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Cyborg Anti-Alien: Un JDR
Aussitôt dit, aussitôt fait : après avoir exhumé mon jeu de rôle Robocop (ici) et annoncé la possible publication future sur ce blog d’autres créations ludiques, voici les règles d’un second JDR entièrement inédit.
Compte tenu de certaines similitudes conceptuelles avec mon Robocop, et le fait que ces similitudes sont ici plus rapidement évoquées, la création du jeu Cyborg Anti-Alien, que j’avais oublié, me paraît dater de la même époque que le Robocop mais légèrement plus tardive, soit 1989 ou 1990.
Le PDF est disponible à la fin du billet.
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(I) Opération Cyborg
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En l’an 2051, le Gouvernement suprême (gouvernement mondial) réagit face à une invasion extraterrestre sans précédent et crée le Kommando Cyborg Anti-Alien (KCA). Il féconde des ovules in vitro et effectue sur les embryons diverses modifications à la fois génétiques et robotiques. Il greffe sur le cerveau de l’embryon une puce électronique comportant un programme ordonnant au futur cyborg d’obéir au Gouvernement suprême et d’exterminer tous les extraterrestres qu’il rencontre.
Il lui greffe également des appareils neuro-optiques lui permettant de détecter les extra-terrestres sous n’importe quelle apparence. Le Chef suprême a jugé l’apparence réelle des aliens si effroyablement repoussante que ces appareils sont interdits à toute personne non membre du programme KCA. Les personnels accrédités du Gouvernement suprême, triés sur le volet après de redoutables épreuves de lavage de cerveau, sont les seules personnes humaines à connaître l’existence et la présence sur terre des extraterrestres.
L’appareil digestif de l’embryon est modifié à titre expérimental pour ne plus avoir besoin de manger ni de boire (si l’expérience est concluante, elle devrait être généralisée à l’ensemble de la population mondiale afin de mettre un terme à la faim dans le monde).
Enfin, une armure-exosquelette blindée autopoïétique est greffée sur l’embryon, entièrement équipée.
À l’âge de 8 mois, le cyborg subit une croissance accélérée due à ses modifications génétiques. À 12 mois, il a la force physique d’un ours. C’est alors que débute sa mission : il sillonne désormais les mégapoles et autres contrées du monde à la recherche d’extraterrestres.
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(II) Situation mondiale
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La principale île du Japon, Honshû, est devenue une gigantesque conurbation s’étendant sur toute la superficie. Cette mégapole d’une densité de 115.000 habitants au kilomètre carré est la capitale du monde, le siège du Gouvernement suprême.
Le territoire des États-Unis a été relayé à un rang très inférieur à la suite de catastrophes industrielles et nucléaires en série et donc de niveaux de pollution extrêmement élevés qui y rendent la survie de l’espèce humaine particulièrement hasardeuse. À quelques rares exceptions près, les centres urbains ont complètement dégénéré, les populations sont devenues semi-nomades.
L’Europe occidentale est désormais un vaste continent-usine. Il n’y vit que des populations ouvrières dans d’immenses ghettos-dortoirs directement reliés aux usines par des réseaux de souterrains. L’industrie alimentaire y a ses principaux centres de production : la pollution et les contaminations extraterrestres ont fait disparaître la plus grande partie de la faune et de la flore qui avaient constitué jusque-là le milieu de l’espèce humaine et ont été remplacées par une faune et une flore extraterrestres répandues dans le milieu terrestre depuis l’invasion (la population humaine ignore la cause réelle de ces changements). Les humains ne mangent plus que de la nourriture de synthèse.
L’URSS et le bloc communiste sont depuis l’invasion complètement coupés du monde, comme ils ne l’ont jamais été, et personne dans la population du monde libre ne sait ce qui s’y passe car le Gouvernement suprême censure toute information à ce sujet. La population du monde libre est conduite à oublier l’existence même d’un bloc soviétique, afin de crédibiliser l’auto-désignation du Gouvernement suprême en tant que gouvernement mondial.
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(III) Le cyborg : feuille de personnage
| ARMEMENT | TYPE DE DOMMAGE | FACTEUR DE DÉGÂTS |
| Tronçonneuse | Déchirure | H |
| Fusil à canon scié | Perforation | G |
| Lance-grenades MC-92 | Explosion | K |
Armure résistance : 7
Santé : 10D4 + 10 : le minimum, hautement improbable, de 20 est deux fois supérieur aux point de santé moyens d’un humain (10).
Caractéristiques : à tirer avec 4D6 dont on garde les 3 meilleurs résultats.
Compétences : à tirer sur la table des compétences.
Programme du cyborg. – Voici les commandements du cyborg :
–Le Gouvernement suprême est votre maître en Liberté : obéissez-lui jusqu’à la mort.
–Les extra-terrestres sont ennemis de notre Liberté et menacent le Gouvernement suprême : éliminez-les de la surface de la terre.
–Notre planète est belle, prenez-en soin comme de vos armes.
–Les émotions ne doivent pas vous guider : tenez-les à distance.
–La contestation des ordres du Gouvernement suprême est interdite car contraire à la Liberté, par conséquent elle est sévèrement punie.
–Vous êtes le rempart de la civilisation, ne l’oubliez jamais.
La vision du cyborg. – Les cyborgs AA sont équipés d’ordinateurs spéciaux munis de scanners à cristaux liquides. Les extra-terrestres émettent, sous toute apparence qu’ils prennent, un rayonnement invisible à l’œil nu. Le scanner des cyborgs le détecte, dissipant l’illusion pour eux.
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(IV) Les extraterrestres
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Venus d’on ne sait où dans l’espace infini, ils sont arrivés un jour en échappant à toute détection puis, par vagues successives, se sont introduits subrepticement dans notre monde. Ils sont responsables de nombreux attentats et crimes. L’ordre du monde libre est sapé de l’intérieur par leur présence occulte.
Les raisons pour lesquelles ils n’attaquent pas directement la terre avec une armée régulière ne sont pas connues et font l’objet de spéculations diverses de la part des services spéciaux du Gouvernement suprême. Bien que, comme le Chef suprême l’ai fait remarquer (voir I), les aliens sont un spectacle horrible, ils n’ont pas tous la même apparence (réelle), loin de là, ils peuvent avoir des aspects bien différents : humanoïdes ou non, amorphes, tentaculaires ou crochus, gluants ou éthérés, rampants ou volants, obscènes, hideux, mous ou durs, colossaux ou minuscules… Un humain ne peut voir leur véritable apparence sans défaillir. C’est d’ailleurs rare : les aliens ont le pouvoir de prendre une apparence humaine et restent le plus souvent sous celle-ci pour œuvrer à leur travail de sape des bases de notre civilisation.
La société civile ignore tout de la présence des extra-terrestres sur la planète. Les médias sous contrôle du Gouvernement suprême inventent de toutes pièces, pour décrire et expliquer les faits provoqués par la présence extraterrestre, des scénarios qui deviennent de plus en plus absurdes et contradictoires avec le temps.
Les cyborgs sont présentés comme une sorte de police secrète du monde libre et les populations humaines sont priées de les considérer comme leurs amis quand bien même elles les voient abattre sans sommation des personnes d’apparence tout à fait ordinaire (même si ces personnes d’apparence ordinaire présentent parfois aux yeux des badauds qui assistent à une fusillade avec les cyborgs d’impressionnantes capacités de résistance). Du reste, l’eau potable du monopole suprême est saturée en sédatifs et autres agents psychotropes qui réduisent fortement les capacités cognitives et mnésiques de la population.
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RÈGLES DU JEU
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(I) Les caractéristiques
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Les valeurs de certaines aptitudes physiques ou mentales d’un personnage sont représentées par des chiffres. Ces caractéristiques sont la force, la constitution, la dextérité, la rapidité, la volonté et l’intelligence.
La force représente la puissance physique (musculaire chez les hommes, bionique chez les cyborgs).
La constitution représente la résistance physique.
La dextérité représente l’habileté manuelle et les capacités motrices.
La rapidité représente les réflexes moteurs.
La volonté représente la résistance mentale.
L’intelligence s’explique d’elle-même.
Chacune de ces caractéristiques est tirée avec 4D6 dont on garde les 3 meilleurs résultats, que l’on additionne. Au début de l’existence du cyborg, les caractéristiques sont ainsi comprises entre 3 et 18. Ce biaisage du hasard vers des valeurs hautes (le plus mauvais dé n’étant pas compté) traduit l’effet des interventions génétiques subies par les embryons cyborgs.
Les caractéristiques servent à calculer des pourcentage de compétence (voir ci-dessous) et à effectuer des épreuves qui n’entrent pas dans le cadre de compétences définies. Par exemple, un cyborg poursuit un extraterrestre dans le dédale d’une usine de construction navale. L’extraterrestre ferme derrière lui une porte blindée. Le cyborg tente de la défoncer : il a une force de 13. La porte étant blindée, le MJ définit un malus de 3 : le joueur tire 1D20 et obtient 9 ; 9 + 3 = 12 < 13 : c’est une réussite. La poursuite peut donc continuer. L’extraterrestre saute par-dessus un puits d’évacuation (test de dextérité à + 2 car le puits est large) : l’alien et le joueur réussissent chacun à leur tour. Le cyborg tente de rattraper l’alien en confrontant sa rapidité à la sienne dans l’espace ouvert sur lequel ils sont désormais en train de courir : les dés indiquent qu’il échoue (il se fait semer : voir le chapitre relatif aux poursuites).
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(II) Les compétences
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Ces sont des aptitudes qui peuvent être acquises et améliorées par l’entraînement, la formation et la pratique. Les diverses caractéristiques (I) permettent d’établir un niveau de base. Le niveau de maîtrise de ces compétences est exprimé par des pourcentages à partir de calculs effectués sur les valeurs des caractéristiques, comme suit :
1 Arme blanche : dex + rap + for
2 Arme à feu : dex + dex + rap
3 Esquive/Parade : rap + dex
4 Électronique : int + vol + vol
5 Électricité : int + vol + vol
6 Camouflage : dex + con + rap
7 Furtivité : dex + dex + int
8 Décryptage : int + int + vol
9 Crochetage : vol + dex + rap
10 Conduite : dex + vol + con
11 Conduite de poids lourd : con + for + dex
12 Conduite de train : con + for + dex
13 Pilotage : int + con + dex
14 Nautisme : dex + rap + con
15 Navigation : int + vol + dex
16 Acrobatie : dex + dex + rap
17 Sabotage : int + vol + for
18 Mécanique : dex + dex + int
19 Premiers soins : int + int + vol
20 Chimie : int + int + vol
21 Anatomie : int + vol + vol
22 Baratin : int + vol + vol
23 Psychologie : int + int + vol
24 Repérage : pourcentage de base 35%
25 Au choix du joueur
Les cyborgs possèdent au départ les compétences : Arme blanche, Arme à feu, Esquive/Parade, ainsi que 3 autres à déterminer par chaque joueur par (1D20 + 1D6) – 1. On retire les dés chaque fois que le résultat est 1, 2 ou 3, ou le même qu’une compétence déjà possédée.
Chacun répartit ensuite entre ces 6 compétences un crédit de 80 % en plus du pourcentage de base indiqué dans le tableau par les caractéristiques.
N.B. On ne peut avoir plus de 40 % en Esquive/Parade.
Ces compétences en nombre prédéfini résultent des modifications génétiques subies par les embryons cyborgs.
Arme blanche. Cette compétence est utilisée dans les combats au corps à corps, aux poings ou à l’aide d’armes (couteaux, masses, mais aussi fusils utilisés comme armes blanches, en frappant avec la crosse…), ou bien lorsqu’on se sert d’armes de jet (lances, shuriken…). Elle est expliquée en détail au chapitre des combats.
Arme à feu. Utilisée quand quelqu’un tire avec une arme à feu ou toute arme à vecteur (révolver, fusil, fusil harpon, lance-grenades, lance-roquettes…). Cette compétence est également expliquée au chapitre des combats.
Esquive/Parade. Voir le chapitre des combats.
Électronique. Permet d’utiliser en expert les matériels électroniques (ordinateurs, logiciels, puces, programmes…).
Électricité. Permet de manipuler en expert le matériel électro-technique.
Camouflage. Permet de se cacher dans n’importe quel milieu. Une personne doit réussir un jet de repérage pour détecter une personne camouflée avec succès.
Furtivité. Permet d’effectuer toutes sortes d’action dans le silence le plus total (pour peu que ce soit crédible, en fonction de l’action).
Décryptage. Permet de reconnaître et déchiffrer toutes sortes de langages et codes cryptés.
Crochetage. Permet de crocheter toutes sortes de serrures.
Conduite. Les diverses compétences de conduite sont expliquées au chapitre des poursuites.
Navigation. Permet de prendre le contrôle de grands cargos (nautiques et aériens) et d’assurer toutes sortes d’opérations de reconnaissance et de maintenance à bord.
Acrobatie. Permet de réaliser des prouesses physiques.
Sabotage. Permet d’utiliser en expert toutes sortes de matériel de sabotage : explosifs, bombes, pièges…
Mécanique. Permet de réparer et de détraquer (de manière imperceptible) toutes sortes de mécanismes.
Premiers soins. Permet d’effectuer sur soi ou sur autrui les gestes de premier soin. Le jet de compétence ne peut être tenté qu’une fois par jour et par personne à traiter : chaque réussite permet de restaurer 2D6 points de santé (voir ci-dessous).
Chimie. Permet d’identifier et de produire toutes sortes de substances chimiques.
Anatomie. Permet d’identifier toutes sortes de tissus organiques (même extraterrestres) et de déterminer les circonstances d’un décès (médecine légale).
Baratin. Permet de convaincre un interlocuteur humain. Un jet réussi contraint le MJ à faire adopter à la personne baratinée le point de vue souhaité par le joueur ; autrement, rien n’y oblige le MJ (un baratinage peut tout de même s’avérer efficace en fonction de l’appréciation du MJ).
Psychologie. Permet par exemple de détecter avec une bonne probabilité si une personne ment.
Repérage. Permet de rechercher des objets ou autres efficacement.
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(III) Combats
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Ambiance. – Le cyborg pénétra dans le laboratoire et repéra l’extraterrestre grâce à son scanner : l’aimable collègue en blouse blanche était en réalité une pieuvre purulente. Quand le cyborg vit que l’alien l’avait à son tour détecté, il dégaina son fusil à canon scié et tira. Les balles s’enfoncèrent dans la chair. L’alien se jeta sur le cyborg et le fustigea de coups de tentacule. Les employés du laboratoire couraient de tous côtés en hurlant. Le cyborg tomba à terre, l’armure lacérée. Il actionna sa tronçonneuse et la plongea dans le corps de l’alien qui fut sectionné en deux parties dans des jets de sang acide. Le cyborg se releva et tira une balle dans ce qui semblait servir de crâne à l’alien. Puis il sortit sous les regards des laborantins traumatisés, cachés sous les tables.
Déroulement. – Pour savoir quel attaquant ou groupe d’attaquants commence l’attaque, on additionne la rapidité de chaque membre du groupe, et le score le plus élevé commence (sauf si une attaque par surprise a lieu).
Ensuite, le groupe qui attaque en premier annonce et résout toutes ses actions (courir, se mettre à couvert, tirer…). Pour résoudre une attaque, on regarde le pourcentage de l’attaquant dans la compétence employée (si le cyborg tire avec son fusil à canon scié, c’est la compétence Arme à feu) et on tire les dés de pourcentage. Si le score est inférieur ou égal au pourcentage de la compétence, l’attaque porte ; si le score est supérieur, l’attaque échoue. Si le coup porte, l’adversaire tire un jet d’esquive/parade, selon la même procédure : si le jet est plus élevé, l’esquive ou la parade échoue et l’attaque cause des dégâts.
Pour donner un coup de poing, on utilise la compétence Arme au corps à corps. Une force entre 3 et 6 (où se situe la force humaine) permet d’avoir des coups de poing de catégorie B, entre 7 et 12 de catégorie C, entre 13 et 18 de catégorie D, et au-delà de catégorie E et plus (échelle de progression à déterminer par le MJ).
La cible d’une attaque réussie subit des dégâts. En premier lieu, si le chiffre du dé des unités de l’attaque est 0, l’attaque est un coup de maître et la victime encaisse le double de dégâts.
De même, si le dé des unités de l’esquive/parade est 0, c’est également un coup de maître défensif et l’attaquant, dans le cas où il s’agit d’un combat au corps à corps, est déséquilibré et ne pourra pas tirer un jet de dé d’esquive/parade au tour suivant.
Calcul des dégâts. – Les armes se caractérisent par une colonne « type de dommages » (TD) et une autre « facteur de dégâts » (FD).
Le type de dommage sert à décrire les blessures provoquées par une arme. Ces dommages peuvent en effet être de plusieurs types : déchirure, perforation, explosion, brûlure, étranglement/suffocation, étouffement, broyage, empoisonnement/infection… Exemples :
–Déchirure : tronçonneuse, scie, démembrement…
–Perforation : munitions d’arme à feu, couteau à cran d’arrêt, flèche, harpon…
– Explosion : grenade, roquette, bombe…
–Brûlure : lance-flammes, rayon laser, acide…
–Étranglement : garrot, mains nues…
–Étouffement : noyade ou autre vide d’air…
–Broyage : rouleau compresseur, éboulement, masse, coup de poing…
–Empoisonnement/infection : gaz toxique, poison, contamination…
Le facteur de dégâts est représenté par une lettre : plus la lettre est élevée dans l’alphabet (avec A la plus basse), plus l’arme est meurtrière.
Chaque personnage dispose d’un capital de santé. Dans le jeu présent, la santé est représentée sous forme numérique ; elle décroît à mesure que le personnage reçoit des blessures et se rétablit par les soins et la récupération normale. Chaque joueur commence avec 10D4 + 10 points de santé (un chiffre entre 20 et 50). Un niveau de santé de 0 ou négatif n’implique pas la mort ipso facto, comme on ne va pas tarder à le voir.
Contre les blessures, un personnage dispose d’une résistance, qui représente sa protection. Sur la feuille de personnage du cyborg, il est indiqué : Armure résistance 7. Chez un homme normalement vêtu, cette protection est de 1. On considère que 10 est la plus haute protection possible.
Lorsqu’une attaque est un succès, on compare le facteur de dégâts de l’arme utilisée par l’attaquant à la résistance de la cible sur le tableau suivant. Le chiffre de la case correspondante indique le nombre de points de santé que perd la cible du fait de cette attaque.
| A | B | C | D | E | F | G | H | I | J | K | |
| 0 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 |
| 1 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 |
| 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 |
| 3 | 2 | 3 | 4 | 2 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 |
| 4 | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 |
| 5 | / | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 |
| 6 | / | / | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 |
| 7 | / | / | / | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 |
| 8 | / | / | / | / | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 |
| 9 | / | / | / | / | / | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 |
| 10 | / | / | / | / | / | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 |
| L | M | N | O | P | Q | R | S | T | U | V | |
| 0 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24 | 25 |
| 1 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24 | 25 |
| 2 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 | 24 |
| 3 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 | 23 |
| 4 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 | 22 |
| 5 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 | 21 |
| 6 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 20 |
| 7 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 |
| 8 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 | 18 |
| 9 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 |
| 10 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 | 15 | 16 | 17 |
/ = 0
Lorsque la santé d’un personnage atteint 0 ou moins, on se réfère au tableau suivant.
–Si la victime atteint 0 point de santé du fait d’une arme dont le type de dommage est la déchirure, il convient de localiser la partie touchée à l’aide de 1D6 :
| humanoïde | non humanoïde | conséquence | |
| 1 | bras droit | membre | voir note 1 |
| 2 | bras gauche | membre | ˝ |
| 3 | jambe droite | membre | ˝ |
| 4 | jambe gauche | membre | ˝ |
| 5 | tronc | partie centrale | voir note 2 |
| 6 | tête | centre nerveux | mort |
Note 1 : Le membre est séparé du corps dans une profusion de sang (ou autre liquide vital). La victime tombe inconsciente si elle rate un jet de constitution.
Pour nos cyborgs, si le résultat est 1 (bras droit), il ne pourra plus se servir d’arme avec le bras droit (les cyborgs sont tous droitiers) et doit utiliser le bras gauche : l’utilisation d’armes par la main gauche cause une chute des compétences Arme blanche, Arme à feu, Esquive/parade de 50%. – Si le résultat est 3 ou 4 (l’une ou l’autre jambe), le cyborg amputé subit un malus de -5 en rapidité et -2 en dextérité.
Note 2 : Le corps est tranché, pour un humanoïde au niveau du bassin, pour un non-humanoïde c’est à la discrétion du MJ. La cible meurt si elle rate un jet de constitution +4.
Tout humain dans cette situation meurt (dans tous les cas) s’il n’est pas opéré dans le délai de quelques heures. Un cyborg tranché en deux est, même s’il ne meurt pas sur le coup (suivant le jet de constitution), hors service jusqu’à la fin de la mission et, s’il rate son jet de régénération à la fin de la mission, il est euthanasié (voir chapitre V).
Pour les non-humanoïdes, le tableau est simplement indicatif : en réalité, toute forme étant envisageable pour les aliens (certains n’ont sans doute même aucun membre), le scénario ou le MJ lui-même doit déterminer le tableau qui s’applique dans chaque cas.
–Perforation : On localise la partie touchée avec le même tableau que précédemment.
Note 1 : Le membre est traversé par le projectile et rendu inutilisable. Même conséquence que pour la perte par séparation du membre.
Note 2 : Le tronc est perforé de part en part. La cible meurt si elle rate un jet de constitution +2. Un humain meurt dans le délai de quelques heures s’il n’est pas opéré. Un cyborg ou un alien est paralysé jusqu’à récupération de points de vie.
–Explosion : Le corps est complètement dilacéré, c’est la mort immédiate.
–Brûlure : On ne détermine une localisation sur le tableau supra que si la cible est touchée par un laser, un jet concentré d’acide, une torche… Les blessures sont alors les mêmes que pour « perforation » (la description n’est pas forcément la même). Si un lance-flammes a été utilisé, ou si le corps a été plongé dans une cuve d’acide, un champ de feu, etc., la dissolution de l’ensemble des tissus est menée à son terme, c’est la mort.
–Étranglement/Suffocation : La victime, dans la mesure où elle disposerait de voies respiratoires, se les voit briser. Il lui reste à vivre 1D6 tours, puis c’est la mort.
–Étouffement : Mort immédiate (pour peu, bien sûr, que l’étouffement puisse être appliqué à la créature considérée).
–Broyage : Si l’arme est une masse, une grosse pierre, etc., il s’agit de concussion et on détermine la localisation avec le tableau supra.
Note 1 : Le membre est brisé. Pour 1 (bras droit), même conséquence que le 1 de Déchirure le temps que le membre se répare (a priori pas avant la fin de la mission). Pour 3 ou 4 (les jambes), malus de -4 en rapidité et -2 en dextérité.
Note 2 : Le thorax est enfoncé. Si la victime rate un jet de constitution +2, elle meurt. Sinon, elle sombre dans le coma, et doit supporter un malus de -2 en force et -2 en dextérité.
Mais si c’est la cible dans sa totalité qui est écrasée, elle meurt.
–Infection/Empoisonnement : Mort immédiate.
Remarque. Lorsqu’un personnage amputé revient au stade d’un jet de dé pour une nécessaire localisation (N.B. la plupart des coups portent bien sûr sur une partie déterminée du corps, simplement, pour la jouabilité, nous ne prenons pas la peine de déterminer cette partie à chaque coup mais seulement aux coups potentiellement fatals), si le jet de dé indique de nouveau le membre amputé (par exemple 2 pour un personnage qui a déjà perdu son bras gauche), on retire le dé.
Voici à présent une liste de quelques malus applicables au jet de dés dans un combat :
Table des malus au corps à corps
–Cible avec bouclier -10%
–Attaquant immobilisé -10%
–Attaquant en chute libre -25%
–Attaquant dans un véhicule mobile -5%
–Cible invisibilisée -30%
–Obscurité -15% (ou plus, suivant que l’obscurité est plus ou moins totale)
–Cible attaquée par surprise +20%
Table des malus à distance
(certains malus au corps à corps s’appliquent aussi dans le cas présent : se reporter alors à la table précédente)
–Cible partiellement cachée -15% (ou plus, suivant la protection de la cible)
Cible dans véhicule mobile -5% (ainsi, un personnage tirant depuis un véhicule mobile sur un autre véhicule mobile cumule d’emblée un malus de -10%)
–Attaquant en train de courir -5%
–Rafale +5%
–Cible au corps à corps -15% (exprime la difficulté de tirer avec une arme à feu sur une cible au corps à corps qui n’entend a priori pas se laisser faire)
–Cible à bout portant (mais non à bout touchant) +15%
Catalogue des armes
Armes à distance
(sauf indication contraire, le type de dommage est la perforation)
| Nbr de balles dans le chargeur | Tirs par tour (c/t) | type de dommage (TD) | facteur de dégâts (FD) | |
| Fusil de chasse | 6 | 1 | H | |
| Fusil à pompe | 6 | 1 | G | |
| Fusil à canon scié | 2 | 2 | G | |
| Carabine | 2 | 2 | G | |
| Colt Python | 6 | 2 | H | |
| Magnum 44 | 6 | 1 | G | |
| Calibre 45 | 6 | 2 | G | |
| Fusil d’assaut* | 6 | 1 | G | |
| Mitrailleuse M60* | 50 | 5 | H | |
| Pistolet-mitrailleur | 50 | 5 | F | |
| Mitraillette* | 50 | 5 | G | |
| Lance-grenades | 4 | 1 | explosion | K |
| Lance-flammes* | / | 1 | brûlure | K |
| Fusil-laser* | / | 1 | brûlure | N |
| Arbalète automatique° | 2 | 2 | F | |
| Arbalète explosive | 1 | 1 | explosion | I |
| Lance-roquettes* | 1 | 1 | explosion | Q |
| Mortier portatif | 1 | 1 | explosion | P |
| Magnum anti-véhicule | 6 | 1 | H | |
| Javelot | / | / | E | |
| Coutelas de jet | / | / | D | |
| Lance-dards | 1 | 1 | G |
*Les armes marquées d’une astérisque * se manient en principe à deux mains. Les personnages amputés ne peuvent donc les utiliser ou bien subissent un malus en cas d’utilisation (à déterminer par le MJ).
°Les armes marquées de ce signe (ici, l’arbalète automatique, et, dans le tableau des armes au corps à corps ci-dessous, la scie circulaire) s’attachent sur l’avant-bras et laissent donc les deux mains libres.
Les armes automatiques sont celles qui peuvent tirer 5 munitions par tour : avec ces armes, tirer plus de 2 munitions par tour est un tir en rafale, auquel s’applique un bonus (voir la table correspondante). Le jet d’attaque doit être tiré pour chaque munition.
L’explosion d’une grenade a un rayon d’action de 3 mètres carrés.
Armes au corps à corps
| ARME | TD | FD |
| Couteau | perforation | D |
| Couteau de survie | perforation | E |
| Hache | déchirure | F |
| Machette | déchirure | G |
| Tronçonneuse | déchirure | H |
| Fouet | voir note | C |
| Fouet électrifié | voir note | F |
| Garrot | étranglement | D |
| Massue/Barre de fer | broyage | D |
| Masse cloutée | broyage | F |
| Perceuse | perforation | H |
| Corde | étranglement | G |
| Scie circulaire° | déchirure | H |
Note : Lorsqu’une personne descend à 0 point de santé à cause d’un fouet, elle tombe seulement inconsciente.
Ces catalogues d’armes sont bien sûr loin d’être exhaustifs ; vous pouvez déterminer à votre gré les données de bien d’autres.
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(IV) Poursuites
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Ambiance. Impassible, le cyborg écrasa l’accélérateur de sa Dark Jet 45 noire. Il prenait en chasse une bande d’aliens dans un fourgon blindé. Il évita quelques voitures sur la voie et sortit son fusil à canon scié par la fenêtre latérale ; se plaçant à côté du fourgon, il tira sur le passager, dont le crâne éclata sous l’impact. Le conducteur du fourgon riposta par une rafale de pistolet-mitrailleur. La Dark Jet reçut plusieurs impacts de balle, dont une toucha le cyborg. Celui-ci, se replaçant derrière le fourgon, par une brusque accélération fit faire un saut prodigieux à son véhicule, qui s’écrasa sur le fourgon, lequel versa sur la route. La Dark Jet, retombée sur ses roues, s’immobilisa.
Déroulement. – Une poursuite s’engage quand une personne ou un véhicule prend en chasse une autre personne ou un autre véhicule.
On détermine la distance entre les deux : courte, moyenne, longue, très longue.
La rapidité sert d’indice dans les poursuites à pied. À chaque tour, poursuivant et poursuivi tirent chacun un jet de rapidité. Si l’un échoue et l’autre réussit, la distance s’accroît (si c’est le poursuivant qui échoue) ou se réduit (si c’est le poursuivi qui échoue) d’une unité. Une unité signifie : de courte la distance passe à moyenne ou de moyenne elle passe à courte etc. Si les deux réussissent, le score le plus bas l’emporte et la distance s’accroît/se réduit en conséquence d’une unité. Si les deux échouent ou si le score est égal, la distance entre les deux est maintenue pendant ce tour. Si le poursuivant parvient à réduire une courte distance, il rattrape la cible. Si le poursuivi parvient à accroître une très longue distance, il sème son poursuivant.
La compétence conduite, dans le type de véhicule concerné, est nécessaire pour les poursuites en véhicule. À chaque tour, poursuivant et poursuivi tentent chacun un jet de conduite. Un échec implique un accident (voir ci-dessous).
On peut aussi considérer que l’échec ne conduit pas à un accident mais seulement à une fausse manœuvre récupérable : par exemple, la voiture est montée sur le trottoir et s’est cognée latéralement contre une façade, ce qui l’endommage légèrement, mais le conducteur garde le contrôle du véhicule et peut le replacer sur la chaussée. Cette fausse manœuvre a cependant réduit le niveau courant de la structure du véhicule (voir ci-dessous), par exemple de 1D10.
Si les deux jets sont réussis ou si le MJ considère que l’échec à un jet de conduite n’a pas provoqué un accident mais seulement une fausse manœuvre récupérable, le pourcentage le plus bas gagne une distance sur l’autre. Au-delà d’une distance très longue, le poursuivant est semé. Au-delà de courte, le poursuivant peut se placer à côté du poursuivi si la voie est assez large, ou bien heurter le poursuivi.
On compte comme des actions à part entière les : demi-tours, virages serrés, cascades, tours de force. Les tours de force ne peuvent être réalisés que si les véhicules sont côte à côte : si celui qui l’opère réussit son jet, l’autre véhicule subit un accident.
Accidents. – Lorsqu’un véhicule rate un jet de poursuite, il subit (éventuellement) un accident : le véhicule se renverse et/ou fait des tonneaux et/ou s’écrase contre un obstacle hors de la chaussée etc., selon le contexte, qui détermine également si le véhicule est encore utilisable ou non. Chaque passager subit des dégâts 1D100/4 arrondi au chiffre inférieur, sauf si le jet de sécurité indique le contraire (voir ci-dessous).
Tirs. – À chaque tour, les passagers (ou le conducteur : malus supplémentaire de -10%) peuvent tirer sur l’autre ou les autres véhicules. Dans les cas autres que les motos etc. de résistance 0, on peut considérer que les dégâts s’imputent sur la structure du véhicule (voir ci-dessous tableau des véhicules) jusqu’à 0, ce qui provoque alors un accident. On peut aussi, de manière cumulée ou alternative, déterminer que des tirs touchent des passagers d’un véhicule, auquel cas la résistance du véhicule s’ajoute à celle des individus (si le maximum de 10 est dépassé, les passagers ne peuvent être blessés directement par des tirs). Il n’y a pas d’esquive/parade possible.
Tableau des véhicules
| VÉHICULE TERRESTRE | RÉSISTANCE | STRUCTURE | SÉCURITÉ |
| Voiture Dark Jet 45 | 3 | 45 | 2 |
| Voiture | 2 | 35 | 2 |
| Voiture de sport | 2 | 30 | 1 |
| Moto | 0 | 25 | 0 |
| Vélo, Scooter | 0 | 10 | 0 |
| Jeep | 2 | 25 | 1 |
| Side-car | 0 | 25 | 1 |
| Fourgon | 3 | 50 | 3 |
| Bus | 3 | 60 | 3 |
| Camion | 3 | 70 | 3 |
| VÉHICULE NAUTIQUE | RÉSISTANCE | STRUCTURE | SÉCURITÉ |
| Hors-bord | 1 | 30 | 2 |
| Scooter des mers | 0 | 25 | 1 |
| Aéroglisseur (amphibie) | 2 | 40 | 2 |
| Bateau (pêche) | 2 | 45 | 2 |
| Chalutier | 4 | 100 | 4 |
| Supertanker | 4 | 100 | 5 |
La résistance du véhicule s’ajoute à celle des passagers en cas de tirs.
La structure est le niveau de points de « santé » du véhicule : à zéro, c’est l’accident.
La sécurité sert en cas d’accident : le joueur tire 1D6, si le résultat est inférieur ou égal au chiffre de la sécurité du véhicule, il ne subit pas de dégâts.
Ces deux tableaux ont vocation à être complétés par d’autres véhicules terrestres et nautiques, mais aussi par des véhicules aériens (ULM, hélicoptères, avions…).
L’aérospatiale. – En l’an 2030, l’ère spatiale est entrée dans une nouvelle phase avec le programme Zaïban et le lancement depuis Tokyo (la conurbation de Honshû) d’une fusée parvenue sur Mars en 90 jours avec quatre spationautes à son bord. Depuis ce lancement, des fusées habitées sont régulièrement lancées sur Mars et Vénus.
En 2038, des savants soviétiques ont découvert sur Mars des cristaux énergétiques à fusion froide, minéraux très rares mais d’une grande valeur qui ont notamment permis la création du fusil-laser (voir table des armes).
En 2043, la fusée australienne Sidney 4 est revenue de Mars avec la plus grande collecte de cristaux jamais réalisée. C’est alors que l’industrie s’est emparée de cette nouvelle matière première.
Un projet de colonisation de Mars est à l’étude : il s’agirait d’envoyer tout d’abord une arche artificielle où vivraient en orbite martienne 15.000 colons qui feraient la navette entre l’arche et la surface martienne pour son exploitation.
Les envahisseurs extraterrestres viendraient, selon certains astronomes subventionnés par le Gouvernement suprême, d’une planète située derrière le trou noir le plus proche, Mâra, mais personne ne peut le prouver. Les extraterrestres se sont à plusieurs reprises attaqués à des installations spatiales humaines : ils ont par exemple saboté une base de lancement au Vietnam et détruit la fusée Sidney 5.
Nos cyborgs seront-ils conduits à faire le voyage vers Mars ou Vénus ?
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(V) Poisons
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Les poisons occasionnent des dommages de type empoisonnement/infection. Certains extraterrestres en sécrètent, en crachent, en ont sur leurs griffes ou leurs crocs ou sur des appendices, ou bien encore le contact avec leur liquide vital est lui-même dangereux, etc.
Voici un tableau de quelques variétés pour donner une idée au MJ des possibilités dans ce domaine.
Tableau des poisons
| POISON | FD | MODALITÉ | EFFETS |
| Cyanure | Q | ingestion | / |
| Arsenic | N | ingestion | troubles de la vision |
| Colendraline | N | injection sanguine | folie |
| Tellurinase | O | inhalation | / |
| Nitrichlorure | O | injection sanguine | / |
| Carbone de tellurase | M | contact | brûlures, vomissements |
Pour calculer la résistance à un poison, on divise les points de santé par 5.
La colonne « Effets » décrit les symptômes autres que la réduction de points de santé causée par le FD du poison, avec effet immédiat ou décalé dans le temps. Il faut en tenir compte et appliquer à la victime des malus en conséquence.
Le poison fait perdre des points de santé toutes les heures après l’empoisonnement, jusqu’à 0 ou l’absorption d’un antidote. À 0 point de santé, voir les effets au TD empoisonnement/infection.
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(VI) Régénération
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Il existe plusieurs systèmes de régénération (récupération de points de santé) :
1/ La compétence Premiers soins permet, on l’a vu, de récupérer 2D6 points de santé.
2/ Entre deux missions, un cyborg récupère tous ses points de santé, auquel s’ajoute 1D6, qui témoigne de son aguerrissement.
3/ Si un cyborg a perdu un membre, à la fin de l’aventure il passe en bloc opératoire. On tire 1D6. Si le résultat est 4 ou 5, le membre est restauré : tous les malus sont retirés.
Si le résultat est 6, les chirurgiens sont parvenus à greffer un membre plus performant (en fait deux) : non seulement les malus sont retirés mais le cyborg a désormais un bonus de +1 en force si le membre est un bras, +1 en rapidité si le membre est une jambe.
Si le résultat est 2 ou 3, les chirurgiens n’ont pas réussi l’opération et le cyborg reste amputé. Si le résultat est 1, le cyborg expire sur la table d’opération.
Au cas où le cyborg aurait été tranché en deux (jet de localisation 5), l’opération ne réussit que pour des résultats de 5 et 6 au dé. Si l’opération est un échec, le Gouvernement suprême euthanasie le cyborg.
Les brûlures et fractures, même graves (ayant occasionné 0 point de santé), sont traitées sans difficultés particulières.
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(VII) Expérience et Progression
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Avec les missions qui se succèdent, un cyborg devient plus fort, plus aguerri, plus expérimenté.
Au bout de 3 missions, il devient Initié, au bout de 5, Commandeur, etc. Voici la table :
| NBR DE MISSIONS ACCOMPLIES | RANG | BONUS |
| 3 | Initié | +5% dans toutes ses compétences ; +1 dans 2 caractéristiques |
| 5 | Commandeur | 2 compétences supplémentaires ; +5% comp ; +1 dans 4 carac ; +1 arme au corps à corps |
| 10 | Grand-Machine | 3 comp suppl ; +7% comp ; + 1 dans toutes les carac ; +1 arme au corps à corps ; +1 arme à feu |
| 15 | Grand-Sudoken | +1 en résistance ; +10% comp ; allocation permanente de Dark Jet 45 |
| 22 | Vénérable-Shiba | +1 en résistance ; +1D6 cyborgs suivants |
Au-delà, le cyborg est considéré comme dangereux par le Gouvernement suprême. Il est éliminé par son créateur au terme de sa 25e mission, à moins, bien sûr, qu’il n’ait l’élégance de conduire une opération kamikaze entre-temps.
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À vos dés !
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Ajout 3/3/2021 : Le PDF
La Créature du billard électrique
Sait-on quelles rencontres l’espace infini nous réserve ?
Dans un monde infini, les possibilités sont infinies.
Quelles peuvent être nos certitudes ?
Et toi, jeune lecteur qui n’a pas connu le loisir de la salle de jeux enfumée ou du café-bar où l’acariâtre tenancier (certains, toutefois, étaient plus bonhommes et conciliants) obligeait ses jeunes clients venus pour le billard électrique à consommer pour avoir le droit de jouer au milieu des poivrots et des chômeurs PMUistes – si bien que les joueurs devaient payer et pour leurs parties et pour des consommations –, qui pourrait te faire comprendre la fadeur de ton temps libre aux yeux de ceux qui gardent en mémoire de tels souvenirs ? Ne t’avise pas de lire ce qui suit au Starbucks où tu te morfonds habituellement après les cours avec des amis tout droit sortis des magasins, et des magazines, car le contraste risque d’être trop fort pour ton âme sensible. Que ceci serve d’avertissement légal.
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La vie d’une araignée se passe en grande partie immobile sur sa toile. Plus sa vie est immobile, plus elle est parfaite, car cela signifie que les revers de la fortune lui sont épargnés. L’araignée se meut nécessairement pour trouver un lieu où tisser sa toile (c’est la fonction des fils de la Vierge, qui transportent les araigneaux), puis elle bouge pour tisser celle-ci, puis elle attend ses proies et elle bouge pour les mordre, les empaqueter, les momifier, les dévorer, elle se déplace aussi, régulièrement, à la recherche d’un partenaire sexuel. En dehors de ces nécessités, si elle doit bouger, c’est qu’un accident est arrivé à sa toile et qu’elle est contrainte de la refaire, peut-être en se déplaçant ailleurs. Moins, donc, elle a bougé dans sa vie, plus elle a vécu heureuse à l’abri des dévastations du monde. Sa toile a piégé les mouches et autres menus insectes dont l’araignée et ses rejetons se nourrissent, tout en échappant à la destruction par des objets, des créatures, des forces naturelles toujours menaçantes.
Son piège tendu, la vie devient pour l’araignée une attente immobile. Rien de ce qu’elle pourrait faire désormais n’est davantage propice à lui dispenser sa nourriture que la plus parfaite impassibilité. Cette mortuaire léthargie est immédiatement rompue quand la frêle mouche engluée dans les fils du piège se débat avec l’énergie du désespoir, car l’araignée, informée par les vibrations de sa toile, se précipite sur sa proie et lui plonge ses crochets dans le corps, l’empoisonnant et la paralysant, pour ensuite la dévorer vivante, morceau par morceau.
Or il existe une forme de vie extraterrestre et prédatrice qui repose sur les mêmes principes d’évolution que l’araignée mais peut se servir de l’environnement artificiel de la civilisation pour piéger ses proies. Et ses proies ne sont autres que les créateurs et habitants de cette civilisation – par exemple, les Terriens.
En l’an 1986 de notre ère, un vaisseau spatial d’origine martienne, invisible aux appareils de détection humaine, connut une avarie à peu de distance de notre planète. Durant le temps que prit l’équipage prit pour réparer cette panne, un caisson transporté par l’astronef s’ouvrit, l’absence de courant ayant rendu vulnérable le système de fermeture, et son occupant s’en échappa. Quand l’un des techniciens à bord le constata, il en informa, alarmé, le capitaine, qui activa immédiatement le protocole d’autodestruction de l’appareil. Juste avant l’explosion de ce dernier, une capsule d’évacuation se dégagea avec le capitaine et trois officiers à son bord, conformément au protocole. Les survivants retournaient vers Mars quand le pilote en second informa le capitaine que, selon les censeurs qu’il venait d’activer, l’occupant du caisson avait subrepticement pénétré la capsule avec eux et s’y trouvait en ce moment même. Le capitaine n’eut alors d’autre choix que d’activer le protocole d’autodestruction de la capsule, qui explosa quelques secondes plus tard.
Entretemps, le mystérieux passager s’en était extrait et se dirigeait vers l’éco-milieu le plus proche : la Terre. C’était une sorte d’araignée noire, dont le tronc chitineux et boursouflé avait la taille d’une main humaine, et qui se servait au moment présent de l’ensemble de ses longues pattes filiformes comme d’un appendice caudal grâce auquel elle nageait dans l’espace avec une impressionnante vélocité, en vue de rejoindre la surface terrestre.
L’araignée extraterrestre tomba en pleine nuit dans la banlieue parisienne de Champville. Elle se trouvait sur une surface gazonnée, non loin d’un pavillon, et approcha de celui-ci. Pénétrant par une chatière à l’intérieur de la cuisine, elle entreprit d’explorer les lieux, dont les habitants dormaient, et quand elle découvrit dans une des pièces du sous-sol un billard électrique, cet objet ludique autrement connu sous le nom anglo-saxon de flipper, elle sut qu’elle avait trouvé son piège.
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M. et Mme Dubois avaient trois enfants, dont deux, Pauline, seize ans, et Jean, douze ans, vivaient alors avec eux à Champville, et le troisième, d’un autre lit de Mme Dubois, suivait des études de droit à Berkeley.
Un soir où leurs parents étaient de sortie, Pauline dit à Jeannot de rester dans sa chambre, car elle avait invité son petit ami Marcel à la maison. Jeannot fut dégoûté mais il obéit, car sa croissance n’avait pas encore commencé et Pauline, qui faisait de l’aïkido, savait le moyen de lui administrer des clés de bras affreusement douloureuses.
Marcel et Pauline descendirent dans la pièce du sous-sol aménagée en second salon, minimaliste, avec le flipper, une télé, une console de jeux Philips Videopac, un canapé, une table et quelques chaises, non loin de l’autre pièce du sous-sol, la cave proprement dite, où se trouvaient un coin pour la buanderie ainsi qu’un grand réfrigérateur. Les pièces recevaient en journée la lumière du soleil par des vasistas en haut des murs, donnant sur le jardin.
Ils venaient de regarder un film d’horreur quand Marcel eut envie de jouer au flipper. Funky Fair était un flipper très attrayant sur le thème de la fête foraine, avec un affichage électronique sur le fronton, des bruitages stimulants, des enluminures colorées : tentes de foire, clowns badigeonnés, ballons de baudruche, femme à barbe… Les trappes, rampes et bumpers évoquaient diverses attractions, la grande roue, le train fantôme, les montagnes russes, le kiosque de la femme à barbe, les tirs aux pigeons.
Marcel lança une partie et Pauline en profita pour se rendre aux toilettes, en haut. Les Dubois avaient aménagé un second living-room au sous-sol comme un espace de liberté pour leurs enfants en croissance, ou pour faire du salon du rez-de-chaussée un espace de liberté pour eux ; de l’un on n’entendait pas ce qui se passait dans l’autre. Quand Pauline redescendit, Marcel n’était plus là. Elle l’appela, en vain, lui dit, banalement, que ce n’était pas drôle, sans effet, puis remonta au rez-de-chaussée, où de nouveau elle l’appela en vain, puis monta à l’étage où elle demanda à Jeannot, surpris en train de feuilleter un magazine pour adultes, s’il avait vu cette andouille de Marcel, mais Jeannot n’avait vu ni entendu personne. Pauline jura que Marcel le paierait.
Quand les parents de Marcel déclarèrent à la police qu’il n’était jamais rentré de son rendez-vous avec ses amis Norbert et Jacques, il fallut dans un premier temps découvrir qu’il avait en réalité passé la soirée chez les Dubois avec leur fille Pauline, qui fut alors connue comme la dernière personne ayant vu Marcel. Elle expliqua qu’ils avaient passé la soirée ensemble jusqu’à ce qu’il décampât à l’improviste, sans rien lui dire. Elle ajouta qu’elle avait d’abord cru que c’était une plaisanterie mais qu’elle avait fini par se rendre à l’évidence : Marcel avait profité de ce qu’elle se rendît aux toilettes quelques instants pour mettre un terme à leur soirée. Les enquêteurs demandèrent à Jeannot s’il avait entendu quoi que ce fût depuis sa chambre, quelqu’un sortir par la porte d’entrée, par exemple, mais Jeannot leur dit qu’il n’avait rien entendu. On mit son trouble, pendant le bref interrogatoire, sur le compte de son jeune âge, sans se douter qu’il craignait que soit découvert ce qu’il était en train de faire au moment de la disparition de Marcel.
La disparition de Marcel, un jeune homme sans histoires ni fréquentations douteuses, restait un mystère. Le mystère s’épaissit encore quand, quelque deux semaines plus tard, Jeannot disparut à son tour.
Alors que leurs parents étaient de nouveau sortis, car ils avaient une vie sociale intense à cause des obligations professionnelles de Mme Dubois, Pauline se morfondait dans sa chambre, pelotonnée sur son lit et pensant à Marcel. Elle ne sut pas dire aux enquêteurs ce que faisait Jeannot pendant ce temps, toujours est-il qu’il n’était plus à la maison le lendemain. Les Dubois étaient rentrés tard dans la nuit et avaient supposé que leurs enfants étaient couchés. Ils n’avaient pas l’habitude de s’en assurer à chacun de leurs retours de soirée et ce ne fut donc que le lendemain que, l’absence prolongée de Jeannot devenant suspecte, ils découvrirent qu’il n’était pas dans sa chambre. Toujours sans nouvelles le soir venu, malgré leurs appels chez les uns et les autres, ils contactèrent la police.
Les enquêteurs relevèrent ce qui pouvait l’être et dirent aux Dubois que tout serait fait pour retrouver leur fils. Personne ne le revit jamais.
Tout comme Marcel, il avait été victime de la créature extraterrestre cachée dans le flipper. Celle-ci s’était logée dans le parallélépipède incliné constituant le plateau. Ce qui l’avait attiré là, c’est, d’une part, le système électrique qui occupait les entrailles de l’objet, dont elle avait besoin pour maintenir sa température corporelle, et, d’autre part, le fait que la caisse du plateau offrait un espace confortable, pour elle comme pour ses victimes, ou ce qu’il en restait quand elle les dégonflait sous l’effet de ses sucs de momification instantanée. La créature possédait en outre des pouvoirs électriques. Elle ouvrit la portière du flipper, là où, dans les salles d’arcade, on introduit la pièce de monnaie pour jouer, et se glissa à l’intérieur. Quand Marcel alluma le flipper et que la créature comprit qu’il était seul, elle ouvrit le clapet depuis l’intérieur et entraîna sa victime dans le caisson. Marcel s’y trouvait donc plié – ou pour mieux dire cassé – en deux, le dos et la tête entre les jambes, et momifié, c’est-à-dire grandement réduit, comme une tête réduite par les Jivaros, de l’ordre des quatre cinquièmes, sans que sa valeur nutritive s’en trouve cependant diminuée d’un iota et sans qu’aucun fluide corporel n’endommage les circuits du flipper. La souplesse du monstre lui permettait de s’adapter parfaitement à l’encombrement du caisson ; le rangement de sa proie était un peu plus délicat, il fallut découper quelques morceaux pour éviter qu’elle ne pèse trop lourdement sur certaines pièces des circuits électriques internes et compromette le bon fonctionnement de la machine. C’est ainsi que la créature se nourrit les jours qui suivirent, puis attendit une nouvelle proie, qui fut Jeannot.
Cette perte accabla les Dubois, qui décidèrent de changer d’air et mirent leur pavillon en vente. Le propriétaire d’une salle de jeux miteuse de Champville, la seule dans cette banlieue, se porta acquéreur du flipper. Il le chargea dans une camionnette puis lui trouva une place au milieu de ses autres machines, billards électriques et bornes d’arcade de diverses formes et couleurs et bruitages variés. La créature se réjouit de ce nouveau milieu qui lui apporterait sa pitance à profusion.
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La salle de jeux enfumée était occupée par une quinzaine de jeunes gens et bourdonnait de la cacophonie électronique et carnavalesque typique de ce genre de repaire socialement mélangé, quand tout à coup l’électricité fut coupée. Le silence des machines fut couvert par les huées des joueurs. L’obscurité était profonde car seule la porte d’entrée apportait de la lumière naturelle en ce lieu. La femme du propriétaire, qui tenait la caisse à ce moment-là, allait ouvrir en maugréant la boîte des fusibles quand l’électricité revint. Il fallut discuter un moment pour éviter de rembourser quelques clients énervés dont la partie avait été interrompue, puis tout rentra dans l’ordre.
La patronne crut bien remarquer que le joueur qui s’essayait au nouveau flipper – provenant de chez les Dubois – n’était plus dans le local, mais elle ne sut qu’en penser et s’imagina que la confusion résultant du black-out lui avait troublé l’esprit.
En réalité, le joueur avait été happé par le flipper. Il était venu seul à la salle de jeu depuis Meulon, une banlieue voisine, n’était pas connu des autres joueurs et sur le moment sa disparition ne fut pas remarquée. Quand les parents de la victime déclarèrent sa disparition un peu plus tard, la police ne parvint pas à établir son passage à la salle de jeux de Champville.
Ce fut différent avec la seconde victime de la salle de jeux. Cette fois-ci, le patron était présent quand le black-out se produisit. De même que précédemment, l’électricité fut coupée et se rétablit au bout de quelques instants, mais le joueur de notre flipper était accompagné. Quand, une fois les lumières rallumées, son camarade, Gaston, ne le trouva plus, il pensa que Didier était reparti chez lui pendant la coupure de courant mais, apprenant quelques jours plus tard que son ami était porté disparu, Gaston se présenta à la police pour déclarer qu’il l’avait perdu de vue à la salle de jeux.
Les enquêteurs se rendirent donc à la salle de jeux pour un entretien avec M. Groseille, le propriétaire. Ce dernier était inquiet. Il n’ignorait pas que le dernier flipper qu’il avait acquis avait été mis en vente après la disparition du fils de la famille des vendeurs – et c’était maintenant un de ses clients qui disparaissait. Par ailleurs, Mme Groseille lui avait parlé du précédent black-out de la salle, un phénomène qui venait de se produire deux fois en quelques jours après des mois de bon et loyal fonctionnement. En temps ordinaire, ce genre de séries événementielles n’est pas de nature à susciter l’étonnement, l’idée qui vient naturellement à l’esprit étant que les fusibles ont pris un coup de vieux. Mais M. Groseille ne put s’empêcher de faire le lien entre ces black-out et la disparition, même s’il écartait aussitôt l’idée faute de pouvoir l’interpréter de manière satisfaisante. En lui apprenant le premier black-out, Mme Groseille n’avait rien dit au sujet de sa propre impression fugace qu’un client avait disparu chez eux, et de son côté elle n’apprit la disparition du second black-out qu’après que la police eut parlé avec son mari.
L’inspecteur Henri se présenta à M. Groseille alors que celui-ci était en train de tenir la caisse de la salle de jeux. Cette troisième disparition à Champville, plus celle du jeune de Meulon, rendaient la police nerveuse. Rien de bien intéressant ne sortit de ce premier entretien mais M. Groseille était désormais informé du fait que le disparu avait été vu pour la dernière fois dans son établissement.
Lorsqu’il l’apprit à Mme Groseille, l’impression de celle-ci au moment du premier black-out lui revint à l’esprit et elle en fit part à M. Groseille. M. et Mme Groseille pensèrent à la possibilité inquiétante qu’un malfaiteur hantât leur salle de jeux et qu’il avait profité du mauvais état des fusibles pour exécuter de sombres desseins… M. Groseille demanda à son épouse de ne rien dire à personne, qu’elle s’était peut-être d’ailleurs tout simplement imaginé des choses, comme elle l’avait elle-même cru d’abord, et que tout rentrerait dans l’ordre. Il lui dit cependant qu’ils devaient désormais redoubler de vigilance, afin de repérer les conduites suspectes.
Il fit venir un électricien pour examiner les plombs de l’établissement. Celui-ci, un honnête homme, constata que tout était normal.
Une banlieue parisienne est un petit monde mais nous ne sommes pas à la campagne où les crimes en série suscitent des mouvements de panique collectifs, et ces disparitions successives ne troublèrent pas le calme, la plupart des gens ignorant ce qui se passe à côté de chez eux. Les faits furent relatés dans de petits journaux locaux mais la plupart des habitants de Champville, quand ils lisent la presse, lisent les journaux nationaux, où l’on ne parle pas de ce qui se passe à Champville.
Quand un troisième adolescent disparut dans la salle de jeux de M. Groseille après un nouveau black-out, les choses prirent pour lui une tournure franchement désagréable. D’autant plus qu’on retrouva cette fois-ci les chaussures de la victime. La créature du flipper trouvait que les chaussures le ballonnaient, aussi décida-t-elle cette fois de les recracher. Cela créa un mouvement de panique dans la salle obscure car une des deux chaussures ainsi éructées heurta la tête d’un client qui crut qu’on l’agressait et bouscula plusieurs autres personnes, lesquelles crurent la même chose, et, tout le monde se précipitant vers la sortie en distribuant coups de poing et coups de pied pour se défendre, plusieurs furent blessés.
La police et le SAMU furent sur place en peu de temps. L’inspecteur Henri fut mis au courant et prit le chemin de la salle de jeux toutes affaires cessantes. Une personne impliquée dans la mêlée et restée sur place déclara avoir perdu une chaussure. On en trouva trois. On lui rendit la sienne, tandis que la paire restante ne trouvait aucun preneur. Trois garçons indiquèrent qu’elle appartenait à leur ami Roger, avec lequel ils étaient venus à la salle de jeux et qui était certainement rentré chez lui – en chaussettes ! – après le mouvement de panique. L’inspecteur Henri demanda qu’on allât sonner chez le garçon puis prit à part M. Groseille, dans un coin de la salle. S’appuyant contre le flipper Funky Fair, sur le plateau duquel il posa son calepin, il recueillit son témoignage.
M. Groseille dit que c’était la troisième fois que l’électricité lui jouait des tours en l’espace de deux semaines, alors que le voisinage n’avait connu aucun incident de la sorte, et la dernière fois un client avait disparu :
« Je pense que ce sont des actes de malveillance, conclut-il. Un malade rôde par ici.
– Le compartiment des fusibles, répliqua l’inspecteur, est pourtant derrière votre caisse. Si quelqu’un l’avait manipulé, vous vous en seriez rendu compte.
– Je ne suis pas tout le temps derrière la caisse. Il faut se dégourdir un peu les jambes, et parfois des clients nous appellent auprès d’une machine pour constater le fonctionnement. La caisse, comme vous avez pu le voir, n’est pas près de l’entrée et elle est encastrée dans son meuble ; il n’est pas vraiment risqué de la laisser seule quelques instants.
– Où étiez-vous quand les plombs ont sauté tout à l’heure ?
– Derrière la caisse.
– Quelqu’un s’est-il approché du compartiment aux fusibles ?
– Pas que je sache. »
L’inspecteur Henri était l’officier de police qui s’était rendu chez les Dubois au moment des disparitions de Marcel et Jeannot. Il avait donc déjà vu le flipper Funky Fair mais pour lui, qui n’avait jamais été joueur de flipper, les flippers se ressemblaient tous. L’aspect du billard électrique lui donnait une vague impression de déjà-vu, trop vague pour s’y arrêter.
« Bien, bien. Voyez-vous, je suis porté à croire qu’un peu de temps va passer avant qu’on revoie ce garçon aux baskets, comme les autres, car je pense à des fugues. On sait quel genre d’adolescents viennent passer le temps dans des établissements tels que le vôtre. Le premier garçon a saisi l’opportunité d’une coupure de courant dans votre salle pour fuguer, tout en laissant croire, étant donné les circonstances inhabituelles et quelque peu dramatiques, à un enlèvement – afin de maximiser l’inquiétude de ses parents, dans un esprit de vengeance, parce qu’il considère qu’ils ne le traitent pas comme il le mérite. Le bruit court parmi ceux qui le connaissent qu’il a quitté Champville et ses parents de cette façon extraordinaire, on en parle à couvert, on l’admire, une autre panne se produit chez vous et l’un de ceux sur lesquels son geste a fait impression décide sur le champ de l’imiter. »
L’inspecteur Henri croyait également à des fugues dans le cas de Marcel et Jeannot. Il se fondait sur une théorie psychosociologique selon laquelle les fugues sont contagieuses : quand un jeune fugue, ses camarades veulent l’imiter. Un trait parmi d’autres de la déliquescence post-soixante-huitarde. Par ailleurs, aucune demande de rançon n’avait été demandée ni aucun corps retrouvé.
– Ma foi, répondit M. Groseille, ça se pourrait bien. Je donnerais tout de même cher pour savoir ce qui se passe avec mes plombs…
– Un conseil : changez-en. Je m’étonne que vous ne l’ayez pas déjà fait. Ne tardez pas, si vous voulez conserver votre gagne-pain à Champville. »
M. Groseille protesta qu’il avait fait venir un électricien, mais l’inspecteur était déjà sorti. Grommelant dans sa barbe (c’est l’expression consacrée : M. Groseille était imberbe, alors qu’une barbe aurait caché la flaccidité de ses joues), il crut percevoir entre deux cibles du flipper un regard maléfique le scruter depuis les profondeurs de la caisse ; quand il fixa les yeux sur le phénomène, cela avait disparu. M. Groseille soupira mélancoliquement.
Le jour même, il appelait un second électricien, lequel constata un dysfonctionnement inexistant et remplaça le matériel. Le garçon aux baskets ne revint jamais chez sa mère et fut à son tour porté disparu. L’inspecteur Henri voyait ainsi son intuition confirmée. Ou presque.
*
Quand un quatrième black-out se produisit dans la salle des jeux des Groseille, Mme Groseille qui tenait la caisse s’évanouit. Là encore, une mêlée s’ensuivit, avec plusieurs blessés, et des chaussures furent retrouvées ici et là. Ceux qui en avaient perdu attendaient à la porte de l’établissement et purent les récupérer des mains de la police. Cependant une paire resta sans preneur. Mme Groseille en larmes faisait une crise d’hystérie et dut être conduite à l’hôpital pour prise en charge.
Passablement en colère, l’inspecteur Henri retrouva M. Groseille sur les lieux. M. Groseille lui présenta d’emblée les documents signés par l’électricien, indiquant les travaux réalisés et la date de leur réalisation : le problème ne pouvait provenir de sa propre installation, le nombre de ses machines était bien inférieur au maximum autorisé, l’origine était à chercher du côté du prestataire, il allait poursuivre EDF en justice…
« Et bien sûr, interjeta l’inspecteur, on retrouve une paire de chaussures sans propriétaire… Pour embrouiller les esprits, j’avoue que c’est très fort de la part de ces fugueurs. Qui fuguerait sans ses chaussures, n’est-ce pas ? Mais, d’un autre côté, pourquoi le criminel ôterait-il les chaussures de ses victimes ? Les marioles veulent faire croire qu’il y a eu résistance, lutte, bien sûr, seulement le précédent fugueur de votre salle de jeux portait des lunettes, et qui peut croire qu’on perd plus facilement ses baskets au cours d’une lutte que ses lunettes ? Le fugueur les a bien sûr gardées sur le nez tandis qu’il enfilait au coin de la rue une autre paire de chaussures, sans doute apportée dans un sac à dos. Il avait chez lui une seconde paire de baskets mais pas une seconde paire de lunettes, voilà tout. Ça me paraît clair.
– Il faut faire quelque chose au sujet des lignes électriques, monsieur l’inspecteur. Ce n’est plus possible, c’est très mauvais pour le commerce. J’en ai assez que des gens se servent de mon établissement pour fuguer. Ma réputation… La santé de ma pauvre femme… »
L’inspecteur Henri avisa le billard électrique Funky Fair et tout à coup – ce fut un éclair d’inspiration – se rappela avoir vu le même chez les Dubois. Il réfléchit un instant, puis :
« Où achetez-vous vos machines ? demanda-t-il à M. Groseille.
– Chez des vendeurs spécialisés. J’ai plusieurs fournisseurs.
– Celui-là ? demanda l’inspecteur en montrant Funky Fair.
– Ah, celui-là, c’est différent. S’il y a moyen, je regarde aussi de temps en temps les occasions. On trouve parfois de bonnes machines ayant peu servi.
– Vous vous rappelez à qui vous l’avez acheté ?
– Aux Dubois, de Champville. Ceux qui ont perdu leur fils.
– Leur fils fugueur… Vous m’en direz tant… »
L’inspecteur trouva la coïncidence étrange, pendant un court instant, mais il se fit la réflexion qu’il était tout à fait normal qu’un flipper soit acheté par le propriétaire d’une salle de jeux et qu’il n’y avait donc aucune coïncidence en réalité.
« Monsieur Groseille, reprit-il, nous allons devoir fermer votre établissement pendant quelque temps… Le temps que nos fugueurs retournent au bercail et que tout cela se tasse un peu, vous comprenez ? »
Ces propos chagrinèrent beaucoup M. Groseille. Son commerce était en règle ; existait-il une raison de penser qu’il était pour quelque chose dans ces disparitions ou ces fugues ? Si les jeunes de cette ville s’étaient mis en tête de fuguer, la fermeture de son établissement ne les en empêcherait pas. Pouvait-on obliger un honnête citoyen etc. ? L’inspecteur accepta un compromis : M. et Mme Groseille se donneraient quinze jours de vacances.
Pendant ce temps, la police demanda à la direction de l’équipement quelques vérifications sur les installations électriques de Champville, dans le quartier de la salle de jeux. Le personnel compétent procéda aux vérifications et, ne trouvant rien d’anormal, il s’ensuivit un âpre échange de courrier entre directeurs d’administration, au terme duquel l’équipement finit par constater deux ou trois petites imperfections dans son système, auxquelles elle remédia, au grand soulagement de l’inspecteur Henri.
Aucun fugueur – et le propriétaire des dernières chaussures dont il a été question était à présent lui-même porté disparu – ne s’était manifesté quand M. Groseille, qui sut par l’inspecteur Henri qu’EDF avait corrigé le défaut constaté sur la ligne, rouvrit son établissement. Le lecteur aura bien sûr compris que les pannes de courant étaient en fait produites par les pouvoirs électriques de la créature du flipper.
À la cinquième coupure de courant, une nouvelle paire de chaussures avait perdu son jeune propriétaire.
Mme Groseille retourna à l’hôpital, cette fois pour des soins prolongés. Le local et l’appartement des Groseille furent passés au peigne fin ; cela avait déjà été le cas lors de la première disparition constatée, cependant la police, cette fois-ci de très mauvaise humeur, se montra particulièrement brutale. Mais ne trouva toujours rien. L’inspecteur Henri lui-même commençait à douter de sa théorie et à suspecter M. Groseille de se payer sa tête. Il allait demander qu’on arrête celui-ci comme principal suspect, quand un agent lui dit qu’un témoin du dernier black-out demandait à lui parler. C’était Gaston, l’ami de Didier, disparu.
« Quelque chose à me dire, mon garçon ? lui demanda l’inspecteur.
– Je ne sais pas si ça peut avoir le moindre intérêt mais je connais la personne à qui les baskets appartiennent et je l’ai vu jouer, avant la coupure de courant, au même flipper que Didier avant sa disparition. Ce flipper-là. »
Il montrait Funky Fair. Le sentiment d’étrange coïncidence qui avait un instant saisi l’inspecteur lors du précédent entretien lui revint en mémoire, mais il trouva cela complètement absurde.
« Et bien ? Quelles conclusions en tires-tu ? demanda-t-il à Gaston, avec une certaine intonation propre à faire comprendre qu’il n’appréciait pas du tout qu’on lui fasse perdre son temps. Gaston se troubla, mais répondit :
« J’ai joué à ce flipper. Il fait des bruits bizarres.
– Je n’ai jamais rien remarqué de tel, interjeta M. Groseille, soucieux de la réputation de son établissement.
– C’est bien, mon garçon. L’agent Couillard va recueillir ton témoignage. »
Couillard reconduisit Gaston et l’inspecteur Henri se trouva de nouveau seul avec M. Groseille. Comme il était dans la plus extrême perplexité dans cette affaire, il chercha à gagner du temps devant M. Groseille et pour cela décida de mettre à profit l’inepte témoignage de Gaston.
« Bien, dit-il, vous allez m’ouvrir cette machine. »
M. Groseille fut décontenancé.
« Que pensez-vous donc y trouver ? eut-il l’audace de répondre. Un cadavre ? Je sais que la caisse ressemble à un cercueil, mais ce n’est pas vide, là-dedans ; il y a toute la machinerie, les circuits… Vous, impressionné par les propos de ce garçon ? Allons, monsieur l’inspecteur…
– Faites ce que je vous dis, Groseille. Nous parlerons après. »
M. Groseille sortit un trousseau de l’énorme poche de son pantalon informe et chercha la clé. Quand il l’eut trouvée, il scruta l’inspecteur. Celui-ci restait impassible, attendant que son ordre de représentant de la loi fût exécuté. Au moment où M. Groseille allait introduire la clé, le clapet s’ouvrit brusquement, des cordes noires jaillirent de l’orifice et s’enroulèrent autour de M. Groseille, et voilà ce dernier, sans avoir le temps de dire ouf, disparu dans le trou, pourtant beaucoup trop étroit pour laisser passer son corps – et le clapet de se refermer derrière lui en claquant !
L’inspecteur Henri dégaina son pistolet et le déchargea sur la machine infernale. Tandis que le verre du fronton et du plateau volait en éclats sous l’impact des balles, les lumières du flipper clignotaient comme hallucinées, les bruitages de la mise en scène du jeu, musique acidulée, explosions, ricanements de clown, approximations électroniques de montagnes russes et de foules en liesse, jouaient une partition hystérique et délirante, et le flipper à son tour déchargea, comme une arme à feu d’un genre nouveau, sa réserve de billes métalliques sur l’inspecteur Henri. Une bille se ficha par ricochet dans la jambe de ce dernier, qui dut trouver refuge derrière la borne d’arcade la plus proche.
Des pattes arachnéennes, immenses et noires sortirent alors de plusieurs points du plateau du flipper et, touchant le sol, hissèrent l’objet dans les airs, où il ressemblait désormais au corps d’une horrible araignée géante.
Quand les agents postés à l’extérieur entendirent les coups de feu et, hurlant des ordres sans queue ni tête, entrèrent dans la salle de jeux pour porter secours à l’inspecteur, ils trouvèrent celui-ci baignant dans son sang et le mur du fond percé d’un trou béant.
*
La nuit était tombée. La créature cherchait à rejoindre les bois de Champville, où elle n’attirerait pas l’attention et pourrait abandonner son flipper endommagé pour changer d’appareil. Son pouvoir électrique créait le black-out autour d’elle ; comme si elle était entourée d’un halo de ténèbres, l’éclairage public s’éteignait à son passage et se rallumait derrière. Seules ces ténèbres mouvantes et les illuminations du flipper trahissaient sa présence. En outre, la plupart des rues de Champville sont peu passantes ; le monstre fut donc peu remarqué, bien que ceux qui le remarquèrent s’en rappellent encore et tentèrent, en s’organisant, d’alerter l’opinion publique sur l’existence de monstres inconnus issus d’accidents industriels. Mais les Champvillois lisent la presse nationale, où l’on ne parle pas de Champville, et le reste du monde ne veut pas non plus en entendre parler. Une voiture, cependant, croisa le chemin du monstre ; le conducteur freina des quatre fers et son véhicule pila entre les pattes avant de l’araignée. Il allait détacher sa ceinture de sécurité pour s’éjecter quand la caisse du flipper, dont la créature se servit comme d’un marteau, s’abattit sur le toit de la voiture dans un horrible fracas de tôle froissée et le tua sur le coup.
Alors que la police tentait d’organiser la traque du monstre, celui-ci était déjà pris en chasse. Les Martiens, naturellement, avaient eu vent des événements dramatiques survenus à leur vaisseau près de la Terre et de la mort par autodestruction de l’ensemble de l’équipage. Ils savaient ce que cela signifiait et envoyèrent un membre de leurs commandos à la recherche de la créature échappée.
Le commando martien arriva à la salle de jeux au moment où la créature s’en extrayait après avoir blessé l’inspecteur Henri. Il avait adopté un déguisement de motard en blouson noir, avec un gros casque qui cachait aux yeux des hommes ses traits peu humains. Il vit sur son radar-bracelet que la créature était lâchée dans les rues, et se lança à sa poursuite en moto. Quand il l’aperçut galopant entre les immeubles, le corps protégé par une étrange armure, il fit immédiatement feu sur elle avec un pistolet-gicleur qui projetait à longue distance une sorte de mousse carbonique destinée à paralyser la créature. Quand la mousse ratait sa cible, elle se désintégrait immédiatement, sans laisser de trace. Heureusement, aucun être humain ne fut non plus touché, car c’eût été la mort assurée pour les malheureux.
Quand la créature se vit pourchasser, elle grimpa le long d’un immeuble afin de semer l’ennemi, mais la moto de ce dernier était du dernier cri martien et pouvait rouler à la verticale. Il la poursuivit donc le long de la façade de l’immeuble, puis sur les toits, où elle sautait de terrasse en terrasse, et il sautait après elle tout en la mitraillant de jets de mousse.
L’araignée dégringola un dernier immeuble et plongea dans l’étang d’Ursus, à l’orée des bois de Champville. Le motard plongea à sa poursuite ; sa moto toucha le fond et fendit les eaux vaseuses de l’étang, tandis qu’il continuait de la mitrailler sous l’eau. L’araignée nageait à grande vitesse à quelques mètres devant et au-dessus de lui, un peu en-dessous de la surface du lac. Elle émergea sur la rive opposée et, quand il sortit à son tour, elle l’attaqua. Elle sauta sur lui en se servant de la caisse du flipper comme d’un marteau, ainsi qu’elle l’avait fait plus tôt avec la voiture. Le motard esquiva le coup de justesse, en dérapant, tandis que le flipper faisait gicler la boue de tous côtés. Un second coup l’obligea à sauter de la moto, que le choc du marteau géant enfouit en profondeur. Le motard culbuta et se mit immédiatement en position de tir, sur un genou. Le flipper-marteau allait lui tomber sur la tête quand le jet de mousse aspergea le plateau et, ruisselant à l’intérieur, paralysa la créature. Les pattes se rétractèrent et le flipper retomba mollement.
Le motard fit sauter le clapet et, inclinant la caisse, en répandit le contenu : deux momies ratatinées qui avaient été il y a peu des êtres humains et ressemblaient à présent à des poupées hideuses, et une espèce de faucheux noirâtre et horrible, la créature du flipper, tombèrent au sol au milieu d’une lavure de mousse carbonique.
L’agent martien sortit d’une poche de son blouson un tube contenant un gaz rare et il y enfourna sans ménagement la créature paralysée. Il procéda de même, dans un autre tube, avec les deux momies, qu’il emportait pour ne pas laisser de traces, et à l’aide de son gant-exosquelette jeta le flipper en ruine au milieu du lac. Il parla dans son bracelet-transmetteur, d’une voix caverneuse :
« B-4 en boîte stop. Croissance entravée stop. Dommages minimes stop. Planète sauvée. »
Quand l’inspecteur Henri fut visité par ses collègues à l’hôpital, il tint des propos qui les firent se jeter des regards. Cependant, il était indéniable qu’une bille de flipper avait été extraite de sa jambe. En outre, les agents qui examinèrent la comptabilité de M. Groseille trouvèrent qu’un flipper manquait dans la salle de jeux : le flipper Funky Fair acheté d’occasion aux Dubois de Champville. On considéra par conséquent que l’inspecteur avait été blessé lors d’une explosion accidentelle de la machine – explosion résultant de la combinaison d’un défaut de fabrication et d’un défaut du réseau EDF local, par laquelle le billard électrique avait été entièrement désintégré et le mur de la salle de jeux partiellement démoli (tandis que les autres machines de la salle ne présentaient que peu de dommages, cela soit dit en passant). L’inspecteur ne chercha pas à maintenir sa version des faits, que l’on attribua à la fièvre provoquée par sa blessure, et put réintégrer ses fonctions une fois sur pied. Les discrètes recherches qu’il conduisit pendant quelque temps montrèrent qu’aucune disparition liée à des salles de jeux, des cafés-bars ou des particuliers propriétaires de billards électriques ne fut déclarée dans le pays à la suite des événements survenus chez M. Groseille, et il finit par douter de la réalité de sa rencontre avec le flipper infernal.
Juillet 2017

