditer en concentrant ses pensées sur le dieu Shiva (Syiwa). Tapa Brata. ascèse ; maîtrise des passions, refus de céder à la tentation de l’interdit, etc. [Du sanskrit vrata (व्रत), un acte de pieuse observance ou d’austérité, comme le fait de se nourrir seulement de lait ou d’une autre sorte d’aliment unique, mais aussi un vœu solennel, notamment de se consacrer à l’étude des Védas. La définition ici donnée de tapa brata ne rend pas le caractère superlatif de cette pratique, définie dans le dictionnaire indonésien-anglais d’Echols comme « the highest form of asceticism », à savoir le sanskrit tapovrata (तपोव्रात) – une multitude d’austérités –, combinaison de tapas (तपस्), ascétisme, et de vrata.]
Buluh Perindu. 1 alat bunyi-bunyian yang menghasilkan bunyi jika ditiup, terbuat dari bambu tipis. 2 buluh yang dapat menimbulkan bunyi sedih dan sayu jika tertiup angin.
Buluh Perindu. 1 Instrument de musique à vent, en bambou mince. 2 Bambou rendant un son triste et mélancolique quand le vent le fait bruisser. [Ces définitions n’évoquent pas un aspect magique de ce bambou, lequel est pourtant apparent dans son nom scientifique, Bambusa magica. Echols donne la définition suivante : « Mythical kind of bamboo used to make flutes that produce melodies irresistible to women. » Selon d’autres versions, si une personne garde un morceau de l’écorce de ce bambou dans la bouche, sa voix devient irrésistible.]
Candradimuka. kawah di kayangan (dalam pewayangan).
Candradimuka. Nom d’un volcan du paradis (dans les légendes). [Plus exactement, dans le théâtre wayang reprenant les récits du Mahabharata. Candradimuka est le cratère du mont Jamurdipa, d’où, selon Echols, les enfants naissent directement adultes.]
Cenayang (چنايڠ). dukun (pawang) yang dapat berhubungan dengan makhluk halus. Prewangan. Jw penghubung dengan dunia roh. / bomoh yang boleh menghubungi semangat = Dukun prewangan.
Cenayang. Sorcier capable d’entrer en contact avec les esprits, shaman. Prewangan. Shaman capable d’entrer en contact avec les esprits.
Cenduai (چندواي). guna-guna (mantra) untuk memikat hati wanita. Minyak cenduai. minyak pengasih (guna-guna) untuk memikat hati wanita. Pelet (ڤليت). getah untuk menangkap burung. 2 minyak (dari ikan duyung) untuk memikat hati orang.
Cenduai. Sortilège (incantation) pour rendre une femme amoureuse. Minyak cenduai. « huile ~ », philtre d’amour, pour rendre une femme amoureuse. Pelet. 1 Résine, gomme servant à attraper les oiseaux. 2 Huile (tirée du lamantin, autrement connu sous le nom de dugong, d’après le malais) pour rendre une personne amoureuse.
Cindaku (چينداکو), Cendaku (چنداکو). Mk orang yang boleh menjadi harimau jadi-jadian (utk « harimau jadi-jadian » di sini).
Cindaku. Tigre-garou, personne capable de se transformer en tigre magique.
Combong (چومبوڠ). Jk pisau (sikin) yang berlubang pada bilahnya (dianggap bertuah).
Combong. Couteau (poignard) à lame percée (considéré comme magique).
Cuca (چوچا). mantra (jampi) untuk menawar bisa, mengobati luka, mengebalkan tubuh, dsb.
Cuca. Incantation (formule magique) pour neutraliser l’effet du poison, guérir les blessures, rendre le corps invulnérable, etc.
Dajal (دجال). Ar setan yang datang ke dunia apabila kiamat sudah dekat (berupa raksasa). / makhluk yang akan muncul untuk menyesatkan manusia sebelum terjadi kiamat, tetapi akhirnya dapat dibunuh oleh Nabi Isa a.s.
Dajal. Diable qui doit apparaître dans le monde à l’approche du jour du jugement dernier (et ayant l’apparence d’un démon/rakshasa). / Créature qui apparaîtra avant le jour du jugement dernier dans le but de tromper les hommes, mais qui sera finalement tuée par le Prophète Jésus. [C’est l’Antéchrist dans le contexte islamique.]
Darusalam (IN), Darussalam (MA) (دارالسلام). Ar 1 alam kesejahteraan (akhirat) 2 alam atau negeri yang aman. Cf. Darul harab. negeri yang rakyatnya belum memeluk agama Islam, lawan Darussalam (harab = perang). 3 surga ketujuh.
Darusalam. 1 Monde de la félicité (dans l’au-delà). 2 Contrée ou pays en sûreté, par opposition au darul harab, les pays dont les peuples n’ont pas encore embrassé l’islam (harab = guerre). 3 Le septième ciel.
Denah (دينه), Denah Jahat (دينه جاهت). hantu yang menyebabkan kaki menjadi bengkak.
Denah. Fantôme qui provoque l’enflure des jambes.
Gelang Bajang. gelang dari benang hitam (dipakai di tangan) untuk penangkal bencana.
Gelang Bajang. Bracelet de fil noir servant d’amulette.
Geliga (ݢليݢ), Guliga (ݢوليݢ). batu yang terdapat di tubuh binatang (ular, landak, dsb) yang mempunyai khasiat untuk menawarkan bisa dsb. = mestika hewan. Kemala (کمالا), Kumala (کومالا), Gemala. batu yang indah dan bercahaya (berasal dari binatang), banyak khasiatnya dan mengandung kesaktian: kemala hikmat (کمالا هکمت).
Geliga. Pierre que l’on trouve dans le corps d’animaux (serpent, porc-épic, etc.) et qui possède entre autres des vertus curatives. Kemala. belle pierre brillante (que l’on trouve dans le corps d’animaux) aux multiples propriétés et dotée de pouvoirs magiques. [C’est ce qu’on appelle un bézoard, et ces pierres étaient réputées en Occident aussi avoir des pouvoirs surnaturels. La crapaudine, par exemple, était censée se trouver dans la tête du crapaud.]
Gendam. mantra atau guna-guna yang dapat membuat orang menjadi terpesona.
Gendam. Formule magique d’envoûtement.
Halimunan (هليمونن). tidak kelihatan. Orang halimunan. orang halus (siluman, orang bunian) (di sini). Doa (Ilmu) halimunan. mantra atau ilmu yang dapat menjadikan badan tidak kelihatan.
Halimunan. Invisible. Orang ~. Esprit (siluman, orang bunian) (voir ici). Doa (prière) / Ilmu (science) ~. science de l’invisibilité.
Hantu Jerangkung. hantu orang mati.
Hantu Jerangkung. Revenant [littéralement, « fantôme squelette », car il a l’apparence d’un squelette humain.]
Jelangkung, Jailangkung. Cn boneka (orang-orangan, yang dilengkapi alat tulis di tangan, digunakan untuk memanggil arwah, dan jika arwah itu telah masuk ke dalam boneka tersebut diadakan tanya jawab, jawaban sang arwah diberikan melalui tulisan tangan boneka itu).
Jelangkung. Figurine de forme humaine ayant un crayon à la main, employée pour invoquer les esprits des morts ; quand un esprit est entré dans la poupée, et qu’on lui pose des questions, il y répond en écrivant par le biais de la figurine.
Jinjang (جينجڠ). pemimpin atau ketua (golongan, hantu, dsb). 2 dukun yang menguasai hantu. 3 badan atau orang yg kemasukan setan. 4 orang yang menemani utusan raja.
Jinjang. 1 Chef (d’un groupe, de fantômes, etc.) 2 Sorcier ayant le pouvoir sur les fantômes. 3 Corps ou personne possédée par un diable. 4 Personne accompagnant un envoyé du prince.
Julung (جولوڠ). Jw (orang yang) mempunyai nasib yang buruk sejak lahir lagi (seperti akan dibunuh dll).
Julung. Personne frappée du mauvais sort depuis sa naissance (et qui, par exemple, est destinée à mourir assassinée).
Kahin (کاهين). Ar 1 ahli (tukang) sihir. 2 ahli nujum. Nujum (نجوم). Ar 1 perbintangan untuk meramalkan (mengetahui) nasib orang. 2 bintang-bintang.
Kahin. 1 Magicien. 2 Astrologue. Nujum. 1 Divination par les astres, afin de connaître le destin d’une personne. 2 Les étoiles. [De l’arabe kahin (كاهن), devin, oracle, prêtre, sacrificateur. Nujum est le pluriel arabe de najm (نجوم / نجم), corps céleste, étoile, planète.]
Karang (کارڠ). Ilmu karang (علمو کارڠ). ilmu kebal. Kebal (کبل). tidak mempan senjata; tidak dapat terlukai oleh senjata. Ilmu kebal. ilmu yang membuat seseorang itu tidak luka oleh senjata tajam dan tidak dapat ditembusi peluru. Kebal penimbul. kebal kerana telah dimasukkan raksa ke dalam badan (dengan dijampi). Ilmu penimbul (علمو ڤنيمبول). ilmu yang mengebalkan orang (dengan menggosokkan raksa pada badan). Kebal simpul. kebal kerana tidak pecah tembuni ketika dilahirkan.
Karang. Ilmu karang. La science de l’invulnérabilité. Kebal. Invulnérable aux armes ; qui ne peut être blessé par une arme. Ilmu kebal. Science qui permet de protéger celui qui la pratique des blessures par armes blanches ainsi que des projectiles. Kebal penimbul. (Personne) invulnérable en raison du fait que du mercure a été introduit par magie dans son corps. Ilmu penimbul. Science de l’invulnérabilité (par l’introduction magique de mercure dans le corps). Kebal simpul. Invulnérable, pour être né sans avoir déchiré le placenta. [Au sujet de cette dernière définition, la chose n’est pas sans rappeler une tradition comparable en Occident, celle des enfants « nés coiffés », c’est-à-dire avec la tête couverte par la poche de liquide amniotique, et qui étaient censés connaître un grand succès dans la vie. David Copperfield, le personnage éponyme du roman de Charles Dickens, naquit coiffé (born with a caul) et son « casque » fut vendu comme talisman.]
Kebaji (کباجي). Mk guna-guna yang membuat suami istri saling berbantah sehingga bercerai.
Kebaji. Sortilège par lequel une femme et son époux sont conduits à se quereller jusqu’à séparation.
Khamzab. Ar anak setan yang bertugas mengecaukan orang yang sedang melakukan salat.
Khamzab. Genre de diable dont la fonction est de distraire les gens pendant la prière.
Lampor. Jw makhluk halus yang berarak.
Lampor. Procession de fantômes.
Maweda. upacara keagamaan di Bali yang dilakukan oleh para pedanda, yang dengan mengucapkan mantra menyebabkan Syiwa turun ke dalam tubuhnya sehingga dewa itu dapat mengubah air menjadi air suci.
Maweda. Cérémonie propre à la religion balinaise, au cours de laquelle le prêtre, par des invocations, fait descendre Shiva (Syiwa) dans son corps, de façon que le dieu puisse par son entremise transformer de l’eau en eau bénite. [La religion balinaise, Agama Hindu Bali, est l’hindouisme – un hindouisme autocéphale – et l’Indonésie est ainsi, avec l’Inde et le Népal, le seul pays à posséder une communauté hindouiste séculaire.]
Miswat. Ar setan yang tugasnya menyiarkan desas-desus, fitnah, kabar angin, dan pidato dusta sehingga masyarakat kacau dan berita bohong menjadi tolok ukur.
Miswat. Genre de diable dont la fonction est de répandre les rumeurs, les calomnies, les faux bruits et les discours mensongers, afin que la société soit plongée dans la confusion et que le faux passe pour le vrai.
Pakpui, Pakpue. Cn 1 ramalan tentang nasib (peruntungan), terdapat dalam kelenteng 2 tukang ramal Cina.
Pakpui. 1 Divination pratiquée dans les temples chinois. 2 Devin chinois.
Pancasona (ڤنچاسونا). mantra yang menyebabkan seseorang yang telah mati dapat hidup kembali.
Pancasona. Formule magique par laquelle une personne décédée est rappelée à la vie.
Pangkah (ڤڠکه). tanda silang atau coretan, msl pada dahi untuk penangkal roh jahat.
Pangkah. Symbole en forme de croix ou de lignes, en particulier sur le front, et servant de talisman contre les esprits malfaisants.
Pawang (ڤاوڠ). orang yang mempunyai keahlian istimewa yang berkaitan dengan ilmu gaib, seperti dukun, mualim perahu, pemburu buaya, penjinak ular. Pawang buaya. orang yang pandai menangkap atau menjinakkan buaya. Pawang gajah. orang yang pandai menangkap atau menjinakkan gajah. Pawang hujan. orang yang pandai menolak hujan. Pawang lebah. orang yang dapat menjinakkan lebah dan kebal terhadap sengatannya; orang yang ahli tentang lebah; juru cari madu.
Pawang. Personne douée de connaissances spéciales liées à un savoir occulte, à l’instar d’un shaman, d’un capitaine de navire, d’un dresseur de crocodiles, d’un charmeur de serpents. Pawang buaya. Personne experte dans l’art d’attraper ou de dresser les crocodiles. Pawang gajah. Personne experte dans l’art d’attraper ou de dresser les éléphants. Pawang hujan. Personne capable de chasser la pluie. Pawang lebah. Personne capable de domestiquer les abeilles et qui est immunisée contre leur piqûre ; personne experte en matière d’abeilles ; personne habile à trouver du miel.
Pelak (ڤلق), Pilak (ڤيلق). hantu jahat (dipakai juga untuk memaki).
Pelak. Esprit malfaisant (est aussi utilisé comme terme d’insulte).
Pelintuh (ڤلينتوه), Pelintoh. guna-guna (mantra) untuk melemahkan (semangat) lawan.
Pelintuh. Formule magique servant à affaiblir (l’esprit de) son adversaire.
Peruang (ڤرواڠ). mantra yang menyebabkan dapat tahan lama menyelam di dalam air (dengan menjadikan ruang udara di sekeliling badan): ilmu peruang. 2 siksaan atau hukuman dengan mengikatkan si terhukum pada tiang, kemudian kepalanya disiram dengan minyak babi yang mendidih hingga terhukum meninggal dunia.
Peruang. 1 Formule magique permettant de rester longtemps sous l’eau (en créant une bulle d’air autour du corps). 2 [Dans un tout autre registre] châtiment par lequel le condamné est attaché à un poteau et sa tête aspergée de saindoux bouillant jusqu’à ce que mort s’ensuive.
Pestaka (ڤستاک). kitab primbon (yang berisi ramalan, mantra, dsb) 2 pengaruh baik atau buruk (yang ada pada suatu benda dsb): pestaka keris. Pustaka (ڤوستاک). kitab; buku 2 buku primbon.
Pestaka. 1 Grimoire magique (comportant des recueils de prédictions, des formules magiques, etc.) 2 Influence surnaturelle bonne ou mauvaise (attachée, par exemple, à un objet, comme un kriss). Pustaka. 1 Livre. 2 Grimoire magique. [Du sanskrit pustaka (पुस्तक), livre.]
Primbon (ڤريمبون). kitab yang berisikan ramalan (perhitungan hari baik, hari nahas, dsb); buku yang menghimpun berbagai pengetahuan kejawaan, berisi rumus ilmu gaib (rajah, mantra, doa, tafsir mimpi); sistem bilangan yang pelik untuk menghitung hari mujur untuk mengadakan selamatan, mendirikan rumah, memulai perjalanan dan mengurus segala macam kegiatan yang penting, baik bagi perorangan maupun masyarakat.
Primbon. Recueil de prédictions (permettant notamment d’établir les jours fastes et néfastes) ; livre réunissant diverses connaissances occultes javanaises (diagrammes, prières, incantations, interprétation des rêves) ; système numérique compliqué permettant de calculer les jour propices pour faire des offrandes, construire une maison, entamer un voyage et arranger toutes sortes d’affaires importantes pour l’individu ou la société.
Pripih (ڤريڤيه). Jw sejenis azimat (tangkal).
Pripih. Sorte de talisman javanais (de protection).
Pukau (ڤوکاو). tepung (dari biji kecubung dsb) yang dipakai untuk memabukkan atau menyebabkan orang tidur nyenyak (dipakai oleh pencuri). 2 jampi yang dapat membuat orang lupa atau tidak sedar akan keadaan yang sebenarnya. Sirep (سيرڤ). mantra untuk membuat orang tertidur.
Pukau. 1 Poudre produite à partir de graines de datura (Datura fastuosa) et utilisée par les voleurs pour faire perdre à quelqu’un ses esprits ou le plonger dans un sommeil profond. 2 Formule magique visant à faire perdre à quelqu’un la mémoire ou bien à altérer son état de conscience. Sirep. Incantation visant à plonger une personne dans le sommeil.
Rajah (راجه). suratan (gambaran, tanda, dsb) yang dipakai sebagai azimat (untuk penolak penyakit dsb). 2 garis pada tapak tangan. 3 coreng-coreng (cacahan) pada tubuh yang dibuat dengan barang tajam; tato.
Rajah. 1 Dessin (image, symbole) employé comme talisman (par exemple pour prévenir les maladies). 2 Lignes de la main. 3 Tatouage.
Raksasa (رقساس). makhluk yang menyerupai manusia, konon berbadan tinggi besar; gergasi (ݢرݢاسي); buta/bota (بوتا). a besar sekali (melebihi ukuran biasa). Laba-laba raksasa: tarantula.
Raksasa. 1 Créature ayant forme humaine, mais de plus grande taille ; ogre (rakshasa). 2 adj de grande taille (dépassant la mesure ordinaire) : araignée rakshasa, mygale. [Du sanskrit raksasa (राक्षस), démon.]
Rejang (رجڠ). perhitungan baik buruk untuk tiap hari bulan, biasanya dilambangkan dengan binatang (seperti tanggal 1 dilambangkan dengan kuda, 2 hari bulan oleh kijang, 3 hari bulan oleh harimau, dll); perhitungan nujum. Candrasengkala, Candrasangkala. Jw rumusan tahun dengan kata-kata, yang setiap kata melambangkan angka, dibaca dari depan dan ditafsirkan dari belakang; kronogram Jawa yang memakai sistem perhitungan bulan.
Rejang. Calcul des jours fastes et néfastes pour chaque jour du mois, recourant en général à un symbolisme animalier (le premier jour est symbolisé par le cheval, le deuxième par le muntjac de Java, Muntiakus muntjak, le troisième par le tigre, etc.) ; calcul astrologique. Candrasengkala. Mise de l’année en formules par des mots dont chacun symbolise un chiffre, qui se lisent dans le sens normal de la lecture et s’interprètent dans l’autre sens ; chronogramme javanais servant de système de calcul astrologique.
Sambang (سامبڠ). beberapa macam penyakit yang kononnya disebabkan oleh sesuatu kuasa ghaib.
Sambang. Diverses sortes de maladies causées par des forces surnaturelles.
Santung (سانتوڠ), Sentung (سنتوڠ). Mk erat, rapat. Santung/Sentung Pelalai. guna-guna yang menyebabkan gadis tidak dapat menemukan jodoh atau tidak mau menika. Pelalai (ڤلالاي). jampi atau ubat untuk melalaikan atau untuk melekakan.
Santung Pelalai. Sortilège par lequel une femme est empêchée de trouver l’âme sœur ou de se marier. Pelalai. Formule magique ou substance rendant distrait ou bien complètement absorbé, passionné.
Semberani (سمبراني), Sembrani. Kuda semberani. kuda yang bersayap (dapat terbang). Beraksa (برقسا). kuda yang dapat terbang; kuda semberani (dalam cerita): kuda beraksa.
Semberani. Cheval ailé.
Sijundai (سيجونداي). Mk sihir untuk membuat orang menjadi gila (orang yang kena sihir itu beryanyi-nyanyi).
Sijundai. Sortilège pour rendre une personne folle (la victime se met à chanter à tue-tête).
Suluk (سلوک). Ar jalan mencapai kesempurnaan batin (dengan mengasingkan diri, beramal ibadat dan berzikir): ahlul suluk, ahlulsuluk. Ilmu suluk. Ilmu tasawuf (تصوف).
Suluk. La voie de la perfection spirituelle (par la réclusion, la prière, la pratique religieuse, la litanie mystique) : ahlulsuluk, les gens suivant cette voie, les mystiques.
Susuk (سوسوق). jarum emas, intan, dsb yang dimasukkan ke dalam kulit, bibir, dahi, dsb disertai mantra agar tampak menjadi cantik, menarik, manis, dsb.
Susuk. Aiguille d’or, de diamant ou d’une autre matière, introduite dans la peau, les lèvres, le front ou ailleurs, avec accompagnement de formules magiques, afin de rendre la femme plus belle et désirable.
Tapa Sungsang. bertapa di atas pohon dengan kaki di atas dan kepala di bawah untuk memperoleh tingkat spiritual tertentu.
Tapa Sungsang. Forme d’ascèse par laquelle la personne se suspend à un arbre la tête en bas, afin de parvenir à un certain degré spirituel.
Teluh. ilmu hitam untuk mencelakakan orang lain.
Teluh. Magie noire visant à causer le malheur d’autrui.
Tenung (تنوڠ). kepandaian untuk mengetahui (meramalkan) sesuatu yang gaib (seperti meramalkan nasib, mencari orang hilang). 2 (= teluh) ilmu hitam untuk mencelakakan orang lain.
Tenung. 1 Habileté dans les voies de la connaissance occulte (par exemple pour prédire le destin, retrouver les personnes perdues, etc.) 2 (= teluh) Magie noire visant à causer le malheur d’autrui.
Tinggam (تيڠݢم). Mk guna-guna untuk membuat sakit (bengkak-bengkak dsb) dengan menusuk-nusukkan duri ekor ikan pari pada gambar orang.
Tinggam. Pratique magique en vue de rendre autrui malade (enflures, etc.) au moyen d’une arête de raie piquée et repiquée dans une image de la personne visée.
Tuju (توجو). mantera (jampi, sihir dll) untuk membuat orang supaya sakit atau mati.
Tuju. Pratique magique en vue de rendre une personne malade ou de la tuer.
Tulah (توله). kemalangan yang disebabkan oleh kutuk, karena perbuatan yang kurang baik terhadap orang tua (orang suci dsb), atau karena perbuatan melanggar larangan. = Kualat (کوالت), Walat
Tulah. Malheur et malédiction que l’individu appelle sur lui à cause du manque de respect envers un ancien (un saint homme, etc.), ou bien de la transgression d’un interdit.
Wangsit. pesan (amanat) gaib.
Wangsit. Message (ordre) surnaturel.
Wasitah (واسطه). Ar 1 wasit perempuan 2 perempuan yang dapat berhubungan dengan orang halus. 3 perantara (dalam perkawinan dsb).
Wasitah. 1 Femme arbitre. 2 Femme capable d’entrer en contact avec les esprits. 3 Intermédiaire (par exemple pour un mariage).
Octobre 2015