Tagged: Amérique latine
Galions des Indes : La poésie de Francisco Villaespesa (Traductions)
Francisco Villaespesa (1877-1936) est un des grands noms du symbolisme espagnol. Né dans la province d’Almería, c’est aussi un poète de l’Andalousie, dont il a chanté les paysages, les mœurs, l’histoire avec ferveur. En traduisant quelques sonnets de son recueil Galions des Indes (Galeones de Indias), qui réunit des poèmes écrits en 1925 et 1926, ce n’est toutefois pas l’Andalousie dont je me suis imprégné à travers son œuvre, mais l’Amérique latine, car Villaespesa était aussi un voyageur. Auteur d’une œuvre poétique d’une grande beauté, en même temps qu’abondante, classique en Espagne, Villaespesa reste peu connu de ce côté-ci des Pyrénées, et je croirais même que je suis le premier à le traduire en français. Que l’on n’hésite pas à me contredire si je me trompe ; je serai le premier à me réjouir que cet auteur n’ait pas complètement échappé, dans notre pays, à l’attention qu’il mérite.
Ces poèmes aux thèmes latino-américains complètent mes diverses traductions de poésie américaine en langue espagnole. La forme adoptée par Villaespesa est ici le sonnet classique ; j’ai traduit ces textes en vers libres, tout en conservant l’agencement du sonnet.
*

*
Sur la mer des Caraïbes IV (En el mer caribe IV)
Sous les clairs cieux tropicaux,
Pleine lune de mars, comme tu brilles
sur la mer sonore des Antilles,
changeant son cristal en joailleries !…
De ta splendeur gemmée tu mortifies
les coruscants rayons sidéraux !
À ton éclat tout s’illumine en albeur
et merveilles de marbres triomphants !
Ciel et mer sont deux strates de saphir
débordantes d’étoiles… Je regarde passer lentement
les heures dans leur vol blanc…
Et nous naviguons dans un diamant
tellement grand, que dans son expansif arc-en-ciel
il entre toute la mer et tout le ciel !…
*
Sur les Andes II (En los Andes II)
Le ciel pleurait ma douleur… La pluie
tombait sur moi comme un suaire,
enveloppant ma chair et mon esprit
dans la paix de son solitaire oubli…
Elle me transperçait le squelette… Et je la sentais
descendre jusqu’au fond de l’ossuaire,
où mon cœur immobile dormait
son rêve de granit, millénaire !
Le ciel pleure ma douleur… Tout
s’efface en ombres et se défait en gadoue…
Et sur le glacier du promontoire, dressé,
l’âme est si transie qu’elle n’entend pas
gronder sur le cadavre de ma vie
l’énorme grizzli de la mort !
*
Haut plateau andin (Altiplanicie andina)
Pas un brin d’herbe, Seigneur ! Pas un oiseau ne chante…
Décombres de cimetière, tel est ce plateau…
Et sur les visages de la roche dure
on devine je ne sais quelle éternelle horreur !
Sur le seuil d’une masure en ruines,
une flamme ondoyante, d’un ton obscur,
nous montre en passant la denture
d’un rire obscène de femme !…
Paysage dantesque, hallucinant,
enlinceulé dans la brume froide !…
Le silence gris pétrifie le paysage,
tandis que l’écho répète, au loin,
comme un cri humain d’agonie,
le gémissement prolongé d’une hyène.
*
Le marécage (La tembladera)
Le marécage… L’infortuné voyageur,
qui, séduit par les merveilles
de ce fascinant jardin flottant,
ose marcher sur son bord !
Des serpents s’enrouleront autour de ses genoux
et dans une lenteur désespérante
le paralyseront, à chaque instant,
jusqu’à l’étouffer dans leurs anneaux tragiques !
Il a coulé… Alors, sous la sphère bleue,
à nouveau indifférent tout se tait…
Plus lumineux qu’avant darde le soleil ses rayons !…
Ma vie est un marécage !…
Tout ce qui y passe se noie dans la fange,
avec lenteur, pour sentir la mort !
*
Pleines lunes I (Plenilunios I)
Nuit bleue, nuit bleue, comme créée
pour, au bord de la mer, doucement
dire tout ce que ressent l’âme
à l’oreille d’une amoureuse !…
Mon regard cherche quelque chose dans la nuit
à la lumière transparente de la lune…
La mer sanglote une chanson dolente,
la ritournelle d’une voix aimée !…
J’évoque dans cette lunaire clarté d’été
quelque chose qui aurait pu… et ne fut pas à moi !…
Ma lèvre nomme, sans le vouloir, un nom.
« Et toi, que feras-tu ?… Et toi, que feras-tu ? », demandé-je
à cet amour impossible, l’ombre
qui pour l’éternité marchera à mes côtés !
*
Crépuscule tropical (Crepúsculo tropical)
En cette tropicale mélancolie
Où lentement s’évanouit le soir,
les vagues sur le sable de la plage,
en mourant feutrent leur agonie…
Vide d’engourdissement est la route
où le cylindre du silence est rayé
par l’aiguille d’un tourne-disque essayant
de dépecer quelque mélodie !…
Par le cadre d’une vitre,
dans la clarté bleu marine du firmament
que n’embue pas une ombre de nuage,
le charbon d’un palmier stylise,
en s’agitant languidement au vent,
l’agonie spasmodique d’une araignée !
*
Motifs colombiens
Sur le Cauca (Motivos colombianos: En el Cauca)
Dans les nuages lointains du Ponant,
parmi un triomphal défilé de drapeaux,
couronnée de tours et de palmiers
s’offre aux yeux une Bagdad de rêve ;
tandis que, suavement, en silence,
comme une cendre de printemps fanés,
s’effeuille la verdeur des rives
dans l’or lustral du courant !…
Et sur une branche de bambou décatie,
absorbé dans la vision miroitante,
un perroquet arbore sa pompe,
à la manière d’un vieux calife méditatif
sous le vert oriental de son turban,
tandis qu’ondule au vent son haïk doré !…
*
Le singe gris (Motivos colombianos: El mono gris)
Au milieu de la forêt qui répand
de piquantes chaleurs de vanille,
l’or vert d’un étang brille
et dans un rayon de soleil splendit, s’embrase…
Rien ne trouble la paix du lieu :
pas un caïman, pas une aigrette, pas un écureuil !…
Seul, se balançant au-dessus de la rive
suspendu par la queue à une branche,
un singe gris, voluptueusement,
grignote la pulpe jaunâtre d’une banane
avec des grimaces de rufian…
Et se voyant lui-même en l’onde,
dans un faciès quasi humain il montre
les dents, comme se mettant à rire !…
*
Nocturne tropical (Motivos colombianos: Nocturno tropical)
Nocturne tropical… Dans les broussailles,
argentant le charbon du paysage,
la lune avec ses blanches toiles d’araignée
brode des arabesques et dessine des dentelles…
La brise musicalise l’âme des joncs ;
et dans le deuil de leurs habits
sculptent les chimériques montagnes
la dantesque épouvante de leurs visages !…
La luciole peint des envolées d’étoiles
dans les frondaisons hallucinantes,
et le silence dilate son cercle
en une vibration de hochet
quand les grillons font retentir leurs millions
de sonnettes de cristal et d’argent !…
*
Saint-Domingue : Le pic-vert (Santo Domingo: El carpintero)
Sur la prière bleue des montagnes
qui s’élèvent en spirales dans le ciel ;
sur le vert silence des broussailles
que d’écume parsèment les sources ;
sur les luxuriants champs de joncs
qui parfument les brises ainsi que des roseraies,
le crépuscule peint des envolées étranges
d’immenses et gemmés paons royaux.
Un naufrage d’arc-en-ciel roule dans le fleuve ;
les poules grattent la terre fertile
qui prête des tapis d’émeraudes à la masure ;
tandis que sur le tronc d’un cocotier,
en copeaux d’argent, jovial, scie
ses glorieux carillons le pic-vert, ou « charpentier ».
*
Lucioles (Luciérnagas)
Il n’existe pas de lampe aussi pudique et aussi belle
que votre petite lanterne miraculeuse…
Un sylphe l’éclaira, pour avec elle
chercher un papillon de nuit…
Comme les larmes fugaces d’une étoile
qui dans l’azur s’éteint tremblante,
ainsi, la nuit, votre lumière brille-t-elle
sur le calice d’une rose !
Avec quelle piété fulgure votre illusion,
volant autour d’une fleur endormie
sur le silence d’une sépulture !…
Ô, douce illusion évanouie,
sillonnant le sein de ma nuit obscure,
ta vie fut un vol de lucioles !
*
Étoiles et lucioles (Luciérnagas y estrellas)
La nuit tropicale, sur la steppe
sans limites, se répand silencieusement.
La terre est d’instant en instant plus floue,
plus tranquille, plus immobile, plus obscure.
La brise a une odeur de fièvre…
Dans cette nuit noire et suffocante,
où sont tes regard lumineux ?
où est la fraîcheur de tes lèvres ?
Et dans le silence immense de la nuit,
pour rendre plus intense ton souvenir,
étoiles et lucioles errantes
éclairent ton nom, dans l’air vivant,
par la fulgurance évanescente
de phosphoriques étincelles de diamant.
*
Colibri (Besaflores)
NdT. Besaflores, un des noms du colibri en espagnol, signifie littéralement « baise-fleurs ».
Quelle fée, dis-moi, de ses mains miraculeuses
a ciselé dans l’or ce prodige,
petit et fragile comme une pensée,
émaillé d’étincelles ?
Elle y attacha des ailes de pierres précieuses
et, lui insufflant la vie par son haleine,
comme un soupir le lança dans le vent
pour être une rose de lumière au milieu des roses !…
L’oiseau-fleur, vivante gemme ailée,
dans ton jardin te vit, de bon matin.
Il quitta la roseraie et se posa tremblant
Sur tes lèvres douces qui souriaient…
Alors ta bouche et l’oiseau semblèrent
deux colibris qui se donnaient des baisers !
*
Interrogations (Interrogaciones)
Voyageur, sur la route parcourue,
les rêves eux-mêmes étaient réalité…
Un par un, tu les vis succomber
parmi les plus prosaïques mesquineries !
Mais quel désir impossible persiste en toi,
qu’aujourd’hui encore, au milieu de tes solitudes,
tu sens des nostalgies de ce qui n’existe pas,
de ce qui jamais ne donnera la nostalgie ?…
Que va-t-il advenir ?… La Réalité ? Le Rêve ?
Un ange, pour évoquer ton passé,
ou, pour te prédire l’avenir, une Fée ?…
Ce qui viendra, viendra, triste ou riant…
Tu continueras d’espérer, bercé d’illusions,
de ce qui jamais ne vient la venue !
De D’Annunzio, du fascisme et de la Révolution mexicaine
I/ D’Annunzio et le fascisme
II/ D’Annunzio et la Révolution mexicaine (le fascisme italien et la Révolution mexicaine)
*
I
D’Annunzio et le fascisme
D’aucuns, dont j’ignore s’ils écrivent aussi sous leur vrai nom, affirment que, s’il fut un enthousiaste du fascisme à ses débuts, D’Annunzio (1863-1938), l’un des écrivains les plus lus de son temps, s’en distança par la suite, se rendant compte, d’après ces gens, de la nature foncièrement mauvaise du régime fasciste en le voyant pratiqué. Bref, il ne savait pas ce que cela donnerait, mais il le vit par la suite, comme nous le voyons tous aujourd’hui, tous, c’est-à-dire ceux qui ne savent pas comment concilier publiquement leur goût pour l’œuvre de ce grand écrivain et poète avec la franche admission de son fascisme invétéré. Il n’y a qu’à ouvrir la page Wikipédia en français sur D’Annunzio pour trouver cette fausseté. Cette page commence en effet ainsi : « Gabriele D’Annunzio, ou d’Annunzio, prince de Montenevoso, est un écrivain italien, né à Pescara le 12 mars 1863 et mort à Gardone Riviera le 1er mars 1938. Héros de la Première Guerre mondiale, il soutient le fascisme à ses débuts et s’en éloigne par la suite. »
Or rien n’est plus faux que D’Annunzio prît ses distances avec le fascisme. S’il prit ses distances avec les affaires du pays, c’est en raison des infirmités de son grand âge. La preuve en est dans les lettres que le poète adressa peu avant sa mort à Mussolini, lettres qui réitèrent le soutien du poète au Duce et continuent d’exprimer l’enthousiasme des commencements.
Voici ce qu’il écrit à propos de la conquête d’Éthiopie (1936) :
Mon cher Compagnon, qui m’es plus cher que jamais.
Tu as sans nul doute senti combien je t’étais proche en ces journées marquées par ton héroïsme vrai, suprême et serein.
Tout ce qu’il y a de meilleur en mon art, tout ce qui aspire à la grandeur, se dressait en moi, du plus profond de mon être, dans l’espoir de sculpter ta haute figure quand toi seul, contre les intrigues des vieillards, la fausseté des hypocrites, les peurs des âmes épuisées, tu défendais ta patrie, ma patrie, l’Italie, l’Italie, l’Italie, seul et à visage découvert.
Elle te sied, la parole de Dante. Du sépulcre ardent, l’ombre de Farinata s’est levée. À visage découvert.
Je t’ai admiré et je t’admire en chacun de tes actes, en chacune de tes paroles. Tu t’es montré et te montres égal au destin que tu rends toi-même invaincu et immuable, tel une loi, tel un décret – ordre qui n’est point nouveau mais éternel.
Tu ne sais pas encore que j’ai commencé à traduire ton extraordinaire discours au peuple d’Irpino dans le latin des Commentaires avec un peu du mordant de Salluste.
Dans sa nudité, ce latin, mieux que la plus pénétrante analyse, révèle l’esprit de ton éloquence. Je voudrais qu’il fût imprimé en exergue à un volume de tes discours.
O Compagnon, ne va pas te salir en t’adressant au puant cloaque de Genève [la Société des Nations].
Sois inébranlable en comprimant ton hilarité, l’âme sereine.
Je t’embrasse. Et je te demande la faveur de mourir pour ta Cause qui est mienne et celle du Génie latin indomptable. Chargé d’ans, recru de solitude, je veux enfin mourir pour la neuve et antique Italie. Ma foi qui ne vacilla pas m’a fait mériter ce prix.
Et (1937) :
Mon cher et grand compagnon, toujours plus grand, il y a trop longtemps que nous ne nous rencontrons pas, ne nous voyons ni ne nous parlons. Dans cet intervalle a surgi dans ta vie le plus haut des événements. Après tant de batailles, tant de victoires, tant de volonté et de heurts, tu as vraiment accompli ce qui, dans l’histoire des grands hommes n’est presque jamais accompli. Tu as créé ton Mythe.
Je t’ai écrit naguère un mot dénué de sens : « N’oses-tu pas, sur ta lancée, chanter les Chants d’Outre-Mer ? »
Pardonne-moi ce mot. Ta cavalcade dévorante et conquérante est au-delà de toute entreprise d’Outre-Mer. Dans toute l’histoire des Conquistadores, jamais on n’en vit aucun – avec ses seuls moyens d’homme – créer son Mythe éternel comme toi.
« Inventeur de mythologies », c’est ainsi que me nommait hier l’obscur philologue Evelino Leonardi qui est bien de ce monde-ci. Un poète plus subtil de France m’appelle, lui, « sourcier de mythes » en alliant aux mythes la mystérieuse faculté de qui découvre les eaux souterraines.
Parmi tant d’insignes bienfaits, tu m’as donné celui de voir un homme vivant créer son Mythe immuable.
Dans sa course, ton cheval a dessiné l’extrême confin de ta Conquête africaine. Course infatigable – auprès d’elle celle de Mazeppa est un jeu d’enfants – course qui, à jamais, a tracé le contour de la Conquête nouvelle…
Pardonne-moi. Peut-être me permettras-tu d’écrire ce Prodige, armé de la plus acérée de mes plumes lyriques. Aujourd’hui je ne veux ni ne puis mêler le sacré au profane.
Je vais t’envoyer deux messagers de mon amour le plus profond : Gian Carlo Maroni et Leopoldo Barduzzi. Ils te parleront du Vittoriale [propriété de D’Annunzio], de la nécessité de le sauver, des moyens à adopter pour l’arracher aux griffes d’héritiers avides et cyniques et le rendre à sa sérénité monumentale.
Le Vittoriale est à toi.
C’est d’ici que partirent vers toi les premières grandes prophéties de ta grandeur et de ta gloire. D’ici partirent les premières paroles dignes de ton destin. N’oublie pas cette beauté, cette vérité, ce courage.
Cher Compagnon, toujours plus cher, je te recommande tout mon idéal et je t’embrasse, l’âme élargie comme celle, sous le soleil désert, du nouvel Empereur d’Éthiopie.
Dans cette lettre, D’Annunzio rappelle qu’il fut l’un des premiers « prophètes » de la grandeur de Mussolini et de son mouvement.
L’éditeur de la correspondance ajoute cette note : « Le ‘subtil poète de France’ est Jean Cocteau qui, en 1932, avait envoyé au Poète son Essai de critique indirecte avec la dédicace : ‘À Gabriele D’Annunzio, sourcier du mythe, chercheur d’or, mage astrologue, oracle, son ami J. C.’ » (p. 224)
Toujours sur le même sujet et, en particulier sur le Négus, le fameux Ras Tafari, qu’il caricature en « fantoche poilu perché au sommet de sa cloche plissée », D’Annunzio écrit également à Mussolini (1er mars 1936) :
(…) Qu’aujourd’hui chaque cartouche d’Italie vaille un homme mort.
Tout entière, l’Éthiopie au rude relief doit inexorablement devenir un haut plateau de la culture latine.
Sois loué, toi qui es parvenu à insuffler à notre race, trop longtemps inerte, la volonté de mener à bien cette tâche. Sois loué, toi qui mènes à leur terme tant de siècles exempts de gloire guerrière et les fais s’accomplir dans la splendeur de cet assaut et de cette conquête.
Aujourd’hui, pour toi, la nation va chercher son souffle au plus profond. Tout est vivant, tout respire. Tout possède ce don fatal. Je sais que désormais le destin même de cette nation puissante possède bronches et plèvre pour ce souffle.
Pourquoi l’allure de Sélassié m’inspire-t-elle une telle hilarité ? La barbe paraît l’encadrer comme un chromo de café de province.
C’est vrai ; j’ai toujours honoré et célébré la vertu du sang. Mais de quelle solennelle origine pourrait bien venir le sang de ce fantoche poilu perché au sommet de sa cloche plissée ? Il n’est pas de figure de rhétorique plus vide que ce manteau en forme de cône.
L’Éthiopie est romaine depuis des temps immémoriaux, comme la Gaule de César, comme la Dacie de Trajan, comme l’Afrique de Scipion.
Après des siècles d’expérience, la diplomatie a enfin acquis le vrai sens historique, celui qui est profond et que ne peut écarter nulle domination. Quelle imbécillité, plus ou moins antique, peut donc aller se confier au pouvoir universel d’un ministre novice, dont les architectes sont le coiffeur, le tailleur et le chapelier et qui, par hasard ou vice, se nomme M. Anthony Eden ?
Combien je m’amuse à ce théâtre de marionnettes grinçantes ! En vérité, dans leur rigidité, les pantalons britanniques ne le cèdent en rien à la cloche style Salomon du velu Hailé Sélassié.
Et lorsque l’Italie, sur la question éthiopienne, quitta la Société des Nations, D’Annunzio félicita immédiatement le Duce en ces termes (13 décembre 1937) :
Tu sais que depuis cinq ans environ j’attendais de toi, avec une inébranlable confiance, l’acte que tu viens d’accomplir. Beaucoup en ont été émerveillés jusqu’à l’ivresse, mais nul, comme moi, n’a été frappé au plus profond de son cœur par une sorte de révélation surnaturelle. C’est bien souvent que j’ai représenté ton mythe, dans sa pureté mystique, ce mythe qui a dessiné ton visage. Je t’ai décrit, t’en souvient-il ? – galopant sur les rives de l’Océan et montant des plages africaines aux hauteurs rocheuses d’Addis-Abeda. Mais ce que tu viens soudain de faire, cet acte immense – dépasse toute attente et tout autre prodige espéré. Tu as imposé ton jour à toutes les incertitudes du destin, tu as vaincu toutes les hésitations de l’homme. Tu n’as rien à redouter, tu n’as plus rien à redouter. Jamais victoire ne fut si pleine. Concède-moi l’orgueil de l’avoir prévue et annoncée. Ce soir, je me tais et t’embrasse comme je ne le fis jamais.
Source : Correspondance D’Annunzio-Mussolini, Ed. Buchet/Castel, 1974 (traduit de l’italien par Paul Jean Franceschini, avec la collaboration des professeurs Renzo De Felice et Emilio Mariano), dont le compilateur titre la dernière partie du recueil, celle des lettres écrites entre décembre 1934 et la mort de D’Annunzio en mars 1938, « Un podagre dévot du Duce ».
C’est en fasciste non repenti que D’Annunzio s’éteignit le 1er mars 1938, recevant des funérailles nationales du régime fasciste.
Qu’il se fût éloigné du fascisme est donc une fausseté. Qu’il s’opposât, en revanche, au rapprochement de l’Italie fasciste avec l’Allemagne nationale-socialiste, est certain. Après avoir lu les lettres ci-dessus, il convient de souligner que l’opposition à un tel rapprochement ne pouvait pas signifier pour D’Annunzio un alignement sur la Société des Nations (le « puant cloaque de Genève ») ou une alliance avec l’Angleterre (qui serait une « imbécillité »), c’est parfaitement clair. D’Annunzio préconisait donc une forme d’isolement européen pour le régime fasciste.
C’est là que l’intérêt du poète pour l’Amérique latine, dans le sens d’une alliance en faveur de la latinité, prend tout son sens.
D’Annunzio fit tout ce qu’il put pour saboter l’alliance entre l’Italie fasciste et le Troisième Reich, en raison de son irrédentisme et de sa germanophobie. L’irrédentisme italien était en effet dirigé contre un Empire largement perçu comme germanique – le Saint Empire germanique –, c’est-à-dire comme une machine germanique à broyer les peuples. (Le jeune Hitler considérait quant à lui l’Empire des Habsbourg, l’Empire austro-hongrois, comme une machine à broyer le peuple allemand. Ces divergences d’appréciation tiennent sans doute, au-delà des œillères propres à chaque nationalisme, à une constitution despotique, au sens de Montesquieu, qui ne pouvait satisfaire personne. – Pour être tout à fait précis, Montesquieu ne décrivait pas les monarchies européennes de son temps comme despotiques mais comme modérées ; le despotisme ne se trouvait selon lui qu’en Orient. Or il n’est pas impossible que l’Empire multi-ethnique austro-hongrois ait parcouru en quelques décennies un chemin qui le rapprochait de la constitution despotique telle que décrite par Montesquieu pour l’Empire ottoman lui-même multi-ethnique ; ou bien la monarchie même « modérée » décrite par Montesquieu ne pouvait tout simplement plus, au vingtième siècle, répondre aux aspirations des peuples européens.)
On ne s’étonne pas de trouver des attaques contre D’Annunzio sous la plume d’auteurs völkisch. L’Autrichien Jörg Lanz von Liebenfels, fondateur de l’Ordo Novi Templi (ONT) et du mouvement ariosophique, lui consacre plusieurs passages de sa revue Ostara. Lanz reproche à D’Annunzio son irrédentisme, moins d’un point de vue nationaliste qu’impérialiste : l’irrédentisme est de ce point de vue une forme de division débilitante de peuples de culture. Durant l’occupation irrédentiste de Fiume par D’Annunzio et les Arditi à la fin de la Première Guerre mondiale, D’Annunzio reçut d’ailleurs des encouragements tant de Gramsci que de Lénine, et son entourage lui conseilla de s’aligner purement et simplement sur le modèle de la jeune république des Soviets, ce qu’il refusa cependant. Lanz voit également en D’Annunzio un type racial inférieur. Il lui reproche l’usage lucratif et intéressé qu’il ferait de sa carrière littéraire. À cette occasion, Lanz dit que D’Annunzio est juif (un juif polonais dont le véritable nom serait Rappaport) ; il ne cite aucune source à l’appui d’une telle allégation et il est permis de penser qu’il s’agît d’un moyen facile de discréditer l’écrivain auprès d’un public antisémite.
Sans doute Lanz n’avait-t-il pas lu les œuvres de D’Annunzio ; s’il l’avait fait, il aurait trouvé d’autres arguments contre lui. Le roman Il Piacere, traduit en français sous le titre L’enfant de volupté (un titre précieux pour un original brut : « Le plaisir »), est l’histoire d’un homme qui cause involontairement la mort de sa maîtresse en criant pendant l’orgasme le nom de sa maîtresse précédente ; c’est le clou du roman.
Que D’Annunzio ne se soit jamais éloigné du fascisme est un fait établi. Qu’il s’en serait éloigné par la suite, en voyant le régime mussolinien devenir pendant la guerre un satellite du Troisième Reich allemand, n’est pas impossible, mais ceci relève de l’histoire-fiction : « Si D’Annunzio avait vécu jusque-là… »
*
II
D’Annunzio et la Révolution mexicaine
a/ Le fascisme italo-américain
b/ D’Annunzio et le Mexique
a/ Le fascisme italo-américain
Un point commun de nombreux pays américains de l’entre-deux-guerres était la présence d’une population immigrée italienne, dans des proportions plus ou moins importantes. En 1927, les Italiens représentaient, en tenant compte également de leurs enfants nés en Amérique, 6 % de la population des États-Unis, 6 % également de celle du Brésil, entre 40 et 50 % en Argentine et Uruguay.
Avec l’arrivée au pouvoir de Mussolini, l’émigration italienne prit fin, notamment en raison des nouvelles opportunités économiques créées dans le pays par le régime fasciste. Cette renaissance italienne, le pays passant en quelques années du statut de « nation prolétaire » (Corradi) à celui de nouveau pays développé, ne manqua pas d’exercer sur les criollos (Blancs) italiens d’Amérique latine un intérêt croissant pour le fascisme. C’est ainsi que furent créées dans les communautés italiennes de différents pays américains des institutions typiquement fascistes, telles que les Fasci, organes militants, le Dopolavoro, organisations de loisir, la Befana fascista, caisse d’aide sociale, etc.
L’Italie de Mussolini noua des relations diplomatiques avec les États latino-américains, dont certains se montrèrent particulièrement intéressés par les idées nouvelles du fascisme, notamment le corporatisme économique1. Au plan culturel, le Duce insistait sur le concept de « latinité » pour étayer l’idée d’une communauté hispano-italique unissant l’Italie et l’Amérique latine. Dans ce cadre, le régime soulignait l’italianité de Christophe Colomb et d’Amerigo Vespucci, le « césarisme » de Simon Bolivar, et cherchait également à contrecarrer le pan-hispanisme des intellectuels espagnols liés au camp nationaliste durant la guerre civile d’Espagne, la latinité fasciste étant présentée par le régime italien comme un mouvement moderniste, l’hispanisme au contraire comme une idéologie réactionnaire.
Cette diplomatie active, aidée par les communautés italiennes nationales, fit que, lorsque l’Italie fut sanctionnée par la Société des Nations après son invasion de l’Éthiopie, certains pays latino-américains, l’Équateur, le Pérou, refusèrent d’appliquer ces sanctions, ce qui contribua à les faire lever.
Les choses commencèrent à changer avec la guerre et la pression des États-Unis sur les pays latino-américains. Ces pressions avaient en fait commencé dès avant la guerre, les États-Unis demandant à ses voisins de réduire les activités fascistes sur leurs territoires ; sans doute considéraient-ils ces activités comme une forme d’ingérence contraire à l’immuable Doctrine Monroe. Quand les hostilités furent déclarées, les pays d’Amérique latine rejoignirent les Alliés l’un après l’autre (l’Argentine au tout dernier moment et sans doute en vue de faciliter son projet d’exfiltration de personnalités allemandes et italiennes). C’est donc à un renversement de politique des pays latino-américains que donna lieu l’entrée en guerre des États-Unis. (Dans certains cas, le renversement de tendance, de la part de dirigeants inspirés du fascisme, précéda l’entrée en guerre. Au Brésil, l’Estado Novo [État nouveau] de Gétulio Vargas, au pouvoir depuis 1930, fut édifié en 1937 sur des principes fascistes, notamment le corporatisme, et Vargas aurait même demandé à faire partie du Pacte Anti-Komintern, sans résultat ; mais dès 1938 il « lusophonisait » l’ensemble de la presse et de l’enseignement au Brésil, mettant un terme aux activités des organisations fascistes italiennes ou italo-brésiliennes dans le pays.)
(Sources diverses, dont la principale : Fascisti in Sud America, a cura di Eugenia Scarzanella, Casa Editrice Le Lettere, Firenze, 2005)
b/ D’Annunzio et le Mexique
Contrairement à nombre d’autres pays d’Amérique latine, le Mexique comptait fort peu d’immigrés italiens. Qui plus est, le président Cárdenas, au pouvoir depuis 1935, donna au pays une orientation nettement anti-fasciste.
À côté des institutions fascistes italiennes qui se développèrent au Mexique sur le modèle des autres pays latino-américains, là comme ailleurs plusieurs mouvements autonomes philofascistes virent également le jour :
–les Chemises Dorées (Camisas Doradas), membres de l’Action Révolutionnaire Mexicaniste (Acciόn Revolucionaria Mexicanista, ACR), appuyées par l’ex-« Maximato » Elías Calles (prédécesseur de Cárdenas à la présidence du pays), responsables de deux tentatives de coup d’État contre Cárdenas, tentatives soutenues par l’Union nationale des vétérans de la Révolution (Uniόn Nacional de Veteranos de la Revoluciόn, UNVR), et dont le leader, le général Nicolás Rodríguez Carrasco, ancien compagnon d’armes de Pancho Villa (il donna à son mouvement le nom des troupes d’élite de Pancho Villa, los Dorados) fut déporté aux États-Unis ;
–un mouvement autour du général Saturnino Cedillo, acteur de la Révolution mexicaine, gouverneur de San Luis Potosí, également auteur d’une tentative de coup d’État en 1938 ;
–un autre mouvement autour du général Román Yocupicio Valenzuela, acteur de la Révolution mexicaine, gouverneur de l’État de Sonora, d’origine indigène2 ;
–l’Action populaire mexicaine (Acciόn Popular Méxicana) de l’écrivain Rubén Salazar Mallén ;
–le Mouvement nationaliste mexicain (Movimiento Nacionalista Mexicano) ;
–le Mouvement des étudiants nationalistes (Movimiento de los Estudiantes Nacionalistas) ;
–la revue Timόn de l’écrivain José Vasconcelos3, ancien ministre de la culture de 1921 à 1923 pendant la présidence d’Álvaro Obregόn, puis candidat d’opposition aux élections présidentielles en 1929, qui, refusant le résultat de l’élection en raison des fraudes électorales qu’il dénonça, tenta l’insurrection armée avant de s’exiler un temps aux États-Unis et en France ;
–l’Union nationale synarchiste (Uniόn Nacional Sinarchista) ;
–le Parti national de salut public (Partido Nacional de Salvaciόn Pública), fondé par plusieurs anciens généraux et colonels de la Révolution mexicaine (Bernardino Mena Brito, Francisco Coss, Adolfo Leόn Osorio, qui fut surnommé « le tribun de la Révolution »…) ; etc.
Tous ces mouvements et personnalités furent plus ou moins liés aux pouvoirs italien et/ou allemand, y compris par des liens financiers. On voit que des acteurs de la Révolution mexicaine (Carrasco, Cedillo, Yocupicio…), désenchantés par le régime, le dénonçaient. L’un des griefs était notamment, sous la présidence de Cárdenas, que ce dernier trahissait l’« agrarisme » de la Révolution mexicaine pour des idées collectivistes d’origine marxiste.
C’est dans ce contexte que D’Annunzio assuma le haut patronage de la Société italo-mexicaine (Società Italo-Messicana) créée en 1923 par le régime fasciste. (Source : article Bajo el signo del Littorio: La comunidad italiana en México y el fascismo 1924-1941, par Franco Savarino)
Durant l’occupation de Fiume en 1919-1920, D’Annunzio avait ajouté aux thèmes irrédentistes (nationalistes) celui de la révolution anti-bourgeoise. C’est cette dernière tendance qui lui fit recevoir l’hommage de Gramsci et de Lénine, même si ces derniers fermaient alors les yeux sur la mystique nationaliste de D’Annunzio. D’un autre côté, ce mélange de révolution anti-bourgeoise et de nationalisme en conduit certains à parler, pour le coup de Fiume, de « première expérience fasciste » (avant la prise du pouvoir par Mussolini en 1922).
Le fait que D’Annunzio ait accepté le patronage de la Société italo-mexicaine semble indiquer (cela reste à démontrer) qu’il connaissait la culture et l’histoire du Mexique, et, que dans sa propre pensée révolutionnaire, il avait peut-être médité l’exemple de la Révolution mexicaine. De sorte que, si l’on admet que D’Annunzio eut une quelconque influence sur le développement intellectuel du fascisme (ce qui est le point de vue adopté par la page Wikipédia italienne sur lui : «Come figura politica lasciò un segno nella sua epoca ed è considerato un importante precursore nonché ispiratore del fascismo italiano.»), il se pourrait que la Révolution mexicaine ait joué un rôle dans le développement du fascisme par ce biais, compte tenu également du fait que nombre de vétérans de cette révolution devinrent par la suite sympathisants du fascisme italien.
*
1 La Constitution de style totalitaire, et notamment corporatiste, en vigueur au Paraguay entre 1940 et 1967, adoptée sous la présidence du général Estigarribia et inspirée du fascisme italien, peut être considérée comme la Constitution fasciste la plus durable de l’histoire mondiale (si on laisse de côté les Constitutions de l’Estado Novo portugais et du franquisme espagnol, qui ne sont pas à proprement parler du fascisme pour certains).
2 Le général Yocupicio, gouverneur de l’État de Sonora de 1937 à 1939, semble être aujourd’hui encore une figure importante aux yeux des Indiens Seri, ou Conca’ac, comme en témoigne le récit suivant, qui parle d’une pacification des relations entre cette communauté indigène et les autorités de l’État mexicain pendant son gouvernorat.
Punta Chueca: Socaiix
En aquellos tiempos, cuando trabajaba como gobernador de la comunidad conca’ac el señor Chico Romero, acordό la paz entre conca’ac y mexicanos con el general Yocupicio, quien por medio del señor Chico Romero y su compañero Antonio Herrera, apoyό a la comunidad conca’ac; por eso el general es inolvidable para nosotros.
Una forma de terminar la guerra fue que los conca’ac mayores y menores comenzaran a estudiar para aprender a leer y escribir. Algunos de los que estudiaron fueron los que fundaron el pueblo en que vivimos y que se llama Punta Chueca.
El general Yocupicio, junto con el asesor del gobernador Luis Thompson y su hermano Roberto, apoyaron con muchas cosas y trabajos a la comunidad.
Los que iniciaron el pueblo se dedicaban a pescar caguama y pescado por el consumo familiar; vivían en Santa Rosa, después vinieron a Punta Chueca y Campo Ona. Así se quedaron trabajando hasta formar el pueblo; después vinieron gentes de otros lugares a quedarse en Punta Chueca, propiciando también la construcciόn de los primeros caminos que se hicieron, cortando mezquites, cactos y todo lo que encontraban a su paso.
En esos tiempos la pesca se hacía con dinamita o anzuelo y arpones de varilla, para los tiburones grandes. Algunos de los fundadores del pueblo aún viven, por ello podemos encontrar a hombres que perdieron dedos de la mano, al explotarles la dinamita antes de tiempo.
Así se formό la comunidad Punta Chueca, un pequeño poblado que ahora es conocido por artesanal, histόrico y pesquero, que naciό gracias al esfuerzo de las personas, sin apoyo del gobierno.
Estamos muy agradecidos con nuestros antepasados que fundaron esta comunidad, ahora sus descendientes vivimos felices y libres en nuestro territorio donde nacimos, crecimos y queremos morir.
Historias de los conca’ac, Consejo Nacional de Fomento Educativo Conafe, 2006, pp. 91-2
3 On a vu D’Annunzio, dans ses lettres, louer Mussolini pour les faits d’armes de l’Italie en Éthiopie. D’Annunzio exaltait – classiquement pour un nationaliste – la valeur guerrière dans le fascisme, au service de la gloire (ou de la gloriole) nationale.
Il n’est pas inintéressant d’observer qu’un autre intellectuel ici nommé, le Mexicain José Vasconcelos, adopte à ce sujet un point de vue diamétralement opposé, à savoir que l’esprit militaire du fascisme serait étranger à l’italianité, ce dit non point au discrédit de celle-ci mais plutôt de celui-là. Cela est affirmé cependant sur le mode hypothétique, à savoir, même si les Italiens ne possédaient pas l’esprit militaire, il faut admettre que « toute culture supérieure tend à dépasser le complexe belliciste » (toda cultura superior tiende a superar el complejo bélico) – complexe dont les lettres emphatiques de D’Annunzio à Mussolini sont au contraire une expression débridée.
Está hoy de moda hacer burla de los desplantes del dictador Mussolini, que no corresponden a la realidad de su naciόn, pero aun suponiendo que al italiano le falte lo que se llama espíritu militar, esto mismo es ya una recomendaciόn si se atiende a que toda cultura superior tiende a superar el complejo bélico, y si los italianos han conseguido esto último, con eso bastaría para colocarlos a la cabeza de la civilizaciόn; pero es un hecho, además, que en todos los όrdenes, desde la poesía del Dante a la bomba atόmica de Fermi, en dos mil años de historia, no hay un momento en que Italia no haya sobresalido a la par de los más adelantados, cuando no por encima de ellos, en ciencia y en arte, en política y en religiosidad.
José Vasconcelos, La flama. Los de arriba en la Revoluciόn. Historia y Tragedia, 4a ed. 1960, p. 324
*
Pour compléter cette lecture, on peut consulter également :
–sur Vasconcelos, mon billet Literatura latinoamericana comprometida… a la derecha (espagnol et anglais) (ici) ;
–une bibliographie d’ouvrages d’Amerikanistik publiés dans l’Italie fasciste (ainsi que dans le Troisième Reich) (ici).