Philo 33 : L’État idéal comme étape nécessaire du suicide collectif universel
« Si les mots tuent, pourquoi nous faire croire à la liberté des mots, pourquoi nous faire croire que les mots sont libres ? » (Philosophie 32)
– Parce que, tout comme les citoyens sont des hommes libres sans qu’il leur soit pour autant permis de tuer leur prochain, la liberté d’expression est garantie sans que les mots qui tuent soient permissibles. – Permettez : puisque l’on ne prétend pas que la liberté limitée par l’interdiction de tuer soit, dans ce rapport entre la liberté et l’interdit, un progrès, à savoir qu’il n’est pas plus permis de tuer aujourd’hui qu’hier, qu’est-ce qui justifie d’appeler la liberté d’expression un progrès si les mots qui tuent sont réprimés comme auparavant ?
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Dans le bouddhisme on vous dira que la mort absolue est un anéantissement qui se mérite. Ailleurs, qu’il faut se préparer à la vie éternelle. Le matérialisme dit que nous dormirons tous du même grand sommeil. Je suis dans les ténèbres et me fais la réflexion que ces problèmes appellent, et pas qu’un peu, des réponses. Si le raisonnement ne peut porter, sans doute faut-il tout de même y réfléchir car c’est seulement de cette manière que pourrait se produire une illumination, une révélation, c’est-à-dire que l’illumination ne vient pas quand on se contente de l’attendre mais seulement quand on la cherche.
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L’électricité « était connue et maniée dès les temps les plus reculés », affirme un personnage du roman de Joris-Karl Huysmans Là-bas (1891). Dès lors que la pile de Bagdad n’a été découverte qu’au vingtième siècle, sur quels éléments s’appuie donc l’écrivain ? – La pile électrique de Bagdad fut découverte en 1936 par l’archéologue autrichien Wilhelm König, qui estima qu’elle était d’origine parthe et que par conséquent son âge devait être de quelque deux mille années. Qu’il s’agisse d’une pile électrique est évidemment controversé mais, quoi qu’il en soit de cette controverse, d’autres indices d’utilisation de l’électricité dans les anciens temps doivent exister, puisque Huysmans y fait allusion : son roman, du moins quand les personnages discutent des résultats scientifiques de l’époque, s’appuie sur des documents et non sur l’imagination du romancier.
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Gilles de Rais, tueur d’enfants : « le mémorable fauve » (Là-bas, ch. XVIII)… Plutôt une hyène misérable. Les fauves ont de redoutables ennemis : buffles, cervidés, même les troupeaux de zèbres savent s’organiser pour rendre la chasse onéreuse. C’est le fauve infirme qui se rabat sur des proies plus minimes.
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La politique, « cette basse distraction des esprits médiocres » (À rebours), mais Huysmans a fini par y venir. À la politique cléricale, en l’occurrence.
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La critique littéraire, sur la nouvelle Le puits et le pendule d’Edgar Poe, semble (je ne parle que des critiques que j’ai pu lire, c’est-à-dire, pardon si c’est peu, deux pages Wikipédia) omettre de dire que la véritable nature de l’horreur du puits est passée sous silence par le narrateur. Il ne s’agit pas seulement d’une chute : « mon esprit se refusa à comprendre la signification de ce que je voyais [au fond du puits] … Oh ! toutes les horreurs, excepté celle-là ! – Avec un cri, je me rejetai loin de la margelle ». Ceci après que « [e]n face de cette destruction par le feu [les cloisons ardentes de la cellule] » « l’idée de la fraîcheur du puits » lui fut apparue « comme un baume ». En voyant le fond du puits, le narrateur ne peut finalement se résoudre à s’y précipiter, en raison de ce qu’il y voit et dont « la signification » nous échappe. La critique tait délibérément le moyen qui consiste à frustrer le lecteur d’une explication. C’est l’une des meilleures nouvelles d’Edgar Poe, et elle n’est pas exempte d’un stupide procédé.
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L’État idéal comme étape nécessaire
du suicide collectif universel
L’âme ne voit rien qui ne l’afflige quand elle y pense. (Pascal)
Les lendemains qui chantent ont souvent la forme de l’État idéal. Dans la philosophie de Philipp Mainländer, l’État idéal n’est pas et ne peut être une fin en soi. L’histoire est certes un mouvement vers l’État idéal : les inégalités sociales doivent être abolies, et la bourgeoise « égalité des chances » ne représente aucunement le fin mot de cette abolition, elle n’est qu’une façade égalitaire par laquelle on prétend justifier les inégalités en affirmant que chacun a reçu les mêmes chances et que les inégalités existantes sont donc justes, or les inégalités existantes rendent impossible la moindre égalité de chances. Mais la véritable finalité de la justice sociale n’est autre que de démontrer par l’expérience aux classes actuellement défavorisées qu’aucune réforme ne peut apporter le bonheur, et que l’État idéal ne peut rien pour les aspirations légitimes de l’homme. C’est dans l’État idéal que cette réalité devient une universelle réalité d’expérience. Tant qu’il existe des classes défavorisées, la notion prévaut parmi celles-ci que leurs souffrances et leurs humiliations sont le résultat d’une exploitation sociale à laquelle l’instauration de l’État idéal peut et doit remédier. Or, s’il est exact que l’exploitation sociale joue dans l’État actuel un rôle dans la souffrance de ces classes, la raison en est que l’exploitation est la forme pour elles de la souffrance universelle dans cet État, tandis que la souffrance a pour les classes favorisées dans ce même État, exploiteuses, une autre forme. Il s’agit donc de supprimer l’exploitation afin que la souffrance ne puisse plus être imputée par qui que ce soit aux conditions sociales, et c’est le mouvement historique vers l’État idéal. Cette impossibilité d’imputation n’a rien à voir, encore une fois, avec la bourgeoise égalité des chances, selon laquelle l’individu ne pourrait s’en prendre qu’à lui-même de sa situation. Dans la pensée bourgeoise, l’imputation est présumée ne pouvoir être faite sur les conditions sociales mais seulement sur soi-même, or il est absurde de considérer que les individus ne sont pas en partie déterminés par les conditions sociales. Dans l’État idéal, où la « question sociale » a été résolue, l’imputation n’est possible que sur la nature du monde et des choses, de la vie ; devient, de cette façon, universelle réalité d’expérience le fait que la vie ne vaut pas d’être vécue.
On a souvent perçu comme un paradoxe les taux élevés de suicide des pays scandinaves, qui sont les plus avancés vers l’État idéal en termes non seulement de sécurité sociale et d’égalité mais aussi de libertés fondamentales. Ce paradoxe est parfois résolu par l’idée selon laquelle c’est parce que les statistiques y sont meilleures que dans les autres pays : si les statistiques nationales françaises, par exemple, étaient aussi performantes que celles de la Suède, cette dernière ne se singulariserait pas en termes de suicides. Bien que ne reposant sur aucune preuve, puisqu’il faudrait pour cela comparer des ensembles statistiques suffisamment élaborés alors que l’argument consiste à dire que les autres ensembles sont défaillants, le raisonnement n’est pas sans force. Où l’État est plus avancé, il faut en effet s’attendre à ce qu’il soit plus performant, par exemple quand il s’agit de recueillir des données sur les causes de la mortalité. L’argument est cependant spécieux : la question de savoir si telle mort est un suicide ou autre chose n’est pas de nature à pouvoir discriminer entre services statistiques de manière significative. Par exemple, quand une mort intervient à la suite d’une chute, dans certaines conditions la certitude d’un suicide plutôt que d’un accident ou vice-versa n’est guère permise, et ce quelle que soit la performance des services de l’État. Le témoignage des uns et des autres pourra faire pencher la balance vers une hypothèse ou vers l’autre, mais sans véritable certitude. En réalité, plus l’État est avancé dans la résolution définitive des contradictions sociales, plus le suicide y doit être élevé. Car la souffrance n’a plus dans l’État idéal, ou bien a beaucoup moins, de causes externes sur lesquelles s’imputer, et par conséquent elle ne permet plus que l’on puisse penser s’y soustraire autrement que dans la mort.
Cela signifie-t-il que, dans l’État imparfait, les riches se suicident plus que les pauvres ? Ce sont les pauvres qui peuvent en effet penser changer leur situation avec les réformes sociales et par là cesser de souffrir, mais les riches, dont nous disons qu’ils souffrent de la même souffrance universelle, ne peuvent, eux, espérer obtenir une meilleure situation sociale dans l’État idéal (bien qu’il se trouve aussi des riches qui soient pour la résolution de la question sociale, ce qui montre que certains d’entre eux ont aussi l’espoir d’alléger leurs souffrances par ce moyen) ; ont-ils d’autre possibilité que le suicide ? Si le pauvre ne se suicide pas quand il croit que l’État idéal mettra fin à ses souffrances, à quoi croit le riche pour ne pas se suicider ? On peut penser qu’il impute ses souffrances à l’inquiétude que les pauvres font peser sur lui par leurs revendications continuelles. Il est connu que les religions et les philosophies insistent sur les maux attachés aux richesses, ainsi que le proverbial « l’argent ne fait pas le bonheur ». On a cru que c’était un moyen d’endormir les pauvres : montrer que le riche souffre devrait rendre inutiles les revendications populaires et donc les faire cesser. Or, dans cette dualité de riches et de pauvres, la souffrance des uns est pour ceux-là une réalité d’expérience tandis que celle des autres ne l’est, pour les mêmes, nullement, et la différence est de taille. Le pauvre connaît d’expérience sa souffrance, tandis qu’il ne peut qu’imaginer celle du riche. La religion n’a pas tort de montrer du doigt les maux attachés aux richesses mais le socialisme n’a pas tort de vouloir supprimer les inégalités sociales.
L’État social est la condition du passage universel de l’être au non-être, c’est-à-dire la condition de la fin du monde. Mainländer suppose alors que ce passage pourrait se produire par « contagion spirituelle » (geistige Ansteckung), comme aux temps du martyre des premiers chrétiens et, plus tard, des Croisades. Il faut entendre par là que la contagion entraînerait un suicide collectif universel.
La relation de l’État actuel au suicide est, comme on peut s’y attendre, parfaitement incohérente. D’un côté, l’État avancé supprime l’absurdité, prétend-il, qui consiste à faire du suicide un crime alors que le coupable est mort et n’a commis de violence qu’envers lui-même. Cela n’empêche nullement cet État de demander à ce que les dettes d’un mort soient payées : les personnes sur qui retombent le cas échéant ces dettes n’ont-elles pas sujet de se plaindre d’un mort ? De même que celles envers qui le mort était obligé d’autres manières. D’un autre côté, l’État français traque les « dérives sectaires » depuis des affaires de suicide collectif au sein de communautés religieuses. On prétend que les suicidés ont agi sous emprise : quelle preuve a-t-on de cela ? N’est-ce pas plutôt une affirmation gratuite ? Il est parfaitement concevable que des individus décident collectivement de se tuer de plein gré ; le nier, c’est montrer un préjugé contre le suicide que l’on n’attendrait pas d’un État qui ne connaît plus du suicide comme crime. La question est évidemment différente lorsqu’il se trouve parmi ces suicidés collectifs des enfants. Cependant, des mineurs se suicident même en dehors des contextes « sectaires » : faut-il que les tuteurs de ces enfants, leurs parents, soient tenus responsables de leurs suicides ? L’incitation au suicide reste un crime en droit mais la raison n’en est pas du tout claire, compte tenu du fait que le suicide n’est plus un crime. Alors que les délits d’incitation ou provocation portent sur des actes réprimés par le droit, ici le délit ne porte plus que sur un acte décriminalisé. Il faut donc ou bien comprendre que le délit d’incitation au suicide est tacitement caduc depuis que le suicide n’est plus un crime, ou bien que cela reste un délit parce que notre droit entend punir des incitations contre la morale, car si l’incitation au suicide reste punissable c’est que le suicide est un mal, et définir un mal de la conduite personnelle qui ne soit pas un crime ne se peut guère qu’en disant que c’est un mal moral. Cette dernière interprétation est contraire à tous les présupposés de notre droit positif. Enfin, l’État qui tolère ou permet les suicides assistés est d’autant moins légitime à rechercher les raisons pour lesquelles les gens se suicident.
Le suicide collectif semble parfaitement cohérent avec le caractère de retrait du monde que présentent de nombreuses sociétés dites sectaires. Dès lors que l’on n’attend plus rien de ce monde, et que l’on ne cherche pas non plus à le changer si l’on s’est convaincu de la vanité de ces tentatives, on pratique une forme de retrait ascétique, de renoncement avec lequel le suicide n’est pas a priori contradictoire. Nous avons, dans de précédents billets (Philosophie 21 et 22), opposé une phénoménologie de l’au-delà d’où le suicide s’évince de lui-même à la philosophie de la transmigration, où le suicide est un interdit moral sans justification phénoménologique : de même qu’à notre conception de l’anhistoricité de l’homme, nous y renvoyons le lecteur qui verrait une forme d’incitation répréhensible dans ce que nous écrivons ici. Hégésias de Cyrène, qui préconisait le suicide, fut exilé par Ptolémée II, et ses livres interdits. Mainländer, dont je discute la pensée, s’est suicidé peu de temps après la publication de son livre, Die Philosophie der Erlösung (1876), lequel n’a pas à ma connaissance été censuré, mais sans doute est-il permis de penser que si l’auteur avait vécu plus longtemps il aurait été inquiété, ce que je donne pour une raison possible de son suicide car je ne pense pas du tout qu’il se soit agi d’une supposée mise en conformité des actes avec la pensée : une telle conformation exigeait au contraire de sa part qu’il défende son livre devant les objections philosophiques qu’il pourrait susciter.
Revenons à la notion d’emprise. Que des gens renoncent au monde ensemble, même en admettant que ce soit par la conviction acquise après avoir entendu les paroles d’une certaine personne, d’un « gourou », si l’on veut, qu’est-ce qui permet de parler d’emprise ? Supposons qu’une personne dont un proche s’est ainsi confiné dans une ferme isolée avec d’autres après avoir vendu sa maison et purgé ses dettes, diligente un détective privé sur la personne du gourou de la secte. Au cas où le détective trouverait que le gourou vit, à l’insu de ses fidèles, une existence contraire à son enseignement, il s’agirait d’une tromperie : cet homme abuse de la crédulité d’autrui. Mais supposons que le détective trouve que ce gourou vit de la même manière que ses fidèles, qu’à ces derniers rien n’est caché, qu’est-ce qui permettrait de parler d’emprise dont l’État aurait à connaître si ces gens préméditaient ensemble de mettre fin à leurs jours ? On pourrait toujours supposer que l’un d’eux, de toute évidence le « gourou », provoque les autres à se suicider et serait donc coupable du délit de provocation au suicide, mais la supposition n’existe que parce que le délit existe, c’est-à-dire parce que la provocation n’a pas été décriminalisée en même temps que le suicide lui-même. Si le délit n’existait pas, cette supposition, fût-elle vraie, ne pourrait servir à l’État pour intervenir ; or, si l’État ne manque pas de justification du fait de l’existence en droit de ce délit, cette dernière exige une justification qui lui fait défaut depuis la dépénalisation du suicide.
Cet interdit légal est, semble-t-il, une cause significative du fait que la question du suicide, la discussion du pour et du contre, ne soit pas davantage présente dans l’espace public, alors même qu’« il n’y a qu’un problème philosophique vraiment sérieux : le suicide », selon la célèbre formule d’Albert Camus dans son Mythe de Sisyphe, un problème que cet auteur traite cependant avec la médiocrité qu’on lui connaît. On peut également voir dans ce fait une autre raison de prudence, c’est qu’il ne convient pas de faciliter la tâche de ceux qui nous en veulent à mort, et que passer, même si c’est faux, pour suicidaire parce que l’on discute du seul problème philosophique vraiment sérieux est un moyen de leur faciliter la tâche dans la mesure où la chute mortelle d’une personne passant pour suicidaire n’éveille guère de soupçons.
Lorsque l’on demandait au philosophe Hégésias, qui préconisait le suicide, pour quelle raison il ne se suicidait pas, il répondait qu’il devait d’abord convaincre les gens du bien-fondé de sa philosophie : c’est la raison pour laquelle il incitait les gens à se suicider plutôt que de se suicider lui-même. Nous avons déjà parlé du suicide de Mainländer. Ce dernier aurait, selon une banale hypothèse, agi conformément à sa pensée en se suicidant. Or sa pensée est que l’humanité disparaîtra lorsque l’État idéal sera réalisé, possiblement – Mainländer se borne à des conjectures sur ce point – par un phénomène de contagion spirituelle qui verra l’humanité se suicider en masse, jusqu’au dernier homme. Et pourquoi pas ? L’État idéal est l’état du désespoir irrémédiable, il ne reste aucune chose à changer, plus rien ne peut être amélioré pour rendre l’homme heureux, et la vérité se montre alors à lui tout entière : le néant est préférable à l’être. Cette évidence en grande partie occultée par les imperfections sociales apparaîtra de manière universelle aux yeux de tous et de chacun, comme elle est apparue aux grands esprits de tous les temps. Et si ces grands esprits ne se sont pas tous suicidés, il est permis de penser que c’est en raison des obstacles propres à leurs époques respectives, à commencer par l’interdit du suicide, et faute de la contagion spirituelle requise. – Ceci est la seule philosophie de l’histoire réaliste fondée sur l’idée de progrès.
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Il n’existe à ce jour aucune traduction française de la Philosophie der Erlösung de Philipp Mainländer, publiée en 1876. Une telle traduction est impossible dans un pays comme la France.
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Le matérialisme est la philosophie par laquelle l’homme n’a rien à penser en vue de la mort. Nous mourrons tous mais ceci, pour le matérialiste, est complètement indifférent ; nous devons vivre comme si la mort n’existait pas, puisqu’il n’y a rien à faire en vue de la mort. La mort existe mais qu’est-ce que ça change ? Mènerions-nous une vie différente si la mort n’existait pas ? Celui qui se goberge continuerait de se goberger, celui qui veut devenir très savant deviendrait de plus en plus savant, le riche de plus en plus riche… Le matérialiste a la mentalité de la vie éternelle, dans cette vie barrée par l’horizon de la mort.
Ils disent : « Vivre sa vie avant la mort. » (Parfois, c’est pire, ils disent « profiter de la vie », quel aveuglement.) Mais cette mort – que demande-t-elle ?
Que veut de moi la mort ? Cette vie, c’est la nature, l’individu que je suis n’est qu’un instrument de son aveugle volonté, le prix qu’elle attache à ma personne celui de l’esclave pour le maître. Vous n’avez pas existé comme une personne pour elle ; votre individu, celui qui vit sa vie, n’existe nulle part dans la nature comme une personne – et si vous vous croyez une personne, il faut pour cela que la nature n’ait pas le dernier mot, mais alors c’est la mort qui vous demande quelque chose en tant que personne, en tant que vous êtes une personne. La mort attend la personne que la nature a méconnue.
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Si la mort est un long sommeil, et si la vie peut être une jouissance, les malheureux peuvent se consoler à l’idée que la mort sera la fin de leurs maux et la fin des injustes jouissances des heureux. Eux doivent gagner la paix et les autres perdre leurs plaisirs. Pourquoi cette pensée ne serait-elle pas suffisamment consolatrice, qu’il faille imaginer en outre un paradis, un enfer ?